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Kitabı oku: «De l'origine des espèces», sayfa 5

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PRINCIPES DE SÉLECTION ANCIENNEMENT APPLIQUÉS ET LEURS EFFETS

Considérons maintenant; en quelques lignes, la formation graduelle de nos races domestiques, soit qu'elles dérivent d'une seule espèce, soit qu'elles procèdent de plusieurs espèces voisines. On peut attribuer quelques effets à l'action directe et définie des conditions extérieures d'existence, quelques autres aux habitudes, mais il faudrait être bien hardi pour expliquer, par de telles causes, les différences qui existent entre le cheval de trait et le cheval de course, entre le Limier et le Lévrier, entre le pigeon Messager et le pigeon Culbutant. Un des caractères les plus remarquables de nos races domestiques, c'est que nous voyons chez elles des adaptations qui ne contribuent en rien au bien-être de l'animal ou de la plante, mais simplement à l'avantage ou au caprice de l'homme. Certaines variations utiles à l'homme se sont probablement produites soudainement, d'autres par degrés; quelques naturalistes, par exemple, croient que le Chardon à foulon armé de crochets, que ne peut remplacer aucune machine, est tout simplement une variété du Dipsacus sauvage; or, cette transformation peut s'être manifestée dans un seul semis. Il en a été probablement ainsi pour le chien Tournebroche; on sait, tout au moins, que le mouton Ancon a surgi d'une manière subite. Mais il faut, si l'on compare le cheval de trait et le cheval de course, le dromadaire et le chameau, les diverses races de moutons adaptées soit aux plaines cultivées, soit aux pâturages des montagnes, et dont la laine, suivant la race, est appropriée tantôt à un usage, tantôt à un autre; si l'on compare les différentes races de chiens, dont chacune est utile à l'homme à des points de vue divers; si l'on compare le coq de combat, si enclin à la bataille, avec d'autres races si pacifiques, avec les pondeuses perpétuelles qui ne demandent jamais à couver, et avec le coq Bantam, si petit et si élégant; si l'on considère, enfin, cette légion de plantes agricoles et culinaires, les arbres qui encombrent nos vergers, les fleurs qui ornent nos jardins, les unes si utiles à l'homme en différentes saisons et pour tant d'usages divers, ou seulement si agréables à ses yeux, il faut chercher, je crois, quelque chose de plus qu'un simple effet de variabilité. Nous ne pouvons supposer, en effet, que toutes ces races ont été soudainement produites avec toute la perfection et toute l'utilité qu'elles ont aujourd'hui; nous savons même, dans bien des cas, qu'il n'en a pas été ainsi. Le pouvoir de sélection, d'accumulation, que possède l'homme, est la clef de ce problème; la nature fournit les variations successives, l'homme les accumule dans certaines directions qui lui sont utiles. Dans ce sens, on peut dire que l'homme crée à son profit des races utiles.

La grande valeur de ce principe de sélection n'est pas hypothétique. Il est certain que plusieurs de nos éleveurs les plus éminents ont, pendant le cours d'une seule vie d'homme, considérablement modifié leurs bestiaux et leurs moutons. Pour bien comprendre les résultats qu'ils ont obtenus, il est indispensable de lire quelques-uns des nombreux ouvrages qu'ils ont consacrés à ce sujet et de voir les animaux eux-mêmes. Les éleveurs considèrent ordinairement l'organisme d'un animal comme un élément plastique, qu'ils peuvent modifier presque à leur gré. Si je n'étais borné par l'espace, je pourrais citer, à ce sujet, de nombreux exemples empruntés à des autorités hautement compétentes. Youatt, qui, plus que tout autre peut-être, connaissait les travaux des agriculteurs et qui était lui-même un excellent juge en fait d'animaux, admet que le principe de la sélection «permet à l'agriculteur, non seulement de modifier le caractère de son troupeau, mais de le transformer entièrement. C'est la baguette magique au moyen de laquelle il peut appeler à la vie les formes et les modèles qui lui plaisent.» Lord Somerville dit, à propos de ce que les éleveurs ont fait pour le mouton: «Il semblerait qu'ils aient tracé l'esquisse d'une forme parfaite en soi, puis qu'ils lui ont donné l'existence.» En Saxe, on comprend si bien l'importance du principe de la sélection, relativement au mouton mérinos, qu'on en a fait une profession; on place le mouton sur une table et un connaisseur l'étudie comme il ferait d'un tableau; on répète cet examen trois fois par an, et chaque fois on marque et l'on classe les moutons de façon à choisir les plus parfaits pour la reproduction.

Le prix énorme attribué aux animaux dont la généalogie est irréprochable prouve les résultats que les éleveurs anglais ont déjà atteints; leurs produits sont expédiés dans presque toutes les parties du monde. Il ne faudrait pas croire que ces améliorations fussent ordinairement dues au croisement de différentes races; les meilleurs éleveurs condamnent absolument cette pratique, qu'ils n'emploient quelquefois que pour des sous- races étroitement alliées. Quand un croisement de ce genre a été fait, une sélection rigoureuse devient encore beaucoup plus indispensable que dans les cas ordinaires. Si la sélection consistait simplement à isoler quelques variétés distinctes et à les faire se reproduire, ce principe serait si évident, qu'à peine aurait-on à s'en occuper; mais la grande importance de la sélection consiste dans les effets considérables produits par l'accumulation dans une même direction, pendant des générations successives, de différences absolument inappréciables pour des yeux inexpérimentés, différences que, quant à moi, j'ai vainement essayé d'apprécier.

Pas un homme sur mille n'a la justesse de coup d'oeil et la sûreté de jugement nécessaires pour faire un habile éleveur. Un homme doué de ces qualités, qui consacre de longues années à l'étude de ce sujet, puis qui y voue son existence entière, en y apportant toute son énergie et une persévérance indomptable, réussira sans doute et pourra réaliser d'immenses progrès; mais le défaut d'une seule de ces qualités déterminera forcément l'insuccès. Peu de personnes s'imaginent combien il faut de capacités naturelles, combien il faut d'années de pratique pour faire un bon éleveur de pigeons.

Les horticulteurs suivent les mêmes principes; mais ici les variations sont souvent plus soudaines. Personne ne suppose que nos plus belles plantes sont le résultat d'une seule variation de la souche originelle. Nous savons qu'il en a été tout autrement dans bien des cas sur lesquels nous possédons des renseignements exacts. Ainsi, on peut citer comme exemple l'augmentation toujours croissante de la grosseur de la groseille à maquereau commune. Si l'on compare les fleurs actuelles avec des dessins faits il y a seulement vingt ou trente ans, on est frappé des améliorations de la plupart des produits du fleuriste. Quand une race de plantes est suffisamment fixée, les horticulteurs ne se donnent plus la peine de choisir les meilleurs plants, ils se contentent de visiter les plates-bandes pour arracher les plants qui dévient du type ordinaire. On pratique aussi cette sorte de sélection avec les animaux, car personne n'est assez négligent pour permettre aux sujets défectueux d'un troupeau de se reproduire.

Il est encore un autre moyen d'observer les effets accumulés de la sélection chez les plantes; on n'a, en effet, qu'à comparer, dans un parterre, la diversité des fleurs chez les différentes variétés d'une même espèce; dans un potager, la diversité des feuilles, des gousses, des tubercules, ou en général de la partie recherchée des plantes potagères, relativement aux fleurs des mêmes variétés; et, enfin, dans un verger, la diversité des fruits d'une même espèce, comparativement aux feuilles et aux fleurs de ces mêmes arbres. Remarquez combien diffèrent les feuilles du Chou et que de ressemblance dans la fleur; combien, au contraire, sont différentes les fleurs de la Pensée et combien les feuilles sont uniformes; combien les fruits des différentes espèces de Groseilliers diffèrent par la grosseur, la couleur, la forme et le degré de villosité, et combien les fleurs présentent peu de différence. Ce n'est pas que les variétés qui diffèrent beaucoup sur un point ne diffèrent pas du tout sur tous les autres, car je puis affirmer, après de longues et soigneuses observations, que cela n'arrive jamais ou presque jamais. La loi de la corrélation de croissance, dont il ne faut jamais oublier l'importance, entraîne presque toujours quelques différences; mais, en règle générale, on ne peut douter que la sélection continue de légères variations portant soit sur les feuilles, soit sur les fleurs, soit sur le fruits, ne produise des races différentes les unes des autres, plus particulièrement en l'un de ces organes.

On pourrait objecter que le principe de la sélection n'a été réduit en pratique que depuis trois quarts de siècle. Sans doute, on s'en est récemment beaucoup plus occupé, et on a publié de nombreux ouvrages à ce sujet; aussi les résultats ont-ils été, comme on devait s'y attendre, rapides et importants; mais il n'est pas vrai de dire que ce principe soit une découverte moderne. Je pourrais citer plusieurs ouvrages d'une haute antiquité prouvant qu'on reconnaissait, dès alors, l'importance de ce principe. Nous avons la preuve que, même pendant les périodes barbares qu'a traversées l'Angleterre, on importait souvent des animaux de choix, et des lois en défendaient l'exportation; on ordonnait la destruction des chevaux qui n'atteignaient pas une certaine taille; ce que l'on peut comparer au travail que font les horticulteurs lorsqu'ils éliminent, parmi les produits de leurs semis, toutes les plantes qui tendent à dévier du type régulier. Une ancienne encyclopédie chinoise formule nettement les principes de la sélection; certains auteurs classiques romains indiquent quelques règles précises; il résulte de certains passages de la Genèse que, dès cette antique période, on prêtait déjà quelque attention à la couleur des animaux domestiques. Encore aujourd'hui, les sauvages croisent quelquefois leurs chiens avec des espèces canines sauvages pour en améliorer la race; Pline atteste qu'on faisait de même autrefois. Les sauvages de l'Afrique méridionale appareillent leurs attelages de bétail d'après la couleur; les Esquimaux en agissent de même pour leurs attelages de chiens. Livingstone constate que les nègres de l'intérieur de l'Afrique, qui n'ont eu aucun rapport avec les Européens, évaluent à un haut prix les bonnes races domestiques. Sans doute, quelques- uns de ces faits ne témoignent pas d'une sélection directe; mais ils prouvent que, dès l'antiquité, l'élevage des animaux domestiques était l'objet de soins tout particuliers, et que les sauvages en font autant aujourd'hui. Il serait étrange, d'ailleurs, que, l'hérédité des bonnes qualités et des défauts étant si évidente, l'élevage n'eût pas de bonne heure attiré l'attention de l'homme.

SÉLECTION INCONSCIENTE

Les bons éleveurs modernes, qui poursuivent un but déterminé, cherchent, par une sélection méthodique, à créer de nouvelles lignées ou des sous-races supérieures à toutes celles qui existent dans le pays. Mais il est une autre sorte de sélection beaucoup plus importante au point de vue qui nous occupe, sélection qu'on pourrait appeler inconsciente; elle a pour mobile le désir que chacun éprouve de posséder et de faire reproduire les meilleurs individus de chaque espèce. Ainsi, quiconque veut avoir des chiens d'arrêt essaye naturellement de se procurer les meilleurs chiens qu'il peut; puis, il fait reproduire les meilleurs seulement, sans avoir le désir de modifier la race d'une manière permanente et sans même y songer. Toutefois, cette habitude, continuée pendant des siècles, finit par modifier et par améliorer une race quelle qu'elle soit; c'est d'ailleurs en suivant ce procédé, mais d'une façon plus méthodique, que Bakewell, Collins, etc., sont parvenus à modifier considérablement, pendant le cours de leur vie, les formes et les qualités de leur bétail. Des changements de cette nature, c'est-à-dire lents et insensibles, ne peuvent être appréciés qu'autant que d'anciennes mesures exactes ou des dessins faits avec soin peuvent servir de point de comparaison. Dans quelques cas, cependant, on retrouve dans des régions moins civilisées, où la race s'est moins améliorée, des individus de la même race peu modifiés, d'autres même qui n'ont subi aucune modification. Il y a lieu de croire que l'épagneul King-Charles a été assez fortement modifié de façon inconsciente, depuis l'époque où régnait le roi dont il porte le nom. Quelques autorités très compétentes sont convaincues que le chien couchant descend directement de l'épagneul, et que les modifications se sont produites très lentement. On sait que le chien d'arrêt anglais s'est considérablement modifié pendant le dernier siècle; on attribue, comme cause principale à ces changements, des croisements avec le chien courant. Mais ce qui importe ici, c'est que le changement s'est effectué inconsciemment, graduellement, et cependant avec tant d'efficacité que, bien que notre vieux chien d'arrêt espagnol vienne certainement d'Espagne, M. Borrow m'a dit n'avoir pas vu dans ce dernier pays un seul chien indigène semblable à notre chien d'arrêt actuel.

Le même procédé de sélection, joint à des soins particuliers, a transformé le cheval de course anglais et l'a amené à dépasser en vitesse et en taille les chevaux arabes dont il descend, si bien que ces derniers, d'après les règlements des courses de Goodwood, portent un poids moindre. Lord Spencer et d'autres ont démontré que le bétail anglais a augmenté en poids et en précocité, comparativement à l'ancien bétail. Si, à l'aide des données que nous fournissent les vieux traités, on compare l'état ancien et l'état actuel des pigeons Messagers et des pigeons Culbutants dans la Grande-Bretagne, dans l'Inde et en Perse, on peut encore retracer les phases par lesquelles les différentes races de pigeons ont successivement passé, et comment elles en sont venues à différer si prodigieusement du Biset.

Youatt cite un excellent exemple des effets obtenus au moyen de la sélection continue que l'on peut considérer comme inconsciente, par cette raison que les éleveurs ne pouvaient ni prévoir ni même désirer le résultat qui en a été la conséquence, c'est-à-dire la création de deux branches distinctes d'une même race. M. Buckley et M. Burgess possèdent deux troupeaux de moutons de Leicester, qui «descendent en droite ligne, depuis plus de cinquante ans, dit M. Youatt, d'une même souche que possédait M. Bakewell. Quiconque s'entend un peu à l'élevage ne peut supposer que le propriétaire de l'un ou l'autre troupeau ait jamais mélangé le pur sang de la race Bakewell, et, cependant, la différence qui existe actuellement entre ces deux troupeaux est si grande, qu'ils semblent composés de deux variétés tout à fait distinctes.»

S'il existe des peuples assez sauvages pour ne jamais songer à s'occuper de l'hérédité des caractères chez les descendants de leurs animaux domestiques, il se peut toutefois qu'un animal qui leur est particulièrement utile soit plus précieusement conservé pendant une famine, ou pendant les autres accidents auxquels les sauvages sont exposés, et que, par conséquent, cet animal de choix laisse plus de descendants que ses congénères inférieurs. Dans ce cas, il en résulte une sorte de sélection inconsciente. Les sauvages de la Terre de Feu eux-mêmes attachent une si grande valeur à leurs animaux domestiques, qu'ils préfèrent, en temps de disette, tuer et dévorer les vieilles femmes de la tribu, parce qu'ils les considèrent comme beaucoup moins utiles que leurs chiens.

Les mêmes procédés d'amélioration amènent des résultats analogues chez les plantes, en vertu de la conservation accidentelle des plus beaux individus, qu'ils soient ou non assez distincts pour que l'on puisse les classer, lorsqu'ils apparaissent, comme des variétés distinctes, et qu'ils soient ou non le résultat d'un croisement entre deux ou plusieurs espèces ou races. L'augmentation de la taille et de la beauté des variétés actuelles de la Pensée, de la Rose, du Délargonium, du Dahlia et d'autres plantes, comparées avec leur souche primitive ou même avec les anciennes variétés, indique clairement ces améliorations. Nul ne pourrait s'attendre à obtenir une Pensée ou un Dahlia de premier choix en semant la graine d'une plante sauvage. Nul ne pourrait espérer produire une poire fondante de premier ordre en semant le pépin d'une poire sauvage; peut-être pourrait-on obtenir ce résultat si l'on employait une pauvre semence croissant à l'état sauvage, mais provenant d'un arbre autrefois cultivé. Bien que la poire ait été cultivée pendant les temps classiques, elle n'était, s'il faut en croire Pline, qu'un fruit de qualité très inférieure. On peut voir, dans bien des ouvrages relatifs à l'horticulture, la surprise que ressentent les auteurs des résultats étonnants obtenus par les jardiniers, qui n'avaient à leur disposition que de bien pauvres matériaux; toutefois, le procédé est bien simple, et il a presque été appliqué de façon inconsciente pour en arriver au résultat final. Ce procédé consiste à cultiver toujours les meilleures variétés connues, à en semer les graines et, quand une variété un peu meilleure vient à se produire, à la cultiver préférablement à toute autre. Les jardiniers de l'époque gréco- latine, qui cultivaient les meilleures poires qu'ils pouvaient alors se procurer, s'imaginaient bien peu quels fruits délicieux nous mangerions un jour; quoi qu'il en soit, nous devons, sans aucun doute, ces excellents fruits à ce qu'ils ont naturellement choisi et conservé les meilleures variétés connues.

Ces modifications considérables effectuées lentement et accumulées de façon inconsciente expliquent, je le crois, ce fait bien connu que, dans un grand nombre de cas, il nous est impossible de distinguer et, par conséquent, de reconnaître les souches sauvages des plantes et des fleurs qui, depuis une époque reculée, ont été cultivées dans nos jardins. S'il a fallu des centaines, ou même des milliers d'années pour modifier la plupart de nos plantes et pour les améliorer de façon à ce qu'elles devinssent aussi utiles qu'elles le sont aujourd'hui pour l'homme, il est facile de comprendre comment il se fait que ni l'Australie, ni le cap de Bonne-Espérance, ni aucun autre pays habité par l'homme sauvage, ne nous ait fourni aucune plante digne d'être cultivée. Ces pays si riches en espèces doivent posséder, sans aucun doute, les types de plusieurs plantes utiles; mais ces plantes indigènes n'ont pas été améliorées par une sélection continue, et elles n'ont pas été amenées, par conséquent, à un état de perfection comparable à celui qu'ont atteint les plantes cultivées dans les pays les plus anciennement civilisés.

Quant aux animaux domestiques des peuples, sauvages, il ne faut pas oublier qu'ils ont presque toujours, au moins pendant quelques saisons, à chercher eux-mêmes leur nourriture. Or, dans deux pays très différents sous le rapport des conditions de la vie, des individus appartenant à une même espèce, mais ayant une constitution ou une conformation légèrement différentes, peuvent souvent beaucoup mieux réussir dans l'un que dans l'autre; il en résulte que, par un procédé de sélection naturelle que nous exposerons bientôt plus en détail, il peut se former deux sous- races. C'est peut-être là, ainsi que l'ont fait remarquer plusieurs auteurs, qu'il faut chercher l'explication du fait que, chez les sauvages, les animaux domestiques ont beaucoup plus le caractère d'espèces que les animaux domestiques des pays civilisés.

Si l'on tient suffisamment compte du rôle important qu'a joué le pouvoir sélectif de l'homme, on s'explique aisément que nos races domestiques, et par leur conformation, et par leurs habitudes, se soient si complètement adaptées à nos besoins et à nos caprices. Nous y trouvons, en outre, l'explication du caractère si fréquemment anormal de nos races domestiques et du fait que leurs différences extérieures sont si grandes, alors que les différences portant sur l'organisme sont relativement si légères. L'homme ne peut guère choisir que des déviations de conformation qui affectent l'extérieur; quant aux déviations internes, il ne pourrait les choisir qu'avec la plus grande difficulté, on peut même ajouter qu'il s'en inquiète fort peu. En outre, il ne peut exercer son pouvoir sélectif que sur des variations que la nature lui a tout d'abord fournies. Personne, par exemple, n'aurait jamais essayé de produire un pigeon Paon, avant d'avoir vu un pigeon dont la queue offrait un développement quelque peu inusité; personne n'aurait cherché à produire un pigeon Grosse-gorge, avant d'avoir remarqué une dilatation exceptionnelle du jabot chez un de ces oiseaux; or, plus une déviation accidentelle présente un caractère anormal ou bizarre, plus elle a de chances d'attirer l'attention de l'homme. Mais nous venons d'employer l'expression: essayer de produire un pigeon Paon; c'est là, je n'en doute pas, dans la plupart des cas, une expression absolument inexacte. L'homme qui, le premier, a choisi, pour le faire reproduire, un pigeon dont la queue était un peu plus développée que celle de ses congénères, ne s'est jamais imaginé ce que deviendraient les descendants de ce pigeon par suite d'une sélection longuement continuée, soit inconsciente, soit méthodique. Peut-être le pigeon, souche de tous les pigeons Paons, n'avait-il que quatorze plumes caudales un peu étalées, comme le pigeon Paon actuel de Java, ou comme quelques individus d'autres races distinctes, chez lesquels on a compté jusqu'à dix-sept plumes caudales. Peut-être le premier pigeon Grosse-gorge ne gonflait-il pas plus son jabot que ne le fait actuellement le Turbit quand il dilate la partie supérieure de son oesophage, habitude à laquelle les éleveurs ne prêtent aucune espèce d'attention, parce qu'elle n'est pas un des caractères de cette race.

Il ne faudrait pas croire, cependant, que, pour attirer l'attention de l'éleveur, la déviation de structure doive être très prononcée. L'éleveur, au contraire, remarque les différences les plus minimes, car il est dans la nature de chaque homme de priser toute nouveauté en sa possession, si insignifiante qu'elle soit. On ne saurait non plus juger de l'importance qu'on attribuait autrefois à quelques légères différences chez les individus de la même espèce, par l'importance qu'on leur attribue, aujourd'hui que les diverses races sont bien établies. On sait que de légères variations se présentent encore accidentellement chez les pigeons, mais on les rejette comme autant de défauts ou de déviations du type de perfection admis pour chaque race. L'oie commune n'a pas fourni de variétés bien accusées; aussi a-t-on dernièrement exposé comme des espèces distinctes, dans nos expositions de volailles, la race de Toulouse et la race commune, qui ne diffèrent que par la couleur, c'est-à-dire le plus fugace de tous les caractères.

Ces différentes raisons expliquent pourquoi nous ne savons rien ou presque rien sur l'origine ou sur l'histoire de nos races domestiques. Mais, en fait, peut-on soutenir qu'une race, ou un dialecte, ait une origine distincte? Un homme conserve et fait reproduire un individu qui présente quelque légère déviation de conformation; ou bien il apporte plus de soins qu'on ne le fait d'ordinaire pour apparier ensemble ses plus beaux sujets; ce faisant, il les améliore, et ces animaux perfectionnés se répandent lentement dans le voisinage. Ils n'ont pas encore un nom particulier; peu appréciés, leur histoire est négligée. Mais, si l'on continue à suivre ce procédé lent et graduel, et que, par conséquent, ces animaux s'améliorent de plus en plus, ils se répandent davantage, et on finit par les reconnaître pour une race distincte ayant quelque valeur; ils reçoivent alors un nom, probablement un nom de province. Dans les pays à demi civilisés, où les communications sont difficiles, une nouvelle race ne se répand que bien lentement. Les principaux caractères de la nouvelle race étant reconnus et appréciés à leur juste valeur, le principe de la sélection inconsciente, comme je l'ai appelée, aura toujours pour effet d'augmenter les traits caractéristiques de la race, quels qu'ils puissent être d'ailleurs, – sans doute à une époque plus particulièrement qu'à une autre, selon que la race nouvelle est ou non à la mode, – plus particulièrement aussi dans un pays que dans un autre, selon que les habitants sont plus ou moins civilisés. Mais, en tout cas, il est très peu probable que l'on conserve l'historique de changements si lents et si insensibles.

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
28 eylül 2017
Hacim:
870 s. 1 illüstrasyon
Telif hakkı:
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