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Kitabı oku: «La Vie de Madame Élisabeth, soeur de Louis XVI, Volume 1», sayfa 8

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À un quart de lieue du Pont, la princesse a trouvé sur sa route un détachement de la maréchaussée, commandé par le prévôt général, et un autre de cent dragons de la légion de Lorraine, ayant à sa tête le comte de Viomesnil, son colonel. À l'entrée du faubourg se trouvèrent le marquis de Pusignieu, lieutenant général, le comte de Blot, maréchal de camp, tous deux employés en Dauphiné, et le sieur de la Tour, commandant du Pont; le régiment d'Anjou, sous les ordres du vicomte de Mailly, son colonel, bordait la haie jusqu'au palais destiné à la princesse. Au moment où Son Altesse Royale mit pied à terre, elle fut saluée par six pièces de canon, servies par une compagnie du régiment de Toul du corps royal de l'artillerie. Le sieur Pajot de Marcheval, intendant de Grenoble, ainsi que l'évêque de cette ville et celui de Belley, eurent l'honneur d'être présentés à la princesse au pied de l'escalier construit pour la recevoir.

Les différents corps militaires lui furent présentés dans son appartement vers les sept heures du soir; Madame de Marcheval et la comtesse de Lesseville, sa fille, eurent l'honneur de lui être nommées par la comtesse de Marsan, ainsi qu'un grand nombre de dames venues de différents points de la province dans l'espoir de rendre leurs respects à Son Altesse Royale.

Vers les huit heures du soir commencèrent les visites des dames de la cour de Turin désignées pour composer la nouvelle suite de la princesse de Piémont. Après leur avoir adressé quelques bienveillantes paroles, Son Altesse Royale les invita à venir voir avec elle le feu d'artifice que M. de Marcheval allait faire tirer sur la place du Pont, en face des fenêtres du palais. À neuf heures environ eut lieu le souper. La princesse se mit à table en public avec les dames qui composaient sa suite en France et celles qui allaient les remplacer en Piémont.

Le 6, à huit heures du matin, les troupes prirent les armes et occupèrent sur le territoire français les postes qui leur étaient assignés. À neuf heures et demie, la princesse entendit la messe dans son appartement, pendant laquelle les troupes sardes et la nouvelle suite de Son Altesse Royale occupèrent les postes qui leur étaient destinés pour la cérémonie de la remise, qui eut lieu à l'issue de la messe.

Le comte de Viry, commissaire plénipotentiaire du Roi de Sardaigne, ayant reçu la princesse des mains du comte de Tonnerre, la conduisit dans une pièce qui avait été disposée pour sa toilette, où elle fut servie par sa cour piémontaise. Quelques moments après, le prince de Piémont est venu lui rendre visite, et la première entrevue des deux augustes époux s'étant faite, le prince est remonté dans ses équipages, escorté d'un détachement des gardes du corps du Roi de Sardaigne, devant lequel marchait une compagnie de dragons bourgeois commandée par le baron de Marette.

À onze heures, la princesse, précédée du comte de Viry et escortée de cinquante gardes du corps piémontais, se disposa à partir, laissant mille regrets à la France et portant la joie à la cour de Piémont. En traversant le pont, ses regards s'arrêtèrent sur cette petite rivière de Guiers qui allait la séparer de sa première patrie, et ses yeux se mouillèrent malgré elle. Elle arriva bientôt aux Échelles, première ville de Savoie, où le roi Victor-Amédée s'était rendu de Chambéry pour la recevoir et lui donner à dîner.

Le 20 septembre, sur le théâtre royal de Chambéry, on donna devant la cour la tragédie de Roméo et Juliette, dont l'auteur, François Ducis70, secrétaire de Monsieur, se trouvant à cette époque dans cette ville, dirigeait lui-même la représentation. Le poëte avait eu l'attention d'insérer dans la scène II du quatrième acte le portrait d'un roi chéri qui prête au diadème un charme inexprimable. Les regards de tous les spectateurs, ne pouvant se méprendre à la ressemblance, se dirigèrent vers la loge royale; les acclamations furent si vives que le Roi en fut attendri. Il prit des mains de Madame la princesse de Piémont l'exemplaire de la pièce qu'elle tenait, pour s'assurer si les vers qu'il venait d'entendre faisaient partie du texte. Il les y trouva; mais Monsieur71, qui était à côté de lui, lui fit remarquer qu'une nouvelle feuille imprimée avait été collée sur l'ancienne.

La famille royale ne fit son entrée à Turin que le 30 septembre. Le roi Victor-Amédée, la reine Marie-Antoinette-Ferdinande, le prince et la princesse de Piémont, étaient dans le même carrosse; celui du duc et de la duchesse de Chablais, frère et belle-sœur du Roi, et des princesses Éléonore-Marie-Thérèse et Marie-Félicité, sœurs du Roi, suivait immédiatement. Dans douze autres voitures étaient les dames du palais, les premiers écuyers et les autres personnes attachées à la cour; les seconds écuyers, les gardes du corps et les pages accompagnaient à cheval. À quelque distance de Turin, les compagnies bourgeoises étaient rangées en bataille, ainsi que quatre régiments de dragons; toutes ces troupes se joignirent au cortége et entrèrent dans la capitale, dont les rues étaient bordées par douze bataillons. À la porte attendaient le gouverneur et l'état-major de la place; ils s'approchèrent du carrosse royal pour complimenter Sa Majesté et lui remettre les clefs de la ville. Le Roi leur ordonna de les offrir à la princesse de Piémont. Il était six heures lorsque la cour descendit au palais; toutes les dames qui s'y étaient rendues furent admises à l'honneur de baiser la main de la Reine, celle de la princesse de Piémont et des autres princesses. Dans la soirée, on tira devant le palais un très-beau feu d'artifice, et toutes les rues de la ville furent illuminées. Le lendemain de son arrivée à Turin, dimanche 1er octobre, la famille royale se rendit à la métropole, où elle assista à un Te Deum chanté en musique. Le soir, après le cercle, toute la cour parcourut en carrosse les rues de la ville, dont chaque maison était illuminée selon l'ordre de son architecture. La joie publique était vive, et aux acclamations qui saluaient la princesse de Piémont, Son Altesse Royale (dit une lettre de l'époque) dut croire qu'elle se trouvait encore au milieu des Français.

Le lundi 2, la famille royale assista à la représentation de l'opéra de Tithon et l'Aurore.

Le 5, il y eut un grand appartement auquel furent invités les familles distinguées et les étrangers de marque résidant à Turin. La famille royale soupa ensuite avec les dames du palais, les femmes des chevaliers de l'ordre de l'Annonciade et des grands officiers de la cour.

Le 6 eut lieu un concert magnifique dans la galerie.

Le 7, un grand bal paré dans le salon des Cent-Suisses, où Madame la princesse de Piémont dansa.

Toutes les fêtes à l'occasion de son mariage se terminèrent par celle que donna, le 16, le baron de Choiseul, ambassadeur de Sa Majesté Très-Chrétienne. La façade de son hôtel, raconte la gazette du temps, était magnifiquement illuminée; des inscriptions, des chiffres, des emblèmes relatifs à l'objet de cette fête, remplissaient les dessus des portes et les entablements des croisées. Le bal commença à dix heures du soir, à l'issue de l'Opéra, et ne finit que le surlendemain à cinq heures du matin; on y distribua pendant plus de trente heures des rafraîchissements de toute espèce, servis avec autant d'ordre que d'abondance, dans quinze pièces richement décorées, et dont plusieurs avaient été construites pour cette fête. Ce bal, le plus long dont on se souvienne à Turin, n'a fini que par l'impossibilité de remplacer les musiciens fatigués.

Enfin, pour clore cette série de fêtes par une cérémonie religieuse, on exposa, le dimanche 15 octobre, à la dévotion populaire, le saint suaire, religieusement gardé dans la chapelle de la cour. Depuis le 31 mai 1750, jour du mariage du roi Victor-Amédée, cette précieuse relique n'avait pas été montrée au peuple. Le cardinal des Lances, ancien archevêque de Turin, avait quitté sa résidence de Rome pour venir remplir les fonctions usitées dans cette circonstance, où se déploie une pompe particulière. Tous les princes, grands-croix de l'ordre des Saints Maurice et Lazare, suivaient la châsse, vêtus de leur habit de cérémonie, ainsi que les chevaliers de l'ordre de l'Annonciade, les grands officiers de la couronne et les ministres d'État. La Reine, les princesses et toutes les personnes de leur cour portaient des cierges. On avait, sur les places et dans quelques larges rues par où devait passer la procession, dressé des amphithéâtres dans l'intérêt des fidèles, attirés de toutes les provinces par l'exposition de cette relique vénérée.

On me pardonnera si mon récit s'est attardé au milieu de ces détails. L'historien qui raconte les derniers beaux jours de la royauté française voudrait arrêter ce soleil sans pareil (nec pluribus impar) que Louis XIV aux jours de sa grandeur avait pris pour emblème de sa maison, afin de l'empêcher de se coucher dans cet amas de sombres nuages assemblés à l'horizon, et au milieu desquels il va disparaître.

Dans les derniers mois de 1775, quelques changements eurent lieu dans le personnel qui environnait d'ordinaire les princesses. La marquise de Causans fut nommée dame pour accompagner Madame Élisabeth; la maréchale de Mouchy ayant obtenu de la Reine la permission de se démettre de la place de sa dame d'honneur, Sa Majesté en pourvut madame la princesse de Chimay, sa dame d'atour, et nomma à la place de dame d'atour la marquise de Mailly, une de ses dames; et l'abbé Brocquevielle, missionnaire, nommé avec l'agrément du Roi pour remplacer l'abbé Allard dans la cure paroissiale de Notre-Dame, eut l'honneur d'être présenté à Sa Majesté et à la famille royale par le Père Jacquier, supérieur général de la congrégation de la Mission.

Le 1er janvier 1776, les princes et princesses, seigneurs et dames de la cour, rendirent au Roi et à la Reine les respects habituels qu'ils avaient l'honneur de leur offrir à l'occasion du nouvel an. Le corps de ville de Paris, ayant à sa tête le duc de Cossé, gouverneur de la ville, s'acquitta du même devoir, les hautbois de la chambre du Roi exécutant pendant le lever de Sa Majesté plusieurs morceaux de musique.

Les chevaliers, commandeurs et officiers de l'ordre du Saint-Esprit étant assemblés dans le cabinet du Roi, vers les onze heures du matin, Sa Majesté reçut chevaliers de l'ordre de Saint-Michel le marquis de Rochechouart, le marquis de la Roche-Aymon, le comte de Talleyrand, le marquis de la Rochefoucauld et le vicomte de Talaru. Le Roi sortit de son appartement pour se rendre à la chapelle, précédé de Monsieur, du comte d'Artois, du duc d'Orléans, du duc de Chartres, du prince de Condé, du duc de Bourbon, du comte de la Marche, du duc de Penthièvre et des chevaliers, commandeurs et officiers de l'ordre; les cinq nouveaux chevaliers, en habits de novices, marchaient entre les chevaliers et les officiers. Le Roi, devant qui les deux huissiers de la chambre portaient leurs masses, était revêtu du manteau de l'ordre, dont il avait le collier, ainsi que celui de la Toison d'or, par-dessus son manteau. Avant la messe, qui fut chantée par la musique du Roi et célébrée par l'ancien évêque de Limoges, Sa Majesté monta sur son trône, reçut prélats commandeurs de l'ordre du Saint-Esprit l'archevêque de Narbonne, l'ancien évêque de Limoges, et chevaliers du même ordre le marquis de Rochechouart et les quatre autres que nous avons nommés plus haut.

Leurs Majestés soupèrent le même jour à leur grand couvert.

Le temps marche. Le 10 avril 1776, nous rencontrons Madame Élisabeth se rendant en cérémonie en l'église paroissiale de Notre-Dame, et y communiant par les mains de l'évêque de Senlis, premier aumônier du Roi, la princesse de Guéménée, gouvernante des Enfants de France, et mademoiselle de Rohan tenant la nappe.

Le 9 mai, le Roi, accompagné de Monsieur, se rendit à trois heures et demie à la plaine des Sablons, où il passa en revue les deux régiments des gardes françaises et suisses. Le comte d'Artois, colonel de ce dernier corps, était à sa tête. Après l'exercice, les troupes défilèrent devant Sa Majesté et devant la Reine, accompagnée de Madame et des dames de la cour. Madame Élisabeth assistait aussi à cette revue, accompagnée dans sa voiture par la princesse de Guéménée, sa gouvernante, et par ses dames de compagnie. Le lendemain 10, nous la retrouvons accompagnant Leurs Majestés, Madame, la comtesse d'Artois, Mesdames Adélaïde, Victoire et Sophie, à l'église royale et paroissiale de Notre-Dame, pour assister au service solennel célébré pour l'anniversaire de la mort de Louis XV, par le sieur Brocquevielle, curé.

Le 12 mai, Turgot et Malesherbes quittèrent le ministère. Comme Malesherbes suppliait le Roi de vouloir bien accepter sa démission: «Que vous êtes heureux! s'écria Louis XVI; que ne puis-je m'en aller aussi!»

Il serait trop long d'entrer dans le détail des causes qui amenaient la retraite de ces deux ministres, et d'ailleurs cet événement n'a pas de lien étroit avec la vie de Madame Élisabeth. Il suffira donc d'indiquer sommairement les difficultés contre lesquelles les efforts de Turgot et de Malesherbes, comme ceux de Louis XVI, se brisèrent. La première partie du règne du jeune successeur de Louis XV avait été une suite de tentatives de réformes. On se plaignait des abus, il voulut les détruire; on réclamait des progrès, il voulut en réaliser. C'est ainsi qu'avec l'agrément de M. de Maurepas, qui, s'il ne provoquait pas les mesures de ce genre, acceptait à titre d'essais, avec une indifférence sceptique, toutes celles que proposaient des intelligences plus hardies, il appela à lui, d'une part Turgot et Malesherbes, de l'autre le comte de Saint-Germain. Turgot et Malesherbes appartenaient à ce qu'on appelait la secte des économistes; c'étaient des esprits élevés et honnêtes, mais qui, pleins de confiance dans leurs théories, ne tenaient pas assez compte des circonstances et ne préparaient pas assez les intelligences, et surtout les intérêts, aux réformes qu'ils voulaient opérer.

Ainsi, quoique la récolte de 1774 eût été mauvaise, Turgot fit établir par un arrêt du conseil la libre circulation des grains. Cette mesure, excellente en elle-même, avait le tort de venir mal à propos. Il y eut des troubles populaires quand on vit les marchés vides, et il fallut envoyer des troupes pour disperser les rassemblements. Ce premier échec jeta du discrédit sur Turgot et ses théories. Les parlements, qui connaissaient son opposition à leur système, lui firent une guerre acharnée. Il fallut un lit de justice pour briser cette résistance, quand le Roi voulut faire enregistrer les édits qui supprimaient les corvées et ceux qui abolissaient les maîtrises et les corporations. En passant ainsi instantanément du régime du privilége au régime de la libre concurrence, on blessait de nombreux intérêts et on détruisait l'organisation ancienne sans la remplacer par une organisation nouvelle. Quoiqu'on parlât beaucoup de la réforme des abus, en principe, ceux qui en profitaient, tout en ne les blâmant pas moins haut que les autres, réagissaient contre le gouvernement quand ils se sentaient atteints. Il se formait donc une ligue des intérêts lésés qui résistaient au pouvoir, et ces intérêts trouvaient un point d'appui dans le Parlement, toujours disposé à intervenir dans la politique. Les encyclopédistes, qui étaient restés dans la théorie, trouvaient que Turgot, depuis qu'il avait mis le pied dans la politique, était devenu d'une timidité extrême et n'allait pas assez vite; ceux au détriment desquels s'exécutaient ces réformes l'accusaient, au contraire, d'aller trop brusquement au but, de sorte que la force d'opinion qui l'avait poussé aux affaires se retirait de lui, sans qu'il eût acquis une autre force parmi les hommes pratiques. Maurepas, qui aimait avant tout le repos et qui voyait grandir l'orage, qui en outre désirait vivre en paix avec les parlements, avait depuis longtemps sacrifié Turgot dans son cœur quand celui-ci succomba. Louis XVI fut le dernier qui le soutint. On l'entendit répéter plusieurs fois: «Il n'y a que M. Turgot et moi qui aimons le peuple.»

Ainsi la première tentative de Louis XVI échouait; échec d'autant plus malheureux que Turgot avait compris qu'en réformant les abus il fallait maintenir intacte l'autorité royale, qui devait être l'instrument de toutes les réformes, vérité capitale que nul n'apercevait dans ce temps.

On savait désormais qu'on pouvait résister au jeune Roi et lui imposer un avis qui n'était pas le sien, on ne l'oublia plus.

J'ai dit le mauvais succès des tentatives du comte de Saint-Germain et de son auxiliaire M. de Guibert, pour introduire des réformes dans l'armée, qu'on voulait discipliner à l'allemande, et décapiter, pour ainsi dire, en licenciant une grande partie de la maison du Roi. On avait mécontenté la troupe et indisposé les officiers, dans des circonstances où il eût été si nécessaire de pouvoir compter sur la fidélité inébranlable de l'armée.

Rien de ce qu'on avait tenté n'avait donc réussi, et Louis XVI entrait dans la seconde partie de son règne avec des illusions évanouies et des craintes sur l'avenir.

M. Taboureau remplaça Turgot, et on lui adjoignit d'abord en qualité de conseiller des finances et de secrétaire général du trésor, Necker, qui devait bientôt le remplacer. Les prôneurs de Necker lui prêtèrent du génie en finances, ses adversaires lui refusèrent toute capacité; deux exagérations et deux erreurs. Necker, qui avait des qualités réelles, eut le défaut des hommes de son temps: il visa avant tout à la popularité. Il eut une idée vraie quand il pensa qu'on fonde le crédit d'une nation en mettant de la clarté et de la régularité dans ses finances; mais il fit une fausse application de cette idée vraie, lorsque dans les circonstances difficiles où l'on se trouvait, il déchira tous les voiles qui dissimulaient la fâcheuse situation de nos affaires financières. Ce qui importait, c'était de guérir la plaie et non de la sonder en public; il la sonda sans la guérir. Les paniques sont aussi dangereuses sur le terrain des intérêts que sur un champ de bataille. Un esprit moins avide de popularité et moins infatué de lui-même eût attendu pour parler du péril que le péril eût été conjuré; mais M. Necker tenait avant tout à faire connaître à tout le monde la profondeur du gouffre, pour faire dire ensuite qu'il était seul capable de le combler. Il fallait agir, il voulut paraître.

À cette époque, le Roi, dans l'intention d'encourager les arts, autorisa le comte d'Angiviller, directeur et ordonnateur général de ses bâtiments, à faire exécuter chaque année un certain nombre de tableaux et de statues par les peintres et les sculpteurs de son académie. Désireux surtout de rendre les arts utiles en les rappelant à leur antique destination, il voulait que les actions et les images de ceux qui ont illustré la France fussent reproduites par le pinceau et le ciseau. M. d'Angiviller disant un jour à Madame Élisabeth que les statues de l'Hôpital, de Sully, de Fénelon et de Descartes étaient commencées: «J'espère, monsieur, lui dit-elle, que vous n'oublierez pas celle de Bossuet72

Au commencement de l'année 1777, Suleïman-Aga, envoyé du bey de Tunis, eut une audience du Roi à Versailles. Après avoir remis au prince ses lettres de créance, cet envoyé s'exprima ainsi: «Sire, le bey de Tunis, mon maître, m'a commandé de me rendre auprès de Votre Majesté Impériale pour la féliciter sur son avénement au trône de ses ancêtres. Jaloux de remplir tous les devoirs que lui prescrit son attachement inviolable pour l'auguste maison de France, ce prince auroit depuis longtemps fait passer un envoyé dans votre cour impériale pour lui présenter l'hommage de ses sentiments, ses regrets sur la mort de son illustre et grand allié et ami l'Empereur de France Louis XV, de glorieuse mémoire, et son compliment sur le bonheur que la Providence a préparé aux Français en appelant à leur tête un jeune monarque qui réunit au plus haut degré les vertus et les qualités les plus éminentes, si les circonstances où mon maître s'est trouvé depuis cette époque à jamais mémorable lui avaient permis de faire ce que son cœur lui inspirait. Chargé aujourd'hui de ses ordres suprêmes, j'apporte aux pieds de Votre Majesté Impériale les vœux les plus ardents pour la prospérité de votre empire, les marques les plus sincères de son respect et de son entier dévouement pour votre personne sacrée. Daignez, Sire, agréer comme une preuve du désir que mon maître aura toujours de mériter la haute bienveillance d'un aussi grand Empereur, les esclaves et les autres présents que j'ai remis en son nom aux officiers de Votre Majesté Impériale. Le plus beau moment de ma vie est celui où j'envisage la gloire de votre trône impérial. Je serai heureux s'il en émane sur moi un regard favorable.»

La cour et la ville s'étonnèrent de trouver chez l'envoyé d'une puissance barbaresque la langue de la diplomatie européenne et les formes du monde civilisé.

L'empereur du Maroc, vers cette même époque, envoya son neveu en France en qualité d'ambassadeur. Il venait offrir au Roi de riches présents. La cour s'extasiait devant ces présents, ne sachant auquel attribuer le plus de valeur. «Je sais, moi, dit la jeune Madame Élisabeth, quel est le plus magnifique, je sais quel est celui qui aura le plus de prix aux yeux du Roi: ce sont vingt marins français qui ont fait naufrage sur les côtes du Maroc, et que le roi de ce pays renvoie à mon frère.»

70.Le père de Ducis était sujet du Roi de Sardaigne; aussi l'origine de François Ducis, ses talents, sa position près de Monsieur, aussi bien que son caractère, le recommandaient-ils à la sympathie de la cour de Sardaigne. Le 3 du même mois, il avait été présenté au Roi, au prince de Piémont, aux deux princesses de Savoie, sœurs de Sa Majesté, au duc et à la duchesse de Chablais, et leur avait fait hommage d'un poëme de sa composition sur le mariage de M. le prince de Piémont avec Madame Clotilde de France. Cet ouvrage avait attiré à l'auteur les compliments les plus chaleureux et les plus flatteurs.
71.Partis le 2 septembre de Versailles, Monsieur et Madame avaient suivi l'itinéraire de la princesse de Piémont, et étaient arrivés deux jours après elle à la cour de Savoie.
72.Louis XVI voulant aussi assurer à la nation la jouissance des chefs-d'œuvre qui ont illustré son école, chargea M. d'Angiviller d'acquérir les tableaux dont Le Sueur avait enrichi l'hôtel Lambert. Instruits des motifs qui avaient déterminé le Roi à cette acquisition, les RR. PP. Chartreux de Paris conçurent un grand acte d'abnégation et de dévouement: ils arrêtèrent dans une assemblée capitulaire de faire au Roi l'hommage des tableaux précieux qu'Eustache Le Sueur avait peints dans leur petit cloître. Le 25 juillet 1776, Dom Hilarion Robinet, prieur de cette maison, et Dom Félix de Nonan, procureur général de l'ordre, conduits par le comte d'Angiviller, furent reçus en audience par Sa Majesté, qu'ils supplièrent, au nom de leur communauté, de réunir cette suite de tableaux à sa magnifique collection. Le Roi, en acceptant cette offre, chargea ces députés d'exprimer à leur communauté la satisfaction que lui causaient le zèle de ces religieux aussi bien que leur amour pour le bien public. Le mois suivant, Louis XVI fit l'acquisition du cabinet des médailles rassemblées par les soins de M. Pellerin, ancien commissaire général de la marine. Cette collection, qui renfermait une grande quantité de médailles inconnues et propres à répandre un nouveau jour sur l'histoire ancienne, passait pour une des plus précieuses qui existassent, et fit du cabinet du Roi, déjà célèbre dans le monde savant, le dépôt le plus riche et le plus utile qu'on pût former pour le progrès des lettres.
Yaş sınırı:
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31 temmuz 2017
Hacim:
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