Kitabı oku: «Histoire du Canada depuis sa découverte jusqu'à nos jours. Tome IV», sayfa 19
Lorsque M. Papineau fut de retour chez lui encore tout excité par ses luttes parlementaires, il commença à déposer sur le papier les griefs de ses compatriotes contre l'Angleterre. Malheureusement la liste en était longue et leur réminiscence ne fit qu'aigrir davantage son âme ardente. Il arriva à la session suivante avec ce travail en ébauche.
Le gouverneur informa les chambres, ouvertes le 7 janvier 1834, que le roi avait nommé un sur-arbitre pour faire le partage des droits de douane entre les deux Canadas, et que le rapport accordait une plus grande part que de coutume au Haut; qu'il serait nécessaire de renouveler la loi d'éducation et les lois de milice qui expiraient, et de reprendre la question des finances sans délai, afin que la métropole vit ce qu'elle aurait à faire.
Plusieurs membres voulaient cesser tout rapport avec l'exécutif et passer de suite à la considération de l'état de la province. M. Bourdages toujours à la tête des hommes les plus avancés, fit une proposition dans ce sens qui fut repoussée. En réponse aux remarques du gouverneur, touchant la porte du bill de subsides de la dernière session, la chambre observa qu'élue par le peuple, elle devait en partager le sort, et que son plus grand désir devait être de travailler pour son bonheur. Elle organisa ses comités ordinaires, mais elle refusa d'en nommer un, suivant l'usage, de bonne correspondance avec le conseil législatif. «C'est une insulte, disait M. Bourdages, de correspondre avec un corps qui a ouvertement déclaré que nous voulions établir une république française.» L'assemblée reprit l'enquête du 21 mai.
Elle reçut presqu'aussitôt plusieurs messages du château. Le 13, elle en reçut un sur le bill de subsides, et un autre sur le siège de M. Mondelet dans son sein, qu'elle avait déclaré vacant deux ans auparavant par suite de sa nomination au conseil exécutif. Le ministre approuvait le gouverneur de n'avoir pas fait procéder à une nouvelle élection dans un cas où la chambre avait outrepassé son pouvoir. Le lendemain on lui en remettait un autre au sujet du conseil législatif en réponse à l'adresse de la dernière session.
«L'objet que l'on a en vue par cette adresse, disait M. Stanley, est de prier sa Majesté de vouloir autoriser une convention nationale du peuple du Bas-Canada à l'effet de mettre de côté les autorités législatives et de prendre en considération lequel de deux modes sera adopté pour détruire entièrement la constitution, l'introduction du principe électif ou l'entière abolition du conseil législatif. Sa Majesté veut bien ne voir dans le mode projeté que le résultat d'une extrême légèreté; elle ne pourra jamais être conseillée de donner son assentiment à ce projet, vu qu'elle doit considérer une semblable mesure comme incompatible avec l'existence même des institutions monarchiques; mais elle sera disposée volontiers à sanctionner toute mesure qui pourrait tendre à maintenir l'indépendance et à élever le caractère du conseil législatif.
«Je ne suis pas prêt à lui conseiller de recommander au parlement une démarche aussi sérieuse que celle de révoquer l'acte de 91… mais si les événemens venaient malheureusement à forcer le parlement à exercer son autorité suprême, pour appaiser les dissensions intestines dans la colonie, mon devoir serait de soumettre au parlement des modifications à la charte des Canadas, tendant non pas à introduire des institutions incompatibles avec l'existence d'un gouvernement monarchique, mais à maintenir et à cimenter l'union avec la mère-patrie, en adhérant strictement à l'esprit de la constitution britannique, et en maintenant dans leurs véritables attributions, et dans des bornes convenables, les droits et les privilèges mutuels de toutes les classes de sa Majesté.»
Il est inutile de dire quel fut l'effet de cette décision sur l'assemblée. Elle renvoya de suite à des comités spéciaux toutes ces communications du gouverneur, qui refusait alors de lui avancer l'argent nécessaire pour payer ses dépenses contingentes, sous prétexte que la perte du dernier bill de subsides le laissait chargé, d'une trop grande responsabilité. L'assemblée demanda copie des instructions royales touchant le bill de subsides de 32, et rejeta un bill passé par le conseil, pour établir un tribunal destiné à juger les fonctionnaires accusés, tandis que le conseil en rejetait un de son côté passé par l'assemblée pour assurer la dignité et l'indépendance des deux conseils, dans lequel contrairement à tous les principes de la constitution anglaise, les conseillers exécutifs devaient être hors du contrôle des deux chambres. Ce bill auquel on avait fait peu d'attention, avait été introduit par M. A. Stuart et semblait plutôt une ironie qu'une mesure sérieuse.
Cependant Le jour pour la prise en considération de l'état du pays arrivait. C'était pour cette occasion que M. Papineau avait préparé; le tableau des griefs dont nous ayons parlé tout à l'heure. En arrivant à Québec il l'avait communiqué aux membres, de son parti. On s'était réuni à diverses reprises chez les membres du comté de Montmorency, M. Bedard, pour l'examiner et y faire les changemens jugés nécessaires. Après quelques modifications un autre membre, M. Morin avait été chargé de les mettre en forme de résolutions. Il fut décidé que ce serait M. Bedard qui les présenterait. Ce membre avec quelques uns de ses amis avait paru dans la dernière session vouloir se détacher de M. Papineau, qui pour ramener le parti de Québec, à ses vues, consentit à faire quelques modifications dans, les résolutions, et, pour flatter l'amour propre de M. Bedard, à les laisser proposer par lui. Les débats durèrent plusieurs jours.
M. Papineau fit un discours dans lequel encore tout irrité du ton de la dépêche de M. Stanley, il s'abandonna à un enthousiasme républicain qui devait mettre l'Angleterre sur ses gardes, et qui était contraire à la partie des résolutions qui citait le fait, que dans les anciennes colonies anglaises, celles qui jouissaient des institutions les plus libérales avaient été les dernières à se révolter. «Des plaintes existent, dit-il, depuis longtemps; tous conviennent de nos maux; tous sont unanimes pour accuser; la difficulté est quant aux remèdes. Il s'agit d'examiner où nous les prendrons. Il y a des personnes, qui, occupées des systèmes électifs et des autres constitutions européennes, veulent nous entretenir de ces idées. Ce n'est pas à nous à décider des institutions de l'Europe; on ne peut les connaître ni en bien juger, nous devons examiner quel doit être notre sort, le rendre aussi bon et aussi durable que possible. Il est certain qu'avant un temps bien éloigné, toute l'Amérique doit être républicaine. Dans l'intervalle, un changement dans notre constitution, s'il en faut un, doit-il être en vue de cette considération? et est-il criminel de le demander? Les membres de cette chambre en sont redevables à leurs constituans comme d'un devoir sacré, et, quand bien même le soldat devrait les égorger, ils ne doivent pas hésiter à le faire, s'ils y voient le bien de leur pays. Il ne s'agit que de savoir que nous vivons en Amérique, et de savoir comment on y a vécu. L'Angleterre elle même y a fondé de puissantes républiques où fleurissent la liberté, la morale, le commerce et les arts. Les colonies espagnoles et françaises, avec des institutions moins libérales, ont été plus malheureuses, et ont dû lutter beaucoup contre le vice de leurs institutions. Mais le régime anglais, qu'a-t-il été dans les colonies? A-t-il été plus aristocratique que démocratique? Et même eh Angleterre est-il purement aristocratique? C'est donc une grande erreur de M. Stanley, de nous parler du gouvernement monarchique d'Angleterre en 1834. Du temps de la maison des Stuart, ceux qui ont maintenu le pouvoir monarchique, ont perdu la tête sur les échafauds. Depuis ce temps la constitution de l'Angleterre a été appelée mixte, et telle ne devait pas être appelée autrement. Lui, M. Stanley, ministre par un vote de là chambre et malgré le roi, à qui l'on a dit de l'accepter ou de perdre sa couronné, M. Stanley méprisé aujourd'hui par le peuple, vient nous parler du gouvernement monarchique de l'Angleterre, quand des changemens sont permis à ses habitans, si grands par leur commerce, leurs institutions, et les progrès qu'ils ont fait faire à la civilisation, aux arts et à la liberté sur tout le globe; et quand cette nation veut introduire de nouveaux élémens de bonheur, en demandant la réforme de l'aristocratie, et en augmentant la force du principe démocratique dans son gouvernement. Le système vicieux qui a régné dans les colonies, n'a fait que donner plus d'énergie au peuple, pour se rendre républicain: c'est ce qui a été le cas dans les états du nord de l'union. Dans les colonies du milieu, quoique les institutions y fussent plus républicaines et plus libérales, le peuple y a été le dernier à se révolter.»
M. Neilson proposa un amendement tendant à faire déclarer «que comme la dépêche du ministre des colonies du 9 juillet 1831, en réponse aux adresses de la chambre du 16 mars précédent, contenait une promesse solennelle de coopérer avec elle au redressement des principaux abus, c'était le devoir de la chambre de travailler dans l'esprit de cette dépêche, à la paix, au bien-être et au bon gouvernement du pays suivant la constitution; que la dépêche du bureau colonial communiquée le 14 janvier dernier, confirmait les mêmes dispositions; que l'on devait s'occuper de l'amélioration du pays, de l'occupation des terres, des lois de propriété, de l'indépendance des juges, de l'administration de la justice, de la responsabilité des fonctionnaires, des comptes publics et de la réduction de toutes les charges inutiles.»
«Les résolutions de M. Bedard portent atteinte, dit-il, à l'existence du conseil législatif, d'un corps constitué comme nous, par l'acte de 91; elles mettent en accusation le gouverneur en chef qui forme aussi une autre branche de la législature; elles refusent formellement de subvenir aux dépenses de la province, et comportent un procédé injurieux contre la mère-patrie, c'est-à-dire contre son secrétaire colonial. Il n'est pas nécessaire de dire que je ne puis voter pour elles. La constitution en tout pays est la règle de conduite pour toutes les parties et la sauve-garde de la liberté de chacun. Du moment qu'on l'attaque on ébranle les passions. Nous nous trouvons dans des circonstances différentes de celles des pays où il y a eu des changemens. En Angleterre et aux Etats-Unis, qu'on a cités, des changemens ont été opérés par le peuple, non par suite d'un goût pour la réforme, mais parce que les rois eux-mêmes voulaient violer la constitution. La ligne de démarcation est bien distincte: ils combattaient pour des droits qui existaient, et nous, nous voulons renverser ceux qui sont établis. Le résultat doit être différent. L'histoire est un moniteur fidèle; elle nous apprend que les conséquences suivent les principes.»
«Je crains, ajouta M. Quesnel à son tour, qu'en nous adressant à l'Angleterre pour demander un changement dans notre constitution, nous ne l'obtenions point et que notre démarche entraîne avec elle des suites désastreuses pour le pays. En Angleterre on n'a jamais voulu convenir des vices de la constitution, et pense-t-on qu'aujourd'hui on y sera plus facile sur ce sujet? Je ne le crois pas. J'ignore où ces résolutions peuvent nous conduire. Si elles n'excitent point de trop grands troubles, il en résultera au moins une grande réaction. Je souhaite sincèrement que mes prévisions ne s'accomplissent point; je souhaite me tromper. Quoique je diffère d'opinion avec la majorité de cette chambre, si elle réussit à procurer l'avantage réel et permanent du pays par les moyens qu'elle emploie aujourd'hui, je me réjouirai de ses succès avec les hommes éclairés qui auront formé la majorité. Je regretterai alors de n'avoir pas eu comme eux assez d'énergie pour braver le péril et entreprendre une chose que je regardais comme dangereuse, ou du moins comme très incertaine quant à ses résultats. Si au contraire mes craintes se réalisent, si la chambre succombe dans son entreprise, je partagerai avec les autres les maux qui pourront peser sur ma patrie, je dirai, ce sont sans doute les meilleures intentions qui ont guidé la majorité de la chambre, et on ne me verra point m'unir avec ses ennemis pour lui reprocher d'avoir eu des vues perverses. Voilà ce qui fera ma consolation.»
L'amendement de M. Neilson fut rejeté par 56 contre 24. MM. Cuvillier, Quesnel, Duval, et plusieurs autres Canadiens faisaient partie de la minorité; et les résolutions qui ont porté depuis le nom de 92 résolutions, furent finalement adoptées. Les administrations provinciales, disaient-elles en substance, foulaient aux pieds les droits et les sentimens les plus chers des Canadiens, qui s'étaient toujours empressés de recevoir les émigrans des îles britanniques comme des frères, sans distinction d'origine ni de croyance; la chambre ne voulait introduire dans le pays que les droits dont jouissaient les habitans de l'Angleterre; le défaut le plus grave dans la Constitution était la nomination du conseil législatif par la couronne, au lieu d'être électif comme elle l'avait demandé l'année précédente, parce que la constitution et la forme du gouvernement qui convenaient le mieux à cette colonie, ne devaient pas se chercher uniquement dans les analogies que présentaient les institutions de la Grande-Bretagne, dans un état de société tout-à-fait différent du nôtre. Ce n'était pas le plus libre régime colonial dans les anciennes colonies, qui avait hâté leur séparation, puisque la Nouvelle-York dont les institutions étaient les plus monarchiques dans le sens que le comportaient la dépêche de M. Stanley, avait été la première à refuser d'obéir à un acte du parlement impérial, et que le Connecticut et le Rhode-Island avec des institutions purement démocratiques furent les derniers à entrer dans la confédération des Etats-Unis. L'acte des tenures devait être révoqué et le vote de toutes les dépenses publiques laissé à là chambre; là partialité dans la distribution des charges publiques était portée au comble loin de diminuer, puisque sur une population de 600,000 habitans, dont 525,000 d'origine française, 47 fonctionnaires seulement les moins rétribués appartenaient à cette origine, tandis que 157 appartenaient à l'origine britannique ou aux 75,000 habitans qui restaient de la population. La négligence du bureau colonial à répondre aux adresses de la chambre, la détention du collège de Québec par le militaire, les obstacles opposée à l'établissement d'autres colléges le refus de rembourser à la province les £100,000 de la défalcation de M. Caldwell étaient encore signalés avec la foule d'abus déjà exposés tant de fois dans les précédentes adresses. La chambre et le peuple, continuaient-elles, appuyés sur la justice, devaient être assez forts pour n'être exposés à l'insulte d'aucun homme quelqu'il fût ni tenue de le souffrir en silence. Dans leur style, les dépêches de Stanley étaient insultantes et inconsidérées à un degré tel que nul corps constitué par la loi même pour des fins infiniment subordonnées à celles de législation, ne pouvait ni ne devait les tolérer… ces dépêches étaient incompatibles avec les droits et les privilèges de la chambre qui ne devaient être ni mis en question, ni définis par le secrétaire colonial.
Puisqu'un fait qui n'était pas du choix de la majorité du peuple, son origine et sa langue, était devenu un prétexte d'injures, d'exclusion, d'infériorité politique et de séparation de droits et d'intérêts, la chambre en appelait à la justice du gouvernement de sa Majesté et de son parlement et à l'honneur du peuple anglais; la majorité des habitans du pays n'était nullement disposée à répudier aucun des avantages qu'elle tenait de son origine et de sa descendance de la nation française, qui sous le rapport des progrès qu'elle avait fait faire à la civilisation, aux sciences, aux lettres et aux arts, n'avait jamais été en arrière de la nation britannique et était aujourd'hui dans la cause de la liberté et la science du gouvernement sa digne émule. Enfin elles finissaient par mettre lord Aylmer en accusation, en priant les communes d'Angleterre de soutenir les plaintes devant la chambre des lords, et les membres indépendans des deux chambres impériales de les appuyer, entre autres O'Connell et Hume. Elles invitaient en même temps les libéraux canadiens à se former en comités dans toutes les parties du pays, pour correspondre avec ces deux hommes d'état, avec M. Viger, et avec les autres colonies en leur demandant leur appui dans des questions qui les intéressaient toutes également.
M. Morin fut chargé d'aller remettre à M. Viger, toujours, à Londres, les pétitions basées sur ces résolutions et destinées aux deux chambres du parlement impérial.
Le conseil législatif, en présence de l'attitude de l'assemblée, vota des adresses contraires aux siennes, pour prier le roi de maintenir la constitution pure et intacte. Les marchands anglais de Québec et autres, opposés à la politique de l'assemblée, signèrent aussi une pétition à la couronne dans le sens de celle du conseil, dans laquelle ils observaient qu'elle voulait donner aux Canadiens-français une supériorité sur les autres habitans, qu'elle voulait s'emparer des terres publiques et entraver l'émigration, que la qualification en biens immeubles exigés des magistrats était faite pour exclure les Anglais de ce corps, que la loi des jurés avait la même tendance, que l'assemblée avait montré une hostilité constante au commerce, que le conseil législatif était leur sauvegarde contre les mesures arbitraires et inconstitutionnelles des représentans du peuple, et que M. Viger ne devait pas être considéré comme l'agent de la population anglaise.
L'assemblée après avoir voté les appropriations nécessaires pour l'éducation, les institutions charitables, les chemins et les améliorations intérieures, laissant de côté la liste civile, commença à se disperser. Le gouverneur ne la voyant plus en nombre, la prorogea en observant que ses procédés ne lui avaient pas permis de lui communiquer les dépêches du ministre sur les difficultés financières; que puisqu'elle en avait appelé au parlement impérial, chaque parti devait se soumettre à son autorité suprême, mais qu'il devait déclarer que le langage des 92 résolutions était si contraire à l'urbanité et à la modération bien connues des Canadiens, que ceux qui ne connaissaient pas le véritable état des choses ne pourraient s'empêcher de croire qu'elles ne fussent le fruit d'une excitation extraordinaire et générale; que néanmoins quelque fussent les sentimens qui régnaient dans l'enceinte de l'assemblée la tranquillité la plus profonde régnait au dehors.
Cette dernière observation était des plus imprudentes. C'était inviter les membres qui avaient voté pour les 92 résolutions à prouver au gouverneur qu'ils exprimaient les sentimens de la masse du peuple; et c'est ce qu'ils firent en organisant partout une agitation générale qui aboutit à l'insurrection.
CHAPITRE II
LES TROUBLES DE 1837.
1835-1837
Effet des 92 résolutions en Angleterre. – Une partie des townsbips de l'est se rallie à la chambre d'assemblée-Comité nommé dans les communes sur nos affaires. – Débats-Une partie du ministère anglais résigne. – M. Stanley est remplacé aux colonies par M. Rice et plus tard par lord Aberdeen. – Comités de district en Canada. – Nouvelles pétitions. – Lettre de M. Roebuck. – Nouveaux débats dans la chambre des communes. – Dissolution du parlement canadien. – Associations constitutionnelles. – Rapprochement entre les libéraux du Haut et du Bas-Canada. – Le parlement s'assemble à Québec. – Nouvelle adresse à l'Angleterre-Une nouvelle section de la majorité se détache de M. Papineau. – Dépêches de lord, Aberdeen. – Ministère de sir Robert Peel. – Trois commissaires envoyés en Canada. – Lord Gosford remplace lord Aylmer. – Chambre des lords. Ouverture du parlement canadien. – Discours de lord Gosford. – La chambre persiste dans la voie qu'elle a prise, en votant 6 mois de subsides qui sont refusés. – Le parlement est prorogé et convoqué de nouveau. – Les autres colonies qui devaient faire cause commune avec le Bas-Canada l'abandonnent et acceptent les propositions de l'Angleterre. – Rapport des commissaires. – La conduite du ministère approuvée. – Les assemblées continuent en Canada. – Langage des journaux. – Agitation dans les campagnes. – Bandes d'hommes armés. – M. Papineau descend jusqu'à Kamouraska. – Opinion réelle de la masse des habitans. – Nouvelle session du parlement aussi inutile que les autres. – Nouvelle adresse au parlement impérial. – Magistrats et officiers de milice destitués. – Associations secrètes à Québec et à Montréal, où l'on résout de prendre les armes. – Démonstrations en faveur du gouvernement. – Assemblée des six comtés. – Mandement de l'évêque de Montréal. – Le gouvernement fait des armemens. – Troubles à Montréal. – Mandat d'arrestation lancés. – Les troupes, battues à St. – Denis; victorieuses à St. – Charles. – La loi martiale proclamée. – Plusieurs membres invitent inutilement le gouverneur à réunir immédiatement les chambres. – Affaire de St. – Eustache. – L'insurrection supprimée. – Troubles dans le Haut-Canada. – Résignation de lord Gosford. – Débats dans les communes. – Les ministres promettent de soumettre l'insurrection par les armes.
Les 92 résolutions et l'ajournement prématuré des chambres ne laissèrent plus de doute sur la gravité de la situation dans l'esprit de ceux en Angleterre qui s'intéressaient aux affaires de ces importantes provinces. La solution de toutes les questions était laissée à la métropole. Quoiqu'il régnât beaucoup d'incertitude sur ce qu'elle allait faire, il surgissait de temps à autre des faits, des rumeurs qui entretenaient les espérances des libéraux. Les journaux reproduisirent une dépêche de lord Goderich au gouverneur de Terreneuve sur les conseils législatifs, qui paraissait leur donner gain de cause. «On ne peut nier, disait ce ministre, qu'en pratique l'existence de ces corps n'aient été accompagnée de difficultés sérieuses. Ils ont mis trop souvent en collision les différentes branches de la législature; ils ont ôté aux gouverneurs le sentiment de leur responsabilité, et privé les assemblées de leurs membres les plus utiles, tout cela sans compensation. Ils ne prennent dans les colonies ni une position ni une influence analogue à la chambre des lords en Angleterre, parce qu'ils n'ont rien de la richesse, de l'indépendance et de l'antiquité de cette institution qui fait respecter la pairie anglaise. D'après ces circonstances et l'histoire des colonies de l'Amérique, je verrais avec plaisir tout arrangement tendant à fondre les deux chambres en une seule dans laquelle les représentans du peuple rencontreraient les serviteurs de la couronne.» Ces dernières paroles annonçaient à la fois l'abolition du conseil et l'introduction du système responsable. L'île du Prince Edouard comme Terreneuve se plaignait de son exécutif.
Une partie des habitans des townships de l'est s'assemblèrent à Stanstead sous la présidence de M. Moulton, et passèrent des résolutions à l'appui de l'assemblée. Presque tous les comtés, presque toutes les paroisses les imitèrent. Les journaux étaient remplis de ces manifestations qui raffermissaient les chefs et divisaient de plus en plus les partis. Des délégués de comtés s'assemblèrent à Montréal pour organiser un comité central et permanent, qui éclairerait l'opinion et donnerait l'exemple des mesures à prendre suivant les circonstances. Le parti anglais faisait courir alors le bruit que les ministres avaient résolu d'unir les deux Canadas. L'agitation dans le Haut-Canada était presqu'aussi vive que dans le Bas, et le parti libéral y paraissait vouloir coordonner ses mouvemens avec les nôtres.
Mais c'était à londres que devaient se décider nos destinées. M. Roebuck avait fait nommer un comité dans les communes sur nos affaires. MM. Roebuck, Hume, O'Connell avaient pris la parole en faveur des Canadiens. Le ministre des colonies, M. Stanley, avait défendu sa politique appuyé de lord Howick et de M. P. Stewart. M. Roebuck en plaidant la cause du Bas-Canada, avait plaidé celle du Haut, dont M. McKenzie était l'agent à Londres, mais l'agent de la minorité d'après l'opinion de sa législature. M. Stanley, dit que le Haut-Canada ne se plaignait pas de sa constitution, et que c'étaient les factions qui avaient décrié celle du Bas, accordée pour conserver la langue, les usages et les lois de ses habitans. Il déclara que le conseil législatif devait être maintenu, parce qu'en le rendant électif on détruirait entièrement l'influence du gouvernement et on annulerait les droits de la minorité anglaise, pour la défense et la protection de laquelle il avait été établi dans l'origine; qu'il était vrai que sur 204 fonctionnaires 47 seulement étaient Canadiens-français; mais qu'il ne doutait nullement que les deux Canadas ne fussent un jour unis, quoiqu'il ne fût pas préparé à proposer pour le moment une mesure qui lui paraissait la seule propre à y assurer la permanence des principes anglais et à réduire la législature réfractaire qui siégeait à Québec.
O'Connell protesta contre la constitution du conseil législatif, vu qu'elle donnait un double vote au gouvernement, et déclara que l'un des principaux abus venait de ce que l'exécutif mettait toute son influence à soutenir des étrangers contre les habitans du pays.
Lorsque la nouvelle de ces débats arriva à Montréal, le comité central vota des remercîmens aux orateurs qui avaient plaidé la cause canadienne, et des approbations à M. Bidwell, à M. MacKenzie et autres chefs réformateurs du Haut-Canada. De jour en jour le parti libéral de cette province cherchait à se rapprocher de nous, pour s'appuyer de notre influence en attendant qu'il eût la majorité vers laquelle il approchait graduellement et qu'il devait bientôt obtenir.
Le comité de la chambre des communes ne put être retenu dans les limites de l'enquête de celui de 1828, et voulut étendre son investigation au-delà, malgré les efforts de M. Stanley. La correspondance entre le bureau colonial et les gouverneurs du Canada, lui fut soumise. On trouva dans les dépêches de lord Aylmer depuis qu'il s'était soulevé contre la chambre, des épithètes offensantes pour les chefs du parti canadien, que M. Baring voulut faire effacer, parce qu'elles devaient tendre à irriter, et que d'ailleurs ce gouverneur était un homme indiscret et d'un esprit faible. Le comité interrogea sir James Kempt, MM. Viger, Morin, Ellice, J. Stuart, Gillespie et le capt. McKennan. M. Morin avait eu une conférence d'une heure et demie avec M. Stanley et sir James Graham, dans laquelle ils avaient discuté la question des finances et celle d'un conseil législatif électif. Quant à sir James Kempt, il disait que le seul moyen de terminer les dlfférens serait d'assurer le payement des fonctionnaires par un acte du parlement impérial, et que quant au conseil exécutif, il s'était dispensé de ses services lorsqu'il était gouverneur du Canada; M. J. Stuart pensait qu'il fallait réorganiser la chambre d'assemblée pour assurer une majorité anglaise, ou réunir les deux Canadas et donner le pouvoir au conseil exécutif de se renouveler lui-même et de renouveler le conseil législatif.
C'est pendant que la question canadienne était devant ce comité qu'une partie des ministres résigna sur la question des biens de l'Irlande. M. Stanley fut remplacé au ministère des colonies par M. Spring Rice. Cette nouvelle accueillie avec joie en Canada, où M. Stanley avait perdu par sa conduite récente la popularité que ses discours de 1822 lui avait acquise, exerça peu d'influence sur nos destinées. Le rapport que présenta le comité ne concluait à rien et laissait les choses dans l'état où elles étaient. Il était très court et à dessein contraint et fort ambigu, pour ne pas mécontenter trop fort aucun parti. Il laissait la solution de toutes les questions au bureau colonial. Cependant il avait causé beaucoup de discussions dans le comité. M. Stanley avait voulu y faire approuver sa conduite, et il y avait fait mettre des additions dans ce sens auxquelles M. Roebuck s'était opposé et qui avaient été retranchées. Sir James Graham et M. Robinson avaient soutenu le ministre contre MM. Roebuck, Howick et Labouchère. On avait débattu quatre heures, et obtenu une majorité de 2 voix.
Les comités de district siégeaient toujours en Canada. Ils avaient acheminé des pétitions portant plus de 60,000 signatures à Londres; ils correspondaient avec nos agens et passaient résolutions pour tenir le peuple en haleine. On lut dans celui de Montréal une lettre de M. Roebuck dans laquelle il l'informait que tant que M. Stanley avait été à la tête du bureau colonial il n'avait conservé aucune espérance de voir les affaires s'arranger, mais que M. Spring Rice paraissait plus traitable et qu'il attendait un meilleur avenir de lui; qu'il avait abandonné le bill de M. Stanley touchant la liste civile, et qu'on devait lui donner un peu de délai. «Il vaut mieux j'en conviens, disait-il, combattre que de perdre toute chance de se gouverner soi-même; mais nous devons assurément essayer tous les moyens avant de prendre la résolution d'avoir recours aux armes… La chambre pourrait, comme sous l'administration de sir James Kempt, passer un bill de subsides temporaire sous protêt, se réservant tous ses droits et exposant qu'elle le faisait par esprit de conciliation et pour fournir au nouveau ministre l'occasion de redresser les griefs de son propre mouvement.» Il conseillait aussi de réveiller le peuple, de ne pas reculer d'un pas devant les principes, et déclarait que l'on n'aurait de bon gouvernement que lorsqu'on se gouvernerait soi-même et qu'on se serait défait du conseil législatif.
La suite des événement fera voir si ces conseils étaient bien sages.
Le 4 août il y eut encore quelques débats dans les communes sur nos affaires à l'occasion d'une requête présentée par M. Hume à l'appui des 92 résolutions. M. Rice blâma sévèrement M. Hume d'une lettre publiée dans les journaux, dans laquelle il appelait les Canadiens à résister à la funeste domination du gouvernement anglais. Il dit qu'il ne convenait point à un homme parlant sans danger dans l'enceinte des communes, de lancer des sentimens qui pourraient faire tant de mal à l'Angleterre et au Canada, et que si l'on avait recours à la résistance il espérait que les lois atteindraient tous ceux qui y seraient concernés.