Kitabı oku: «Si elle entendait», sayfa 2

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CHAPITRE TROIS

Les réunions avec le directeur Duran n’avaient jamais été faciles. Mais il s’était toujours bien comporté avec Kate et elle le considérait comme un ami. Cependant, vu la manière dont la vie de Kate avait changé au cours de ces derniers mois, elle s’attendait à une réunion un peu tendue –peut-être même qu’il allait mettre un point final à sa carrière en tant qu’agent du FBI.

Quand elle entra dans son bureau, il l’accueillit avec ce sourire pragmatique qu’elle lui connaissait si bien. Duran avait plus ou moins le même âge qu’elle et ils avaient appris à s’apprécier mutuellement.

« Salut, Kate, entre, assieds-toi. »

Elle fut tout de suite inquiète en l’entendant l’appeler par son prénom. C’était très familier et ce n’était pas dans ses habitudes, à moins que ce soit après les heures de travail ou que la conversation soit un peu animée.

« Kate, hein ? » dit-elle. Elle était plutôt à l’aise en sa présence et elle fit cette remarque sur le ton de la plaisanterie, histoire de lui signaler qu’elle avait bien remarqué le ton informel qu’il avait utilisé.

« Eh bien, officiellement, tu es toujours en congé de maternité, » dit-il. « Ce serait bizarre de t’appeler agent. Mais comme tu peux l’imaginer, c’est aussi l’une des raisons pour laquelle je voulais te parler. » Il laissa échapper un soupir et la regarda droit dans les yeux. « Comment vas-tu, Kate ? »

« Bien. Mais un peu perdue… »

« Tu as l’impression d’être cette mère miracle ? »

« Apparemment, je suis entrée dans le club des célébrités, » plaisanta-t-elle. « D’ailleurs, cette petite réunion ne peut pas durer trop longtemps. J’ai un déjeuner prévu avec Ryan Seacrest juste après ça. »

« Je ne sais pas de qui tu parles. »

Kate haussa les épaules. L’humour n’avait jamais vraiment fait partie de leur relation.

« Je ne vais pas te mentir, » dit Duran. « La nouvelle a été plutôt bien accueillie. Tous les agents se sont envoyés des liens et des articles sur la mère miracle. »

« Tu sais, je n’ai donné que deux interviews. Je ne sais pas du tout comment ça a pu déboucher sur plus de quarante articles. »

« Sûrement les réseaux sociaux qui se sont emballés. Mais dis-moi… Est-ce que cette notoriété soudaine te ferait hésiter à retravailler pour le FBI ? »

Elle ne put s’empêcher de rire. « Non. S’il y avait quoi que ce soit qui pourrait me retenir de retravailler avec vous, ce ne serait certainement pas cette gloire éphémère. »

« Il y aurait donc certaines choses qui pourraient t’en empêcher ? »

« Éventuellement. Peut-être mon bébé, ou mon âge avancé. »

« Ça fait maintenant trois mois que tu es en congé, » dit-il. « Même un petit peu plus longtemps. J’imagine que je n’ai pas besoin de te préciser que tu ne rajeunis pas. Mais… tu es encore en pleine forme physiquement. C’est impressionnant. »

« Excuse-moi si je suis un peu directe, » dit Kate. « Mais qu’est-ce que tu veux exactement ? Est-ce que tu veux que je revienne travailler pour vous ? »

« Dans un monde parfait, oui. Ça a été mentionné à plusieurs reprises lors de réunions. Mais tous ces articles à ton sujet soulignent non seulement le fait que tu as accouché à cinquante-sept ans, mais aussi le fait que tu sois encore un agent actif du FBI. Je ne sais pas comment ça va se passer en termes médiatiques si tu retournes sur le terrain. »

Kate s’appuya contre le dossier de sa chaise. Elle n’avait pas pensé à ça.

« Pour être tout à fait franc, » continua Duran. « Oui, je veux que tu reviennes. Mais c’est un peu égoïste de ma part. Tu es l’un de nos meilleurs éléments et ce serait vraiment positif pour l’image du FBI. Les médias t’adorent. Tu es devenue une sorte de célébrité. Mais je n’ai pas non plus envie de t’influencer. Si tu veux arrêter, il n’y a pas de problème. Tout le monde comprendra. »

« Mais en fait, ça me manque, » dit Kate. Ce ne fut qu’au moment de prononcer ces mots qu’elle s’en rendit compte.

« Je m’en doutais un peu. Alors ce que je peux faire – en tout cas, pour les prochains mois – c’est de t’assigner des enquêtes pas trop risquées. Pour que tu gardes l’esprit occupé et que tu restes concentrée. Enfin… si tu penses avoir eu suffisamment de temps pour te reposer et si tu es prête à revenir travailler. »

« Oui, je suis prête, » dit-elle. L’idée de mettre Michael à la crèche lui faisait de la peine, mais elle savait que ce serait positif pour lui… ainsi que pour elle et pour Allen. Bien qu’au fond d’elle, elle ne soit pas vraiment sûre d’y être totalement préparée. Afin d’éviter de penser à tout ça, elle continua à parler. « Comment va DeMarco ? Je ne lui ai parlé que trois fois depuis que je suis partie et à chaque fois que je lui ai posé des questions sur le boulot, elle a changé de sujet de conversation. »

« C’est sûrement parce qu’elle a été très occupée. J’ai le droit de t’en parler parce que tu es encore techniquement sa coéquipière… mais elle a travaillé sur deux affaires assez importantes dernièrement. Il y a trois semaines, elle a arrêté deux hommes qui distribuaient de l’héroïne. Et la semaine dernière, elle a épinglé à elle toute seule un type qui a assassiné trois personnes en Virginie de l’Ouest avant de partir en cavale à travers le Maryland. »

« Ah oui… elle a vraiment été bien occupée ! »

« Et maintenant que tu mentionnes DeMarco, on vient juste de lui assigner une enquête en Caroline du Nord. Ça m’a l’air d’être une affaire assez simple. Deux jeunes filles universitaires assassinées. Sûrement l’œuvre d’un harceleur. Je suis sûr que DeMarco serait enchantée que tu te joignes à elle. Vu que l’affaire semble assez simple, ça pourrait être parfait pour toi, dans ta situation. »

« Et en quoi consiste ma situation, exactement ? »

« Kate, tu sais ce que je veux dire. Si tu veux te remettre dans le bain, c’est l’enquête parfaite pour le faire. Mais bien entendu, ça dépend totalement de toi. C’est toi qui choisis. »

« Ça me paraît une bonne idée, mais maintenant qu’elle s’en sort très bien toute seule, je n’ai pas non plus envie de la déranger. »

« Je suis sûr qu’elle sera ravie que tu te joignes à elle. Et pour être tout à fait honnête, vu qu’on ne sait pas combien de temps tu vas encore rester avec nous, c’est plus logique que tu travailles avec une coéquipière que tu connais bien. »

« Oui, c’est logique. »

Duran resta un moment silencieux, avant de se lever de sa chaise. « Elle part demain matin. Est-ce que ça te laisse assez de temps pour tout organiser avec ton mari ? Est-ce que vous en avez déjà parlé ? »

« Plus ou moins, » dit-elle. « Enfin… de manière tacite, mais l’idée est bien présente dans notre esprit. Je suis sûre qu’il sait que je n’en ai pas terminé avec le FBI, mais… »

« Mais quoi ? »

« Mais que ça ne va plus tarder. Que ma carrière au FBI touche à sa fin. »

Elle vit que Duran était sur le point de lui poser une autre question, mais il se ravisa. Elle savait ce que c’était, alors elle lui fut reconnaissante de ne pas la poser.

Est-ce que ça va être la dernière enquête de ta carrière ?

Elle était contente qu’il ne lui ait pas demandé, parce qu’elle ne savait pas du tout quelle était la réponse à cette question.

***

Ce fut leur seul sujet de conversation au dîner. Allen le prit plutôt bien, car il s’y attendait. Dès le moment où Duran avait appelé Kate, il avait su. La conversation s’était étonnamment bien passée, bien qu’une certaine tension persiste entre eux.

« Il faut que je te dise quelque chose, » dit Allen, en écartant son assiette vide. Il avait préparé du poulet teriyaki pour dîner et le repas avait été excellent. La cuisine était l’une de ses nombreuses qualités. « Je suis vraiment ravi à l’idée que tu retournes travailler. Ça a vraiment été pénible pour moi de voir dans quel état tu étais le mois dernier. On aurait dit que tu avais perdu quelque chose et que tu ne savais pas où chercher. Je sais que le boulot te manque et je suis ravi que tu puisses travailler sur cette enquête. Mais j’ai tout de même quelques questions. »

« Je m’en doute, » dit Kate. « Alors, passons-les en revue. »

« OK ! Bien que je sois presque à la retraite, je dois encore répondre à des appels et assister à des réunions au cours de l’année à venir. Et je ne veux pas que ton boulot passe avant le mien. Il faut aussi qu’on cherche une crèche pour Michael. »

« Je suis tout à fait d’accord. Maintenant, dans le cas de cette enquête, est-ce que tu es disponible pour t’occuper de Michael pendant quelques jours ? »

« Oui. En fait, je n’ai rien de prévu pour les trois semaines à venir. »

« Et ça ne te dérange pas de t’occuper tout seul de lui pendant ces quelques jours ? »

« Pas du tout. Ça va être amusant de se retrouver entre hommes. »

« Quelles autres questions voulais-tu me poser ? »

« Je pensais à ta sécurité. Je sais que tu peux te défendre et c’est l’une des raisons pour laquelle je t’aime autant. Mais je n’aime pas beaucoup l’idée que ma femme de cinquante-sept ans soit occupée à pourchasser des hommes qui ont moitié son âge. Tu n’es pas vraiment le genre d’agents à rester assise derrière un bureau ou dans une voiture. »

« On en a parlé avec Duran. Cette affaire devrait être assez simple. Il a également pris en compte le facteur âge, bien qu’il en ait parlé en termes un peu plus agréables. »

« Une dernière question. » Allen s’appuya contre le dossier de sa chaise et but une gorgée de son vin. Il regarda en direction de la balancelle où Michael s’était endormi pendant qu’ils dînaient. « Combien de temps vas-tu encore continuer ? Franchement ? Le fait de mettre un bébé au monde a dû également puiser dans tes réserves d’énergie. »

« C’est une question difficile, » dit-elle. « Toute cette situation… je n’aurais jamais pu l’imaginer. Un bébé à cinquante-sept ans. Un supérieur et une coéquipière qui veulent que je continue à travailler. Je ne m’y attendais pas du tout et… je ne sais pas. Et probablement que je ne le saurai pas tant que je ne serai pas retournée sur le terrain. »

Elle le vit réfléchir à ce qu’elle venait de lui dire. Le côté droit de sa bouche se retroussa légèrement.

« Alors, c’est sûrement mieux que tu y retournes, » dit-il. « En tout cas… pour l’instant. On en reparlera dans trois mois. Est-ce que ça te paraît raisonnable ? »

« Plus que raisonnable. »

Elle eut envie de lui dire combien il avait été adorable et arrangeant tout au long de leur relation. Mais il le savait déjà, parce qu’elle le lui répétait continuellement. Elle savait qu’elle donnait l’impression de faire passer son boulot avant lui et, pour être tout à fait honnête, c’était exactement ce qu’elle avait fait. Mais maintenant, ils avaient un bébé et un mariage se profilait à l’horizon. C’était ça, sa vie, maintenant. Sa nouvelle vie. Et elle avait enfin l’occasion de ne pas laisser son boulot tout contrôler. C’était ce qu’elle avait fait dans le passé et elle avait failli creuser un fossé entre elle et Mélissa.

Elle sut tout de suite que quelque chose avait changé. Dans le passé, elle n’aurait pas perdu une minute – elle se serait directement levée de table et elle aurait commencé à préparer ses affaires pour son départ en Caroline du Nord. Mais maintenant, après la réunion avec Duran et la conversation avec Allen, tout ce dont elle avait envie, c’était de rester assise à ses côtés. C’était lui, son avenir. Pas son boulot. Allen, Michael et Mélissa étaient son point d’ancrage.

Tout ce qu’elle devait faire, c’était s’assurer que sa tête suive pour parvenir à s’installer dans cette vie aux allures si parfaites.

Et à l’instant présent, alors qu’elle était assise à côté d’Allen, sa vie lui paraissait de fait plutôt magique.

CHAPITRE QUATRE

Quand Kate et DeMarco se retrouvèrent dans le parking du FBI, Kate eut l’impression qu’elles s’étaient vues la veille. Elle remarqua néanmoins qu’il y avait quelque chose de différent chez DeMarco et ça n’avait rien à voir avec son apparence. Physiquement, elle était toujours la même que la dernière fois qu’elles s’étaient vues, six mois plus tôt.

« Agent Wise, ça me fait vraiment plaisir de te revoir, » dit DeMarco.

« Pareil pour moi. »

Elles se serrèrent brièvement dans les bras et ce fut à ce moment-là, au moment de cette démonstration rapide d’affection, que Kate se rendit compte que quelque chose avait changé chez DeMarco. C’était presque imperceptible, mais sa coéquipière avait l’air d’être une personne différente. Kate pensa d’abord qu’elle avait l’air plus âgée, mais ce n’était pas ça. C’était son attitude qui avait changé, la manière dont elle se tenait. Elle avait la tête haute et regardait droit devant elle, sans avoir besoin de quelqu’un pour la soutenir ou la guider. Dans ce sens, oui, DeMarco paraissait plus âgée. Vu qu’elle venait juste d’avoir un enfant, Kate y trouva une analogie plutôt appropriée : le changement de DeMarco ressemblait à celui qui s’opérait chez une femme encore jeune et naïve, qui viendrait juste d’avoir un bébé et qui serait désormais guidée par l’instinct maternel.

Une autre chose avait changé et c’était le lien qui les unissait. Kate l’avait remarqué dès le début – dès le moment où elles avaient jeté leurs sacs dans le coffre de la voiture qu’elles allaient conduire jusqu’en Caroline du Nord. Et ça n’avait rien de négatif. Elles étaient toutes les deux ravies de se revoir, et encore plus de retravailler ensemble sur une affaire après plus de six mois. Mais il y avait un changement au niveau du leadership. DeMarco n’était plus la subordonnée qui prenait exemple sur Kate et suivait chacune de ses recommandations. DeMarco avait beaucoup plus confiance en elle. Elle était un agent à l’avenir prometteur, capable d’élucider des enquêtes par elle-même.

Rien n’avait été dit – que ce soit par DeMarco ou Duran – mais Kate sut tout de suite que DeMarco était la personne responsable de cette enquête. Et franchement, ça ne la dérangeait pas. En fait, elle trouvait ça plutôt même normal.

Elles passèrent la majorité du voyage à se donner des nouvelles concernant leur vie. Elles avaient six heures devant elle pour le faire et ça passa trop vite. Kate lui parla de Michael et combien c’était bizarre d’avoir un fils plus jeune que sa propre petite-fille. Elle lui raconta qu’elle avait essayé de rester active et de garder l’esprit vif, alors que tout son univers tournait autour des biberons, des langes et du manque de sommeil.

À son tour, DeMarco lui raconta ce qu’elle avait fait ces derniers mois. Elle ne s’épancha pas sur sa vie privée et se limita à mentionner qu’elle avait une nouvelle petite amie et que son père avait eu peur d’avoir le cancer. Mais elle parla davantage de son boulot. Quand elle commença à en raconter les moments les plus forts, elle le fit presque d’un air gêné.

« Ne sois pas timide, » dit Kate. « Duran m’a raconté que tu étais devenue une crack, surtout au cours des dernières semaines. Maintenant… quand il dit que tu as épinglé à toi toute seule cet assassin, qu’est-ce qu’il veut dire par là, exactement ? »

« Tu veux vraiment que je te raconte l’histoire ? » Elle avait l’air surprise mais aussi un peu excitée.

« Bien sûr que je veux que tu me la racontes ! »

« Eh bien, je ne voudrais pas avoir l’air de me vanter. Mais oui… ce type avait assassiné un couple marié dans l’état de New York, puis il avait essayé de tuer et de voler quelqu’un d’autre à Washington. On a découvert qu’il était ici et une chasse à l’homme a été lancée. Je n’étais pas responsable de l’enquête, mais l’agent qui s’en occupait a eu la grippe et j’ai repris l’affaire. J’ai fini par coincer l’assassin et l’un de ses amis dans cette vieille maison, tout près de Georgetown. J’ai dû tirer sur l’ami. La balle l’a atteint au genou gauche. Quant à l’assassin, ce fut une véritable lutte à mort. Je lui ai accidentellement disloqué la hanche et fracturé le poignet. »

« Accidentellement disloqué la hanche ? » demanda Kate, en riant.

« Oui, accidentellement. De plus… il était stone. J’ai découvert plus tard qu’il avait pris une drogue psychédélique. S’il avait été conscient et qu’il avait compris ce qui se passait, les choses auraient pu se terminer de manière très différente. »

« Mais quand même… c’est incroyable. Peut-être que c’est juste la toute nouvelle maman qui parle, mais je suis vraiment fière de toi. »

« Comment ça, la toute nouvelle maman ? Mais toi, tu es la mère miracle ! »

Elles se mirent à rire et cette bonne humeur les accompagna durant tout le reste du voyage. Elles ne virent pas le temps passer jusqu’à la petite ville de Harper Hills. Mais ce sentiment de passation de pouvoir était néanmoins incontestable. Kate l’acceptait sans problème. Elle regarda DeMarco garer leur voiture sur le parking du commissariat et ouvrir avec empressement la portière du côté conducteur.

***

L’intérieur du commissariat de Harper Hills faisait penser à ce que devait ressembler un commissariat dans une série télé des années 80. Et pas l’une de ces séries qui avaient lieu à New York ou à Los Angeles. Non, c’était un endroit qui aurait très bien pu passer dans un film de Hallmark, où le détective était également un super cuisinier ou un auteur de livres pour enfants. Il y avait une entrée centrale qui faisait office de vestibule. Au-delà de ça, il y avait trois bureaux, dont un seul était occupé. Derrière ces bureaux, il y avait un étroit couloir et rien de plus.

Au seul bureau occupé, était assis un homme obèse avec une coupe mulet, ce qui en rajoutait encore un peu plus à la sensation années 80. Il leur fit un geste de la tête et se leva rapidement de son siège. Sur le badge accroché à sa poitrine était écrit le nom de Smith.

« Vous devez être les agents, » dit Smith, en se précipitant vers le vestibule pour les accueillir.

Kate resta légèrement en retrait, pour que DeMarco comprenne qu’elle lui laissait la parole.

« Oui, c’est nous, » dit DeMarco. « Agents DeMarco et Wise. Est-ce que le shérif Gates est là ? »

« Oui, il est dans son bureau. » Smith leur fit signe de le suivre. Il les précéda dans le couloir et il s’arrêta devant la première porte à droite. « Shérif ? » dit-il, en frappant à l’embrasure de la porte ouverte. « Les agents du FBI sont arrivés. »

« Venez, entrez ! » répondit une voix.

DeMarco entra en premier, suivie par Kate. Le shérif se leva de sa chaise, la main tendue pour les saluer. Ils se serrèrent la main et le shérif les regarda droit dans les yeux, d’une manière qui semblait leur dire qu’il n’avait aucun problème avec le fait de travailler avec des femmes, mais qu’il allait sûrement les traiter avec la bonne vieille hospitalité des gens du Sud.

« Shérif, » dit Kate, « je pensais que le commissariat serait en effervescence, étant donné la nature de cette affaire. »

« Eh bien, c’était le cas il y a peu. La police d’état est arrivée et deux de mes hommes sont partis avec eux. Ils sont occupés à boucler certaines des routes secondaires. Il y en a beaucoup dans le coin, vous savez. Je suis resté au commissariat pour vous accueillir. »

« C’est gentil de votre part, » dit DeMarco. « Qu’est-ce que vous pouvez nous dire concernant cette affaire ? On nous a fait un briefing à Washington, mais je préférerais l’entendre directement depuis la source. »

« Eh bien, il y a eu deux meurtres dans une ville qui n’a connu qu’un seul homicide en dix ans. Les deux victimes étaient de jeunes femmes – dix-neuf et vingt ans. La première a été tuée il y a cinq jours, sur le parking d’un bowling. La deuxième victime a été retrouvée hier matin sur le porche de la maison de sa mère. À première vue, il n’y a aucun lien entre les deux filles. Leur seul point commun, c’est leur âge et le fait qu’elles soient toutes les deux originaires du coin. La deuxième victime, Kayla Peterson, était en visite pour quelques jours. Elle étudie à l’université. »

« Une université de Caroline du Nord ? » demanda DeMarco.

« Non, quelque part en Floride. »

« Est-ce qu’il y a des similarités entres les familles des deux victimes ? » demanda Kate.

« Leur seul point commun, c’est d’être des filles de couples divorcés. On a parlé avec tous les membres directs de la famille et ils ont tous un alibi. Mais bien entendu, libre à vous de les interroger à nouveau. »

« Merci, » dit DeMarco. « Est-ce que vous pourriez nous emmener à l’endroit où la deuxième victime a été retrouvée ? »

« Oui, bien sûr. »

Gates enfila une veste et sortit du bureau. Kate trouvait vraiment que l’attitude de DeMarco avait changé. C’était à peine perceptible, mais c’était bien présent. Elle était plus sûre d’elle. Elle l’avait remarqué dans la manière qu’elle avait eue de parler au shérif. Et c’était également visible dans la façon qu’elle avait eue de le suivre, mais en passant devant Kate.

Elle est encore si jeune, pensa Kate. Ça va vraiment être un agent exceptionnel.

Elle était vraiment contente d’être à nouveau aux côtés de DeMarco. Et elle était heureuse de pouvoir travailler sur cette affaire, bien qu’elle soit maintenant certaine que ce serait probablement l’une de ses dernières enquêtes.

***

En se rendant vers la dernière scène de crime, ils traversèrent presque toute la ville de Harper Hills. Il y avait quatre feux rouges dans la ville et très peu de commerces. Elles virent un Burger King et un Subway, tous les deux situés le long de la petite et tranquille rue principale. Vers le bout de la rue, Gates tourna sur une route secondaire et DeMarco le suivit de près.

Ils se retrouvèrent très vite sur une autre route de campagne, et encore une autre. C’était une région un peu bizarre. Kate avait déjà vu de nombreuses petites villes de province disposées de la même manière, mais Harper Hills ressemblait plutôt à un lotissement rural, niché dans les plaines boisées de Caroline du Nord. Le quartier dans lequel ils arrivèrent était constitué d’un ensemble de terrains boisés, séparés par d’épais bosquets d’arbres.

Gates s’engagea sur une allée en graviers et DeMarco le suivit. Il y avait une autre voiture garée dans l’allée. DeMarco se gara derrière Gates et ils sortirent tous de voiture.

« Voici la maison des Peterson, » dit Gates. « La mère, Sandra, est actuellement chez une amie, près de Cape Fear. Elle ne pouvait pas supporter de rester ici et je comprends. Elle était vraiment anéantie. »

Puis il tendit une enveloppe à DeMarco, qui la prit, l’ouvrit et regarda à l’intérieur. Kate jeta un coup d’œil par-dessus son épaule et vit qu’il s’agissait des dossiers de l’enquête. Elles avaient reçu la majorité de ces dossiers en format numérique à Washington, mais pas tous. Kate jetait toujours un coup d’œil aux dossiers sur papier, même quand elle les avait reçus en version digitale. Le fait de voir tous ces éléments sur papier – et surtout les photos de la scène de crime – rendait l’affaire encore plus présente.

« Est-ce que vous êtes le premier à être arrivé sur les lieux ? » demanda DeMarco.

« Non, Smith est arrivé en premier. Mais je le suivais de près. »

« Est-ce que vous pouvez m’expliquer ce que vous avez vu ? »

Kate aimait beaucoup cette approche. Plutôt que de feuilleter directement les dossiers, DeMarco voulait s’assurer de visualiser la scène, telle qu’elle s’était déroulée le matin où le corps avait été retrouvé. Les photos et les rapports étaient des outils précieux, mais c’était rarement aussi utile que d’entendre le récit des événements de la bouche de ceux qui étaient arrivés les premiers sur les lieux.

« D’après la mère, Kayla Peterson était rentrée à la maison pour le mariage d’une amie. Elle est sortie avec quelques amis avant-hier soir et le lendemain matin, elle n’était pas dans sa chambre. Mais sa voiture était garée dans l’allée. Quand la mère a ouvert la porte pour aller jeter un coup d’œil à la voiture, elle a retrouvé Kayla morte sur le porche. Elle avait eu le temps d’introduire sa clé dans la serrure, avant que l’assassin l’attaque. La clé pendait encore à la porte quand nous sommes arrivés. En voyant le corps, il était évident qu’elle avait été étranglée. »

« Est-ce qu’elle était entièrement habillée ? » demanda Kate.

« Oui. Le médecin légiste nous a dit qu’il n’y avait aucune indication qu’elle ait été violée ou sexuellement agressée. On dirait que le meurtre était la seule chose qui intéressait le tueur. Même chose avec la première victime. »

« Est-ce que le médecin légiste sait ce qui a été utilisé pour l’étrangler ? » demanda DeMarco.

« Il pense que c’est une sorte de câble, probablement en plastique. Et il a mis beaucoup de force pour l’étrangler. Le médecin légiste pense que le tueur doit être assez fort. »

« C’est la voiture de Kayla qui se trouve dans l’allée ? » demanda DeMarco, en montrant la seule voiture garée devant la maison.

« Oui. » Il fouilla dans sa poche et en sortit un porte-clés. Il le tendit à DeMarco et dit, « Vous pouvez aller y jeter un coup d’œil, si vous voulez. »

Ils redescendirent les marches du porche et se dirigèrent vers l’allée. Kayla conduisait une Kia Optima 2017. Elle ressemblait en tous points à la voiture typique d’une universitaire : propre, un bâton de rouge à lèvres sur la console, une bouteille d’eau à moitié vide et un chargeur de téléphone. À part ça, il n’y avait rien d’autre d’intéressant – en tout cas, rien qui pourrait leur permettre de savoir qui l’avait suivie ce soir-là.

Une fois qu’elles eurent terminé d’inspecter la voiture, Gates leur ouvrit la porte d’entrée. Il leur expliqua que Sandra lui avait donné les clés de la maison avant de quitter la ville, pour qu’il puisse y jeter un coup d’œil.

« Est-ce qu’elle pourrait être soupçonnée du meurtre ? » demanda Kate.

« Même si je pensais que ça pouvait être le cas – et je ne le pense pas – ça n’expliquerait pas la première victime. »

« C’était trois jours avant Kayla, c’est bien ça ? » demanda DeMarco.

« C’est exactement ça. Bien qu’il soit impossible d’être totalement certain qu’elle n’a rien à voir avec tout ça, j’ai interrogé chacune des personnes qui se trouvaient au bowling quand il a fermé. Pas une seule m’a dit y avoir vu Sandra Peterson. Une femme savait exactement de qui je voulais parler et elle a même trouvé scandaleux que je pose la question. De plus… je reviens sur ce que le médecin légiste a dit. Celui qui a étranglé Kayla Peterson était vraiment très fort. Et si vous finissez par rencontrer Sandra Peterson, vous verrez tout de suite que ça ne colle pas. Elle est vraiment famélique. Elle a perdu beaucoup de poids quand son mari est parti. Et pas en faisant de l’exercice. Elle a presque l’air de souffrir de malnutrition. »

Kate et DeMarco jetèrent un coup d’œil dans la chambre de Kayla. Elles y virent des vestiges de l’adolescente qu’elle avait été : des autocollants de Hannah Montana collés sur le côté de la commode et des traces plus claires aux endroits sur les murs où des posters avaient été accrochés. Elles trouvèrent deux sacs au pied du lit. L’un d’entre eux était visiblement destiné à ce dont elle allait avoir besoin pour le mariage. Il était rempli de jolis vêtements, de maquillage et de notes pour un discours. L’autre sac était beaucoup plus informel et contenait des vêtements, un livre de poche et un nécessaire de toilette. Mais rien qui puisse les aider dans leur enquête.

« Avez-vous parlé aux amies avec lesquelles elle est sortie le soir où elle a été assassinée ? » demanda DeMarco.

« À toutes, sauf une. Apparemment, elles étaient quatre en tout, en comptant Kayla. »

« J’aimerais leur parler, » dit DeMarco. Elle se tourna ensuite vers Kate, comme si elle cherchait son approbation. Kate se contenta de hocher légèrement la tête, mais elle apprécia le fait que DeMarco lui demande son avis.

« On est lundi après-midi, alors elles sont sûrement au travail. Je pourrais passer quelques coups de fil et leur demander de venir au commissariat. »

« Et pourquoi pas dans un bar ou dans une cafétéria ? » demanda DeMarco.

Gates eut l’air surpris, mais il hocha lentement la tête. « Oui, il y a bien l’un ou l’autre bar en ville. En fait, juste à côté. Je suis presque sûr que certaines de ces filles fréquentent l’un d’entre eux, Chez Esther. Je peux leur demander de vous y retrouver à dix-huit heures. »

« Assurez-vous de bien leur dire que ce n’est pas une option, » dit DeMarco. « Si elles ne viennent pas, on ira chez elles. »

Kate sourit. Ce n’était pas le chemin qu’elle aurait emprunté, mais il pouvait s’avérer efficace. Elle savait ce que DeMarco pensait. En général, quand on interrogeait des témoins en-dehors d’un commissariat ou du confort de leur maison, le flux de conversation avait tendance a être plus naturel. Mais Kate ne privilégiait pas cette approche, car la possibilité de distraction était trop grande. Mais c’était l’enquête de DeMarco et elle allait la laisser la mener à sa manière.

Ils sortirent tous les trois de la maison et au moment où ils arrivèrent à leur voiture respective, le shérif Gates était déjà au téléphone, occupé à organiser la réunion.

« Je me demande pourquoi il a laissé la mère partir comme ça, » dit DeMarco, en entrant en voiture.

« Elle vient juste de perdre sa fille. À moins qu’il y ait le moindre indice qui permette de la soupçonner, ça ne vaut pas la peine de lui faire vivre tout ça. De plus, elle n’a aucun ami, ni aucun membre de la famille dans le coin. Et la famille et les amis, c’est exactement ce dont elle a besoin en ce moment. »

DeMarco eut un petit rire. « Mon dieu, comme tu m’as manqué, Kate. Je commençais à ne plus prendre en compte les émotions des gens quand il s’agissait d’une enquête. »

« Ça arrive souvent, » dit Kate. « Après un moment, on commence par ne plus considérer les gens qu’on rencontre comme de vraies personnes. On a juste un puzzle à résoudre et ils ne sont que les éléments qui vont nous permettre de le faire. C’est une façon merdique de penser, mais ça arrive à tous les agents à un moment ou à un autre. »

« J’ai du mal à t’imaginer te comporter comme ça. »

Demande à Mélissa, pensa-t-elle. Elle te racontera comment j’ai pu faire passer mon travail avant toute autre chose.

En pensant à ça, des larmes lui vinrent aux yeux. Elle les essuya discrètement. C’était un autre rappel que lui lançait la vie. Oui, elle avait été une mère lamentable avec Mélissa, en faisant généralement passer son travail avant elle.

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Litres'teki yayın tarihi:
02 eylül 2020
Hacim:
242 s. 4 illüstrasyon
ISBN:
9781094306643
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