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Kitabı oku: «Les mystères d'Udolphe», sayfa 35

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CHAPITRE XLIII

Après les dernières découvertes, Emilie fut traitée par le comte et par sa famille comme une alliée de la maison de Villeroi, et reçue, s'il était possible, avec encore plus d'amitié.

Le comte, inquiet et surpris de ne recevoir aucune réponse de Valancourt, s'applaudissait de sa prudence. Emilie ne partageait point des craintes dont elle ignorait le motif: mais quand il la voyait succomber sous le poids de sa cruelle erreur, il avait besoin de toute sa résolution pour la priver d'un soulagement momentané, et dissimuler avec elle. Les noces de Blanche s'approchaient, et partageaient son attention et ses soins. On attendait chaque jour M. de Sainte-Foix. Tout le château s'occupait des plus brillants préparatifs. Emilie voulait prendre part à la gaieté qui l'entourait; mais elle le tentait vainement: préoccupée de tout ce qu'elle avait appris, et surtout inquiète du sort de Valancourt, elle se représentait l'état où il était quand il donna à Thérèse son anneau: elle croyait y reconnaître l'expression du désespoir; et quand elle considérait où ce désespoir avait pu le conduire, son cœur saignait de douleur et d'effroi. Les doutes qu'elle formait sur sa santé, sur son existence, l'obligation où elle était de conserver ces doutes jusqu'à son retour à la vallée, lui paraissait insupportable. Il y avait des moments où rien ne pouvait la contenir. Elle s'échappait brusquement, elle allait chercher le calme dans les profondes solitudes des bois qui bordaient le rivage de la mer. Le battement des vagues écumantes, le sourd murmure des forêts, étaient analogues à l'état de son âme; elle s'asseyait sur une roche, ou sur les ruines de la vieille tour; elle observait vers le soir la dégradation des couleurs sur les nuages; elle voyait se dérouler les sombres voiles du crépuscule. La crête blanche des vagues, toujours ramenées au rivage, ne se distinguait plus qu'à peine sur la surface obscure des flots. Quelquefois elle répétait les vers que Valancourt avait gravés en ce lieu: puis, trop affectée des chagrins qu'ils lui renouvelaient, elle cherchait à se distraire.

Un soir qu'avec son luth elle errait au hasard sur ce rivage favori, elle entra dans la tour. Elle monta un escalier tournant, et se trouva dans une chambre moins dégradée que le reste. C'était de là que souvent elle avait admiré la vaste perspective que la mer et la terre lui offraient: le soleil se couchait sur cette partie des Pyrénées qui sépare le Languedoc du Roussillon; elle se plaça près d'une fenêtre grillée: les bois et les vagues au-dessous d'elle gardaient encore les nuances rougeâtres du soleil couchant. Ayant accordé son luth, elle y mêla le son de sa voix, et chanta un de ces airs simples et champêtres qu'autrefois Valancourt écoutait avec transport.

Le temps était si doux, si calme, qu'à peine le zéphyr du soir ridait la surface de l'onde, ou gonflait légèrement la voile qui recevait encore les derniers rayons de lumière. Les coups mesurés de quelques rames troublaient seuls le repos et le silence. La tendre mélodie du luth achevait de plonger Emilie dans une douce mélancolie: elle répéta ses anciennes romances; et les souvenirs qu'elles réveillaient devenant toujours plus touchants, ses larmes tombèrent sur le luth, et elle ne put continuer.

Le soleil avait disparu derrière le sommet des montagnes, leurs plus hautes pointes ne recevaient plus sa lumière; Emilie ne quittait point la tour, et s'y livrait à ses rêveries. Elle entendit marcher, elle tressaillit, et, regardant à la grille, elle reconnut en bas M. de Bonnac. Elle retomba dans la rêverie, dont cette distraction l'avait tirée: après quelques moments, elle reprit son luth, et chanta son air favori. Elle entendit encore marcher; elle écouta, on montait à la tour. L'obscurité lui inspira un peu de crainte; autrement elle n'en eût éprouvé aucune, puisque M. de Bonnac venait de passer. Les pas étaient rapides et légers; la porte s'ouvrit, et le crépuscule mourant déroba au premier instant les traits d'une personne qui entrait: mais Emilie pouvait-elle se méprendre au son de la voix? c'était celle de Valancourt. Emilie, qui jamais ne l'avait entendue sans émotion, troublée de surprise et de plaisir à la fois, l'eut à peine vu à ses pieds, qu'elle tomba sur une chaise. Tant de mouvements combattaient dans son cœur, qu'à peine elle entendait cette voix, dont les tendres et timides accents cherchaient à la ranimer. Valancourt, aux genoux d'Emilie, s'accusait de l'excès d'impatience qui l'avait décidé à la surprendre ainsi. Il venait d'arriver, et, ne pouvant attendre que le comte fût de retour, il avait couru aussitôt pour le chercher à la promenade. En passant près de la tour, il avait reconnu la voix d'Emilie, et sur-le-champ il était monté.

Elle fut longtemps avant de recouvrer ses sens; quand elle fut revenue, elle repoussa les soins de Valancourt, et lui demanda, avec autant de mécontentement qu'elle pouvait en sentir à sa vue, quel était le sujet de sa visite.

–Ah! Emilie, dit Valancourt, cet air, ces paroles, hélas! j'ai peu à espérer. Quand vous m'avez privé de votre estime, vous avez donc cessé de m'aimer?—Oui, monsieur, reprit Emilie, tâchant de donner de l'assurance à sa voix; si vous faisiez cas de mon estime, vous ne m'auriez pas donné cette nouvelle occasion de chagrin.

La physionomie de Valancourt changea soudain; l'anxiété du doute fit place à la surprise et au découragement. Il resta muet; il dit enfin:—On m'avait donné lieu d'espérer une réception bien différente!—Est-il bien vrai, Emilie, que pour jamais j'ai perdu votre affection? dois-je croire que votre estime ne peut jamais m'être rendue, que votre amour ne peut renaître? Le comte a-t-il médité cette cruauté, qui me donne une seconde fois la mort?

Le ton dont il parlait alarma Emilie autant que son discours l'étonna. Tremblante d'impatience, elle demanda qu'il voulût bien s'expliquer.

–Et pourquoi cette explication? répondit Valancourt. Ignorez-vous combien ma conduite a été calomniée? ignorez-vous que les actions dont vous m'avez cru coupable… et comment avez-vous pu, ô Emilie! me dégrader à ce point dans votre opinion?… que ces actions je les méprise, je les abhorre autant que vous? Ignorez-vous que le comte a découvert les faussetés qui me privaient de l'unique bien qui me soit cher au monde? qu'il m'a lui-même invité à venir près de vous me justifier? L'ignorez-vous, et suis-je encore le jouet d'une fausse espérance?

Le silence d'Emilie semblait confirmer cette crainte; Valancourt, dans l'obscurité, ne pouvait distinguer la surprise et la joie qui la rendaient comme immobile. Incapable de parler, un soupir de son cœur parut la soulager, et elle dit à la fin:

Valancourt! J'ignorais ce que vous venez de me dire. L'émotion que j'éprouve en est la preuve. Je ne pouvais plus vous estimer; mais je n'avais pu encore réussir à vous oublier.—Quelle idée, reprit Valancourt en s'appuyant contre la fenêtre, quelle persuasion ce moment m'apporte! Je vous suis cher! je vous suis cher encore, mon Emilie!—Faut-il donc que je vous le dise? répliqua Emilie. Cela est-il nécessaire? Voilà mon premier moment de joie depuis votre départ, et il me dédommage de tout ce que j'ai souffert.

Valancourt soupirait, et ne pouvait répondre; il couvrait ses mains de baisers: les larmes qui les inondaient parlaient un bien tendre langage, et les mots eussent eu moins d'expression.

La Réconciliation.


Emilie, un peu remise, proposa de retourner au château. Alors, et pour la première fois, elle se souvint que le comte avait invité Valancourt à se justifier auprès d'elle, et qu'il ne s'était fait aucune explication. Mais, à cette seule idée, tout son cœur rejeta la possibilité que Valancourt eût été coupable. Ses regards, sa voix, ses manières étaient le gage de sa noble et constante sincérité. Emilie se livra sans réserve aux émotions d'une joie que jamais elle n'avait sentie.

Ni Emilie ni Valancourt ne surent comment ils étaient retournés au château: si un pouvoir magique les y eût transportés, peut-être ils en eussent mieux remarqué le mouvement; ils étaient dans le vestibule avant de songer s'il existait quelque autre personne dans le monde. Le comte vint au-devant d'eux; et, avec toute la franchise et la bienveillance de son caractère, il accueillit Valancourt, et le pria de lui pardonner son injustice.

La comtesse et la jeune Blanche accueillirent Valancourt avec politesse et amitié. Blanche était si heureuse du bonheur d'Emilie, qu'elle oublia pour un moment l'absence de M. de Sainte-Foix; on l'attendait ce jour même, et la généreuse sensibilité de Blanche fut bientôt récompensée par l'arrivée de son amant. Il était guéri des blessures qu'il avait reçues dans la périlleuse aventure des montagnes, le récit qu'on en fit augmenta le sentiment des jouissances présentes; on se félicita de nouveau, et ce charmant souper offrit sur tous les visages l'expression d'une joie égale. Chacun cependant gardait son caractère et goûtait diversement son bonheur. Blanche était franche et gaie, Emilie tendre et plaintive, Valancourt exalté, tendre et gai tour à tour; Sainte-Foix était joyeux; et le comte, à ce spectacle, exprimait autant de complaisance que de bonté.

CHAPITRE XLIV

Les mariages de Blanche et d'Emilie Saint-Aubert furent célébrés le même jour au château de Blangy, avec toute la magnificence du temps. Les fêtes furent splendides: on avait tendu la grande salle d'une tapisserie neuve, qui représentait Charlemagne et ses douze pairs; on voyait les fiers Sarrasins qui s'avançaient à la bataille; on voyait tous les enchantements et le pouvoir magique de Merlin. Les somptueuses bannières des Villeroi, ensevelies longtemps dans la poussière, furent de nouveau déployées, et flottèrent sur les pointes gothiques des fenêtres coloriées. La musique résonnait de toute part, et les échos de la galerie en retentissaient.

Annette regardait cette salle, dont les arcades et les fenêtres étaient illuminées et décorées de lustres en festons; elle considérait la magnificence des parures, les riches livrées des serviteurs, les meubles de velours enrichis d'or; elle écoutait les chants de plaisir qui ébranlaient la voûte; elle se croyait dans un palais de fées; elle assurait que, dans les plus beaux contes, elle n'avait rien vu de si charmant, et que les lutins eux-mêmes ne faisaient rien de plus beau dans leurs brillantes assemblées. La vieille Dorothée soupirait, et disait que l'aspect du château lui rappelait encore sa jeunesse.

Après avoir orné quelques-unes des fêtes du château, Emilie et Valancourt prirent congé de leurs tendres amis, et retournèrent à la vallée. La bonne, la fidèle Thérèse les reçut avec une joie sincère. Les ombrages de ce lieu chéri semblèrent, à leur arrivée, leur offrir obligeamment les plus tendres souvenirs. En parcourant ces lieux si longtemps habités par M. et madame Saint-Aubert, Emilie montrait avec tendresse les endroits où ils aimaient à reposer, et son bonheur lui semblait plus doux, en pensant que tous deux ils l'auraient embelli d'un sourire.

Valancourt la mena au platane, où, pour la première fois, il avait osé lui parler de son amour. Le souvenir des chagrins qu'ensuite il avait endurés, des malheurs, des dangers qui avaient suivi cette rencontre, augmenta le sentiment de leur félicité actuelle. Sous cet ombrage sacré, et voué pour jamais à la mémoire de Saint-Aubert, ils jurèrent l'un et l'autre de chercher à s'en rendre dignes, en imitant sa douce bienveillance; en se rappelant que toute espèce de supériorité impose des devoirs à celui qui en jouit; en offrant à leurs semblables, outre les consolations et les bienfaits que la prospérité doit tous les jours à l'infortune, l'exemple d'une vie passée dans la reconnaissance envers Dieu, et la constante occupation d'être utile à l'humanité.

Aussitôt après leur retour, le frère de Valancourt vint le féliciter de son mariage, et rendre hommage à Emilie. Il fut si content d'elle, si heureux de la riante et heureuse perspective que ce mariage offrait à Valancourt, que sur-le-champ il lui remit une partie de son bien; et, comme il n'avait point d'enfant, il lui assura la totalité de sa succession.

Les biens de Toulouse furent vendus. Emilie racheta de M. Quesnel l'ancien domaine de son père; elle dota Annette, et l'établit à Epourville avec Ludovico. Valancourt et elle-même préféraient à toute autre demeure les ombres chéries de la vallée; ils y fixèrent leur résidence; mais chaque année, par respect pour M. Saint-Aubert, ils allèrent passer quelques mois dans l'habitation où il avait été élevé.

Emilie pria Valancourt de trouver bon qu'elle remît à M. de Bonnac le legs qu'elle avait reçu de la signora Laurentini. Valancourt, quand elle fit cette demande, sentit tout ce qu'elle avait pour lui d'obligeant. Le château d'Udolphe revenait aussi à l'épouse de M. de Bonnac, la plus proche parente de cette maison; et cette famille, longtemps malheureuse, goûta de nouveau l'abondance et la paix.

Oh! combien il serait doux de parler longtemps du bonheur de Valancourt et d'Emilie! de dire avec quelle joie, après avoir souffert l'oppression des méchants et le mépris des faibles, ils furent enfin rendus l'un à l'autre; avec quel plaisir ils retrouvèrent les paysages chéris de leur patrie! combien il serait doux de raconter comment, rentrés dans la route qui conduit le plus sûrement au bonheur, tendant sans cesse à la perfection de leur intelligence, ils jouirent des douceurs d'une société éclairée, des plaisirs d'une bienfaisance active, et comment les bosquets de la vallée redevinrent le séjour de la sagesse et le temple de la félicité domestique!

Puisse-t-il du moins avoir été utile de démontrer que le vice peut quelquefois affliger la vertu; mais que son pouvoir est passager, et son châtiment certain! tandis que la vertu froissée par l'injustice, mais appuyée sur la patience, triomphe enfin de l'infortune!

Et si la faible main qui a tracé cette histoire a pu, par ses tableaux, soulager un moment la tristesse de l'affligée, par sa morale consolante; si elle a pu lui apprendre à en supporter le fardeau, ses humbles efforts n'auront pas été vains, et l'auteur aura reçu sa récompense.

FIN DES MYSTÈRES D'UDOLPHE
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
03 ağustos 2018
Hacim:
624 s. 25 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain

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