Kitabı oku: «Avant Qu’il Ne Jalouse», sayfa 2

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Au bout de la rangée, elle s’arrêta net. Elle se trouvait face à une plaine à perte de vue, rien que de la terre, de l’herbe morte, et l’horizon. Pourtant, au milieu, elle distinguait une petite structure qui ne lui était que trop familière.

Il s’agissait de la maison dans laquelle elle avait grandi. Et les cris venaient de là.

Mackenzie courut en direction de la maison, ses jambes se mouvaient comme si le maïs y était encore accroché et tentait de la retenir dans le champ.

Elle courut plus férocement, en réalisant que la cicatrice de son ventre s’était ouverte. Lorsqu’elle atteignit le porche de la maison, le sang de la blessure coulait sur ses jambes, formant une flaque sur les marches du porche.

La porte d’entrée était fermée mais elle entendait toujours les pleurs. Son bébé, à l’intérieur, qui hurlait. Elle ouvrit la porte qui céda instantanément. Il n’y eut ni grincement ni crissement, malgré la vétusté de la maison. Avant même d’être entrée, elle vit Kévin.

Au milieu du salon vide – le même salon dans lequel elle avait passé tellement de temps enfant – se trouvait un rocking-chair. Sa mère y était assise, Kévin dans ses bras, et elle le berçait doucement.

Sa mère, Patricia White, leva les yeux vers elle. Elle paraissait beaucoup plus jeune que la dernière fois que Mackenzie l’avait vue. Elle sourit à Mackenzie, les yeux injectés de sang, avec un air étrange.

- Félicitations, Mackenzie. Mais pensais-tu vraiment que tu pouvais me cacher mon petit-fils ? Pourquoi le souhaiterais-tu, d’ailleurs ? Ai-je été une si mauvaise mère ? Est-ce cela ?

Mackenzie ouvrit la bouche pour dire quelque chose, pour exiger que sa mère lui rende son bébé. Mais lorsqu’elle s’exécuta, tout ce qui sortit de sa bouche fut de la barbe de maïs et de la terre, se déversant sur le sol.

Et pendant ce temps, sa mère souriait, en serrant Kévin contre elle, le blottissant contre elle.

Mackenzie bondit dans le lit en criant.

- Seigneur, Mac… est-ce que ça va ?

Ellington se tenait sur le seuil de la chambre. Il portait un T-shirt et un short de jogging, indiquant qu’il était en plein entraînement dans la chambre d’amis.

- Ouais, soupira-t-elle. Juste un cauchemar. Un très vilain cauchemar.

Puis elle jeta un coup d’œil au réveil et vit qu’il était presque huit heures du matin. Ellington avait réussi à lui accorder quelques heures de sommeil supplémentaires ; Kévin se réveillait en général aux alentours de cinq ou six heures pour manger.

- Il ne s’est pas encore réveillé ? demanda Mackenzie.

- Si. Je lui ai donné du lait congelé. Je sais que tu voulais garder ta réserve mais j’ai pensé que tu avais vraiment besoin de dormir.

- Tu es merveilleux, dit-elle en se rallongeant dans le lit.

- Ne l’oublie jamais. Maintenant, rendors-toi. Je te l’apporterai quand il aura besoin d’être changé. Marché conclu ?

Elle laissa échapper un murmure affirmatif tout en se rendormant. Pendant un instant, elle entrevit des images fantôme de son cauchemar dans sa tête mais elle les éloigna en repensant à son mari aimant et à son bébé qui serait ravi de la voir quand elle se réveillerait.

***

Un mois plus tard, Ellington retourna travailler. Le directeur McGrath lui avait promis de ne pas lui assigner des affaires intenses ou trop complexes pendant un moment, à cause du bébé et de l’épouse en plein allaitement qui l’attendaient à la maison. Et au-delà de ça, McGrath s’était également révélé assez souple quant à ses horaires. Certains jours, Ellington partait à huit heures du matin et revenait à seulement quinze heures.

Lorsqu’Ellington reprit ses fonctions, Mackenzie commença véritablement à se sentir mère. L’aide d’Ellington lui manqua vraiment beaucoup pendant les premiers jours mais être seule avec Kévin lui procurait une sensation spéciale. Peu à peu, elle se rendit compte qu’elle connaissait ses rythmes et ses petits caprices par cœur. Et même si la majeure partie de ses journées se déroulait assise sur le canapé pour cicatriser tout en dévorant des séries Netflix, elle sentait que leur lien se renforçait.

Mais Mackenzie n’avait jamais été du genre à supporter l’inactivité. Au bout d’une semaine, elle commença à culpabiliser d’enchaîner les épisodes sur Netflix. Elle mit à profit son temps libre pour lire des récits de crimes qui avaient réellement eu lieu. Elle parcourut les ressources textuelles en ligne tout comme les podcasts, en tentant de stimuler son esprit : elle s’efforçait de deviner l’issue de ces affaires de la vie réelle avant que le narrateur parvienne à leur conclusion.

Elle rendit visite à son gynécologue deux fois au cours de ces six premières semaines pour s’assurer que la cicatrice de la césarienne se refermait correctement. Même si le médecin semblait se réjouir de la rapidité avec laquelle elle se remettait, il insista en lui disant qu’un retour à la normale si rapide pourrait causer des complications. Il l’avertit que le simple fait de se pencher pour ramasser quelque chose pouvait causer une déchirure.

Pour la première fois de sa vie, Mackenzie se sentit vraiment invalide. Cela ne lui convenait pas, mais elle devait se concentrer sur Kévin. Elle comptait bien faire en sorte qu’il reste heureux et en bonne santé. Elle devait respecter un certain rythme et, comme Ellington et elle l’avaient prévu pendant sa grossesse, elle devait aussi le préparer à la séparation maternelle pour le faire garder dans le futur. Ils avaient trouvé une garderie réputée et avaient déjà réservé une place. Et même s’ils offraient d’accueillir le bébé à seulement deux mois, Mackenzie et Ellington avaient décidé de ne pas le confier à un étranger avant cinq ou six mois. La place qu’ils avaient réservée deviendrait disponible juste après l’anniversaire des six mois de Kévin, offrant à Mackenzie tout le temps nécessaire pour se sentir à l’aise, non seulement avec le développement de Kévin mais aussi avec l’idée de la séparation.

Donc elle ne vivait pas sa période de convalescence comme un problème tant que Kévin était avec elle. Même si elle n’en voulait pas à Ellington de retourner travailler, elle se surprit à désirer qu’il soit à la maison durant la journée, de temps en temps. Il ratait tous les sourires de Kévin, tous les petits tics adorables qu’il développait, les roucoulements et autres bruits de bébé.

Tandis que Kévin allait d’étape importante en étape importante, l’idée de la garderie rodait dans un coin de son esprit. Et avec elle, celle de réintégrer ses fonctions. Cette perspective l’enthousiasmait, pourtant, chaque fois qu’elle regardait son fils dans les yeux, elle ne parvenait pas à savoir si elle serait capable de vivre une vie qui l’obligeraient à courir vers le danger, un pistolet passé à la ceinture, avec de l’incertitude à chaque coin de rue. Cela semblait presque irresponsable qu’elle et Ellington occupent tous les deux un poste si dangereux.

La perspective de retourner travailler – pour le Bureau et dans des situations même seulement vaguement périlleuses – devint de moins en moins attrayante à mesure qu’elle tissait des liens avec son fils. En réalité, lorsque le médecin l’autorisa à reprendre une activité physique légère trois mois plus tard, elle n’était plus du tout sûre de vouloir réintégrer le FBI.

CHAPITRE TROIS

Grand Teton National Park, Wyoming

Bryce s’assit sur le rebord de la falaise, balançant les pieds au-dessus du vide. Le soleil se couchait, brillant de ses derniers feux dorés et orange vif disparaissant dans le halo rouge de l’horizon. Il se massa les mains et pensa à son père. Son équipement d’escalade se trouvait derrière lui, rangé et prêt pour une nouvelle aventure. Il lui restait deux kilomètres cinq à parcourir pour retourner à sa voiture – au total, il aurait parcouru cinq kilomètres à pied – mais pour l’instant, il ne pensait même pas à sa voiture.

Il ne pensait ni à sa voiture, ni à sa maison, ni à la femme qu’il venait d’épouser. Son père était mort un an plus tôt aujourd’hui, et ils avaient répandu ses cendres ici, en haut de la falaise sud de Logan’s View. Son père était mort sept mois avant son mariage et juste une semaine avant ce qui aurait été son cinquante-et-unième anniversaire.

C’était ici, très exactement, au sommet de la paroi sud de Logan’s View que Bryce et son père avaient célébré la première ascension de Bryce. Bryce savait qu’on ne pouvait pas la considérer comme une ascension difficile mais elle l’avait été pour lui, à dix-sept ans. Cependant, depuis, il avait escaladé des falaises bien plus impressionnantes dans le parc national de Grand Teton.

Honnêtement, Bryce ne voyait pas ce que cet endroit avait de si spécial. Il ignorait pourquoi son père avait demandé que ses cendres soient dispersées ici. Cela avait obligé Bruce et sa mère à se garer sur le parking général à trois kilomètres de distance de là où il se trouvait – où, il y avait un peu moins d’un an, ils avaient dispersé les cendres de son père. Bien sûr, le coucher de soleil était beau, mais il y avait beaucoup d’autres points de vue superbes dans le parc.

- Eh bien, je suis remonté, papa, marmonna Bryce. Je grimpe çà et là, mais rien d’aussi brutal que les trucs que tu faisais.

Bryce sourit en repensant à la photo qu’on lui avait donnée peu de temps après les obsèques de son père. Son père avait tenté d’escalader l’Everest mais s’était tordu la cheville après seulement un jour et demi de montée. Il avait gravi des glaciers en Alaska et nombre de formations rocheuses qui attendaient d’être baptisées à travers les déserts américains. L’homme était une légende dans l’esprit de Bryce et c’était ainsi qu’il comptait le conserver dans ses souvenirs.

Il observa le crépuscule, certain que son père l’aurait apprécié. Même si, honnêtement, avec tous les couchers de soleil qu’il avait vus de différents sommets pendant ses années d’escalade, celui-ci n’était peut-être qu’un coucher de soleil générique.

Bryce soupira, remarquant que les larmes ne lui montaient pas aux yeux comme d’habitude. Il s’accoutumait peu à peu à un monde dans lequel son père n’était plus. Il était toujours en deuil, bien sûr, mais il passait lentement à autre chose. Il se leva et se tourna pour ramasser le sac à dos qui contenait son équipement d’escalade. Il s’arrêta net, alarmé à la vue d’une personne qui se tenait juste derrière lui.

- Désolé de vous avoir fait sursauter, lança l’homme, debout à moins d’un mètre de lui.

Comment ai-je pu ne pas l’entendre ? se demanda Bryce. Il a dû avancer très silencieusement… volontairement. Essayait-il de me surprendre ? Pour me voler ? Me prendre mon équipement ?

- Pas de problème, décréta Bryce en choisissant d’ignorer l’homme.

Il semblait avoir une trentaine d’années, une fine couche de barbe lui couvrait le menton et il était coiffé d’un bonnet en microfibres.

- Joli coucher de soleil, hein ? enchaîna l’homme.

Bryce ramassa son sac, le passa sur son épaule et commença à avancer.

- Ouais, tout à fait, répondit-il.

Il avança dans la direction de l’homme, avec l’intention de lui passer devant sans lui accorder un autre regard. Mais l’homme tendit le bras et lui bloqua le passage. Lorsque Bryce tenta de le contourner, l’homme l’attrapa par le bras et le poussa en arrière.

Tandis qu’il trébuchait, Bryce avait conscience de l’espace ouvert qui l’attendait à moins de deux mètres derrière lui – environ cent-vingt mètres de vide.

Bryce avait seulement asséné un coup de poing à quelqu'un dans toute sa vie ; l’incident avait eu lieu en CE1, dans la cour de récréation, lorsqu’un gamin qui avait tout d’un imbécile avait proféré une plaisanterie de mauvais goût sur sa mère. Pourtant, Bryce se surprit à refermer le poing, tout à fait prêt à se défendre si cela s’avérait nécessaire.

- C’est quoi, ton problème ? demanda Bryce.

- La gravité, dit l’homme.

Il esquissa un mouvement, mais on n’aurait pas dit qu’il allait frapper, non, il lançait quelque chose. Bryce leva un poignet pour intercepter l’objet, en réalisant ce qui, dans la main de l’homme, venait de refléter l’éclat doré du crépuscule sur une surface de métal.

Un marteau.

Il s’écrasa sur son front assez brutalement pour générer un son qui, selon Bryce, semblait tout droit sorti d’un dessin animé. Mais la douleur qui suivit n’avait rien de drôle ou de comique. Il cligna des yeux, complètement étourdi. Il recula d’un pas alors que chacun des nerfs de son corps tentait de lui rappeler qu’il y avait cent-vingt mètres de vide derrière lui.

Mais ses terminaisons nerveuses étaient comme anesthésiées, l’attaque sortant de nulle part avait provoqué une douleur aveuglante dans son crâne et son dos s’engourdissait.

Bryce s’affaissa, tombant sur un genou. C’est à ce moment-là que l’homme se positionna et lui donna un coup de pied directement dans le plexus solaire.

Bryce sentit à peine l’impact. Sa tête n’était plus qu’un feu brûlant. Le coup l’envoya voler en arrière, il frappa contre le sol assez brutalement pour rouler-bouler un peu plus loin.

Il sentit immédiatement la gravité prendre le pouvoir sur lui mais il resta perplexe sur ce qui était arrivé, exactement.

Son cœur s’accéléra et son esprit, happé par la douleur, passa en mode panique. Il tenta de reprendre son souffle pendant que ses réflexes reprenaient le dessus, et il tâtonna à la recherche d’une prise quelconque.

Mais il n’y avait rien. Il n’y avait que l’air, le vent qui lui sifflait dans les oreilles alors qu’il chutait et quelques secondes plus tard, une brusque explosion de douleur lorsqu’il s’écrasa contre le sol rocailleux tout en bas. Au moment où il poussait son dernier soupir, il vit l’ombre rouge passer sur le côté de la paroi qu’il venait d’escalader, un dernier coucher de soleil qui l’escortait vers l’obscurité.

CHAPITRE QUATRE

Ce qui, au début, lui était apparu comme le paradis commençait rapidement à ressembler à une sorte de prison. Même si elle aimait toujours son fils plus qu’elle n’aurait pu l’expliquer, ou même le concevoir, Mackenzie était au bord de la crise de nerfs. Les promenades occasionnelles dans son quartier ne lui suffisaient plus. Lorsque le médecin l’avait autorisée à faire un peu d’exercice et à reprendre une vie normale chez elle, elle pensa instantanément à aller courir ou même à soulever des poids légers. Elle avait perdu la forme – elle n’avait jamais été si peu musclée en cinq ans – et les abdominaux qui faisaient sa fierté étaient enterrés sous du tissu cicatriciel et une couche de graisse dont elle n’était pas familière.

Dans l’un de ses moments de plus grande faiblesse, elle se mit à pleurer sans pouvoir se contrôler, un soir, en sortant de la douche. Toujours aussi dévoué et aimant, Ellington se précipita dans la salle de bains et la trouva appuyée contre le lavabo.

- Mac, qu’est-ce qui se passe ? Est-ce que ça va ?

- Non. Je pleure. Ça ne va pas. Et je pleure pour des raisons stupides.

- Comme quoi ?

- Comme le corps que je viens d’apercevoir dans le miroir.

- Ah, Mac… hé, tu te souviens quand tu m’as dit il y a quelques semaines que tu avais lu qu’il était normal de pleurer sans raison ? Eh bien, en voilà un parfait exemple.

- Cette cicatrice de césarienne ne partira jamais. Et le poids… je vais avoir du mal à le perdre.

- Mais pourquoi ça te dérange ?

Il n’adoptait pas une approche inflexible mais il ne la dorlotait pas non plus. Ce qui lui rappelait indéniablement à quel point il la connaissait bien.

- Ça ne devrait pas. Et honnêtement, je crois que je pleure pour une autre raison… mon reflet a été le déclencheur.

- Ton corps est très bien comme il l’est.

- Tu te sens obligé de dire une chose pareille.

- Non, pas du tout.

- Comment peux-tu voir ça et me désirer ? demanda-t-elle.

Il lui sourit.

- C’est assez facile. Écoute… je sais que le médecin t’a autorisé à faire de l’exercice léger. Donc, tu sais… si tu me laisses faire tout le travail…

Sur ce, il jeta un regard aguicheur à travers la porte de la salle de bains en direction de la chambre.

- Et Kévin ?

- Il est en pleine sieste de fin d’après-midi. Mais il se réveillera probablement dans une minute ou deux. Et il se trouve que ça fait plus de trois mois. Donc je ne m’attends pas à ce que quoi qui puisse arriver dure davantage.

- Tu es un abruti.

Il répondit par un baiser qui l’empêcha de poursuivre et effaça instantanément tous ses ressentis négatifs. Il l’embrassa langoureusement et elle sentit le poids des trois mois d’attente dans ce baiser. Il l’escorta délicatement jusqu’à la chambre et, comme il l’avait suggéré, fit tout le travail – avec précaution et dextérité.

Le timing de Kévin se révéla parfait. Il se réveilla trois minutes après qu’ils avaient terminé. Tandis qu’ils marchaient ensemble en direction de la chambre du bébé, Mackenzie lui pinça les fesses.

- C’était un peu plus que de l’exercice léger.

- Tu te sens bien ?

- Incroyablement bien, répondit-elle. Si exceptionnellement bien que je pense peut-être aller à la salle de gym ce soir. Tu voudrais bien garder le petit bonhomme pendant que je sors un moment ?

- Bien sûr. Mais fais attention à toi.

Et c’était tout ce dont Mackenzie avait besoin pour se motiver. Elle ne s’apitoyait jamais sur son sort. Même quand il s’agissait de faire du sport et, apparemment, d’être mère. C’était peut-être la raison pour laquelle trois mois après avoir ramené Kévin à la maison, elle se sentit coupable de sortir pour la première fois. Elle était allée au supermarché et chez le médecin avant, bien sûr, mais c’était la première fois qu’elle sortait en sachant qu’elle serait loin de son bébé pendant plus d’une heure.

Elle arriva à la salle de gym juste après vingt heures, donc il n’y avait plus grand monde. C’était la même salle qu’elle fréquentait quand elle avait commencé à travailler pour le Bureau, avant qu’elle n’utilise le complexe du FBI. Il était agréable d’être de retour sur un tapis de course juste comme n’importe quelle autre citadine, luttant contre les bandes de résistance obsolètes et s’entraînant avec pour unique but de rester active.

Elle parvint seulement à courir une demi-heure avant que son ventre ne commence à la faire souffrir. Elle avait aussi une sérieuse crampe à la jambe droite qu’elle tenta de faire passer sans succès. Elle prit une pause, se remit à courir sur le tapis, puis décida que c’était suffisant.

Ne commence pas à t’auto-flageller, pensa-t-elle, mais c’était la voix d’Ellington dans sa tête. Un être humain a grandi en toi et on a dû te cisailler le ventre pour l’en sortir. On ne se remet pas de ces choses comme Superwoman. Donne-toi le temps.

Elle avait transpiré, et c’était suffisant pour elle. Elle rentra, prit une douche et allaita Kévin. Il était si heureux qu’il s’endormit pendant la tétée, ce que les médecins déconseillaient. Mais elle le laissa faire, le tenant dans ses bras jusqu’à ce qu’elle aussi se sente fatiguée. Puis elle le mit au lit. Ellington était installé face à la table de la cuisine, il faisait des recherches pour l’affaire sur laquelle il travaillait.

- Ça va ? lui demanda-t-il lorsqu’elle traversa le salon.

- Ouais. Je pense que j’ai peut-être un peu exagéré à la salle. J’ai un peu mal. Je suis lessivée.

- Je peux faire quelque chose ?

- Non. Quoique… Tu pourrais peut-être encore m’aider avec de l’exercice léger demain matin, non ?

- Toujours ravi de vous donner un coup de main, madame, lança-t-il en souriant derrière son écran d’ordinateur.

Elle souriait, elle aussi, en se mettant au lit. Sa vie semblait parfaitement remplie et elle avait des courbatures aux jambes et sentaient que ses muscles commençaient à réapprendre ce à quoi ils étaient habitués par le passé. Elle s’assoupit en une minute.

Elle ignorait qu’elle plongerait à nouveau dans le rêve de l’immense champ de maïs, et verrait sa mère avec son bébé dans ses bras.

Elle ignorait également à quel point le cauchemar l’affecterait cette fois.

***

Lorsque elle s’éveilla en sursaut à cause du cauchemar, le cri venait bien de sa bouche. Elle s’assit dans le lit si brutalement qu’elle manqua tomber du matelas. À côté d’elle, Ellington l’imita en poussant un grognement.

- Mackenzie… que se passe-t-il ? Est-ce que ça va ?

- Juste un cauchemar. C’est tout.

- On aurait dit que c’était épouvantable. Tu veux en parler ?

Son cœur tambourinait encore dans sa poitrine mais elle se rallongea. Pendant quelques instants encore, elle sentit le goût de la terre dans sa bouche.

- Pas en détail. Juste… je crois qu’il faut que je revoie ma mère. Je dois lui annoncer la naissance de Kévin.

- Ça me semble approprié, déclara Ellington, clairement surpris par la puissance du cauchemar et son effet sur elle. C’est logique, je suppose.

- Nous pouvons en reparler plus tard, conclut-elle en sentant le sommeil la gagner à nouveau.

Les images du cauchemar continuaient à la hanter mais elle savait que si elle ne se rendormait pas rapidement, sa nuit serait très longue.

Elle se réveilla quelques heures plus tard en entendant Kévin pleurer. Ellington était sur le point de sortir du lit mais elle posa une main sur son torse.

- Je m’en occupe.

Ellington n’opposa pas beaucoup de résistance. Ils revenaient progressivement à des nuits normales et ni l’un ni l’autre n’était prêt à refuser de dormir lorsque l’occasion se présentait. En outre, il devait assister à une réunion le lendemain matin, au sujet d’une nouvelle enquête dont il allait prendre la direction en réunissant une équipe de surveillance. Il lui en avait parlé au dîner mais elle était bien trop perdue dans ses pensées pour se souvenir des détails. Ces derniers temps, elle était particulièrement dispersée et il lui était difficile de se concentrer – surtout lorsqu’Ellington parlait de travail. Les missions lui manquaient et elle l’enviait mais n’était pas encore prête à laisser Kévin, quelle que soit la qualité de la garderie.

Mackenzie se dirigea vers la chambre d’enfant et le prit délicatement dans ses bras. Désormais, Kévin en était à la phase où il cessait de pleurer (la plupart du temps) à l’instant où l’un de ses parents s’approchait de lui. Il savait qu’il obtiendrait ce dont il avait besoin et avait déjà appris à avoir confiance en ses propres instincts. Mackenzie changea sa couche puis s’installa dans le rocking-chair pour lui donner le sein.

Son esprit dériva vers ses parents. Elle ne se souvenait évidemment pas d’avoir été allaitée, bébé. La simple idée que sa mère lui ait un jour donné le sein était difficile à envisager. Pourtant, elle savait maintenant que la maternité l’amenait à voir le monde sous un jour totalement différent. Sa mère avait peut-être commencé à aller mal – elle avait même peut-être été totalement détruite par l’assassinat de son mari.

Ai-je été trop dure avec elle pendant tout ce temps ? se demanda-t-elle.

Mackenzie termina d’allaiter Kévin, en pensant longuement à son futur – pas seulement aux semaines à venir, lorsque son congé maternité toucherait à son terme, mais aux mois et aux années qui l’attendaient et à la meilleure manière de les vivre.

Yaş sınırı:
0+
Litres'teki yayın tarihi:
15 nisan 2020
Hacim:
251 s. 3 illüstrasyon
ISBN:
9781094305394
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