Kitabı oku: «Storey», sayfa 4

Yazı tipi:

– Vous devriez passer plus de temps avec vos proches. Croyez-moi, je sais de quoi je parle.

– Vous ne connaissez pas ma mère. Après la mort de mon père, elle s’est endurcie. Je crois qu’elle n’aime pas trop les hommes. Pas après ce que mon père lui a fait. Ne me demandez pas quoi, parce que je ne vous le dirai pas.

Il ne voulait pas le savoir, pensa Paul, il ne voulait pas s’impliquer dans la vie des autres. Il avait déjà assez de mal avec la sienne.

– Je dois partir, dit-il en se levant.

David se leva également et demanda:

– Vous pensez qu’elle s’en sortira?

– Dites-moi, vous avez dit que le traitement allait coûter une fortune. Qui paye pour ça?

– Elle ne l’a pas dit.

– Non?

– Non, elle a seulement dit qu’elle allait se retrouver au chômage pendant un temps. Le journal lui offrira un soutien financier uniquement pendant quelques mois, ce qui est tout-à-fait juste de leur part. Après cela, elle sera à fauchée.

– Vous la connaissez depuis combien de temps? demanda Paul.

– Je sais où vous voulez en venir – vous êtes un type méfiant, c’est ça? Vous m’avez donné cette impression dès la première minute que je vous ai vu. Je ne suis pas né de la dernière pluie, vous savez! Vous pensez que juste le fait qu’elle ait demandé qu’on lui prête de l’argent, fait d’elle une croqueuse de diamants.

– Elle a déjà demandé?

– Juste pour la dépanner, après l’épuisement de ses économies. Je lui ai proposée de l’héberger ici, mais elle ne veut pas en entendre parler. Je crois qu’elle est assez timide, vraiment, réservée. N’aimerais pas s’imposer. Je sais qu’elle paraît être une dure, mais au fond c’est une fille très gentille.

Paul fit une pause.

– Si j’étais à votre place, dit-il, j’attendrais un peu avant de lui prêter quoi que ce soit. Voyez d’abord comment les choses se passeront.

– Quelques milliers par-ci, par-là, ne vont pas me ruiner. Regardez cet endroit. Un oncle me l’a légué dans son testament. Tout payé, avec de l’argent en plus. Je peux me le permettre.

– C’est ce dont j’avais peur. Laissez-moi vous donner mon numéro.

CHAPITRE HUIT

Bien que la maison fût en bon état, l’une des chambres avait besoin de restauration. Paul acheta donc, le lendemain matin, un bidon de magnolia pour peindre le papier peint à motifs que son père avait posé il y a près de trente ans de cela.

Il consacra un bon bout de temps à penser à David et à se demander ce qu’Araminta faisait avec lui. Il se demandait également où Cliff se trouvait dans cette comédie, si c’était le cas. Il pensait à Cliff et à ses trois hommes de main, assis dans les pubs et cafés à s’imaginer des projets qui pourraient rapidement les enrichir, vendre des marchandises volées dans des foires-à-tout ou dans des magasins d’échange contre du liquide en essayant se faire des profits. Il se demandait s’ils étaient sérieux, s’il devait en parler à Rick, les mettre sur une liste, voir s’ils étaient connus des flics de Coventry. D’après ce que Cliff avait raconté, ils se préparaient pour un coup et Paul ne pensait pas que cette virée impliquait Araminta. C’était probablement une affaire sur le terrain et sordide.

Il avait vu qu’Araminta gérait sa propre escroquerie en forçant David à lui remettre de l’argent comptant pour la soutenir le temps que, soi-disant, elle était au chômage. Mais il se demandait si ça aller s’arrêter là. Peut-être qu’il y avait une autre chose de planifiée. David était un peu ringard et peut-être insociable, vivant seul dans une maison inachevée qui lui avait été léguée par un parent. Peut-être qu’il était la proie idéale d’une femme séduisante, qui l’exploiterait ne voulant pas établir une relation de confiance, mais qui agitait continuellement devant lui la promesse du plaisir. Il s’imaginait bien Araminta dans ce rôle, le mener par le nez de la même façon qu’elle l’avait fait avec lui, au début. Etant consciente de son pouvoir et de sa fermeté, elle s’attendait qu’on lui obéisse. Il avait connu des femmes comme elle et avait failli encore une fois tomber dans le piège, avant de remarquer son attitude – le sourire facile, accepter les insultes – et avait fini par s’en détacher.

Peut-être que Cliff lui avait arrangé un rendez-vous avec David et cela faisait partie d’un plus grand plan, un plan qui les impliquerait tous. Peut-être que c’était ça l’affaire – arnaquer un célibataire solitaire pour s’accaparer de ses économies. Au pub, Cliff avait demandé comment David allait. Il le connaissait donc, ou du moins se sentait à l’aise de poser la question. Paul s’imaginait bien Cliff faire marcher David de la même façon qu’il avait essayé de le faire avec lui: disant connaitre une personne que David aimerait, une femme séduisante, une professionnelle, intelligente avec qui il s’entendrait… Mais cela était impossible puisqu’elle avait dit que David travaillait pour la municipalité et qu’elle écrivait sur la municipalité, sur la corruption – oui, ce serait donc son billet d’entrée: un coup de téléphone à son bureau – j’ai entendu que vous étiez droit, David, et que je peux vous faire confiance. Parlez-moi donc des manigances derrière les portes closes de la municipalité…

Il pensait encore à Araminta lorsque son téléphone sonna. Il n’était pas du tout surpris d’entendre sa voix au bout de la ligne.

– Qu’est-ce que tu as dit à David, hier?

– Tu as une excellente façon de commencer les conversations, dit-il.

– Ne t’fous pas de ma gueule, Paul. Qu’est-ce tu lui as dit? Tu es retourné et tu lui as parlé, n’est-ce pas? dit-elle très énervée après lui.

– Tu ne peux pas me reprocher de parler au gars, après la façon dont tu m’as bousculé dehors. Que crois-tu que je suis, un trophée pour le rendre jaloux? Je sais pourquoi tu m’as choisi, mais tu ne m’as donné la chance de briller.

– De quoi tu parles? dit-elle en insistant sur les mots, impatiente de pousser sa gueulante. Il m’a appelé ce matin, il a dit… il a dit qu’il n’allait pas faire ce que je lui avais demandé.

– Te prêter de l’argent?

– Ce n’est pas ton putain de problème. Tu lui as monté la tête, c’est ça? Qu’est-ce tu as raconté?

– Rien. Seulement un petit conseil amical. Après que tu lui as raconté ton histoire de cancer, je pensais qu’il en avait besoin.

Elle s’était tue et il savait qu’elle se préparait, elle réfléchissait à la façon dont elle pourrait continuer la conversation en repensant à ce qu’elle savait de lui et à ce qui pourrait marcher.

– Je t’ai emmené là-bas parce que je pensais que tu étais un ami, dit-elle d’une voix plus méfiante. Bien, on est dans la bonne direction, pensa-t-il. Je savais que ce que j’avais à dire le choquerait sûrement, et que j’aurais peut-être eu besoin d’un peu … d’un peu de soutien.

– Je vois où tu veux en venir… tu lui annonces une chose si dévastatrice qu’il pourrait avoir besoin d’une personne sur qui s’appuyer, tu m’as donc amené avec toi, moi, un inconnu. Qu’est-ce qui peut clocher dans ça?

– Tu ne le connais pas. Il a besoin de soutien, une personne à qui il peut faire confiance. Tu es digne de confiance.

– C’est la chose la plus gentille que tu m’aies jamais dite.

– Vas te faire foutre.

– Et le cancer, c’est vrai?

Silence à nouveau. Paul se l’imaginait, le téléphone contre la joue à analyser la réponse qu’elle pourrait donner.

Mais elle réussit à le surprendre à nouveau, en disant:

– Retrouve-moi ce soir. A Litten Tree, au bout de Heltford Street, près du Bull Yard. On en parlera.

– Je verrai si je peux te caser. Trop de travail ici.

– Sois au rendez-vous. Huit heures.

CHAPITRE NEUF

Rick regardait Kirkland aligner le putt, la routine, en maintenant le putter tel un pendule comme si cela allait modifier en quoi que ce soit son coup foireux. Il regarde les genoux cagneux s’accroupir au-dessus de la balle, comme Jack Nicklaus, mais à chaque fois qu’il rabat le putter pour lancer le coup, il dépasse la ligne et pousse le putt. Rick a vu cela se produire maintes fois, mais il était si heureux de gagner qu’il ne voulait pas que Kirkland sache ce qui clochait.

Il passait ses vendredi après-midi sur le parcours de golf, en avoir pour ses treize milles balles d’adhésion en doses hebdomadaires. Il lui a fallu trois ans pour réussir à avoir des parrains. Maintenant qu’il avait réussi, il allait bien profiter de son adhésion à chaque fois qu’il le pouvait, il ne laissera pas l’herbe lui pousser sous les pieds. Vendredi était le jour idéal, mais il essayait de jouer dans des tournois les week-ends, s’il pouvait, pour réduire son handicap.

Le parcours s’appelait Shooters Hill, à Greenwich, à quelques kilomètres de Canary Wharf, bien que ce soit assez difficile à croire. Les panoramas des pentes douces du nord de Kent, brillantes en ce moment de l’année sous un soleil doux de fin d’après-midi. Vu son travail, il pensait que ce serait à en mourir de rire de devenir membre de ce club particulier, mais ça lui ressemblait bien. Et s’il pouvait également l’emporter sur Kirkland, c’était un bonus.

Le putt de Kirkland glissa à côté du trou. Et voilà, il n’apprendra jamais. Rick aspira grandement à travers ses dents.

– De très près, mon pote. Putt difficile.

Kirkland putta la balle à l’extérieur en étant sur la ligne de Rick, puis prit sa balle du trou, plia un genou et plaça son autre jambe derrière pour se mettre en équilibre, telle une cigogne. Il était nouveau au département et Rick l’avait pris sous son aile, mais il n’allait pas le dorloter non plus! Si vous êtes dans le département, c’est que vous avez déjà ce qu’il fallait et que vous pouvez vous défendre tout seul.

Le tee suivant était en trois coups, Rick commença le premier… lorsque son téléphone sonna.

Kirkland leva les bras, Tu plaisantes, Rick jetant un coup d’œil sur l’écran et leva son index: Je dois répondre à ce coup de fil.

– D’accord, enfoiré, pourquoi tu ne m’as pas dit que tu partais? Et où diable es-tu? dit-il au téléphone.

La voix de Storey calme comme d’habitude, cette façon de sembler être à des distances tout en étant assis sur la chaise d’à côté. C’était un don de délimitation. Ça le rendait bon dans son travail.

Lorsqu’il en avait un!

– Je ne voulais pas te parler, dit-Storey, tu sais très bien ce que tu aurais dit.

– Tu as raison, même si je ne crois pas que j’aurais beaucoup parlé – je t’aurais plutôt assommé. Un boulot rapide puisque de toute façon tu n’as pas de bon sens.

– C’est ma décision, Rick. Je ne pouvais pas continuer, et puis je ne pouvais pas rester en ville. De plus, mon père est mort. J’avais des choses à régler.

Cela réfréna Rick, mais pas pour longtemps. Il croyait en la famille, mais il pensait que Storey a dû passer outre, faire une pause comme le recommandaient les psys, puis pouvoir revenir et se remettre en selle, comme on dit.

– Storey, tu es un trou du cul, dit-il. Ce qui t’es arrivé aurait pu arriver à n’importe qui. Tu étais sous les ordres et d’ailleurs tu as été disculpé.

– Je n’aurai pas dû me retrouver dans une situation qui avait besoin de disculpation. C’était de ma faute.

Rick était présent sur les lieux avec lui ce soir-là, et il avait toujours l’image du corps allongé sur le sol, les autres membres de l’équipe debout autour qui le regardaient, se disant tous: Pauvre bâtard, Storey, il va y avoir de la merde !

Peu importe le temps que vous avez passé sur le terrain, les choses peuvent toujours mal tourner.

Cela n’a pas d’importance. Il se rappela de ce que Thomas lui avait dit, Fais revenir Storey, on a besoin de lui, il était l’un des meilleurs, toujours attentif, bon souffle. Se rendre à l’ancienne adresse de Storey ne lui avait servi à rien, à part de recevoir un savon de la part de sa voisine, cette jeune femme en sueur qui, selon lui, savait plus qu’elle n’en disait. Elle avait probablement envie de Storey. Ce qui était souvent le cas de la plupart des femmes.

– Je comprends pourquoi tu es parti, dit-il, t’avais juste besoin d’un peu de temps et toutes ces conneries. Mais tu fous tout en l’air. Tu devrais te ressaisir et te grouiller de revenir.

– J’ai démissionné – tu as oublié?

– Il est possible d’annuler ta démission.

– Thomas t’as parlé? Charme habituel? Je le vois bien te demander de me parler pour me faire revenir, parce qu’il n’accepterait pas de le faire lui-même.

– Peu importe. Ce n’est pas de lui qu’on parle.

– Je sais, tu penses à moi. Vous êtes tous chaleureux et câlins là-bas. Vous vous mettez au lit un ours en peluche dans les bras.

Kirkland pratiquait son swing en regardant son prolongement, en gardant sa dernière position et en étudiant le pli de son coude, comme s’il ne faisait pas parti de son corps. Rick lui tourna le dos et dit à Storey:

– Donc si tu ne reviens pas et que tu ne me dis pas où tu es, pourquoi tu m’appelles? Si ça ne te dérange pas, j’ai un petit garçon, ici, qui attend que je lui donne une bonne raclée. Et non, je n’aimerais pas reformuler ma phrase.

– Toi et ton putain de golf. En fait, tu pourrais m’être utile.

Et voilà, pensa Rick. Ils ne lâchent jamais prise quand ils ont besoin de quelque chose. Ils n’arrivent pas à sortir complètement du système – accéder à des informations qu’ils n’arrivent pas à avoir ailleurs. Il a connu beaucoup trop d’hommes qui ont quitté la police et sont entrés aux services de la sécurité privée, puis qui passent un simple coup de fil uniquement pour avoir des nouvelles et obtenir une adresse… en général, sa réponse était: non, je ne peux pas. Si tu voulais ce type d’informations, tu aurais dû rester flic.

Mais il était peut-être préférable de garder Storey de son côté, plutôt que de l’énerver pour le moment. Si Thomas voulait qu’il revienne, alors il devrait continuer à parler à Storey jusqu’à ce que quelque chose éclate et qu’il arrive alors à le tenter.

– Tu veux m’utiliser et ensuite me jeter comme une serviette sale, dit-il.

– C’est exactement ça.

Rick écouta Storey lui raconter l’histoire du petit groupe qu’il avait rencontré, de cette femme Araminta et de l’homme qui s’appelle Cliff. On ne sait pas comment, mais il s’est retrouvé impliqué avec eux. Il jouait maintenant le jeu pour connaître leur plan. Ils ne savaient rien à son sujet, mais ils avaient l’air d’aimer la façon dont il se comportait.

– Alors qu’est-ce que tu veux? demanda Rick. Des arrestations? Des mises en garde?

– Tout. Je connais Elliott depuis l’école. Eh bien, je l’ai vu. Je crois que cette femme Araminta est une arnaque de première. Ça serait une bonne chose si elle avait une relation avec lui, mais j’en doute.

– Tu devrais passer le relais aux flics locaux. Pourquoi tu t’impliques?

– Ça m’occupe. D’ailleurs je suis un combattant du crime, non? Né pour combattre le crime.

– Fais chier. Je suis sur le point de passer au quatorzième trou, alors vas te faire voir.

– Fais gaffe de ne pas tomber, tu te feras mal.

Rick raccrocha, se retourna et vit Kirkland le regarder en fronçant les sourcils pensant qu’il lui dirait sûrement qui était au bout du fil.

N’y pense même pas. Il n’avait pas besoin de le savoir. Si Rick voulait enfreindre la loi en donnant à Storey des informations, moins de personnes le savaient mieux c’était.

CHAPITRE DIX

Il les avait aperçus avant même d’arriver à la porte d’entrée du pub – les trois hommes de Cliff traînaient dehors, deux d’entre eux fumaient, le troisième celui qu’il pensait être probablement Dutch, avait un demi à la main. Merde. Est-ce qu’elle était enchaînée à lui? Elle ne pouvait donc rien faire sans que Cliff soit présent?

Il jeta un coup d’œil autour. Le Litten Tree était un gastro pub dans un quartier bondé non loin du centre-ville, sur la route qui menait à la gare et à Kenilworth. Il voyait la grande télé murale à travers la porte à double battant, mesurant facilement deux mètres, si ce n’est pas plus. L’endroit semblait être animé contrairement la rue.

– Quelle foutue coïncidence de vous revoir ici, vous trois, dit-il.

Gary, le plus petit avec le regard intense, écrasa sa cigarette de son pied.

– Bavard comme d’habitude. Tu n’la mets jamais en veilleuse?

– Tu fais ressortir ce qu’il y a de meilleur en moi. Araminta est là?

Gary leva son regard vers Tarzan:

– Tu crois, Tarz? Tu l’as vu?

Il aimait utiliser le grand homme comme son larbin, pensa Paul, une façon de se monter contre les autres.

– Je suis certain d’avoir senti son odeur dans le coin, continua-t-il avant que Tarzan ne réponde. Une jupe à la recherche de quelqu’un pour gigoter en-dessous, comme une putain de prostituée en chaleur. Hein, Tarzan? As-tu vu une personne qui répond à cette description?

Tarzan prit une taffe de sa cigarette et secoua la tête:

– Non, pas dernièrement. Pas de jupons puants par ici.

– Alors quoi de neuf? dit-Paul. Vous attendez quelqu’un? Vous savez, il y a bien longtemps de cela une personne m’a dit: si tu vois trois hommes debout devant un pub, cela veut probablement dire que deux d’entre eux sont pédés et que le troisième est jaloux. Alors qui est qui?

Gary remonta son pantalon par la ceinture, regarda autour de lui pour voir si quelqu’un regardait. Paul se prépara en cas de coup de poing. Tarzan écrasa sa cigarette. Paul croyait qu’ils se préparaient à le cogner, lorsque Dutch se mit à rire:

– Putain, il vous a eu tous les deux, dit-il. Un expert en blague a réussi à froisser vos quéquettes.

– Ferme ta putain de gueule, dit Gary.

Paul remarquant son visage virer au rouge:

– Contrairement à mon pote Tarzan, je suis sûr de ma putain de masculinité.

– Ouais, je vois ça, dit Dutch. Je le vois très bien sur ta putain de gueule.

La porte du pub s’ouvrit et Cliff apparut, costaud, musclé et ferme. Paul commençait à voir plus l’influence qu’il pouvait avoir sur les gens.

– C’est quoi ça, un putain d’institut de femmes? dit Cliff.

– On était juste…

– Ouais, ouais, je vous ai dit de m’avertir lorsque ducon se pointe.

– C’est moi? demanda Paul.

– D’après toi? Il n’y a que la vérité qui blesse. Allez, amène-toi par ici, lui dit-il en saisissant Paul par le bras et l’éloignant de la lumière de la porte d’entrée.

Il traversa l’enceinte de Bull Yard en direction du passage souterrain qui menait à un parking à plusieurs étages.

Paul, secouant le bras pour se libérer, se demandait où ils allaient. Etait-ce le moment où Cliff entrait en jeu, lui faire son baratin sur la virée qu’il planifiait? Ou est-ce autre chose?

Ils s’arrêtèrent au milieu du passage souterrain, face à un mur en céramique noir et blanc. Il tendit, puis détendit ses muscles. Son centre de gravité retrouvé. Son ouïe réglé, hypersensible maintenant au piétinement de leurs pieds sur le goudron, cinq hommes se mettant en position, une légère brise venant du passage souterrain, une puanteur s’échappant d’une demi-douzaine de poubelles industrielles bleues.

– Je dois te parler de Minty, dit Cliff, tu le sais, c’est ça?

– Est-ce qu’elle est là?

– Peu importe. Que fais-tu avec cette fille? Tu cherches à tirer un coup avec elle? Une belle nana comme elle! Elle est peut être une peau de vache pour la plupart du temps, mais elle sait comment s’y prendre, je suis d’accord avec toi.

Paul se pencha en arrière, en laissant une distance entre lui et Cliff, et dit à voix basse:

– Qu’est-ce que ça peut te faire? Elle a un mec, non?

– Tu l’as rencontré hier, c’est ça? J’ai eu tout le scénario. Elle était en pétard lorsqu’elle a su que tu lui avais parlé. Elle croit que tu es en train de ruiner sa vie sentimentale. Tu devrais faire gaffe à ça, mon vieux, ne te glisse jamais entre une fille et une queue sympa, tu sais de quoi je parle?

Paul sentit qu’il se trouvait soudainement au milieu d’un cercle, les autres ayant changé de position.

– C’est quoi ça? demanda-t-il. Est-ce que tu me menaces? pensa-t-il à ajouter.

Cliff jeta un coup d’œil à chacun de ses hommes avant de se retourner vers lui.

– Tu penses que c’est une menace? C’est juste cinq mecs qui parlent dans un tunnel de merde. On pourrait parler de pêche, non, si je savais la moindre putain de chose sur la pêche. C’est une chose que je n’ai jamais réussi à comprendre – pourquoi on l’appelle la ‘pêche à la ligne’? Qu’est-ce que cette putain de ligne? Je veux dire dans le contexte.

– Qu’est-ce qui se passe avec Araminta et David? demanda Paul. Ce truc de cancer? Lui donner de l’argent pendant la durée de son traitement… Je suis surpris qu’il soit tombé dans le panneau.

– Quoi, avec ta grande expérience en psychologie humaine en tant qu’agent d’assurances, c’est de ça qu’on parle?

– Entre autres.

Cliff hocha la tête dans l’obscurité, comme s’il savait que Paul allait lui donner cette réponse ou quelque chose similaire.

– Eh bien, je savais que tu n’étais pas un foutu employé de bureau. Tu es trop vulgaire. Qu’y a-t-il d’autre? Dans ton passé? demanda-t-il.

Paul resta silencieux, il le dévisagea avant de poser lourdement son regard sur les autres hommes.

– Je te parie que tu étais dans l’armée, dit Cliff. Toutes ces conneries de voyager partout… je te parie que tu as fait un tour en Irlande ou en Irak, c’est ça?

Paul continua à le fixer en silence… laisse faire, ne révèle rien.

– Rien à foutre – fou juste la paix à David, dit Cliff l’air las. C’est un homme bien qui fait un travail important. Contrairement à toi.

– Si tu le dis.

– Oh, tu parles maintenant? J’pensais que les putains de fantômes du parking t’avaient coupé la langue. Donc tu vas le laisser tranquille, n’est-ce pas?

– Je vais y réfléchir…

Plus tard, il se demanda si Cliff lui avait donné là un signal qu’il n’avait pas compris ou si c’était tout simplement le moment qu’ils avaient convenu… il reçut un coup violent derrière la tête, le faisant chanceler et le renversant en avant, probablement un coup de poing de Tarzan. Il vit alors Dutch, là, en face de lui avec une étrange expression sur le visage qui lui tirait ses traits. Paul se plia en deux lorsqu’il prit un coup de poing dans le ventre, faisant jaillir l’air de ses poumons. A la fraction de seconde suivante, il s’attendait à quelque chose venant de Gary, mais rien.

Cliff se tenait alors en face de lui. Il sentit des mains agripper ses bras et le redresser. Il avait du mal à respirer, sa vue était devenue floue et sentait un mal de tête lui monter à l’arrière du crâne. Il pensait qu’on le testait.

Il se pencha à nouveau et voulut cracher, mais changea d’avis. Cliff le lâcha et lui tapota sur le dos: il venait de réussir le test. Paul se dit: ne parle pas et respire profondément. Sa vue commençait à s’éclaircir, il aurait pu facilement vomir.

Cliff se rapprocha et lui chuchota à l’oreille.

– Viens à l’intérieur quand tu te sentiras mieux, dit-il calmement. Prends ton temps. Personne n’est mort.

Puis Paul entendit les hommes s’éloigner, se parlant entre eux. Il posa les mains sur ses genoux et sentit le goût de la bile au fond de sa gorge.

Il était heureux qu’ils aient tiré cela au clair.

Arrivé à la porte, il se sentait déjà mieux et se demandait pourquoi il retournait à l’intérieur du pub. Il voulait boire un verre, mais il ne savait pas s’il pourrait en encaisser plus de Cliff et des rites de sa pseudo-mafia. Mais il savait également que s’il partait maintenant, il passerait pour une mauviette. Et vu ce qui se passait entre lui et Cliff, il ne pouvait pas faire ça.

Les voilà, assis près de la fenêtre, pas un cheveu de travers, graissés en arrière, tous sérieux à l’exception de Gary, voulant montrer qu’il avait marqué un point.

Il tira sa chaise en la raclant et s’assit face à Cliff, le fixant du regard, puis se retourna vers Gary qui lui faisait un demi-sourire en lui montrant ses dents, les yeux brillants.

D’un mouvement décontracté, Paul donna un coup au demi de Gary en le renversant sur ses genoux avant qu’il puisse reculer et se lever. Paul lui saisit les cheveux et lui plaqua le visage dans le liquide, le clouant là en relançant un regard vers Cliff sans tenir compte les tentatives de Gary à se libérer. Tarzan et Dutch se raidirent immobiles.

Cliff n’avait pas bougé.

– Gary ne t’a jamais touché, dit-il.

– Vraiment? Il devrait alors faire attention à ses fréquentations.

– Il est mouillé, maintenant. Il va puer.

– Il avait besoin de se changer de toute façon. J’en avais marre de le voir avec ce blouson.

Paul repoussa la tête de Gary et le petit homme se releva, la bière dégoulinant du visage, puis fit un pas en avant.

– Ne fais pas ça, dit Cliff à voix basse. Pas ici. Vas t’essuyer le visage. Ça t’apprendra à te moquer des malheurs des autres.

– Je vais l’enculer, dit Gary en s’essuyant le menton. Attends pour voir si je ne vais pas le faire. Juste au moment où tu t’y attendras le moins.

Il s’éloigna et se dirigea vers les toilettes. Dutch alla au bar et revint avec des serviettes pour essuyer la table.

– Je me rappelle de toi au bahut, dit Cliff, mais c’est un peu vague. Des choses qui me reviennent – tu jouais au rugby, tu étais le capitaine de l’équipe de tennis. Je ne me souviens pas t’avoir beaucoup vu dans le coin. Remarque, je n’allais pas souvent au bahut. Je me foutais toujours dans la merde. Ma vie a pris un chemin différent du tien? Je me suis mis dans la drogue, puis des petits délits pour me payer ma drogue. Les conneries habituelles. J’ai réussi à arrêter avant de me mettre dans les drogues dures. J’ai toujours vécu ici. Un petit poisson dans un petit étang. Hé, comment as-tu appris ces choses?

– Quelles choses?

– Gary essayait de se libérer, mais tu arrivais à le maintenir en bas avec une seule main. Putain de forces spéciales ou quoi? Points de pression et tout?

Paul se dit qu’il avait eu de la chance – il était assis dans une position qui lui permettait d’appuyer sur la tête de Gary sans avoir besoin de faire trop d’efforts. Il n’avait pas entièrement perdu sa forme, non plus. Il a pu alors pivoter son épaule et son coude pour garder le petit homme fermement maintenu.

– J’ai appris un ou deux trucs, dit-il. Autodéfense. Les assurances peuvent être un sale boulot.

Cliff regardait par-dessus son épaule.

– Voilà Gary de retour. On peut y aller maintenant. Lève-toi.

Sortis, Paul savait qu’ils allaient quelque part lorsqu’il vit Cliff se diriger vers un grand fourgon blanc garé dans la rue près d’une station de taxi.

Cliff déverrouilla la porte du conducteur et monta, Dutch glissa le panneau de la porte côté passager et dit à Paul de monter. Une fois à l’intérieur, Paul s’installa sur un siège et remarqua que Tarzan était monté derrière lui pour s’affaisser sur le siège en face en faisant grincer les ressorts. Tarzan était sûrement supposé le surveiller. Dutch et Gary étaient à l’avant avec Cliff. Ce dernier démarra le moteur, engagea la première et prit la route en quittant le centre-ville.

Les trois sur les sièges avant se mirent à discuter entre eux, mais Paul ne pouvait pas les entendre à cause du bruit à l’arrière. Il jeta un coup d’œil autour de lui, mais ne trouva rien d’intéressant. Un siège libre à côté de lui et un autre à côté de Tarzan, en fait le fourgon était presque entièrement vide: un plancher en tôle à nervures, des logements de roue et quelques sangles en plastique avec des crochets en métal à l’extrémité pour attacher des marchandises. Les fenêtres-arrière étaient recouvertes de planches.

– Alors à qui appartient la Batmobile? demanda-t-il à Tarzan.

Tarzan se pencha en avant, ses longs bras pendant entre les genoux. Paul remarqua que contrairement à la première fois, l’homme portait une chose qui ressemblait à un costume – une veste et un pantalon appariés, des chaussures noires unies, une chemise blanche avec col à pointes boutonnées mais sans cravate. Il paraissait gêné et Paul pensa qu’il n’était pas habitué à s’habiller en tenue de gala.

– Je n’ t’aime pas, dit Tarzan, alors ne m’parle pas. Sinon, tu recevras une autre beigne dans la tête.

– Je croyais qu’on commençait à s’entendre.

– T’as dit que j’étais une tapette.

– C’était uniquement une image. Tu ne devrais pas me prendre au sérieux.

– Je ne te prends pas au sérieux. Ferme ta putain de gueule maintenant.

– J’aime bien ton costard.

Tarzan le fixa, mais ne dit rien. Paul essayait d’entendre ce que le groupe disait à l’avant, mais ils parlaient trop bas. Cliff passait les vitesses et le bruit d’accélération du moteur à travers le plancher du fourgon lors de la transmission de la pulsion aux roues-arrières vibrait sous ses pieds.

Paul reconnut une sortie du périphérique après l’hôtel Ramada et devina qu’ils se dirigeaient vers Tile Hill, côté ouest de la ville. Quelques minutes plus tard, les lumières des maisons s’estompèrent et ils traversèrent Hearsall Common, monotone et sombre des deux côtés.

– J’ai travaillé ici, dit-il à Tarzan, quand j’avais dix-huit ans. Un boulot d’été. Une entreprise de pièces détachées de machines, qui vendait des gadgets. Tile Hill, près de Massey Fergusons.

Il avait trouvé une chose pour attirer l’attention de Tarzan.

– C’est fermé maintenant, dit-il. Entièrement dégommée, remplacée par des maisons.

– Ce sera bien quand ils auront fini de construire Coventry, non?

Mais ça n’avait plus l’air de l’intéresser. Tarzan regardait à nouveau Paul avec mépris, les doigts joints entre les genoux.

Cliff ralentissait en prenant un dernier virage et ralentissait encore plus pour finalement s’arrêter. Paul voyait à travers le pare-brise qu’ils se trouvaient dans une rue déserte, peut-être une zone industrielle, quelques voitures garées au bord de la route. Un seul lampadaire éclairait le trottoir.

Du siège avant, Dutch se retourna et regarda Paul. Son visage pâle rougit.

– Tu es impliqué maintenant, mec, tu es en plein dedans. Tu sais dans quoi tu t’es foutu? Tu n’en a pas la moindre idée, n’est-ce pas?

– Dutch, dit Cliff et l’homme se retourna pour regarder à travers le pare-brise comme les autres.

Paul se demandait ce qui pouvait bien les rendre aussi excités. C’est un cambriolage? Allait-il mettre des gants et une cagoule et grimper par-dessus une clôture avec eux?

Il ne le pensait pas. Ils étaient trop mal préparés et n’avaient aucun équipement avec eux. Ils observaient quelque chose, peut-être qu’ils surveillaient un bâtiment ou qu’ils voulaient le lui montrer… c’était probablement cela. Ils lui montraient ce qu’ils allaient faire pour l’impliquer, l’entraîner petit à petit dans la sauce et rendre son retrait plus difficile.

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Yaş sınırı:
0+
Litres'teki yayın tarihi:
09 nisan 2019
Hacim:
301 s. 2 illüstrasyon
ISBN:
9788873040620
Tercüman:
Telif hakkı:
Tektime S.r.l.s.
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