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Kitabı oku: «David Copperfield – Tome I», sayfa 37

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La conversation prit ensuite une tournure plus mondaine. M. Micawber nous dit qu'il trouvait Camden-Town fort incommode, et que la première chose qu'il comptait faire quand ses annonces lui auraient procuré quelque chose de satisfaisant, c'était de déménager. Il parla d'une maison à l'extrémité occidentale d'Oxford-Street donnant sur Hyde-Park, et sur laquelle il avait toujours jeté les yeux, mais il ne pensait pas pouvoir s'y installer immédiatement, parce qu'il faudrait un grand train de maison. Il était probable, que pendant un certain temps, il serait obligé de se contenter de la partie supérieure d'une maison, au- dessus de quelque magasin respectable, dans Piccadilly, par exemple: la situation serait agréable pour mistress Micawber, et en construisant un balcon, ou en élevant la maison d'un étage, ou en faisant quelque autre arrangement de ce genre, il serait possible de s'y loger d'une manière commode et convenable pendant quelques années. Quoi qu'il pût lui arriver, et quelle que dût être sa demeure, nous pouvions compter, ajouta-t-il, qu'il y aurait toujours une chambre pour Traddles et un couvert pour moi. Nous exprimâmes notre reconnaissance de ses bontés, et il nous demanda pardon de s'être lancé dans des détails de ménage; c'était une disposition bien naturelle qu'il fallait excuser chez un homme à la veille d'entrer dans une vie nouvelle.

Mistress Micawber à ce moment tapa de nouveau à la muraille pour savoir si le thé était prêt, et interrompit ainsi notre conversation amicale. Elle nous versa le thé de la manière la plus aimable, et toutes les fois que je m'approchais d'elle pour apporter les tasses, ou pour faire circuler les tartines, elle me demandait tout bas si D. était blonde ou brune, si elle était grande ou petite, ou quelque détail de ce genre, et il me semble que cela ne me déplaisait pas. Après le thé, nous discutâmes une quantité de questions devant le feu, et mistress Micawber eut la bonté de nous chanter, d'une petite voix grêle (que je regardais autrefois, je m'en souviens, comme ce qu'on pouvait entendre de plus agréable), les ballades favorites du beau sergent blanc, et du petit Tafflin. M. Micawber nous dit que, lorsqu'il lui avait entendu chanter le Sergent blanc, la première fois qu'il l'avait vue sous le toit paternel, elle avait attiré son attention au plus haut point, mais que lorsqu'elle en était venue au petit Tafflin, il s'était juré à lui-même de posséder cette femme ou de mourir à la peine.

Il était à peu près dix heures et demie quand mistress Micawber se leva pour envelopper son bonnet dans le papier gris et remettre son chapeau. M. Micawber saisit le moment où Traddles endossait son paletot, pour me glisser une lettre dans la main, en me priant tout bas de la lire quand j'en aurais le temps. Je saisis, à mon tour, le moment où je tenais une bougie au-dessus de la rampe pour les éclairer, pendant que M. Micawber descendait le premier en conduisant mistress Micawber, et je retins Traddles qui les suivait déjà, le bonnet de cette dame à la main.

«Traddles, lui dis-je, M. Micawber n'a pas de mauvaises intentions, le pauvre homme, mais, si j'étais à votre place, je ne lui prêterais rien.

– Mon cher Copperfield, dit Traddles en souriant, je n'ai rien à prêter.

– Vous avez toujours votre nom, vous savez.

– Ah! vous appelez cela quelque chose à prêter? dit Traddles d'un air pensif.

– Certainement.

– Oh! dit Traddles, oui, c'est bien sûr. Je vous suis très- obligé, Copperfield, mais j'ai peur de le lui avoir déjà prêté.

– Pour ce billet qui est un placement sûr? demandais-je.

– Non, dit Traddles. Pas pour celui-là. C'est la première fois que j'en entends parler. Je pensais qu'il me proposerait peut-être de signer celui-là, en retournant à la maison. Le mien, c'est autre chose.

– J'espère qu'il n'y a pas de danger?

– J'espère que non, dit Traddles: je ne le crois pas, parce qu'il m'a dit l'autre jour qu'il y avait pourvu. C'est l'expression de M. Micawber: «J'y ai pourvu.»

M. Micawber levant les yeux à ce moment, je n'eus que le temps de répéter mes recommandations au pauvre Traddles, qui me remercia et descendit. Mais en regardant l'air de bonne humeur avec lequel il portait le bonnet et donnait le bras à mistress Micawber, j'avais grand'peur qu'il ne se laissât livrer, pieds et poings liés, aux gens d'affaires.

Je revins au coin de mon feu, et je réfléchissais moitié gaiement moitié sérieusement, sur le caractère de M Micawber et sur nos anciennes relations, quand j'entendis quelqu'un monter rapidement. Je crus d'abord que c'était Traddles qui venait chercher quelque objet oublié par mistress Micawber, mais à mesure que le pas approchait, je le reconnus mieux; le coeur me battait et le sang me montait au visage. C'était Steerforth.

Je n'oubliais jamais Agnès, et elle ne quittait jamais le sanctuaire (si je puis m'exprimer ainsi) qu'elle occupait dans mon esprit depuis le premier jour. Mais lorsqu'il entra, et que je le vis devant moi, me tendant la main, le nuage obscur qui l'enveloppait dans ma pensée se déchira pour faire place à une lumière brillante, et je me sentis honteux et confus d'avoir douté d'un ami si cher. Mon affection pour Agnès n'en souffrit point: je pensais toujours à elle comme à l'ange bienfaisant de ma vie; mes reproches ne s'adressaient qu'à moi, et non pas à elle; j'étais troublé de l'idée que j'avais fait injure à Steerforth, et j'aurais voulu l'expier, si j'avais su comment m'y prendre.

«Eh bien, Pâquerette, mon garçon, vous voilà muet! dit Steerforth avec enjouement, en me serrant la main de la façon la plus amicale. Est-ce que je vous surprends au milieu d'un autre festin, sybarite que vous êtes. Je crois en vérité que les étudiants de Doctors'-Commons sont les jeunes gens les plus dissipés de Londres; vous nous distancez joliment, nous autres, innocente jeunesse d'Oxford!» Il promenait gaiement ses regards animés autour de la chambre, et vint s'asseoir sur le canapé en face de moi, à la place que mistress Micawber venait de quitter, puis il se mit à tisonner.

«J'étais si étonné au premier abord, lui dis-je en lui souhaitant la bienvenue avec toute la cordialité dont j'étais capable, que je n'avais plus la force de vous dire bonjour, Steerforth.

– Eh bien! ma vue fait du bien aux yeux malades, comme disent les Écossais, répliqua Steerforth, et la vôtre produit le même effet, maintenant que vous êtes en pleine fleur, ma Pâquerette, comment allez-vous, monsieur Bacchanal?

– Très-bien, répliquai-je, et je vous assure que je ne fête pas le moins du monde une bacchanale ce soir, quoique j'avoue que j'ai donné à dîner à trois personnes.

– Que je viens de rencontrer dans la rue, faisant tout haut votre éloge, dit Steerforth. Quel est donc celui de vos amis qui était en pantalon collant?»

Je lui fis de mon mieux, en quelques mots, le portrait de M. Micawber, et il rit de tout son coeur, déclarant que c'était un homme à connaître, et qu'il entendait bien faire sa connaissance.

«Mais l'autre, lui dis-je à mon tour, notre autre ami; devinez qui c'est.

– Dieu le sait peut-être, dit Steerforth, mais non pas moi. Ce n'est pas un fâcheux, j'espère? Je me suis figuré qu'il avait un peu l'air ennuyeux!

– Traddles! dis-je d'un ton de triomphe.

– Qui ça? demanda Steerforth de son air insouciant.

– Est-ce que vous ne vous rappelez pas Traddles? Traddles, qui couchait dans la même chambre que nous à Salem-House?

– Ah! c'est lui, dit Steerforth en frappant avec les pincettes un morceau de charbon placé sur le sommet du feu? Est-il toujours aussi simple qu'autrefois? Où donc l'avez-vous déterré?»

Je fis de Traddles un éloge aussi pompeux que possible, car je sentais que Steerforth avait pour lui quelque dédain. Mais lui, écartant ce sujet avec un signe de tête et un sourire, se borna à remarquer qu'il ne serait pas fâché non plus de revoir notre ancien camarade, qui avait toujours été un drôle de corps, puis il me demanda si j'avais quelque chose à lui donner à manger. Pendant les intervalles de ce court dialogue qu'il soutenait avec une vivacité fébrile, il brisait les charbons avec les pincettes, d'un air contrarié. Je remarquai qu'il continuait, pendant que je tirais de mon armoire les débris du pâté de pigeons, et quelques autres restes du festin.

«Mais voilà un souper de roi, Pâquerette, s'écria-t-il, en sortant tout à coup de sa rêverie, et en s'asseyant près de la table. Je vais y faire honneur, car je viens de Yarmouth.

– Je croyais que vous étiez à Oxford, répliquai-je.

– Non, dit Steerforth, je viens de faire le métier de matelot, ce qui vaut mieux.

– Littimer est venu aujourd'hui ici pour demander si je vous avais vu, repris-je, et j'ai compris d'après ses paroles que vous étiez à Oxford, quoique je doive avouer, maintenant que j'y pense, qu'il ne m'en a pas dit un mot.

– Littimer est plus fou que je ne croyais, puisqu'il se donne la peine de me chercher, dit Steerforth, en versant gaiement un verre de vin, et en buvant à ma santé. Quant à vouloir deviner ce qu'il pense, vous serez plus habile que nous tous, Pâquerette, si vous en venez à bout.

– Vous avez bien raison, lui dis-je, en approchant ma chaise de la table… Ainsi donc vous avez été à Yarmouth, Steerforth, ajoutai-je dans mon impatience de savoir des nouvelles de nos connaissances. Y avez-vous passé longtemps?

– Non, répliqua-t-il; ce n'était qu'une petite fugue de huit jours à peu près.

– Et comment se porte-t-on là-bas? Naturellement la petite Émilie n'est pas encore mariée?

– Non, pas encore, cet événement doit se passer dans je ne sais combien de semaines ou de mois, l'un ou l'autre. Je ne les ai pas beaucoup vus. À propos, j'ai une lettre pour vous, ajouta-t-il en posant son couteau et sa fourchette qu'il avait maniés avec beaucoup d'ardeur, et en cherchant dans ses poches.

– De qui?

– De votre vieille bonne, répliqua-t-il en tirant quelques papiers de la poche de son gilet. J. Steerforth, esq., doit à l'hôtel de la Bonne-Volonté… Ce n'est pas cela. Patience, je vais le trouver. Le vieux… je ne sais comment… est malade, c'est à propos de cela qu'elle vous écrit, je suppose.

– Barkis, vous voulez dire?

– Oui! répondit-il, en fouillant toujours dans ses poches, et en examinant ce qu'il y avait dedans. Tout est fini pour le pauvre Barkis, j'en ai peur. J'ai vu un petit apothicaire ou médecin, je ne sais lequel, qui a eu l'honneur d'amener Votre Majesté dans ce monde. Il m'a donné les détails les plus savants: mais en résumé son opinion est que le voiturier ne tardera pas à faire son dernier voyage. Mettez la main dans la poche de devant de mon paletot qui est là sur cette chaise, je crois que vous trouverez la lettre. L'avez-vous?

– La voilà! dis-je.

– Ah! justement.»

La lettre était de Peggotty, elle était courte et un peu moins lisible qu'à l'ordinaire. Elle m'apprenait l'état désespéré de son mari, faisait allusion à ce qu'il était devenu un peu plus serré qu'autrefois, ce qu'elle regrettait surtout parce qu'elle ne pouvait pas lui donner à lui-même toutes les petites douceurs qu'elle voudrait. Elle ne disait pas un mot de ses fatigues et de ses veilles, mais elle ne tarissait pas en éloges sur son mari. Tout cela était dit avec une tendresse simple, honnête et naturelle, que je savais véritable, et la lettre finissait par ces mots: «tous mes respects à mon enfant chéri!» L'enfant chéri c'était moi.

Pendant que je déchiffrais cette épître, Steerforth continuait de manger et de boire.

«C'est dommage, dit-il, quand j'eus fini, mais le soleil se couche tous les jours, et il meurt des gens à toute minute, il ne faut donc pas se tourmenter d'une chose qui est le lot commun de tout le monde. Si nous nous arrêtions chaque fois que nous entendons frapper du pied à quelque porte cette voyageuse qui ne s'arrête pas elle-même, nous ne ferions pas grand bruit dans ce monde. Non! En avant! par les mauvais chemins, s'il n'y en a pas d'autres, par les beaux chemins si cela se peut, mais en avant! Sautons par- dessus tous les obstacles pour arriver au but!

– Quel but? demandai-je.

– Celui pour lequel on s'est mis en route, répliqua-t-il: en avant!»

Je me rappelle que, lorsqu'il s'arrêta pour me regarder, son verre à la main, et son beau visage un peu penché en arrière, je remarquai pour la première fois que, quoiqu'il fût bruni, et que la fraîcheur du vent de mer eût animé son teint, ses traits portaient des traces de l'ardeur passionnée qui lui était habituelle, lorsqu'il se jetait à corps perdu dans quelque nouvelle fantaisie. J'eus un moment l'idée de lui reprocher l'énergie désespérée avec laquelle il poursuivait l'objet qu'il avait en vue, par exemple cette manie de lutter avec la mauvaise mer, et de braver les orages; mais le premier sujet de notre conversation me revint à l'esprit, et je lui dis:

«Voyons! Steerforth, si votre esprit veut bien se maîtriser assez pour m'écouter un moment, je vous dirai…

– L'esprit qui me possède est un puissant esprit et il fera ce que vous voudrez,» répliqua-t-il en quittant la table pour se rasseoir au coin du feu.

– Eh! bien, je vais vous dire, Steerforth. J'ai envie d'aller voir ma vieille bonne. Non que je puisse lui être utile, ou lui rendre un véritable service, mais elle m'aime tant que ma visite lui fera autant de plaisir que si je pouvais lui être bon à quelque chose. Elle en sera si heureuse que ce sera une consolation et un secours pour elle. Ce n'est pas un grand effort à faire pour une amie aussi fidèle. N'iriez-vous pas y passer près d'elle une journée, si vous étiez à ma place?»

Il avait l'air pensif, et il réfléchit un moment avant de me répondre à voix basse:

«Mais, oui, allez-y; ça ne peut pas faire de mal.

– Vous en arrivez, dis-je, et il est inutile, je pense, de vous demander de venir avec moi.

– Parfaitement inutile, répliqua-t-il. Je vais coucher à Highgate ce soir. Je n'ai pas vu ma mère depuis longtemps, et cela me pèse sur la conscience, car c'est quelque chose que d'être aimé comme elle aime son enfant prodigue. Bah! quelle folie! Vous comptez partir demain, je pense, dit-il, en appuyant ses mains sur mes épaules, et en me tenant à distance.

– Oui, je crois.

– Eh bien, attendez seulement jusqu'à après-demain. Je voulais vous prier de passer quelques jours avec nous; j'étais venu tout exprès pour vous inviter, et voilà que vous vous envolez pour Yarmouth.

– Je vous conseille de parler des gens qui s'envolent, Steerforth, quand vous partez toujours comme un fou pour quelque expédition inconnue.»

Il me regarda un moment sans me parler, puis reprit, en me tenant toujours de même et en me secouant par les épaules.

«Allons! décidez-vous pour après-demain et passez la journée de demain avec nous! Qui sait quand nous nous reverrons! Allons! après-demain! J'ai besoin de vous pour m'épargner le tête-à-tête de Rosa Dartle, et pour nous séparer.

– Craignez-vous de trop vous aimer si je n'étais pas là? demandai-je.

– Oui, ou de nous détester, dit Steerforth en riant: l'un ou l'autre. Allons! c'est convenu? après-demain!

– Va pour après-demain, lui dis-je,» et il mit son paletot, alluma son cigare et se prépara à aller chez lui à pied. Voyant que telle était son intention, je mis aussi mon paletot sans allumer mon cigare, j'en avais eu assez d'une fois, et je l'accompagnai jusqu'à la grand'route qui n'était pas gaie le soir, dans ce temps-là. Il était fort en train tout le long du chemin, et quand nous nous séparâmes, je le regardai marcher d'un pas si léger et si ferme, que je me rappelai ce qu'il m'avait dit: «Sautons par-dessus tous les obstacles pour arriver au but!» et je me pris à souhaiter pour la première fois que le but qu'il poursuivait fut digne de lui.

J'étais rentré dans ma chambre et je me déshabillais, quand la lettre de M. Micawber tomba par terre: elle fit bien, car je l'avais oubliée. Je rompis le cachet et je lus ce qui suit: la lettre était datée d'une heure et demie avant le dîner. Je ne sais si j'ai dit que, toutes les fois que M. Micawber se trouvait dans une situation désespérée, il employait une sorte de phraséologie légale qu'il semblait regarder comme une manière de liquider ses affaires.

«Monsieur… car je n'ose pas dire, mon cher Copperfield.

«Il est nécessaire que vous sachiez que le soussigné est enfoncé. Vous remarquerez peut-être aujourd'hui qu'il aura fait quelques faibles efforts pour vous épargner une découverte prématurée de sa malheureuse position, mais toute espérance est évanouie de l'horizon, et le soussigné est enfoncé.

«La présente communication est écrite en présence (je ne peux pas dire dans la société), d'un individu plongé dans un état voisin de l'ivresse, et qui est employé par un prêteur sur gages. Cet individu est en possession légale de ces lieux, par défaut de payement de loyer. L'inventaire qu'il a dressé comprend non- seulement toutes les propriétés personnelles de tout genre appartenant au soussigné, locataire à l'année de cette demeure, mais aussi tous les effets et propriétés de M. Thomas Traddles, sous-locataire, membre de l'honorable corporation du Temple.

«Si une seule goutte d'amertume pouvait manquer à la coupe déjà débordante qui s'offre maintenant (comme le dit un écrivain immortel) aux lèvres du soussigné, elle se trouverait dans ce fait douloureux qu'un billet endossé en faveur du soussigné par le sus- nommé M. Thomas Traddles pour la somme de vingt-trois livres quatre shillings et neuf pence est échu et qu'il n'y a pas été pourvu. Elle se trouverait encore dans ce fait également douloureux, que les responsabilités vivantes qui pèsent sur le soussigné seront augmentées selon le cours de la nature, par une nouvelle et innocente victime dont on doit attendre la malheureuse arrivée à l'expiration d'une période qu'on peut exprimer en nombres ronds par six mois lunaires, à partir du moment présent.

«Après les détails ci-dessus, ce serait une oeuvre de surérogation que d'ajouter que les cendres et la poussière couvrent à tout jamais

«la

«tête

«de

«Wilkins Micawber.»

Pauvre Traddles! Je connaissais assez M. Micawber pour savoir qu'on était sûr de le voir se relever de ce coup, mais mon repos fut troublé cette nuit-là par le souvenir de Traddles, et de la fille du pasteur suffragant de Devonshire, père de dix enfants bien vivants. Quel dommage! une si bonne fille! toute prête, comme disait Traddles (ô! éloge de funeste présage), à l'attendre jusqu'à soixante ans ou mieux s'il le fallait.

CHAPITRE XXIX
Je vais revoir Steerforth chez lui

Je prévins M. Spenlow, ce matin-là, que j'avais besoin d'un petit congé, et comme je ne recevais pas de traitement, et que par conséquent je n'avais rien à craindre du terrible Jorkins, cela ne fit aucune difficulté. Je saisis cette occasion pour dire d'une voix étouffée et avec un brouillard devant les yeux, que j'espérais que miss Spenlow se portait bien, à quoi M. Spenlow répondit sans plus d'émotion que s'il parlait d'un être ordinaire, qu'il m'était fort obligé, qu'elle se portait très-bien.

Les clercs destinés à la situation aristocratique de procureurs étaient traités avec tant d'égards que j'étais presque complètement maître de mes actions. Pourtant, comme je ne tenais pas à arriver à Highgate avant une ou deux heures de l'après-midi, et que nous avions, pour ce jour-là, un petit procès d'excommunication, je passai une heure ou deux fort agréablement à la Cour, où j'assistai aux plaidoieries, en compagnie de M. Spenlow. L'affaire se présentait sous le titre de: «Le devoir du juge invoqué par Tipkins contre Bullook pour la correction salutaire de son âme.» Le procès prenait son origine dans la lutte de deux marguilliers. L'un d'eux était accusé d'avoir poussé l'autre contre une pompe; comme la poignée de cette pompe était placée dans une école, et que cette école était abritée par une des tourelles de l'église, cela faisait de leur rixe une affaire ecclésiastique. Le procès était amusant, et tout en me rendant à Highgate sur le siège de la diligence, je pensais à la Cour des Doctors'-Commons, et à l'anathème prononcé par M. Spenlow contre quiconque viendrait, en touchant à la Cour, bouleverser la nation.

Mistress Steerforth fut bien aise de me voir, et Rosa Dartle aussi. Je fus agréablement surpris de ne pas trouver là Littimer, remplacé par une petite servante à l'air modeste, qui portait un bonnet avec des rubans bleus, et dont j'aimais infiniment mieux rencontrer par hasard les yeux que ceux de cet homme respectable; je les trouvais moins embarrassants. Mais ce que je remarquai surtout après avoir été une demi-heure dans la maison, c'est l'attention et la vigilance avec laquelle miss Dartle me surveillait, et le soin avec lequel elle semblait comparer ma figure avec celle de Steerforth, puis celle de Steerforth avec la mienne, comme si elle s'attendait à saisir quelque regard d'intelligence entre nous. Toutes les fois que je la regardais, j'étais sûr de rencontrer ces yeux ardents et sombres, et ce regard pénétrant fixés sur mon visage, pour passer de là tout d'un coup à celui de Steerforth, quand elle ne nous regardait pas tous les deux à la fois. Et loin de renoncer à cette vigilance de lynx, quand elle vit que je l'avais remarquée, il me sembla au contraire que son regard en devint plus perçant et son attention plus marquée. J'avais beau me sentir innocent, en toute conscience, des torts dont elle pouvait me soupçonner, je n'en fuyais pas moins ces yeux étranges dont je ne pouvais supporter l'ardeur affamée.

Pendant toute la journée, on ne rencontrait qu'elle dans la maison. Si je causais avec Steerforth dans sa chambre, j'entendais sa robe qui frôlait la muraille dans le corridor. Si nous nous exercions sur la pelouse, derrière la maison, à nos anciens amusements, je voyais son visage apparaître à toutes les croisées successivement comme un feu follet, jusqu'à ce qu'elle eut fait choix d'une fenêtre propice pour mieux nous regarder. Une fois, pendant que nous nous promenions tous les quatre dans l'après- midi, elle me prit le bras et le serra de sa petite main maigre comme dans un étau, pour m'accaparer, laissant Steerforth et sa mère marcher quelques pas en avant, et lorsqu'ils ne purent plus l'entendre, elle me dit:

«Vous avez passé bien du temps sans venir ici, votre profession est-elle réellement si intéressante et si attachante qu'elle puisse absorber tout votre intérêt? Si je vous fais cette question, c'est que j'aime toujours à apprendre ce que je ne sais pas. Voyons, réellement?»

Je répliquai qu'en effet, j'aimais assez mon état, mais que je ne pouvais dire que j'en fusse exclusivement occupé.

«Oh! je suis bien aise de savoir cela, parce que, voyez-vous, j'aime beaucoup qu'on me rectifie quand je me trompe. Alors, vous voulez dire que c'est un peu aride, peut-être?

– Peut-être bien, répliquai-je, est-ce un peu aride.

– Oh! et voilà pourquoi vous avez besoin de repos, de changement, d'excitation et ainsi de suite? dit-elle. Ah! je vois bien! mais n'est-ce pas un peu… hein?.. pour lui; je ne parle pas de vous?»

Un regard qu'elle jeta rapidement sur l'endroit où Steerforth se promenait en donnant le bras à sa mère, me montra de qui elle parlait, mais ce fut tout ce que j'en pus comprendre. Et je n'ai pas le moindre doute que ma physionomie exprimait mon embarras.

«Est-ce que… je ne dis pas que ce soit… mais je voudrais savoir… est-ce qu'il n'est pas un peu absorbé? est-ce qu'il ne devient pas peut-être un peu plus inexact que de coutume dans ses visites à cette mère d'une tendresse aveugle… hein? Elle accompagna ces mots d'un autre regard rapide jeté sur Steerforth et sa mère, et d'un coup d'oeil qui semblait vouloir lire jusqu'au fond de mes pensées.

– Miss Dartle, répondis-je, ne croyez pas, je vous en prie…

– Moi, croire! dit-elle. Oh! Dieu du ciel! mais n'allez pas croire que je crois quelque chose. Je ne suis pas soupçonneuse. Je fais une question. Je n'avance pas d'opinion. Je voudrais former mon opinion d'après ce que vous me direz. Ainsi donc, cela n'est pas vrai? Eh bien! je suis bien aise de le savoir.

– Il n'est certainement pas vrai, lui dis-je un peu troublé, que je sois responsable des absences de Steerforth, que je ne savais même pas. Je conclus de vos paroles qu'il a été plus longtemps que de coutume sans venir chez sa mère, mais je ne l'ai revu moi-même qu'hier au soir après un très-long intervalle.

– Est-ce vrai?

– Très-vrai, miss Dartle.»

Pendant qu'elle me regardait en face, je la vis pâlir, son visage s'allonger, et la cicatrice de la vieille blessure ressortir si bien qu'elle se détachait profondément sur la lèvre défigurée, se prolongeait sur l'autre en dessous et descendait obliquement sur le bas de son visage. Je fus effrayé de ce spectacle et de l'éclat de ses yeux qui étaient fixés sur moi quand elle dit:

«Que fait-il, alors?»

Je répétai ses paroles plutôt en moi-même que pour être entendu d'elle, tant j'étais étonné.

«Que fait-il? dit-elle avec une ardeur dévorante. À quoi s'emploie-t-il cet homme, qui ne me regarde jamais sans que je lise dans ses yeux une fausseté impénétrable? Si vous êtes honorable et fidèle, je ne vous demande pas de trahir votre ami, je vous demande seulement de me dire si c'est la colère, ou la haine, ou l'orgueil, ou la turbulence de sa nature, ou quelque étrange fantaisie, ou bien l'amour, ou n'importe quoi qui le possède pour le moment?

– Miss Dartle, répondis-je, que voulez-vous que je vous dise, pour bien vous persuader que je ne sais rien de plus de Steerforth que je n'en savais quand je suis venu ici pour la première fois? Je ne devine rien. Je crois fermement qu'il n'y a rien. Je ne comprends même pas ce que vous voulez me dire.»

Pendant qu'elle me regardait encore fixement, un mouvement convulsif, que je ne pouvais séparer dans mon esprit d'une idée de souffrance, vint agiter cette terrible créature. Le coin de sa lèvre se releva comme pour exprimer le dédain ou une pitié méprisante. Elle mit précipitamment sa main sur sa bouche, cette main que j'avais souvent comparée dans mes pensées à la porcelaine la plus transparente, tant elle était mince et délicate, quand elle la portait devant ses yeux pour abriter son visage de l'ardeur du feu; puis elle me dit vivement, d'un accent ému et passionné:

«Je vous promets le secret là-dessus!»

Et elle ne dit pas un mot de plus.

Mistress Steerforth n'avait jamais été plus heureuse de la société de son fils, car justement Steerforth n'avait jamais été plus aimable ni plus respectueux avec elle. J'éprouvais un vif plaisir à les voir ensemble, non-seulement à cause de leur affection mutuelle, mais à cause aussi de la ressemblance frappante qui existait entre eux, si ce n'est que l'influence de l'âge et du sexe remplaçait chez mistress Steerforth, par une dignité pleine de grâce, la hauteur ou l'ardente impétuosité de son fils. Je pensais plus d'une fois qu'il était bien heureux qu'il ne se fût jamais élevé entre eux une cause sérieuse de division, car ces deux natures, ou plutôt ces deux nuances de la même nature auraient pu être plus difficiles à réconcilier que les caractères les plus opposés du monde. Je suis obligé d'avouer que cette idée ne me venait pas de moi-même: ce n'est pas à mon discernement qu'il faut en faire honneur; je la devais à quelques mots de révélation de Rosa Dartle.

Nous étions à dîner, lorsqu'elle nous fit cette question:

«Oh! dites-moi, je vous en prie, les uns ou les autres, quelque chose qui m'a préoccupée toute la soirée et que je voudrais savoir?

– Qu'est-ce que vous voudriez savoir, Rosa? demanda mistress Steerforth. Je vous en prie, Rosa, ne soyez pas si mystérieuse.

– Mystérieuse! s'écria-t-elle. Oh! vraiment! Est-ce que vous me trouvez mystérieuse?

– Est-ce que je ne passe pas ma vie à vous conjurer, dit mistress Steerforth, de vous expliquer ouvertement, naturellement?

– Ah! alors je ne suis donc pas naturelle? répliqua-t-elle, eh bien! je vous en prie, ayez un peu d'indulgence, parce que je ne fais de question que pour m'instruire. On ne se connaît jamais bien soi-même.

– C'est une habitude qui est devenue chez vous une seconde nature, dit mistress Steerforth sans donner d'ailleurs le moindre signe de mécontentement; mais je me rappelle et il me semble que vous devez vous rappeler aussi le temps où vos manières étaient différentes, Rosa, où vous aviez moins de dissimulation et plus de confiance.

– Oh! certainement, vous avez raison, répliqua-t-elle, et voilà comment les mauvaises habitudes deviennent invétérées! Vraiment! moins de dissimulation et plus de confiance! Comment se fait-il que j'aie changé insensiblement? voilà ce que je me demande. C'est bien extraordinaire, mais c'est égal, il faut que je tâche de retrouver mes manières d'autrefois.

– Je le voudrais bien, dit mistress Steerforth en souriant.

– Oh! j'y arriverai, je vous assure! répondit-elle. J'apprendrai la franchise, voyons… de qui… de James!

– Vous ne pourriez apprendre la franchise à meilleure école, Rosa! dit mistress Steerforth un peu vivement, car tout ce que Rosa Dartle disait avait un air d'ironie qui perçait au travers de sa simplicité affectée. Pour cela j'en suis bien sûre, dit-elle avec une ferveur inaccoutumée. Si je suis sûre de quelque chose au monde, vous savez que c'est de cela.»

Mistress Steerforth me parut regretter son petit mouvement de vivacité, car elle lui dit bientôt avec bonté:

«Eh bien! ma chère Rosa, avec tout cela vous ne nous avez pas dit le sujet de vos préoccupations?

– Le sujet de mes préoccupations? répliqua-t-elle avec une froideur impatientante. Oh! je me demandais seulement si des gens dont la constitution morale se ressemble… Est-ce l'expression?

– C'est une expression qui en vaut bien une autre, dit Steerforth.

– Merci… Si des gens dont la constitution morale se ressemble se trouvaient plus en danger que d'autres, dans le cas où une cause sérieuse de division se présenterait entre eux, d'être séparés par un ressentiment profond et durable.

– Oui, certainement, dit Steerforth.

– Vraiment? répliqua-t-elle, mais voyons, par exemple, on peut supposer les choses les plus improbables… en supposant que vous eussiez avec votre mère une sérieuse querelle?

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
28 eylül 2017
Hacim:
690 s. 1 illüstrasyon
Tercüman:
Telif hakkı:
Public Domain
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