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Kitabı oku: «La Vie de Madame Élisabeth, soeur de Louis XVI, Volume 1», sayfa 33

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XVII
NOTES SUR LE VOYAGE DE M. LE COMTE ET DE Mme LA COMTESSE DU NORD EN FRANCE AU MOIS DE MAI 1782

M. le grand-duc et madame la grande-duchesse de Russie, héritiers présomptifs de ce thrône, le mari, de la maison d'Holestein régnante alors en Russie, et la femme de la maison de Virtemberg, sont arrivés à Paris le 18 mai 1782, voyageant incognito198, sous le nom de comte et comtesse du Nord; ils ont été le 20 à Versailles, où l'appartement de M. le prince de Condé199 avoit été préparé pour les recevoir. M. le comte du Nord a été chez le Roi en arrivant, accompagné des officiers chargés de la conduite des princes étrangers et ambassadeurs; on ne sait pas s'il s'est trouvé des officiers des cérémonies à sa visite chez le Roi; une chaise à porteurs de la Reine a été prendre madame la comtesse du Nord à son appartement; accompagnée de la livrée de la Reine qui l'a conduite chez Sa Majesté, cette princesse a été accompagnée par madame de Vergennes, femme du ministre des affaires étrangères. M. le comte et madame la comtesse du Nord ont vu de suite toute la famille royale et ont dîné avec elle, dans la pièce qui précède la chambre de la Reine où Leurs Majestés ont coutume de manger le dimanche. Il ne s'est trouvé ni princes ni princesses du sang chez le Roi et chez la Reine, ils ne se sont point trouvés non plus à un concert qu'il y a eu le soir chez la Reine, le tout parce qu'ils ne devoient pas être nommés à M. le comte et à madame la comtesse du Nord, et qu'on a cru qu'il étoit difficile qu'ils fussent dans la chambre sans être connus d'eux. Madame la princesse de Lamballe avoit demandé dispense de se trouver au concert à cause de son rang, mais la Reine a voulu qu'elle y fût relativement à sa place de surintendante de la Maison de Sa Majesté. Au reste, la Reine a eu la bonté de concerter les choses de manière que tout s'est passé sans que le rang fût compromis. M. le comte et madame la comtesse du Nord ont envoyé dans l'après-midi, à l'appartement de madame la princesse de Lamballe, des cartes qu'on trouvera attachées à ces notes, et madame la princesse de Lamballe en a renvoyé chez eux de pareilles; moyennant cette précaution, la connoissance s'est trouvée faite quand M. le comte et madame la comtesse du Nord sont venus chez la Reine; et Sa Majesté a simplement montré à madame la comtesse du Nord que madame la princesse de Lamballe étoit auprès de la dernière de Mesdames, alors madame la comtesse du Nord a été à Madame Victoire, la pria de la présenter à madame la princesse de Lamballe; cette dernière s'est avancée pour répondre comme elle le devoit à cette politesse, et elles se sont dit réciproquement qu'elles avoient été l'une chez l'autre; M. le comte du Nord et madame la princesse de Lamballe ne se sont point parlé. Ce même jour M. le comte et madame la comtesse du Nord sont retournés à Paris, et le lendemain 21 ils ont envoyé des cartes à la porte des princes et princesses, c'est-à-dire M. le comte du Nord à la porte des princes et princesses, et madame la comtesse du Nord à la porte des princes seulement. Les princes200 et princesses ont renvoyé des cartes pareilles chez M. le comte et madame la comtesse du Nord; on dit indéfiniment M. le comte et madame la comtesse du Nord, parce que les princes ont envoyé des cartes chez la femme comme chez le mari, quoiqu'elle ne fût pas venue chez eux par égard pour son sexe; madame la princesse de Lamballe a renvoyé des cartes, quoiqu'elle eût été écrite à Versailles, parce que M. le comte et madame la comtesse du Nord en avoient envoyé chez elle à Paris. La carte qui a été envoyée à la porte de M. le duc de Penthièvre par M. le comte du Nord se trouve attachée à ces notes.

Le 23201, il y a eu opéra à la Cour, auquel les princes et princesses n'ont point accompagné Leurs Majestés, parce qu'elles ont été dans une loge. La famille royale et les princesses202 ont aussi été dans les loges. Le spectacle étoit dans la grande salle.

Le 27, toujours du même mois de may, M. le comte du Nord est venu en personne203 chez M. le duc de Penthièvre à dix heures du matin, accompagné de M. le Prince de Bariatinsky, ministre de Russie, et ils ont laissé à la porte de l'hôtel de Toulouse les cartes qu'on trouvera attachées à cette note. On trouvera encore attaché à ces notes le papier qui a été envoyé à M. le duc de Penthièvre, alors à Sceaux, par le suisse de l'hôtel de Toulouse, ce même jour 27. L'invitation au bal que le Roi devoit donner pour M. le comte du Nord a été apportée encore à l'hôtel de Toulouse à Paris, elle est attachée à ces notes. Le lendemain 28, M. le duc de Penthièvre a retourné en personne chez M. le comte du Nord, et a demandé aussi madame la comtesse du Nord. Il a laissé à leur porte le billet dont la minute est attachée à ces notes, en priant de le remettre à M. le prince de Bariatinsky.

Le 29 may, il y a eu un second opéra auquel le Roi, la Reine et la famille royale ont assisté de la même manière qu'à celui du 23. L'arrangement des loges des princesses a été mauvais encore: madame la duchesse de Chartres, madame la duchesse de Bourbon occupoient les trois premières auprès de celles où étoit la famille royale à la gauche, et mademoiselle de Condé la première à la droite; M. le duc d'Orléans a été dans la loge de madame la duchesse de Chartres.

Le 1er juin au soir, M. le duc de Penthièvre a été instruit que M. le comte et madame la comtesse du Nord devoient venir dîner à Sceaux le surlendemain 3. En conséquence, il a envoyé sur-le-champ des billets d'invitation aux Russes dont la liste est ci-jointe; on trouvera dans cette liste la formule des billets qui ont été envoyés: on trouvera encore ci-joint la liste des Russes qui avoient été invités par M. le duc d'Orléans204, contenant la formule du billet qu'il a envoyé et la liste générale des personnes de la nation russe se trouvant à Paris, que M. le duc de Penthièvre avoit fait demander à M. le prince de Bariatinsky, ministre de Russie, par l'entremise de madame la duchesse de Chartres. M. le duc d'Orléans en avoit usé de même par l'entremise d'une autre personne. M. de Bariatinsky a été invité verbalement par un valet de chambre; ce ministre s'est chargé de distribuer tous les billets des Russes205. M. le duc de Penthièvre a invité en outre M. le maréchal et madame la maréchale de Noailles, M. le maréchal et madame la maréchale de Mouchy, madame la duchesse de la Vallière, seconde douairière, madame la comtesse de la Marck, M. le duc d'Estissac, M. et madame d'Aubeterre et M. le duc de Crussol; il y avoit en outre plusieurs personnes, hommes et femmes, qui sont venues à Sceaux ou qui s'y sont trouvées accidentellement sans doute. Les premiers officiers et les dames de la maison de M. le duc de Penthièvre, et M. le vicomte de Lastic, son ancien premier gentilhomme de la chambre, madame la princesse de Conty et madame la princesse de Lamballe ne se sont point trouvés à ce dîner, parce que madame la comtesse du Nord n'étoit pas venue chez elles en personne. Le 3, lorsque M. le comte et madame la comtesse du Nord sont arrivés à Sceaux, M. le duc de Penthièvre a reçu madame la comtesse du Nord à la descente de sa voiture206, par égard pour son sexe. M. le duc d'Orléans l'avoit rencontrée à la porte de la dernière antichambre lorsqu'elle a été au Raincy, c'est-à-dire de l'antichambre la plus près de la Cour; elle a dit des choses très-honnêtes à M. le duc de Penthièvre en le traitant d'Altesse, et M. le comte du Nord qui a été nommé à M. le duc de Penthièvre par M. de Bariatinsky, en a usé de même en ajoutant le mot de Monseigneur pour mieux marquer son incognito. M. le duc de Penthièvre lui a nommé ses trois premiers officiers, et ensuite il a conduit M. le comte et madame la comtesse du Nord dans l'appartement du rez-de-chaussée en leur donnant le pas qu'ils ne vouloient point prendre, surtout M. le comte du Nord. Arrivés dans le salon, M. le duc de Penthièvre a nommé à madame la comtesse du Nord les dames titrées ou non titrées qui n'étoient point connues d'elle, et ses premiers officiers, ainsi que tous les hommes qui étoient dans la chambre. Il a aussi nommé tous les hommes à M. le comte du Nord et lui a indiqué quelles étoient les dames qu'il voyoit. Il n'a point été question de fauteuils, tout le monde, princes, princesses et autres, s'est assis sur des chaises. Lorsque le moment de se mettre à table est venu, madame la comtesse du Nord a passé avec madame la duchesse de Chartres se tenant par la main, mais cependant madame la duchesse de Chartres laissant le pas à madame la comtesse du Nord; toutes les dames ont passé ensuite, puis M. le comte du Nord avec M. le duc de Chartres, à peu près comme madame la comtesse du Nord et madame la duchesse de Chartres, ensuite M. le duc de Penthièvre, et puis tous les hommes; on s'est placé à table, hommes et femmes, sans rang. M. le comte et madame la comtesse du Nord étoient à peu près au milieu de la table, M. le duc de Penthièvre entre eux deux; madame la duchesse de Chartres étoit à côté de madame la comtesse du Nord, à sa droite, puis une dame et ensuite M. le duc de Chartres; les princes et princesses ont été servis par des pages, et les autres personnes par la livrée; il va sans dire que M. le comte et madame la comtesse du Nord ont été compris parmi les princes et princesses, et par conséquent servis par des pages. Les gentilshommes de M. le duc de Penthièvre n'ont point mangé avec madame la comtesse du Nord; Sceaux étoit excepté du nouvel usage établi à l'égard de ces messieurs, à l'instar de Saint-Cloud.

Après le dîner, on a été à la promenade dans les calèches et différentes voitures. M. le duc de Penthièvre a mené207 M. le comte et madame la comtesse du Nord dans une petite calèche à un cheval; madame la comtesse du Nord et madame la duchesse de Chartres étoient dans le banc du fond, et M. le comte du Nord et M. le duc de Penthièvre étoient sur le banc en avant. M. le comte et madame la comtesse du Nord ont monté en calèche avant madame la duchesse de Chartres et M. le duc de Penthièvre. Il s'est trouvé une collation sans table ni apparat au pavillon de la ménagerie, et après cette collation, madame la comtesse du Nord a voulu absolument que madame la duchesse de Chartres passât avant elle pour remonter en calèche, et M. le comte du Nord a terminé les compliments à cet égard en donnant la main à madame la duchesse de Chartres, et passant avec elle. Madame la comtesse du Nord a passé ensuite donnant la main à M. le duc de Penthièvre. M. le comte du Nord voulut que M. le duc de Penthièvre montât en calèche avant lui, mais ce dernier fit le tour de la calèche et monta par le côté opposé à celui par lequel M. le comte du Nord y montoit. On revint au château, et après avoir resté un moment dans le salon, M. le comte et madame la comtesse du Nord s'en retournèrent à Paris; il étoit environ sept heures du soir. M. le comte du Nord voulut s'échapper sans être vu, mais M. le duc de Penthièvre s'en étant aperçu, alla le reconduire; madame la comtesse du Nord vint ensuite, l'un et l'autre ne voulurent pas absolument que M. le duc de Penthièvre passât la porte de la dernière antichambre, où il avoit joint M. le comte du Nord, lorsqu'il avoit voulu s'échapper. M. le duc de Penthièvre ayant sçu que M. le duc d'Orléans avoit retenu M. le comte et madame la comtesse du Nord à souper le jour qu'ils avoient été au Raincy, fit proposer la même chose à madame la comtesse du Nord par madame la duchesse de Chartres, mais les arrangements de M. le comte et de madame la comtesse du Nord ne leur ayant pas permis d'accepter l'offre de M. le duc de Penthièvre, la discrétion l'empêcha d'insister.

Le lendemain 4, M. le duc de Penthièvre a retourné chez M. le comte et chez madame la comtesse du Nord, ses arrangements ayant demandé qu'il ne différât pas cette visite: il les a trouvés chez eux à l'hôtel de M. le prince de Bariatinsky, où ils se logeoient; il étoit accompagné de M. le chevalier du Authier, son capitaine des gardes; M. le prince de Bariatinsky et un autre monsieur l'ont reçu à peu près à la voiture, et l'a conduit à l'appartement de madame la comtesse du Nord, où il a trouvé les battants ouverts. Madame la comtesse du Nord étoit en pied, et après quelques mots de politesse, elle a proposé à M. le duc de Penthièvre de s'asseoir et a pris une chaise pareille à celle qu'elle lui a proposée; elle a prié M. le chevalier du Authier et M. le prince de Bariatinsky de s'asseoir aussi, mais ils sont restés debout. La principale dame de madame la comtesse du Nord étoit assise vis-à-vis d'elle, sur une chaise pareille à celle de la princesse. M. le comte du Nord est arrivé par l'intérieur de l'appartement, pendant la visite de M. le duc de Penthièvre, et après des compliments il s'est assis sur un canapé qui se trouvoit à portée des chaises occupées par madame la comtesse du Nord et M. le duc de Penthièvre, et hors de rang; lorsque la visite, qui a duré quatre ou cinq minutes, a été finie, M. le comte du Nord s'est avancé pour reconduire M. le duc de Penthièvre: ce dernier lui a dit qu'il désiroit avoir l'honneur de lui rendre ses devoirs dans son appartement; M. le comte du Nord après avoir répondu des honnêtetés générales, a encore insisté pour reconduire M. le duc de Penthièvre, mais ce dernier lui ayant demandé de ne point prendre garde à lui, M. le comte du Nord est resté à la porte de la pièce où s'étoit passée la visite: les mêmes personnes qui avoient reçu M. le duc de Penthièvre et qui avoient pris les devants pendant les compliments avec M. le comte du Nord, se sont trouvées à peu près à la même place où ils étoient venus le recevoir, et se sont retirés un moment avant que la voiture de M. le duc de Penthièvre partît d'après ses instances.

Le 5 de juin, M. le comte et madame la comtesse du Nord ont été en personne à l'appartement de madame la princesse de Lamballe à Versailles; elle a retourné chez eux le lendemain 6, et les a priés à souper pour le samedi 8, jour du bal donné par le Roi à M. le comte et à madame la comtesse du Nord.

Le 8, jour du bal, les princes208 se sont rendus chez le Roi vers cinq heures trois quarts du soir, et les princesses chez la Reine, et ont accompagné Leurs Majestés à la salle du bal; les Enfants de France se sont aussi rendus chez le Roi, chacun de leur côté. La salle du bal étoit arrangée comme pour celui des gardes du corps donné en 1782, à l'occasion de la naissance de M. le Dauphin, dont le plan est dans les cartons des cérémonies, excepté qu'on n'y avoit point mis de buffets et qu'il y avoit un fort grand nombre de lumières. La famille royale et les princes étoient placés dans le fond du quarré de la danse, en face de la porte d'entrée, sur des pliants, ainsi que toutes les danseuses, d'abord par rang, madame la comtesse du Nord étant placée entre Madame et madame la comtesse d'Artois, et ensuite sans rang pendant le cours du bal. Les princesses avoient leurs dames derrière elles, pas exactement dans le rang où elles auroient dû être placées, mais toujours de manière à marquer qu'elles devoient être derrière elles. Le Roi et les princes alloient et venoient dans le bal, ainsi que M. le comte du Nord. Le Roi s'est assis quelquefois auprès de madame la comtesse du Nord. M. le prince de Condé et M. le duc de Penthièvre se sont assis un moment sur les pliants destinés aux danseuses, derrière une quantité d'hommes qui se trouvoient dans le milieu du quarré de la danse, et pendant que la Reine dansoit une contredanse, M. le comte du Nord s'est assis, ayant M. le prince de Bariatinsky à côté de lui sur un gradin au haut de la salle à gauche en entrant, derrière deux rangées de dames et à peu près derrière madame la comtesse du Nord, un peu sur le côté; les ambassadeurs étoient placés à droite, eu égard à la porte d'entrée de la salle, derrière les dames, qui étoient à droite en entrant dans le quarré de la danse; Madame, fille du Roi, étoit dans une loge donnant sur l'avant-scène, lorsque la salle est arrangée pour un spectacle, à droite en entrant dans la salle, et M. le duc d'Angoulême et Mademoiselle dans la loge vis-à-vis celle de Madame. Le bal a été ouvert par une contredanse dans laquelle la Reine dansoit avec M. le comte d'Artois: les autres danseurs et danseuses étoient des personnes de la Cour, titrées ou non titrées. Les pages du Roi ont fait les honneurs du bal, pour offrir les rafraîchissements aux dames, ce qu'on a dit être conforme à l'usage. Le bal a fini vers neuf heures. Les princes ont reconduit le Roi chez lui, et ensuite s'en sont retournés chez eux.

Ce même jour, M. le comte et madame la comtesse du Nord ont été souper chez madame la princesse de Lamballe à Versailles. Ils sont arrivés à dix heures moins un quart; M. de Ravenel et M. le chevalier Dyauville, avec les pages, ont été à la porte de la première antichambre recevoir M. le comte du Nord qui étoit arrivé le premier; peu de temps après madame la comtesse du Nord est arrivée, mesdames de Guebriant et de Pardaillan209 ont été pareillement à la porte de la première antichambre la recevoir; à dix heures madame la comtesse du Nord est passée à table, conduite par madame la princesse de Lamballe qui la tenoit par la main; madame la comtesse du Nord occupoit la place du haut de la table à la droite de madame la princesse de Lamballe, du côté de la cheminée de la salle à manger, et M. le comte du Nord à la gauche de madame la princesse de Lamballe, qui se trouvoit par ce moyen entre eux deux; les princes et princesses ont été servis par des pages. La table étoit de vingt et un couverts, il n'y avoit à cette table en hommes que M. le comte du Nord et son ambassadeur, il y a eu trois grandes tables et plusieurs petites; après le souper, il y a eu bal, auquel sont venus la Reine, Monsieur, Madame, M. le comte d'Artois et Madame Élisabeth. Le bal n'a fini qu'à trois heures passées. M. le comte du Nord est parti du bal avant une heure, madame la comtesse du Nord s'est en allée à deux heures, madame la princesse de Lamballe a voulu la reconduire, elle l'a empêchée d'aller au delà de la porte de son salon. La Reine est restée jusqu'à la fin du bal. Madame la princesse de Lamballe est allée chez M. le comte et madame la comtesse du Nord, à l'instar de madame la duchesse de Bourbon, qui en avoit usé ainsi, après leur avoir donné à souper. Ce même jour M. le prince de Conty observa à M. de Vergennes que madame la comtesse du Nord avoit fait une seconde visite à toutes les princesses, hors à madame la princesse de Conty, et le lendemain cette dernière princesse reçut un billet de madame la comtesse du Nord tourné de la manière la plus polie, qui lui témoignoit ses regrets de n'avoir pas encore pu la voir, et lui demandoit son jour et son heure pour lui rendre visite; la qualification d'altesse sérénissime se trouvoit dans ce billet, commencé sans Madame en vedette, et fini par, De Votre Altesse Sérénissime la bien dévouée servante. Ces derniers mots étoient détachés du corps de la lettre d'une manière très-marquée; le billet étoit signé La comtesse du Nord. Madame la princesse de Conty alla tout de suite, quoi qu'elle fût à Sceaux, à la porte de madame la comtesse du Nord, qu'elle ne trouva point; elle y laissa un billet écrit de sa main, portant qu'elle étoit venue pour avoir l'honneur de voir madame210 la comtesse du Nord et la remercier de toutes ses bontés. M. de Penthièvre fut avec elle, parce qu'elle désira être accompagnée de quelqu'un connu de M. le comte et de madame la comtesse du Nord. Malgré cette visite, madame la princesse de Conty envoya le lendemain matin son écuyer à M. le prince de Bariatinsky pour savoir le jour et l'heure à laquelle elle pourroit voir madame la comtesse du Nord; il dit qu'il répondroit par écrit à cette princesse.

Le 10, M. (sic) et madame la comtesse du Nord ont été à Chantilly; M. le prince de Condé a laissé ses gentilshommes se mettre à table avec ses prince et princesse, s'ils ont trouvé place, attendu que Chantilly étoit un lieu où ils mangeoient avec les princesses du sang. M. le prince de Condé avoit excepté sa maison de Vanvres, à l'instar de Saint-Cloud, et, on croit, celle de Saint-Maur; M. le prince de Condé n'a point présenté ses gentilshommes à M. le comte et à madame la comtesse du Nord.

Le 13, M. de Bariatinsky a répondu à madame la princesse de Conty qu'il sçavoit que madame la comtesse du Nord avoit beaucoup d'arrangements pris jusqu'au moment de son départ, mais qu'il sçavoit aussi que cette princesse avoit destiné la soirée du dimanche 16 à faire des visites, et que si madame la princesse de Conty étoit chez elle ce jour-là, elle iroit la voir. Madame la princesse de Conty a répliqué à M. de Bariatinsky qu'elle se rendroit avec empressement à Paris (madame la princesse de Conty étoit à Sceaux) pour recevoir la visite de madame la comtesse du Nord, mais qu'il le prioit de l'avertir de lui à elle, du moment où cette princesse demandoit ses voitures, pour qu'elle pût lui rendre ses devoirs dans sa maison, ainsi qu'elle le devoit et le désiroit. Le billet de madame la princesse de Conty finissoit en disant qu'elle étoit charmée d'avoir cette occasion d'assurer M. de Bariatinsky de la véritable et parfaite considération qu'elle avoit pour lui. M. de Bariatinsky n'étoit que ministre plénipotentiaire. Ce même jour 13, M. le duc et madame la duchesse de Chartres ont donné à souper à M. le comte et à madame la comtesse du Nord, à une maison de M. le duc de Chartres située à Mousseaux, dans les fauxbourgs de Paris; ils ont prié toutes les personnes de la nation russe dans le cas d'aller chez eux, d'après l'état qu'ils en ont demandé à M. le prince de Bariatinsky, faute d'avoir les titres des personnes qui avoient été invitées par M. le duc d'Orléans et M. le duc de Penthièvre, au Raincy et à Sceaux.

Le 14, madame la princesse de Conty a reçu une réponse de M. de Bariatinsky par le canal de son écuyer qu'elle avoit envoyé pour que le ministre de Russie n'eût pas la peine de lui écrire de nouveau, portant que madame la comtesse du Nord avoit tous ses moments destinés et continuant à dire qu'elle iroit chez madame la princesse de Conty le dimanche suivant, mais il s'y trouvoit néanmoins une phrase qui donnoit jour à voir que madame la comtesse du Nord seroit chez elle ce même jour 14, à l'issue de son dîner. D'après cette phrase, madame la princesse de Conty s'est rendue chez M. le comte et madame la comtesse du Nord, et leur a rendu la visite comme elle le désiroit; M. de Bariatinsky est venu la recevoir au bas de l'escalier, et M. de Soltikof à la porte de la première antichambre; les battants étoient ouverts; madame de Benkendorf, principale dame de madame la comtesse du Nord, est venue à la porte du salon où étoit cette princesse, et madame la comtesse du Nord elle-même a fait plusieurs pas en avant211, elle a conduit madame la princesse de Conty en lui donnant la main et passant la première comme pour montrer où il falloit aller dans un cabinet qui étoit près le salon, où elle s'est assise avec elle sur un canapé en la faisant placer au-dessus d'elle; madame la comtesse du Nord a fait un compliment à M. de Penthièvre qui étoit avec madame la princesse de Conty pour lui proposer de s'asseoir, et a fait une honnêteté à la dame d'honneur de madame la princesse de Conty et à madame de Benkendorf pour qu'elles s'assisent. M. le duc de Penthièvre et ces dames ont pris des fauteuils cabriolets qui étoient les seuls qui fussent dans la chambre: les battants se sont fermés pendant la visite et ont resté fermés. Lorsqu'on est sorti, madame la comtesse du Nord a reconduit madame la princesse de Conty jusqu'à plus de la moitié du salon qui étoit avant le cabinet où la visite s'est passée, et madame de Benkendorf jusqu'à la porte de ce salon; madame la princesse de Conty n'ayant pas vu M. le comte du Nord, a attendu M. de Bariatinsky (lequel avoit disparu pendant la visite chez madame la comtesse du Nord) dans l'antichambre de cette princesse. M. le comte du Nord y est venu avec M. de Bariatinsky; la visite s'y est passée de la manière la plus polie de la part de M. le comte du Nord, et il a voulu reconduire absolument madame la princesse de Conty jusqu'à sa voiture, et l'a vu partir. M. le duc de Penthièvre s'est servi de cette occasion pour faire sa visite d'adieu212 à M. le comte et à madame la comtesse du Nord. Il est resté debout dans la voiture de madame la princesse de Conty, en sortant de la cour de M. le comte du Nord, jusqu'à ce qu'il ait été hors de la vue de ce prince.

Le 15 du même mois, le Roi et la Reine ont été prendre M. le comte et madame la comtesse du Nord dans leur appartement pour les mener à Marly; Leurs Majestés sortoient de la messe. M. le comte et madame la comtesse du Nord occupoient le logement de M. le prince de Condé qui est à côté de la chapelle; les voitures attendoient devant les colonnades de la chapelle, elles étoient à quatre places. Dans une, il y avoit la Reine et madame la comtesse du Nord dans le fond, et le Roi et M. le comte du Nord sur le devant. Madame la comtesse du Nord avoit voulu se placer sur le devant, à côté de M. le comte du Nord, et dans l'autre une dame du palais de la Reine, une dame de madame la comtesse du Nord, le ministre de Russie et M. de Poix; ce dernier joignoit à la qualité de gouverneur de Marly celle de capitaine des gardes de quartier; la voiture de Leurs Majestés étoit accompagnée de gardes du corps. Le Roi, la Reine, M. et madame la comtesse du Nord sont revenus dîner à Versailles chez la Reine, avec toute la famille, excepté Mesdames et les Enfants de France.

Le mercredi 19, toujours du même mois de juin, M. le comte et madame la comtesse du Nord sont repartis de Paris; ils ont été à Brest et ont repassé ensuite en Allemagne par la Normandie et la Flandre; M. le comte du Nord n'a point fait de visites d'adieux aux princes, il a dit beaucoup de choses à madame la duchesse de Chartres pour M. le duc de Penthièvre et lui a même demandé s'il n'étoit point à Paris; M. le duc de Penthièvre se trouvoit dans ce moment à l'Isle-Adam: madame la comtesse du Nord qui n'avoit pas encore trouvé madame la princesse de Lamballe chez elle, excepté quand elle y étoit venue souper, vint la voir l'avant-veille de son départ au soir.

M. le prince de Conty pense que pour luy personnellement, qui a eu l'air de se plaindre à M. de Vergennes relativement à madame la princesse de Conty, plainte sur laquelle M. et madame la comtesse du Nord luy ont donné une ample satisfaction, il doit leurs marquer une attention dans cette circonstance, et se propose conséquemment d'y passer dès ce soir, sachant qu'ils vont demain matin à Chantilly. M. le prince de Conty pense aussi que M. le duc de Penthièvre ne trouvera point d'inconvénient à cette démarche de sa part, démarche qu'il se propose de réitérer avant leur départ. Ils n'ont point mis de prétentions, ils sont honnêtes, et il ne luy paroît pas que de l'être beaucoup avec eux puissent luy préjudicier.

Si cependant M. le duc de Penthièvre n'étoit pas du même avis, M. le prince de Conty le prie de vouloir bien le luy marquer, et se flatte que son attachement luy est bien connu.

À Paris, ce 9 juin 1782.

Copie de la lettre de M. le maréchal de Biron à M. le prince Bariatinsky
Paris, 12 juin 1782.

Monsieur, j'ai rendu compte au Roi de la dernière conversation que j'ai eu l'honneur d'avoir avec vous, et Sa Majesté permet à son régiment des gardes de recevoir de madame la comtesse du Nord les marques de bonté et de satisfaction qu'elle veut bien lui donner.

Le chef de ce corps est pénétré de respect pour cette illustre souveraine; elle est faite pour être admirée et jamais refusée; ainsi elle peut envoyer ses ordres. Le maréchal de Biron verra avec grand plaisir un des premiers corps du royaume se réunir à lui en faisant des vœux pour sa conservation et celle du respectable comte du Nord.

J'ai l'honneur d'être, etc.
Le maréchal duc de Biron.
Copie de la lettre de madame la comtesse du Nord à M. le maréchal de Biron
Paris, 13 juin 1782.

Quoique le suffrage d'une femme, lorsqu'il s'agit du militaire, est de bien peu de conséquence, cependant il lui est permis de mêler ses applaudissements à ceux du public. Recevez donc, Monsieur le maréchal, mes remercîments pour votre complaisance, en nous faisant jouir du beau spectacle de la revue de votre régiment, et permettez-moi de vous assurer que mon mari et moi en avons ressenti la plus grande satisfaction. J'aurois désiré pouvoir vous donner cette assurance dès lundi; mais mon voyage de Chantilly m'en a empêchée; je profite du premier moment que j'ai à moi pour vous prier, Monsieur le maréchal, de permettre à votre régiment d'accepter cette bagatelle, comme le simple témoignage de notre satisfaction et reconnaissance; et enfin, pour dire la chose sans détour, je désirerois qu'ils boivent à la santé de leur général et à la mienne.

En vous réitérant encore, Monsieur le maréchal, nos remercîments pour toutes vos attentions et politesses, que je sais apprécier et reconnoître, je vous prie d'être persuadé des sentiments d'estime et de considération avec lesquels je serai toujours,

La comtesse du Nord.

M. le duc, etc., prie (pour les femmes) madame de, etc., de vouloir bien lui faire l'honneur de (pour les hommes, de vouloir bien) venir dîner chez lui le… avec M. le comte et madame la comtesse du Nord.

Liste des personnes de distinction qui se trouvent à la suite de M. le comte et de madame la comtesse du Nord et qui ont été invitées au Raincy par monseigneur le duc d'Orléans:

Madame de Soltycoff, madame de Borschoff, madame de Nelidoff, madame de Benkendorff.

M. de Soltycoff, M. le prince Youssoupoff, M. le prince Kourakin, M. de Wadkowsky, M. de Benkendorff, M. de Plescheyeff.

Ce qui fait en tout six hommes et quatre femmes.

Liste de toutes les personnes de la nation russe, remise par M. le prince de Bariatinsky

Madame la comtesse de Bruce, dame d'honneur de l'Impératrice.

Mademoiselle de Borschoff, mademoiselle de Nelidoff, demoiselles de la cour, à la suite de madame la comtesse du Nord.

198.M. le comte du Nord avoit quitté tous ses ordres, à l'instar de l'Empereur, qui en use de même dans ses voyages; les gardes du corps ne prenoient point les armes pour lui et on ne lui ouvroit point les deux battants chez le Roi; il y a eu plusieurs fêtes et promenades à Versailles, Marly et Trianon, auxquelles les princes et princesses n'ont point été invités; ils n'ont été avertis que pour le bal.
199.L'appartement de M. le maréchal de Duras a été prêté à M. le prince de Condé pour le temps que le sien seroit occupé par M. le comte et madame la comtesse du Nord.
200.M. le prince de Condé et M. le duc de Bourbon ont été en personne chez M. le comte et madame la comtesse du Nord, à Versailles.
201.Il y avoit eu souper dans les cabinets le 22, où M. le comte et madame la comtesse du Nord se sont trouvés; on ne sait s'il y a eu des princes et princesses du sang, tous n'y ont pas été.
202.Madame la duchesse de Chartres étoit dans la première loge, à gauche de celle du milieu de la salle occupée par la famille royale. (Le Roi et la Reine étoient au-dessus de cette loge du milieu de la salle, dans une loge grillée.) Et madame la princesse de Lamballe, dans la loge après et à côté de celle de madame la duchesse de Chartres; elles n'étoient qu'elles deux de princesses au spectacle. Les uns disent que M. le duc d'Angoulême étoit dans la loge à droite de celle de la famille royale, d'autres prétendent qu'il étoit dans la loge du bout de la salle, toujours à droite, auprès de celle des gentilshommes de la chambre; M. le prince de Condé et M. le duc de Bourbon ont été dans cette dernière loge, c'est-à-dire celle des gentilshommes de la chambre; on croit qu'il n'y avoit qu'eux deux de princes au spectacle.
203.Madame la comtesse du Nord est revenue en personne chez quelques princesses, mais pas chez toutes. Deux se sont trouvées dans le cas de n'avoir point reçu de visite de sa part en personne. On croit que M. le comte du Nord est revenu en personne chez tous les princes.
  Depuis cette note écrite, madame la comtesse du Nord a été en personne chez toutes les princesses.
204.C'est au Raincy que M. le duc d'Orléans a donné à dîner à M. le comte et à madame la comtesse du Nord; ses gentilshommes n'ont point mangé à la table où étoit cette princesse, mais ils ont mangé à une autre table tenue par M. le duc de Chartres, dans une pièce différente. Le Raincy étoit un lieu dans lequel M. le duc d'Orléans avoit réglé que les gentilshommes mangeoient avec les princesses. Saint-Cloud étoit la seule maison où il avoit maintenu l'ancien usage de ne point admettre les gentilshommes à la table des princesses.
205.M. le duc et madame la duchesse de Chartres sont venus à Sceaux pour ce dîner. Madame la duchesse de Chartres n'avoit point de dames à elle, par raison d'absence ou de maladie. Elle a mené avec elle madame la baronne de Talleyrand.
206.Il étoit environ deux heures après midy. M. le duc de Chartres, M. le duc de Penthièvre et les hommes qui étoient à Sceaux n'avoient point d'épée. M. le comte du Nord et les personnes étrangères avoient la leur. M. le comte du Nord quitta la sienne et on la porta dans l'appartement qui lui étoit préparé. M. de Bariatinsky quitta aussi la sienne. Madame la comtesse du Nord et les dames étoient en lévite ou en polonoise. Il y avoit un appartement préparé pour madame la comtesse du Nord. Les ecclésiastiques étoient en habit de campagne.
207.Le reste de la compagnie a été dans différentes calèches ou voitures. M. le duc de Chartres menoit celle qui alloit immédiatement après celle de madame la comtesse du Nord; il avoit avec lui la principale dame de cette princesse et madame de Bariatinsky. M. de Guebriant, premier gentilhomme de la chambre de M. le duc de Penthièvre, menoit une petite calèche dans laquelle se trouvoient les filles d'honneur de madame la comtesse du Nord; M. le duc de Crussol menoit une petite voiture dans laquelle se trouvoient madame la duchesse de la Vallière et d'autres dames.
208.Les princes ont été invités au bal par un gentilhomme ordinaire, suivant l'usage accoutumé. Voici les termes du billet d'invitation:
  «Le Roy a ordonné au doyen de ses gentilshommes ordinaires d'inviter de la part de Sa Majesté Son Altesse Sérénissime monseigneur le duc de Penthièvre d'assister au bal paré que Sa Majesté donnera au comte et à la comtesse du Nord le samedy 8 juin.
  »Le bal sera sans cérémonie.
  »Le Roy et la Reine n'auront point le fauteuil.»
209.La manière dont madame la princesse de Lamballe a reçu madame la comtesse du Nord a été réglée d'après ce que madame la duchesse de Bourbon avoit pratiqué.
210.Madame étoit écrit en toutes lettres.
211.Madame la princesse de Conty a présenté sa dame d'honneur à madame la comtesse du Nord, et madame la comtesse du Nord a présenté la sienne à cette princesse.
212.D'après la lettre de M. le prince de Conty cy-incluse.
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
31 temmuz 2017
Hacim:
723 s. 6 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain
Metin
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