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Kitabı oku: «Les etranges noces de Rouletabille», sayfa 14

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XXII
LA RANÇON

Rouletabille toucha bientôt le fond de la pièce d'eau. Dès qu'il sentit sous ses semelles de plomb un terrain large et solide, il commença de se mouvoir avec plus de facilité.

Il y voyait assez clair. L'eau, autour de lui, avait un pâle rayonnement lacté… Il examina minutieusement les parois de pierre, passant en revue les joints, tâtant de ses gants la paroi ou y appuyant sa pioche.

Tout à coup, il eut, dans la sphère de cuivre qui le coiffait comme d'un énorme casque, une exclamation… Devant lui, là, sur sa droite, s'ouvrait dans la muraille circulaire un corridor!

L'existence de ce corridor, bien que celui-ci aboutît directement à la pièce d'eau, ne devait certainement pas être soupçonnée, même de ceux qui avaient pu apercevoir l'immense vasque vide de toute son onde. Et cela, à cause de la porte qui, à l'ordinaire, devait le fermer. Cette porte, en ce moment ouverte, se présentait de profil, ayant roulé sur un gond central autour de laquelle elle tournait comme sur un pivot, telle une porte d'écluse.

Comme elle se présentait à lui, Rouletabille pouvait passer à droite ou à gauche; il en fit le tour, se rendant parfaitement compte de la façon dont elle jouait, dont elle pivotait sur elle-même, sur son centre, dans l'eau, mais ne pouvant découvrir le système qui en commandait la manoeuvre de l'extérieur et hors de l'eau.

Il imagina avec une presque certitude que la porte ou les portes—car il pouvait y en avoir d'autres comme celle-ci—permettant l'inondation du souterrain qui conduisait au trésor, avaient été ouvertes si rapidement, à la dernière minute, par Abdul-Hamid lui-même, que celui-ci n'avait pas eu le temps, une fois les souterrains inondés, de faire jouer à nouveau le système de fermeture, sans quoi la porte, pivotant à nouveau, serait venue reprendre place dans le mur, se confondant avec lui.

Rouletabille put voir en effet que la lourde porte qu'il avait devant lui apparaissait en bronze d'un côté, mais garnie de plaques de marbre sur l'autre, sur le côté qui devait se refermer dans la pièce d'eau.

Ému plus qu'on ne le saurait dire, car il commençait à être persuadé qu'il avait enfin découvert le mystère du couloir de Durdané et qu'il allait bientôt pénétrer dans la chambre du trésor, il se glissa le long de la porte et avança dans le couloir.

L'eau cédait doucement à sa pression; il se servait de son pic comme d'une canne; dans l'eau ses semelles de plomb cessaient d'être des entraves à sa marche.

Dans sa sphère de cuivre, il respirait à l'aise et il avait calculé approximativement au poids du réservoir et à la pression de l'air qui s'en échappait qu'il pouvait bien compter sur deux heures au moins de bonne atmosphère, en mettant les choses au pis.

Si son coeur battait à grands coups sourds dans sa poitrine, ce n'était point malaise physique, mais allégresse morale, à l'idée qu'il allait enfin toucher au but auquel, depuis quarante-huit heures, il avait à peu près désespéré d'atteindre…

Soudain il ne vit plus les parois du corridor… Il ne vit plus que de l'eau… de l'eau… de tous côtés… Il était au centre de ce reflet glauque; l'eau… et c'était tout…

Il marcha… il marcha encore… et puis s'arrêta… Il ne voyait toujours que de l'eau. Il commença de s'effrayer… Où était-il donc?…

Il imagina que, sortant du corridor, il était entré dans une vaste salle dont il ne pouvait apercevoir les parois. Et pour rencontrer celles-ci, il modifia sa marche.

Il se dirigea vers sa gauche, faisant ainsi, avec la ligne qu'il avait suivie jusqu'alors, un angle droit. Il fit dix pas… Il fit vingt pas… Toujours rien!… Cette salle souterraine devait être immense!

Enfin la clarté de la lampe alla faiblement rayonner sur une paroi de marbre… Il s'approcha du mur dont il pouvait suivre maintenant le dessin des joints…

C'était un beau marbre vert, aussi beau que celui des colonnes de Sainte-Sophie, et qui avait peut-être été arraché comme celui-ci au temple du Soleil à Héliopolis.

La richesse de ces murs nus sembla à Rouletabille de bon augure et il marcha le long de la paroi en y faisant glisser ses mains.

Si près du mur, la lumière électrique éclairait parfaitement les dalles, et le reporter les touchait une à une, demandant à chacune si elle n'allait point lui livrer son secret, si ce n'était pas celle-ci ou celle-là qui lui cachait l'inépuisable trésor.

Il tâchait de découvrir quelque anomalie dans la jonction, quelque défaut dans le cimentage, quelque marque exceptionnelle qui eût pu le mettre sur la voie…

Mais les dalles succédaient aux dalles, toutes pareilles et, sous le pic qui les frappait, gardaient la même immobilité, la même immutabilité…

Rouletabille commençait à désespérer…

Est-ce que cette découverte inouïe des souterrains noyés allait simplement aboutir à une promenade sous l'eau? Et devrait-il revenir les mains vides?… sans avoir rien vu, sans avoir rien deviné de la précieuse cachette?

Et voilà que sur sa droite s'ouvrait un autre corridor… un long boyau opalin qui allongeait devant lui son chemin de mystère…

Il hésita devant ce nouveau problème… et puis il se résolut, pour cette fois, à ne point quitter cette salle qu'il ne la connût entièrement… qu'il ne l'eût parcourue de bout en bout, qu'il n'eût fini de tâter et de frapper ses murailles.

Il glissa donc devant le corridor et retrouva la paroi de la salle… et puis un angle.

Il resta bien cinq minutes à examiner cet angle… et la paroi continua, dans son uniformité…

La misère de Rouletabille était grande et il frissonnait sous sa carapace sous-marine… non point qu'il eût froid, car il était fait maintenant à cette sensation de fraîcheur qui tout d'abord l'avait saisi, mais son coeur se glaçait à cette pensée qu'arrivé dans la chambre des trésors il devrait la quitter sans avoir rien découvert.

Il avait espéré un moment, ayant trouvé la porte de la pièce d'eau ouverte et mettant sur le compte du désarroi d'Abdul-Hamid l'oubli de sa fermeture, qu'il trouverait peut-être aussi, dans la chambre du trésor, quelque preuve de cette fuite rapide… quelque coffre entr'ouvert.

Mais il n'y avait rien dans cette salle, rien que des murs, ces éternels murs verts…

Était-il bien sûr, du reste qu'il fût dans la chambre des trésors?… N'était-elle point au bout de l'un de ces corridors qui venaient aboutir dans la pièce qu'il traversait?

Tiens!… encore un corridor!… Il passe… il retrouve la paroi… il lui semble qu'ainsi faisant il revient sur ses pas, décrivant un vaste rectangle…

Tout à coup, il crie dans son casque!…

Sur sa droite, là, là!…

Une illumination, mille feux qui s'allument soudain… Un embrasement sous la clarté de sa lampe… un foyer de radieuse lumière, un scintillement éblouissant dans l'éventrement de la muraille…

Fasciné, Rouletabille s'avance.

Plus de doute! Voilà le trou aux trésors!

Ceux-ci ont roulé jusqu'aux dalles sur lesquelles il marche et il sent que ses semelles de plomb écrasent des pierres précieuses!…

Une grande plaque de marbre vert formant porte a été repliée à demi contre la muraille et voilà le coffre magique.

Il avance la main… Il laisse glisser son pic à ses pieds… et des deux mains, des deux mains, il plonge dans ces richesses… Des joyaux! des colliers! des perles! des diadèmes! des diamants à remuer à la pelle!… Et il les remue, les remue… les soulève, les laisse retomber!… enfonce le bras, ne se lasse pas de palper, de toucher, de prendre, de laisser et de reprendre toutes ces merveilles qui valent des millions! Des millions!… Et dans son casque, il pleure!… il rit!… il étouffe!…il délire!… «Ivana!… Ivana!…» soupire-t-il. Et il s'appuie à la muraille pour ne pas tomber, car il sent que sous lui ses jambes flageolent et qu'il n'a plus la force de conserver son équilibre dans l'élément liquide qui l'enserre… Il pousse, en s'y accrochant, la porte de marbre vert… Oh! miracle!… derrière cette porte… une autre est ouverte… et une autre… et une autre encore!… Sur cette partie du mur, les plaques de marbre n'ont pas été refermées… Le maître, dans sa fuite épouvantée, n'en a sans doute pas eu le temps… et il est possible que les autres murs, que les autres plaques renferment elles aussi des millions!… des millions!…

Rouletabille revit, dans son imagination en désordre, cette scène suprême où Abdul-Hamid, sentant sa dernière heure de souveraineté venue et peut-être sa mort prochaine, a voulu revoir, une dernière fois avant de partir et peut-être de mourir, toutes ces richesses accumulées depuis tant d'années… Une dernière fois, il a voulu s'en repaître la vue puisqu'il ne pouvait les emporter et il est descendu une dernière fois par le couloir de Durdané et la vasque immense du jardin d'hiver dans la chambre des trésors!… Et il a ouvert les portes de marbre vert… mais il n'a pas eu le temps de les refermer toutes…

Il n'a pas eu le temps de les refermer toutes… Talonné par la peur… il s'est enfui!… il est remonté juste à temps pour noyer derrière lui tous ses joyaux et tous ses millions… car ce n'est pas seulement des bijoux qui se trouvent là, entassés, mais de l'or! de l'or!… Des monceaux de pièces d'or!… De quoi acheter toutes les consciences et payer tous les crimes!… de quoi racheter peut-être l'empire, un jour!…

Pour Rouletabille, tout cela ne représente qu'une chose, une chose pour laquelle il donnerait cet or, et ces perles, et ces joyaux, et ces rubis, et ces émeraudes, et ces saphirs, une chose pour laquelle il donnerait tous les diadèmes de la terre: la rançon d'Ivana!…

–La rançon! la rançon!…

Comme il répétait ces mots avec délire il eut un mouvement un peu brusque, car il venait de heurter le pic qu'il avait laissé glisser; il se retourna et contre l'angle de l'une des plaques de marbre entr'ouvertes il brisa sa petite lampe électrique.

Aussitôt toute cette magie s'éteignit et il fut plongé instantanément au sein des plus profondes ténèbres.

XXIII
SOUS L'EAU ET DANS LA NUIT

Dire ce qui se passa à cette minute précise dans l'âme de Rouletabille serait difficile.

D'abord il ne comprit pas.

Toute cette nuit après toute cette lumière! Pourquoi?

Pourquoi tous ses trésors disparaissaient-ils au moment même qu'il venait de les toucher?

Était-il le jouet de quelque méchant génie qui, dans le pays des Mille et une nuits, s'amusait de lui et faisait passer sous ses yeux d'illusoires visions?

Ce fut donc sa première pensée: l'inexistence de cela.

Mais cependant, comme, dans un geste spontané, il continuait de toucher, dans la nuit, ces richesses que la nuit semblait vouloir lui prendre, il connut qu'il n'avait pas rêvé.

Le mur était bien là, et les trous dans le mur, et les joyaux et l'or, sous ses doigts, et les portes de marbre auxquelles il se heurtait.

Alors sa main descendit à sa ceinture et il toucha l'appareil électrique brisé.

C'était un accident tout naturel dont il ne comprit pas tout de suite l'importance, mais qui cependant lui donna le frisson, car sa situation devenait redoutable au fond de cette eau et au fond de cette nuit.

Cependant il ne saisit point tout de suite la possibilité d'une catastrophe. Il se raidit contre la peur et appela à lui toute son intelligence, toute sa lucidité. En somme, il n'était point perdu au centre d'une chose inconnue. Il était dans une chambre dont il connaissait le chemin.

Il lui fallait revenir sur ses pas, voilà tout… sans perdre la tête, en suivant très exactement le mur… Pour venir jusque-là, il avait compté deux corridors avant le corridor de la pièce d'eau.

Il s'appuya au mur et, du pied, chercha son pic qui pouvait lui être utile. Sa jambe en heurta le manche de bois, qui se dressait flottant entre deux eaux. Il le saisit et alors commença la marche à rebours.

Ah! voilà le premier couloir.

Là, il lâcha le mur et, orientant avec soin ses semelles de plomb, il s'avança, les bras tendus.

Il se félicita d'atteindre bientôt l'autre angle du mur, de l'autre côté de l'entrée du couloir… Et il continua, le long du mur, sa marche tâtonnante.

Voici le second corridor… Il marche… il marche encore…

Et voici le troisième!…

Soudain il s'arrête et une angoisse inexprimable lui étreint le coeur… Il pense qu'il n'y a aucune raison pour que ce troisième couloir-là soit le bon!…

En effet, en sortant du couloir de la pièce d'eau, il est entré tout droit dans la salle des trésors, jusqu'en son milieu, et puis il a obliqué à gauche jusqu'à ce qu'il rencontrât le mur; mais entre cette partie du mur qu'il atteignit et le corridor d'entrée, qui lui dit qu'il n'y a point d'entrée, qui lui dit qu'il n'y a point d'autres corridors!… Doit-il prendre celui-ci? Doit-il l'éviter?… S'il le prend, ne trouvera-t-il point à son extrémité un nouveau labyrinthe et la mort?… S'il l'évite, ne risque-t-il point de laisser derrière lui la seule issue possible qu'il ne retrouvera peut-être jamais plus?…

Hésitation terrible et puis résolution farouche…

Il marche… Il avance dans le noir liquide… Il s'enfonce dans le corridor… Il s'arrête…

Il tâte de son pied l'eau autour de lui, dans l'espérance de heurter la porte qui, retenue par son gond central, s'ouvre au milieu du corridor, sur un plan parallèle aux murs… Mais il ne sent rien!…rien que le mur qu'une de ses mains ne lâche pas… et il glisse le long du mur…

Et tout à coup la main frémit… Un angle… une nouvelle pièce… Est-ce la pièce d'eau?…

Non! sans quoi il eût rencontré la porte… mais peut-être est-il passé à côté de la porte sans la toucher… Il se retourne, oblique un peu sur sa droite, lâche le mur, revient sur ses pas…

Maintenant, il a hâte de revenir dans la chambre du trésor, car il faut sortir de ce couloir, qui conduit il ne sait où…

L'angle d'un mur… Mon Dieu! il commence à s'y perdre!… Il a bien cru qu'il revenait sur ses pas… S'il s'était trompé, ce serait trop terrible… S'il ne s'est pas trompé, il peut espérer que, rentré dans la chambre du trésor, le prochain corridor sera le bon!

Il marche… il monte, rencontrant des angles… et maintenant il ne sait plus!

Non, il ne sait plus s'il est dans une pièce dont il touche les angles, ou s'il entre dans un corridor, ou s'il en sort…

Il ne sait plus!… Il ne sait plus!…

Il sait seulement qu'il n'est point dans la vasque du jardin d'hiver, sans quoi ses mains glisseraient sur des pierres circulaires, et celles-ci sont plates… Il veut savoir absolument s'il est dans un corridor… Pour cela, il abandonne le mur qu'il tient pour se diriger en face… Il marche… il marche… rien!…

Ses mains ne touchent plus à rien…

Alors il retourne sur ses pas.

Mais il n'arrive plus à retrouver le mur!

Ses oreilles commencent à tinter furieusement. Est-ce le manque d'air qui commence à se faire sentir? ou la folie qui arrive avec ses grelots?…

XXIV
SUITE DU DRAME SOUS L'EAU ET DANS LA NUIT

Rouletabille pense qu'il va mourir… étouffé au milieu de cette nuit et au fond de cette eau…

Ah! qu'il voudrait retrouver un mur!… seulement une pierre pour le soutenir!… pour le rattacher à quelque chose! Il lui semble qu'il serait moins perdu! C'est horrible d'être ainsi dans le néant liquide et noir…

Ses jambes se dérobent sous lui, il sent qu'il va tomber, s'allonger… pour toujours!

Il va mourir… dans ce tombeau plein de millions!… qu'il a violé!… et qui le garde!

Si ses oreilles lui font entendre d'étranges sons, ses yeux, à cette minute suprême, comme il arrive parfois dans la nuit des paupières closes, lui font voir tout à coup de sinistres lueurs… des cercles de lumière qui dansent la danse des millions… la danse des trésors d'Abdul-Hamid…

Rêve magnifique au seuil de la mort…

Avant qu'il ne rende le dernier souffle, les trésors qu'il est venu chercher là, au fond de la terre et de l'eau, ont la coquetterie macabre de briller pour lui une fois encore… oui… Il y a là-bas des rayonnements de joyaux…

Ainsi, ce petit cercle de lumière lactée ne peut être que l'un de ces diadèmes qu'il a osé toucher tout à l'heure et qui vient danser autour de lui, comme s'il était sur le front d'une reine invisible qui danserait et qui serait naine!…

Car le cercle de lumière s'avance à une petite hauteur.

Et voilà que la vision s'agrandit… Ce diadème est vaste maintenant comme une grande roue dont le moyeu serait occupé par un cabochon d'un éclat insoutenable…

Soudain ce cabochon cesse de briller.

Ce n'est plus un diadème qu'il voit, ni un front lumineux sur la tête d'une naine… mais une ombre immense d'homme entouré d'un cercle de clarté glauque.

D'abord Rouletabille croit que c'est son ombre à lui, son reflet, car l'ombre a sa forme à lui; et sa tête est coiffée de ce casque, de cette énorme sphère de cuivre qui repose sur les épaules du scaphandrier.

Et l'autre tient aussi à la main un pic, comme le pic de Rouletabille…

Cependant Rouletabille ne remue pas, et l'ombre et la lumière remuent!…

Rouletabille, qui s'est redressé, reste droit… et l'ombre se penche…

Les bras de Rouletabille restent collés au corps et les bras de l'ombre s'étendent en un geste de surprise ou d'effroi…

Et devant l'ombre, dans la muraille, il y a des reflets merveilleux!…

Et voilà soudain que Rouletabille renaît, respire, pense, se rend compte, se souvient:

–Gaulow!…

Il a devant lui Gaulow, qui vient de découvrir les trésors d'Abdul Hamid!…

Mais alors c'est le salut! c'est le salut si Gaulow ne le voit pas!…

Puisqu'il lui est impossible, à lui Rouletabille de retrouver le chemin du jardin d'hiver dans cet aquatique labyrinthe, il suivra Gaulow et sortira avec lui par le Bosphore, puisque Gaulow est venu par le Bosphore!

Et Rouletabille bénit sa chance qui, tout à l'heure, sur le ponton, l'a retenu au moment où il avait été tenté, autant et peut-être plus que La Candeur, de se ruer sur Gaulow et de le supprimer dans le moment que celui-ci leur était apparu, embarrassé dans ses vêtements de scaphandrier!

Maintenant, c'est Gaulow qui le sauve!

Cependant Rouletabille continue de penser que si la présence de Gaulow le sauve, lui, elle ne fait pas les affaires d'Ivana… Gaulow connaît maintenant l'emplacement des trésors, et voilà la rançon d'Ivana bien compromise…

Alors, tout de suite, cette conclusion apparut dans toute sa netteté à l'esprit du reporter: «Il faut que Gaulow, sans s'en douter, me sauve… et qu'il disparaisse!».

Avec de grandes précautions, Rouletabille s'éloigna du centre de lumière… et il attendit…

L'homme s'était jeté à genoux devant l'un de ces trésors merveilleux et puisait là-dedans à pleines mains. Il remplissait de pierres précieuses un sac qu'il avait apporté avec lui.

Quand ce sac fut plein, il se releva, il prit sa pioche et après avoir repoussé les dalles de marbre, comme s'il craignait la visite importune de quelque curieux au fond de ce coffre-fort sous-marin, il se dirigea du côté opposé à celui par où était venu Rouletabille.

Le reporter, derrière lui, s'avança. Il faisait un pas chaque fois que l'autre en faisait un et avait grand soin de conserver ses distances.

Soudain, dans la clarté lactée qui entourait Gaulow devant lui, Rouletabille aperçut le profil d'une porte de bronze telle qu'il en avait trouvé une à la sortie de la pièce d'eau.

Il ne douta plus qu'ils ne fussent arrivés au Bosphore, d'autant que Gaulow, s'avançant sur cette porte, fit un geste comme pour la faire rouler.

Rouletabille alors fit un mouvement brusque pour se jeter en avant. Est-ce que Gaulow allait lui échapper? Est-ce qu'il allait l'enfermer dans ce tombeau?

Ce mouvement découvrit-il Rouletabille?

Toujours est-il que l'homme cessa soudain de s'occuper de la porte, puis après quelques instants d'immobilité, fit quelques pas au-devant de Rouletabille dans le corridor.

L'autre recula.

Mais Gaulow s'avança encore, levant sa pioche.

Rouletabille ne douta plus qu'il ne fût découvert et leva sa pioche à son tour.

Alors les deux hommes restèrent à nouveau immobiles, se fixant à travers la grosse lentille de leur casque, le pic levé…

Ils comprenaient que l'un des deux devait rester là, et qu'après avoir découvert un pareil secret, il y en avait un de trop sur la terre et sous les eaux!

L'homme, grand et fort, jugea que Rouletabille, petit, mince, d'apparence chétive sous son énorme casque, serait pour lui une facile proie.

Il s'avança aussi vite que le lui permettait le vêtement dans lequel il se mouvait.

Rouletabille, lui, recula encore. Il voulait user de ruse et pensait qu'il avait tout à gagner à sortir du cercle de lumière.

Il s'enfuit, si tant est qu'on puisse appeler fuite cette reculade difficile dans cette eau qui ne lui avait jamais paru si lourde à remuer. Et il laissa glisser sa pioche comme si elle lui échappait par mégarde.

L'autre s'en fut aussitôt à cette arme et la ramassa heureux sans doute d'un événement qui diminuait son adversaire.

Pendant ce temps, profitant de ce que Gaulow se baissait pour ramasser son pic, Rouletabille s'affalait, s'allongeait contre la muraille, sur le sol.

Gaulow continua son chemin, le cherchant.

Quand Gaulow passa devant lui, Rouletabille se leva tout doucement et comme l'homme, arrêté, se demandait où il était passé, il se jeta, par derrière, sur lui; et lui arracha, des deux mains, les deux tuyaux d'inspiration et d'expiration!…

D'abord, sous la ruée, l'homme chancela et puis retrouva son aplomb, et tout à coup porta la main à son casque. Alors Rouletabille assista à quelque chose d'horrible, à l'étouffement de ce grand corps qui faisait des gestes désordonnés pour se soulager du poids formidable qui pesait sur ses épaules… et qui se débattait contre l'étreinte fatale de l'élément.

Il tendit une dernière fois les mains vers Rouletabille et soudain s'écroula, roula par terre, porta les mains à sa poitrine, eut quelques sursauts et puis resta allongé.

Il était mort.

Par un miracle, la lanterne électrique qu'il avait à sa ceinture ne s'était point brisée. Rouletabille alla la lui prendre et, armé de cette lueur propice, il ramassa le sac aux joyaux, puis, tout de suite, s'en fut à la porte, ne s'attardant point à contempler sa victime.

La porte obéit facilement à la poussée du reporter, recevant une égale pression de toutes parts, plus la sienne.

Elle tourna sur ses gonds. Il tourna avec elle et quand elle fut refermée il était dehors, dans le Bosphore.

Rouletabille se rendit compte des difficultés qu'avait dû surmonter Gaulow avant de trouver cette porte qui était quasi recouverte d'algues et encastrée entre deux murs dont l'un s'avançait cachant presque l'autre.

Le reporter sortit de cet impasse et fut sur le lit même du Bosphore. Il ne perdit point de temps à y rechercher les vestiges des civilisations disparues. Il chercha le long de la rive une rampe naturelle, ne tarda point à la trouver… espéra ensuite une échelle, un escalier, et fut assez heureux pour rencontrer enfin une marche, comme il y en avait tant dans ces parages, une marche qu'il gravit et qui fut suivie d'autres.

Et ainsi peu à peu il émergea du niveau du détroit, dévissa non sans effort sa sphère et respira l'air glacé du dehors avec une joie que nous nous refusons à décrire.

Il se rendit compte qu'il était tout près des ruines de Tchéragan et alors il songea à La Candeur qui l'attendait toujours dans le jardin d'hiver et qui devait être dans de belles transes.

Il se soulagea de son vêtement imperméable, le ramassa, lia ensemble tous ses ustensiles et le sac et reprit le chemin qu'il avait fait avec La Candeur.

Cependant au pied du mur qu'il avait à franchir il laissa sous une pierre tous ses impedimenta.

Enfin, il parvint dans les couloirs de Durdané et, en approchant du jardin d'hiver, commença d'entendre un clapotis qui n'était pas ordinaire…

Une minute après il était dans les bras de La Candeur, lequel l'avait cru mort et qui, pour la sixième fois, venait de plonger dans la pièce d'eau à la recherche de son chef de reportage.

Nous renonçons à décrire la stupéfaction et la joie désordonnée du bon La Candeur…

–C'est drôle, dit-il à Rouletabille, quand il fut un peu remis de ses émotions et qu'il eut retrouvé sa voix, c'est toi qui es allé te promener sous l'eau et c'est moi qui suis mouillé!…

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
21 temmuz 2018
Hacim:
280 s. 1 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain
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