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Note sur l'invasion des Sarrasins dans le Lyonnais

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Mais que faire de ces hordes souillées? de ces tribus qui n’avaient plus de musulman que le nom? Les ramener en Espagne, en Afrique, en Arabie, peut-être? Montrer aux croyants de Médine et de Damas l’épouvantable spectacle de musulmans ivres de vin ou gorgés des graisses impures des troupeaux de la Séquanie! Un sacrifice était nécessaire, il fut ordonné. L’influence occulte, mais toute-puissante des marabouts et des imans, profita des divisions qui régnaient entre les Arabes et les Bérébères; l’armée fut condamnée à périr, et chaque scheik, chaque émir dispersa ses cavaliers dans les forêts de la haute Bourgogne, les marécages de la Dombes, les rochers du Bugey et du Dauphiné14, au milieu desquels, trois cents ans plus tard, les exilés vivaient encore à l’état de nation à part, de peuple séparé et maudit, avec ses lois, sa religion, ses mœurs, et où, aujourd’hui même, on les retrouve avec étonnement soit organisés en villages, soit, plus souvent, comme familles maintenues intactes, sans mélanges avec leurs voisins et ayant conservé sinon le culte, du moins le type physique et moral de la race à laquelle appartenaient leurs pères.

Lorsque Childebrand eut accompli sa mission et campé avec l’avant-garde des Francs sur les bords du Rhône, que l’approche de Charles-Martel eut été signalée par toutes les voix de la renommée, la fureur des musulmans se réveilla, et ils brûlèrent toutes les cités au milieu desquelles ils purent promener leur vengeance. Alors eurent lieu ces atrocités qui remplirent d’effroi les populations, alors on vit ces dévastations dont les siècles ont eu de la peine à guérir les blessures, mais dont ils n’ont pu effacer le souvenir.

Parmi les lieux où on peut retrouver des traces de la fuite des musulmans, lorsqu’ils traversèrent la Saône, nous citerons particulièrement Châlon15, Tournus, Boz, Uchizy, Sermoyer, Fleurville, Ozan, Arbigny, Mâcon, Lyon. Plusieurs tribus s’arrêtèrent dès qu’elles eurent mis la rivière entre elles et leurs ennemis; à Pont-de-Veyle, à Louhans, en d’autres lieux encore, on montre la chaussée ou la digue des Sarrasins, dénomination qui, si elle ne prouve pas que ces ouvrages leur appartiennent, indique du moins combien leur nom est encore vivant dans le pays. Dans le Bugey, trois villes importantes furent détruites, et deux d’entre elles si complètement, qu’on ne sait où trouver le lieu où elles existaient. Isernore, à la douce appellation, a conservé les ruines d’un temple célèbre; Orindinse a dû s’élever au confluent de l’Ange et de l’Oignin; la ville des Tattes devait être sur les bords de la Valserine, non loin de Châtillon-de-Michaille. La Chronique de Saint-Amand, un des plus anciens documents de l’histoire du Bugey, ne donne que des détails incomplets à cet égard.

Les monastères de Nantua, d’Ambronay et de Saint-Rambert-de-Joux, dans la gorge de l’Albarine, furent renversés. La Franche-Comté, la Savoie, le Dauphiné se couvrirent de ruines. Les histoires de ces provinces donnent de douloureux détails sur les ravages que commirent les Orientaux.

Les tribus qui occupaient Lyon n’épargnèrent pas notre cité. Les troupes en marche et qui avaient dépassé Valence, vinrent se réfugier dans nos murs. Quand elles virent que la fortune devenait contraire et que la cause de l’islam ne se relèverait pas, le pillage, l’incendie et la dévastation assouvirent le besoin de vengeance de ces cœurs ulcérés; Romains, Gaulois, Francs, Visigoths, tous devinrent égaux devant les terribles musulmans, qui n’étaient plus des convertisseurs zélés, mais de farouches ennemis. Ce fut un massacre général, une ruine universelle, et dès lors le peuple de la cité ne prononça plus qu’avec une superstitieuse terreur le nom de cette race maudite de Dieu.

La ville détruite, les hordes musulmanes se retirèrent vers les montagnes à l’orient de Lyon16, où elles rejoignirent les autres tribus fugitives; mais désormais indépendantes, elles ne réunirent leurs drapeaux que pour lutter contre les difficultés du moment et pour se frayer un passage à travers les populations belliqueuses de ces contrées. La plaine d’Ambérieu conserve encore plusieurs castramétations qu’on leur attribue17; les montagnes sont pleines de leurs noms; les flots de l’Albarine, comme ceux du Haut-Rhône, baignent la grotte des Sarrasins, la balme des Sarrasins, la chambre, les crèches, les forts, la maison des Sarrasins, et même cette grotte de Roland où fut trouvé, il y a cinq siècles, un cor arabe de la plus magnifique beauté; Seillonas, Ordonnas, Benonce reçurent les colonies africaines; la vallée d’Amby, de l’autre côté du Rhône, vit se dresser un camp formidable que les voyageurs vont encore visiter. La tradition raconte de longs et sanglants combats livrés entre les Séquanes, les Ambarres, les Allobroges et les légers cavaliers de l’Arabie. Ces derniers furent probablement vainqueurs, puisque partout ils parvinrent à se maintenir dans les vallées qu’ils avaient choisies et où sont encore leurs descendants.

Si le paysan qui passe sur la montagne est brun, maigre, avec le regard ardent, un nez aquilin, l’œil enfoncé sous l’orbite; si ses cheveux d’un noir de corbeau ont des reflets bleus au soleil; s’il répond au nom de Babolah, Kaffon, Tabardet, Ciza-Cartet, Ciza-Buiron, Alamercery, ou Galaffre comme un héros de l’Arioste, demandez-lui s’il n’appartient pas à une famille sarrasine, et, l’œil attaché sur vous pour approfondir votre pensée, soyez certain qu’il vous répondra affirmativement.

Messieurs Monnier, Riboud, Guillemot, Lapierre, Fauché-Prunelle, ont réuni de curieux et précieux documents sur le séjour des Arabes dans la Franche-Comté, la Bresse, le Bugey, la Savoie et le Dauphiné; mais ces savants modestes ont fait des chapitres, des monographies, non un livre; les historiens de longue haleine n’ont pas encore utilisé leurs travaux, et, malgré l’ouvrage de M. Reinaud, l’histoire de l’invasion des Sarrasins est encore à faire, surtout au point de vue de nos pays.

L’influence de cette invasion fut grande sur la civilisation de nos contrées. Outre les connaissances pratiques dont la médecine, l’agriculture18 et l’industrie profitèrent; outre la bougie, le papier, l’ouate, la bourrache, le tambour qu’ils firent connaître à la Gaule, les Arabes dotèrent la Bresse de cette race admirable de chevaux que les mauvais soins n’ont pu faire dégénérer; de ces volailles que les gourmets ont rendues célèbres19; de ce blé noir, fortune du pauvre, que le Dombiste mange, en pâte légère délayée dans de l’eau ou du lait et cuite légèrement entre deux plaques brûlantes, comme le voyageur du désert; le commerce s’est enrichi de ces chiffres simples et commodes qui ont fait presque oublier la numération embarrassée des Romains; la langue s’est emparée d’une foule de mots dont elle ne pourrait plus se passer, depuis alambic jusqu’à taffetas20; mais, surtout, il est un nom qui mérite l’attention de l’historien et qui serait une révélation, si l’histoire ne devait accepter qu’avec réserve ce qui lui est appris par les poètes. Voilà ce que dit M. de Lamartine, dans cette prose magique dont lui seul a l’usage et qui est une poésie comme tout ce qui jaillit de sa puissante imagination:

 
14«Ravagée par les Huns, les Ostrogoths, les Bourguignons, les Lombards et les Sarrasins… la Maurienne est peut-être de toutes nos provinces celle dont l’histoire présente le plus de péripéties.» (Travaux de la Soc. d’hist. et d’archéologie de la province de Maurienne, Ier Bulletin, p. III.) «Ce ne fut qu’au Xe siècle que les Sarrasins coupèrent le rocher sur lequel s’élève la chapelle de sainte Thècle et desséchèrent la plaine.» (L’abbé Truchet, Notice historique sur la commune de Valloires). «Les Sarrasins avaient poussé leurs incursions jusque dans nos montagnes (942). Hugues de Provence, roi d’Italie, les chargea de garder les principaux passages des Alpes du nord contre son compétiteur Bérenger.» (Ducis, Voies romaines, Revue Savoisienne, 15 avril 1861.) «Nous citerons ensuite ces colons, d’origine évidemment étrangère, qui vivent depuis des siècles isolés dans les marais desséchés de la Bresse.» (Roget de Belloguet, Ethnogénie gauloise.)
15Vers 645, le siége épiscopal de Châlon-sur-Saône était occupé par un homme de bien nommé Gratus qui habitait le faubourg Saint-Laurent: déjà à cette époque le faubourg communiquait avec la ville par un pont. Comme à Tournus et à Mâcon, le pont de Châlon servit de passage aux Sarrasins et fut détruit derrière eux.
16«Les Sarrasins qui ne purent opérer leur retraite en Provence ou en Septimanie, se réfugièrent dans les montagnes (du Jura et du Dauphiné) et s’y retranchèrent dans des positions inexpugnables. Notre province (Bresse et Bugey) est au nombre de celles qui furent envahies; elle leur servit de refuge en leur présentant des positions naturellement fortifiées.» (Paul Guillemot, Monog. hist. du Bugey).
17«Parcourons, dans le Bugey, les diverses contrées qui les recèlent, à commencer cette investigation dans la plaine qui s’étend des rivages du Rhône et de l’Ain jusqu’à la chaîne non interrompue des premières montagnes. C’est là que les Sarrasins sont arrivés après avoir saccagé Lyon.» (Paul Guillemot, Monog. hist. du Bugey.)
18«L’agriculture, en Sicile, dut aux Arabes ses plus grands progrès: le coton apporté par eux des champs syriens, la canne à sucre, le frêne qui produit la manne, le pistachier, etc., etc.» (Ebn-Khaldoun, Histoire de l’Afrique.)
19Courrier de l’Ain, la Presse.
20Nous pouvons citer: alcali, alchimie, alcool, algarade, algèbre, almanach, ambre, amiral, mesquin.