Kitabı oku: «Nous Sommes De Retour», sayfa 4
Vaisseau spatial Théos - Analyse des données
Pétri était encore plongé dans lâanalyse de la sonde quand Atzakis, revenant dans la cabine, dit à lâintention de son ami :
â Ils nous donneront des nouvelles.
â Ce qui veut dire : débrouillez-vous tout seuls, commenta amèrement Pétri.
â Plus ou moins comme dâhabitude, non ? répondit Atzakis, en tapant vigoureusement sur lâépaule de son compagnon de voyage.
â Quâest-ce que tu peux me dire de ce tas de ferraille ?
â à part le fait quâil a vraiment failli nous rayer le vernis de la coque extérieure, je peux te confirmer, avec une certitude absolue, quâaucun message nâa été transmis par notre ami à trois pales. La sonde semblerait avoir été envoyée dans le seul but dâanalyser et dâétudier les corps célestes. Une espèce de voyageur solitaire de lâespace, qui enregistre des données et les transmet régulièrement à sa base, et il montra le détail de lâantenne dans lâhologramme qui flottait dans la pièce.
â Nous lui sommes probablement passés trop vite à côté pour quâil puisse avoir enregistré notre présence, hasarda Atzakis.
â Il nây a pas que ça, mon vieux. Ses instruments de bord sont programmés pour analyser des objets à une distance de centaines de milliers de kilomètres et nous, nous sommes passés si près que, si nous nâétions pas dans le vide, le déplacement dâair le ferait encore tourner comme une toupie.
â Et maintenant que nous sommes plus loin, tu penses quâil pourrait enregistrer notre présence ?
â Je ne crois pas. Nous sommes vraiment trop petits et trop rapides pour faire partie de ses « centres dâintérêts ».
â Bien, sâexclama Atzakis. Enfin une bonne nouvelle, me semble-t-il.
â Jâai essayé de faire une analyse de la méthode de transmission des données utilisée par la sonde, reprit Pétri. Il semble quâelle ne soit pas équipée dâune technologie par « vortex de lumière » comme la nôtre, mais quâelle utilise encore un vieux système de modulation de fréquence.
â Ce nâest pas celui quâutilisaient nos prédécesseurs avant la Grande Révolution15 ? demanda Atzakis.
â Exact. Ãa nâétait pas très efficace, mais ça nous a quand même permis dâéchanger pendant très longtemps des informations sur toute la planète, et ça a contribué à nous faire arriver là où nous en sommes maintenant.
Atzakis sâassit sur le fauteuil du poste de commande, se mordilla lâindex un instant, puis dit :
â Si câest le système de communication actuellement utilisé sur la Terre, nous pourrions peut-être capter une de leurs transmissions.
â Oui, et peut-être même un bon film porno, commenta Pétri, faisant pointer légèrement sa langue à gauche de sa bouche.
â Arrête avec tes bêtises. Pourquoi nâessaies-tu pas plutôt de réadapter notre système de communication secondaire à cette technologie ? Je voudrais arriver là -bas le plus informé possible.
â Jâai compris. Dâinnombrables heures de travail mâattendent dans ce minuscule compartiment.
â Ãa te dirait de manger quelque chose avant ? proposa Atzakis en anticipant la demande de son ami, dont il imaginait bien quâelle allait suivre immédiatement.
â Câest la première chose sensée que je tâentends dire aujourdâhui, répondit Pétri. Toute cette agitation mâa donné un appétit certain.
â Dâaccord, on fait une pause, mais câest moi qui choisit ce quâon mange. Le foie de Nebir que tu as voulu hier est resté si longtemps dans mon pauvre estomac quâil semblait y avoir pris racine.
Une dizaine de minutes après, alors que les deux compagnons de voyage finissaient leur repas, sur Terre, au Centre de Contrôle des Missions de la NASA, un jeune ingénieur relevait une étrange variation de trajectoire de la sonde quâil contrôlait.
â Chef, dit-il dans le micro relié à son casque, à un centimètre environ de sa bouche, je crois que nous avons un problème.
â Quel genre de problème ? se hâta de demander lâingénieur responsable de la mission.
â Il semble que Juno, pour une raison encore inconnue, ait subi une légère variation de sa trajectoire programmée.
â Une variation ? Et de combien ? Mais due à quoi ?
Il en avait déjà des sueurs froides. Le coût de cette mission était exorbitant et il fallait que tout marche comme prévu.
â Je suis en train dâanalyser les données. La télémétrie indique un déplacement de 0,01 degré sans aucune raison apparente. Tout semble marcher convenablement.
â Elle pourrait avoir été touchée par un fragment de roche, hasarda lâingénieur le plus âgé. Dans le fond, la ceinture dâastéroïdes nâest pas si loin.
â Juno est presque localisée sur lâorbite de Jupiter, et il ne devrait pas y en avoir, assura le jeune homme, avec beaucoup de tact.
â Et alors quâest ce qui sâest passé ? Il doit forcément y avoir un dysfonctionnement quelque part.
Il réfléchit une seconde, puis ordonna :
â Je veux un double contrôle sur tous les instruments de bord. Les résultats dans cinq minutes sur mon ordinateur, et il coupa la communication.
Le jeune ingénieur se rendit alors compte de la responsabilité qui lui avait était confiée. Il regarda ses mains : elles tremblaient légèrement. Il décida de passer outre. Il appela son collègue pour quâil exécute un check-up sélectif de la sonde et croisa les doigts. Les ordinateurs commencèrent à effectuer en séquence tous les contrôles programmés et, après quelques minutes, les résultats de lâanalyse apparurent sur son écran :
Check-up terminé. Tous les instruments sont opérationnels.
â Tout a lâair ok, commenta le collègue.
â Et alors, quâest-ce qui sâest passé, bon Dieu ? Si on ne le découvre pas dans les deux minutes qui viennent, le chef va nous passer un savon à tous les deux, et il commença à jouer fébrilement avec les commandes sur le clavier quâil avait devant lui.
Rien de rien. Tout fonctionne parfaitement.
Il devait absolument inventer quelque chose, et il devait le faire vite. Il commença à tambouriner de ses doigts sur son bureau. Il continua une dizaine de secondes, puis décida de faire appel à la première règle non écrite du manuel de comportement sur son lieu de travail : ne jamais contredire son chef.
Il ouvrit son micro et dit dâune traite :
â Chef, vous aviez raison. Câest bien un petit astéroïde troyen qui a fait dévier la sonde. Heureusement, il ne lâa pas touchée directement, mais il est passé très près. De toute évidence, la masse de lâastéroïde a créé une petite attraction gravitationnelle sur notre Juno, provoquant ainsi la légère variation de trajectoire ; je vous envoie les données. Et il retint son souffle.
Après quelques interminables instants, la voix orgueilleuse de son chef lui parvint dans le casque.
â Jâen était sûr mon garçon, mon instinct de vieux loup ne me trompe pas.
Puis il ajouta :
â Veillez à activer les moteurs de la sonde et à en corriger la trajectoire. Je ne tolèrerai aucune erreur et il coupa la communication.
Il reprit une seconde après en disant :
â Excellent travail, les gars.
Le jeune ingénieur se rendit alors compte que le sang avait recommencé à circuler dans son corps. Son cÅur battait si fort quâil en entendait les pulsations contre ses oreilles. Tout compte fait, ça pouvait aussi sâêtre passé comme ça. Il regarda son collègue et, levant le pouce, lui fit signe que tout allait bien. Lâautre lui répondit en clignant de lâÅil. Pour cette fois, il sâen était sortis.
Nassiriya â Après le dîner
Le système dâenregistrement émit un double bip et se ralluma. à lâintérieur de la voiture, la voix dâÃlisa sortit à nouveau du petit haut-parleur :
« Je pense que câest lâheure dây aller, Jack. Je dois me lever très tôt demain pour continuer les fouilles.
â Dâaccord, répondit le colonel. Je vais remercier le chef et on y va tout de suite après. »
â Putain de merde, sâécria le maigre. à cause de toi, on a raté le meilleur.
â Et allez, je ne lâai pas fait exprès, se justifia le gros. On pourra toujours dire quâil y a eu un dysfonctionnement du système et quâil y a une partie de la discussion que nous nâavons pas pu enregistrer.
â Câest toujours moi qui dois te sortir de la mouise, fit lâautre.
â Je vais me faire pardonner. Jâai déjà un plan pour mettre la main sur la tablette de notre cher Professeur. Il sâattrapa le nez entre le pouce et lâindex, puis dit :
â Nous nous introduirons cette nuit dans sa chambre et nous copierons toutes les données sans quâelle sâen aperçoive.
â Et quâest-ce quâon fait pour quâelle ne se réveille pas, on lui chante une berceuse ?
â Ne tâinquiète pas, compère. Jâai encore des as dans ma manche, et il lui fit un clin dâÅil.
Pendant ce temps, dans le restaurant, Jack et Ãlisa se préparaient à sortir. Le colonel alluma sa radio portable et contacta lâescorte :
â Nous allons sortir.
â Tout est calme, ici, Colonel, répondit une voix dans son oreillette.
Le colonel ouvrit avec prudence la porte du restaurant et observa attentivement lâextérieur. Debout, près de la voiture, se tenait encore le militaire qui avait accompagné Ãlisa.
â Tu peux y aller, mon garçon, ordonna le colonel. Câest moi qui raccompagne le Professeur.
Le soldat se mit au garde-à -vous, salua militairement et, prononçant quelques mots dans sa radio, disparut dans la nuit.
â Ãa a été une soirée magnifique, Jack, dit Ãlisa en sortant. Elle respira profondément lâair frais de la nuit et ajouta :
â Ãa faisait vraiment longtemps que je ne nâavais pas passé un aussi bon moment. Encore merci. Et elle arbora à nouveau un de ses merveilleux sourires.
â Viens, dans ce secteur ce nâest encore pas très sûr de rester à lâextérieur.
Sur ces mots, il ouvrit la portière et lâaida à monter.
Le colonel au volant, la grande voiture sombre quitta rapidement les lieux en laissant derrière elle un gros nuage de poussière.
â Moi aussi je me suis senti très bien. Je nâaurais jamais imaginé quâune soirée avec un « savant professeur » puisse être si agréable.
â Savante ? Câest ça que tu penses de moi ? Et elle se détourna de lui, feignant la colère.
â Savante oui, mais aussi très sympathique, intelligente et vraiment sexy.
Elle regardait dehors, et il en profita pour lui caresser doucement les cheveux sur la nuque.
Ce contact lui procura une cascade dâagréables frissons dans le dos. Elle ne pouvait pas céder si vite. Mais son excitation allait croissant. Elle décida de se taire et de profiter de cet agréable et léger massage. Jack, encouragé par lâabsence de réactions à son geste, continua à caresser ses cheveux longs. Soudain, il commença à faire glisser sa main, dâabord sur son épaule, puis sur son bras, puis de plus en plus bas, jusquâà lui effleurer doucement les doigts. Elle, toujours tournée vers la fenêtre, prit sa main et la serra sans retenue. Câétait une main grande et forte. Ce contact lui donnait une grande assurance.
Non loin de là , une autre voiture sombre suivait les deux passagers, essayant de capter dâautres propos intéressants.
â Je crois que les dix dollars sont en train de changer de main, mon vieux, dit le gros. Il la raccompagne à lâhôtel, elle le fait monter pour boire quelque chose et le tour est joué.
â Tu peux prier pour que ça ne finisse pas comme ça, sinon, jâaimerais bien savoir comment on va faire pour copier les données de lâordinateur.
â La vache, je nây avais pas pensé.
â Tu ne penses jamais à rien dâautre que ce qui finit dans ton estomac sans fond.
â Allez, ne te laisse pas trop distancer, dit le gros, en ignorant la provocation. Je ne voudrais pas perdre le signal une nouvelle fois.
Ils restèrent un peu main dans la main, sans rien dire. Ils avaient tous deux le regard fixe, au-delà du pare-brise. Lâhôtel approchait, et Jack se sentait très maladroit. Ce nâétait évidemment pas la première fois quâil sortait avec une fille, mais ce soir-là , il sentit resurgir toute la timidité qui lâavait torturé pendant sa jeunesse, et quâil pensait avoir dépassée. Ce contact si prolongé lâavait comme paralysé. Il aurait peut-être dû dire quelque chose pour rompre ce silence gênant, mais il craignait que le moindre mot puisse gâcher ce moment magique, et il décida de se taire.
Il remercia mentalement la boîte automatique de la voiture qui lui avait permis de ne pas lâcher la main dâÃlisa pour passer les vitesses, et continua à conduire dans la nuit.
Ãlisa, de son côté, se rappelait tous les « hommes de sa vie » présumés, lâun après lâautre. Plusieurs histoires, beaucoup de rêves, de projets, de joie et de bonheur, mais à chaque fois, à la fin, beaucoup de déception, dâamertume et de douleur. Câétait comme si le destin avait déjà tout décidé pour elle. La voie qui sâouvrait à elle, sans aucun doute riche en satisfactions et succès sur le plan professionnel, ne semblait pas prévoir qui que ce soit à ses côtés pour lâaccompagner. Et maintenant elle était là , dans un pays étranger, voyageant dans la nuit, sa main dans la main dâun homme que, jusquâà la veille, elle considérait comme un obstacle à ses plans et qui, maintenant, lui inspirait une grande tendresse et beaucoup dâaffection. Plus dâune fois, elle se demanda ce quâelle devait faire.
â Tout va bien ? demanda Jack, inquiet, voyant ses yeux devenir de plus en plus brillants.
â Oui, merci, Jack. Câest juste un moment de tristesse. Ãa va passer.
â Câest de ma faute ? sâempressa-t-il de lui demander. Jâai dit ou fait quelque chose qui ne va pas ?
â Non, au contraire, répondit-elle aussitôt dâune petite voix douce, et elle ajouta :
â Reste près de moi, sâil te plaît.
â Hé, je suis là . Ne tâinquiète pas. Je nâaccepterai jamais quâon te fasse du mal, dâaccord ?
â Merci, merci infiniment, dit Ãlisa, pendant quâelle tentait dâessuyer les larmes qui glissaient lentement sur ses joues. Tu es adorable.
Jack resta silencieux, et il lui serra la main encore plus fort.
Lâenseigne de lâhôtel apparut au bout de la rue, quâils parcoururent sans rien dire. Puis le colonel ralentit et arrêta la voiture juste devant lâentrée. Ils se regardèrent intensément. Pendant un long moment, aucun dâeux nâosa parler. Jack savait quâil devait faire le premier pas, mais Ãlisa le précéda.
â Câest maintenant que tu devrais me dire que la soirée a été splendide, que je suis magnifique, et moi je tâinviterais à monter pour boire quelque chose.
â Oui, lâusage lâimposerait, commenta Jack, un peu dérouté par ces mots. Câest ce que je ferais si tu étais comme les autres, mais ce nâest pas ce que je pense.
Il reprit son souffle et il continua.
â Je pense que tu es une personne très particulière et que cette soirée passée ensemble mâa donné lâoccasion de mieux te connaître, et de découvrir beaucoup de choses que je nâaurais jamais pensé trouver chez une « archéologue ».
â Je prends ça comme un compliment, dit-elle, essayant de dédramatiser un peu.
â Derrière cette armure de femme forte et indestructible, je crois que se cache une petite créature tendre et effrayée. Tu es une fille très douce, et dâune sensibilité unique.
Il allait peut-être regretter ce quâil allait dire, mais il fit appel à son courage et continua.
â Franchement, une nuit de sexe à archiver, comme tant dâautres, absolument inutiles, et qui, le matin suivant, ne te laissent rien quâun immense vide, ça ne mâintéresse pas. Je voudrais plus avec toi. Tu mâas toujours beaucoup plu, je lâavoue.
Il ne pouvait plus sâarrêter, maintenant. Il lui prit les deux mains, les serra et poursuivit.
â Depuis que je tâai rencontrée dans mon bureau la première fois, jâai réalisé quâil y avait quelque chose de spécial chez toi. Au départ, jâétais évidemment attiré par ta beauté, mais ensuite ta voix, ta façon de parler, tes gestes, ta façon de marcher, ton sourire...
Il fit une brève pause avant dâajouter :
â Ton charme mâa fasciné. Tu as volé mon cÅur. Je crois que je ne pourrais plus penser à une vie sans toi et ce nâest absolument pas la conclusion de cette soirée qui pourra me faire changer dâavis.
Ãlisa, qui ne sâattendait pas du tout à une déclaration de ce genre, resta bouche bée un moment ; puis, le regardant dans les yeux, elle sâapprocha lentement de lui. Elle hésita un instant, puis lâembrassa.
Ce fut un baiser long et intense. Des émotions anciennes et nouvelles ré-affleuraient en eux. Soudain, Ãlisa se détacha de lui et, restant tout près, lui dit :
â Merci pour ces mots, Jack. Moi non plus je nâaurais pas voulu que notre rencontre se termine avec une minable nuit de sexe. Cette soirée mâa permis de découvrir quelque chose de plus de toi et dâapprécier le genre dâhomme que tu es. Moi non plus je nâaurais jamais pensé trouver derrière un « colonel » revêche une personne si tendre et si sensible. Je dois tâavouer que depuis des années je nâavais plus senti mon cÅur battre aussi fort. Je ne suis plus une gamine, je sais, mais je ne voudrais pas tout gâcher en te faisant monter maintenant.
Elle fit une longue pause, puis ajouta :
â Je voudrais vraiment te revoir.
Elle lâembrassa à nouveau, descendit de la voiture et entra en courant dans lâhôtel. Elle craignait, en se retournant, ne pas pouvoir respecter ce quâelle venait de dire.
Jack la suivit du regard jusquâà ce quâelle disparaisse derrière la porte à tambour de lâhôtel. Il resta immobile, à regarder les pales tourner jusquâà leur arrêt complet. Alors, il posa un dernier regard vers lâenseigne tremblante, puis appuya à fond sur la pédale de lâaccélérateur et, dans un crissement aigu de pneus, il disparut dans la nuit.
Les deux personnages louches qui suivaient le couple garèrent leur voiture à lâarrière de lâhôtel en faisant très attention de ne pas se faire remarquer. De là , ils pouvaient voir la fenêtre de la chambre dâÃlisa qui, moins dâune minute après, sâillumina.
â Elle est rentrée, et elle est seule, dit le gros.
Le maigre sâempressa de rappeler à lâautre quâil avait perdu le pari.
â Lâche tes dollars, mon cher, et il frotta lâun contre lâautre pouce et index.
â Eh bien, je me serais attendu à tout sauf à ce que ça finisse comme ça, répondit le gros. Notre cher colonel a vraiment lâair dâavoir un gros béguin.
â Oui, et elle aussi a lâair dâêtre bien mûre.
â Quel « beau petit couple », commenta le gros avec son rire habituel. Maintenant il faut quâon attende que la petite poulette se mette au lit ; après on se faufile dans sa chambre et on copie toutes les données de sa tablette.
Il descendit de la voiture et ajouta :
â En attendant, je prépare le matériel ; toi, surveille si elle éteint la lumière.
Ãlisa était tourmentée par mille pensées. Avait-elle bien fait de le quitter comme ça ? Comment le prendrait-il ? Aurait-il encore eu envie de la revoir ? Au fond, câétait lui qui avait proposé de différer. Jack lui avait donné là une vraie preuve de sérieux. Le sentiment quâil avait exprimé avec tous ces mots merveilleux était-il vraiment sincère, ou nâétait-ce quâune stratégie pour la faire tomber dans un piège quâil avait habilement ourdi ? Elle nâaurait pas supporté une nouvelle déception amoureuse, dâautres douleurs et dâautres souffrances. Elle décida de ne pas y penser pour lâinstant. Quoi quâil en soit, elle avait atteint le but quâelle sâétait fixé : le colonel lui avait accordé deux semaines de plus pour achever ses recherches. Le reste nâétait que « perspectives » et elle avait désormais appris quâil ne fallait pas se faire trop dâillusions. Elle ne pouvait pas se permettre de subir une nouvelle déconvenue. Cette fois-ci, elle ne sâen serait pas relevée.
Elle se déshabilla et elle se jeta sur le lit la tête la première. Lâalcool lâavait hébétée. Son plus grand désir, à ce moment, était de faire un bon somme. Elle éteignit la lumière et sâendormit presque aussitôt.
Tandis quâil conduisait vers la base, Jack pensait plus ou moins aux mêmes choses. Lâavait-il déçue ? Aurait-elle vraiment eu envie de le revoir ? Quoi quâil en soit, il était sûr dâavoir fait belle figure en glissant, de façon aussi élégante, sur la possibilité de coucher ensemble. Peu en auraient fait de même, et il était sûr quâelle avait beaucoup apprécié. Dans le fond, si quelque chose était en train de naître, ils auraient eu tout le temps pour être ensemble. Un jour de plus ou de moins nâaurait fait aucune différence.
â Elle a éteint la lumière, dit le maigre à voix basse comme sâil avait peur de la réveiller. Il prit un gros sac dans le coffre et ajouta :
â On peut y aller.
Ensemble, dâun pas circonspect, ils se dirigèrent vers lâentrée de la maison attenante à lâhôtel, dans laquelle ils avaient loué une chambre.
â Il faut quâon fasse ça maintenant, dit le gros. Elle garde toujours cette maudite tablette sur elle, comme si câétait sa culotte. La seule façon de mettre la main dessus, câest de le faire quand elle dort.
Ils montèrent lentement les escaliers en évitant de faire du bruit inutilement. Un simple tour dans la serrure, et la porte sâouvrit dans un grincement. Leur chambre était pleine de cartons, dâenveloppes, et dâobjets en tous genres. On aurait dit un entrepôt abandonné. Une vieille applique, couverte de la poussière de plusieurs années, illuminait faiblement la pièce.
â On va entrer en passant par-dessus la séparation de nos terrasses, dit le gros.
â On ? Tu veux plutôt dire que je vais entrer, sâécria lâautre. Comment penses-tu pouvoir sauter de lâautre côté avec toute la graisse que tu te trimballes ?
â Tu ne serais pas en train de mettre en cause mes capacités athlétiques ?
â Non, bien sûr. Je ne me le permettrais jamais, répondit le maigre dâun ton assez sarcastique. Arrête de dire des conneries et passe-moi cette corde. Si je devais glisser, essaie au moins de me retenir. Je nâai pas envie de mourir écrasé sur le trottoir de cette ville minable.
Ne tâinquiète pas, je te tiens.
Il passa la corde autour de sa taille et lâenroula aussi sur la rampe de la balustrade.
â Prends ça, ajouta-t-il en lui passant un petit pistolet à seringue avec un viseur laser. Une petite piqûre de cette chose, et notre demoiselle dormira comme un ange toute la nuit. Lâaiguille est tellement mince que, dans le pire des cas, elle pensera avoir été piquée par un moustique.
Le maigre monta sur la balustrade et, dâun saut agile, atterrit sur la terrasse de la chambre voisine. Il sâaccroupit le plus possible et, très lentement, sâapprocha de la grande fenêtre qui donnait sur la chambre dâÃlisa.
Il regarda à lâintérieur avec circonspection, passant sa tête entre le montant et le rideau. Bien que très faible, lâéclairage public lui permit de voir quâÃlisa était couchée sur le ventre, la tête tournée de lâautre côté, vêtue uniquement de sa culotte et de son soutien-gorge.
Quel beau petit cul, quand même ! Notre colonel a lâÅil.
Il inséra lentement la micro-seringue, remplie du puissant somnifère, dans le chargeur du pistolet, et glissa le canon dans lâouverture de la fenêtre ouverte. Le petit viseur dessina un point rouge juste sur la fesse gauche dâÃlisa. Il retint un instant son souffle, puis appuya sur la gâchette. La seringue partit avec un souffle étouffé et alla sâenfoncer dans la chair tendre. Ãlisa toucha à peine le point touché de sa main gauche, comme si elle chassait un insecte, puis glissa à nouveau son bras sous lâoreiller et recommença à dormir profondément.
Le maigre attendit quelques minutes pour que le somnifère fasse son effet ; puis il ouvrit lentement la fenêtre et entra prudemment dans la chambre.
Il sâapprocha du lit dâun pas de félin et contrôla la respiration dâÃlisa. Elle était profonde et régulière. Dâun doigt, il lui effleura légèrement le dos. Aucune réaction.
Parfait ! Elle dort comme une souche. Elle ne se rendra compte de rien.
Pour éviter de laisser une trace quelconque, il récupéra prudemment la seringue, la retirant dâun coup sec de la fesse, et la mit dans sa poche. Il regarda autour de lui. Il remarqua aussitôt le sac à main dâÃlisa, posé, entrouvert, sur la chaise à côté du lit. Il commença à y fouiller et, bien quâil ne fût pas bien grand, il se rendit personnellement compte de ce quâil peut être compliqué de trouver quelque chose dans un sac de femme. Il y avait de tout.
Tout à coup, une musique à plein volume le fit sursauter. Le portable dâÃlisa sonnait, avec une mélodie rock très bruyante. Il en eut un coup au cÅur. Craignant quâelle puisse se réveiller, il essaya frénétiquement de le faire taire. Il appuya sur toutes les touches possibles avant de trouver la bonne. Il se tourna vers elle. Elle dormait encore. Sur lâécran du téléphone il lut le nom de lâinterlocuteur : Jack Hudson.
Quâest quâil voulait encore ? Peut-être que sâil nâavait pas de réponse, il reviendrait pour vérifier.
Il devait faire vite. Il jeta le portable sur le lit, prit le sac et vida par terre tout son contenu. Le bord métallique de la tablette refléta un instant la faible lumière du lampadaire. Il la prit et lâalluma.
Activation en cours...
Mais comment font-ils, dans les films, pour entrer dans les bâtiments les mieux protégés, pénétrer dans lâordinateur central, se connecter et tout copier en deux secondes ?
Il attendit patiemment le démarrage, puis sortit de la poche intérieure de sa veste un petit appareil portable quâil connecta à lâordinateur par un petit câble noir. Dâinterminables secondes sâécoulèrent.
Connexion établie.
Il commença frénétiquement à feuilleter tous les dossiers jusquâà ce quâil trouve celui qui lâintéressait : « Photos et documents ». Il jeta un coup dâÅil rapide au contenu et décida quâil y avait tout ce dont il avait besoin. Il tapa donc très rapidement une série de commandes sur le mini-clavier intégré à son appareil. Une barre de progression apparut sur lâécran, indiquant que lâopération de copie était en cours.
10 %, 30 %, 55 %...
Allez, dépêche-toi ...
Quelques très longues secondes après, le message quâil attendait anxieusement apparut enfin.
Opération terminée.
Il retira le câble, éteignit la tablette et la remit dans le sac dâÃlisa avec tout le contenu quâil avait éparpillé au sol. Il remit le sac sur la chaise en faisant très attention de le placer exactement comme il lâavait trouvé.
Tout a lâair ok. Je peux filer.
Il donna un dernier coup dâÅil aux courbes généreuses dâÃlisa, puis sortit sur la terrasse et repoussa la fenêtre en la laissant légèrement ouverte, comme il lâavait trouvée. Il se retourna et vit son acolyte, tranquillement appuyé sur la balustrade et, qui, directement penché vers la terrasse dâÃlisa, la regardait dâun air béat.
â Câest sûr que toi, ta spécialité, câest vraiment de ne pas te faire remarquer, hein ? lui dit-il. Mais quâest-ce que tu fais sur cette terrasse ? Pourquoi tu ne mets pas aussi un grand panneau qui dirait : « Nous sommes en train de commettre un vol dans cette pièce. Ne pas déranger » ?
â Mais allez, il nây a personne dehors. Qui veux-tu qui nous voie à cette heure de la nuit ?
â Laisse tomber, répondit-il, découragé. Prends plutôt la corde et aide-moi à passer de lâautre côté.
Il se hissa sur la balustrade et, sans trop dâefforts, revint sur la terrasse de leur appartement.
â Tout copié ? demanda le gros.
â Non, jâai passé tout mon temps à regarder le cul du Professeur, répondit sérieusement le maigre.
Lâautre le regarda, un instant stupéfié, puis réalisa quâil se moquait de lui, et répliqua :
â Jây ai presque cru. Et après, câest moi qui dit des conneries. Allez, fais-moi voir.
Ils entrèrent dans leur chambre. Le maigre fit un peu de place dans le bazar de la table et y déposa son appareil. Il prit deux chaises poussiéreuses, en passa une à son acolyte, et, après les avoir grossièrement dépoussiérées, ils sâassirent pour regarder les éléments tout juste copiés.
â Mais qui est-ce qui a habité dans cette porcherie ? demanda le gros. On dirait une décharge.
â Regarde un peu. Voilà les photos quâÃlisa a fait voir au colonel, et il commença à les parcourir lâune après lâautre.
â Celle-ci doit être la tablette qui faisait partie du journal dâAbraham.
Il fit apparaître une autre image.
â Et celle-là , câest la traduction de la tablette que nous nâavons pas enregistré à cause de toi.
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