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Kitabı oku: «Le magasin d'antiquités, Tome II», sayfa 20

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– Oh! il n'y a rien de fâcheux là dedans, dit-elle. Rien du tout qui vous concerne.

– Mais ça concerne peut-être?.. Enfin est-ce que vous n'avez rien entendu à travers les fentes des portes ou les trous de serrure, qu'on n'aurait pas été bien aise que vous pussiez entendre?»

En faisant cette question, Dick respirait à peine.

«Oh! que si.

– Dans… dans Bevis-Marks? ajouta vivement Richard Quelque conversation entre Brass et Sally?

– Oui.»

Richard tira hors du lit son bras décharné; et, saisissant la jeune fille par le poignet, il la pressa de s'expliquer; sinon, il ne répondrait pas de ce qui pourrait arriver, dans l'état d'agitation et d'angoisse où il se trouvait et qu'il était incapable de supporter davantage. En le voyant si inquiet, la marquise comprit qu'il y aurait plus de danger à différer sa révélation que d'inconvénients à la faire tout de suite. Elle promit d'obéir, à condition que le malade se tiendrait parfaitement tranquille et s'abstiendrait de remuer ou de se tourner brusquement comme il faisait.

«Mais si vous recommencez, dit-elle, je laisserai là l'histoire.

Je vous en préviens.

– Vous ne pouvez la laisser avant de l'avoir commencée. Commencez, ma mignonne. Parlez, ma soeur, parlez. Gentille Polly, dites. Dites-moi tout. Je vous en prie, marquise. Je vous en supplie.»

En présence de ces ardentes prières, que Richard Swiveller jetait d'un ton aussi passionné que s'il s'agissait des voeux les plus solennels et les plus terribles, la jeune fille ne put résister davantage.

«Eh bien! dit-elle, avant le jour où je me suis enfuie, je, couchais ordinairement dans la cuisine où nous avons joué ensemble aux cartes, vous savez. Miss Sally avait l'habitude d'avoir dans sa poche la clef de la cuisine, et le soir elle ne manquait jamais de venir prendre la chandelle et couvrir le feu. Cela fait, elle me laissait gagner mon lit dans l'obscurité, fermait la porte en dehors, remettait la clef dans sa poche, et me tenait ainsi enfermée jusqu'au lendemain matin où elle revenait de très-bonne heure, je vous assure, me rendre ma liberté. J'avais terriblement peur de me savoir ainsi calfeutrée; car je savais bien que, si le feu prenait à la maison, ils m'oublieraient pour ne songer qu'à eux. Aussi, quand je pouvais trouver une vieille clef rouillée, je la ramassais bien vite pour l'essayer à la porte. Enfin dans un coin poudreux de la cave je rencontrai une clef qui fit mon affaire.»

Ici M. Swiveller agita violemment ses jambes. Mais comme, devant cette démonstration, la petite servante s'était interrompue sur- le-champ dans son récit, il cessa de remuer et, s'excusant d'avoir oublié un moment leur convention, il pria la jeune fille de continuer.

«Allez, dit-elle, ils étaient bien regardants pour ma nourriture. Oh! vous ne sauriez vous imaginer comme ils me serraient de près. Aussi j'avais l'habitude de sortir la nuit quand ils étaient au lit et de rôder dans l'ombre, à la recherche de quelque morceau de biscuit ou de sandwich que vous auriez laissé dans l'étude, ou même de pelures d'orange pour les mettre dans de l'eau chaude et m'en faire censé du vin. Avez-vous jamais goûté de la pelure d'orange infusée dans de l'eau?»

M. Swiveller répondit qu'il n'avait jamais goûté de cette liqueur brûlante, et pressa de nouveau son amie de reprendre le fil de son récit.

«Avec beaucoup de bonne volonté on finit par trouver cela agréable: autrement, on regrette de ne pas y sentir un peu plus de goût, comme de raison. Eh bien! donc, quelquefois je sortais quand mes maîtres étaient allés se mettre au lit; et une ou deux nuits avant qu'il y eût ce fameux bruit dans l'étude quand on arrêta le jeune homme, je montai l'escalier tandis que M. Brass et miss Sally étaient assis devant le feu de l'étude; et pour dire la vérité, confiante dans ma clef qui protégeait mon retour, je me mis à écouter à la porte.»

M. Swiveller leva ses genoux comme pour faire un dais conique des draps et de la couverture; la plus grande impatience se trahit dans l'expression de ses traits. Mais la petite servante s'arrêtant et le menaçant du doigt de ne pas continuer, le cône disparut; l'air d'impatience seul resta.

«Ils étaient là tous deux, lui et elle, dit la petite servante, assis près du feu et causant tout doucement ensemble. M. Brass dit à miss Sally: «Ma foi, c'est une chose dangereuse, qui peut nous mettre bien des désagréments sur les bras, et je ne m'en soucie guère.» Mais elle, elle lui disait, vous savez son genre, elle lui disait: «Il faut que vous soyez un vrai coeur de poulet, l'homme le plus faible, le plus mou que j'aie jamais vu, et c'est une grande erreur de la nature que nous ne soyons pas nés plutôt moi le frère et vous la soeur. Quilp, dit-elle encore, n'est-il pas notre principal client? – Oui certainement, répondit M. Brass. – Et, ne sommes-nous pas toujours occupés à ruiner quelqu'un pour son compte? – Oui certainement, répondit M. Brass. – Eh bien, dit-elle, qu'importe la ruine de Kit, puisque Quilp la désire? – Au fait, oui, qu'importe?» dit M. Brass. Alors ils se mirent à chuchoter et à rire longtemps entre eux en se disant qu'il n'y aurait aucun danger pourvu que la chose fût bien menée M. Brass tira son livre de poche et dit: «Voilà l'affaire, tenez! justement le billet de banque de cinq livres que m'a remis Quilp. Il ne nous en faut pas davantage. Kit doit venir demain matin, je le sais. Tandis qu'il sera en haut, vous sortirez, et j'enverrai en course M. Richard. Kit étant seul vis-à-vis de moi, j'engagerai la conversation avec lui et mettrai ce billet dans son chapeau. Je m'arrangerai de manière à faire trouver le billet par M. Richard, qui deviendra notre témoin. Et ce sera bien le diable si avec tout cela nous ne réussissons pas à débarrasser M. Quilp de Kit pour satisfaire son ressentiment. Miss Sally se mit à rire en approuvant le plan. Mais comme ils firent mine de vouloir se retirer et que j'avais peur d'être surprise en restant plus longtemps, je redescendis bien vite mon escalier. Voilà!»

En parlant ainsi, la petite servante s'était peu à peu animée autant que M. Swiveller; aussi ne fit-elle pas d'effort pour le contenir lorsqu'il se dressa dans son lit et demanda vivement:

«Cette histoire n'a-t-elle été confiée à personne?

– Comment l'aurait-elle été? répondit la garde-malade. Rien que d'y penser j'en étais toute saisie, et j'espérais que le jeune homme serait renvoyé absous. Quand je leur entendis dire qu'on avait déclaré Kit coupable d'un vol dont je le savais innocent, vous étiez parti, le locataire aussi, et d'ailleurs je crois bien que j'aurais eu peur de lui raconter la chose, même s'il avait été là. Quant à vous, depuis que je suis venue ici, vous avez été si malade, qu'il n'y avait pas moyen de songer à vous en parler.

– Marquise, dit M. Swiveller arrachant de sa tête son bonnet de nuit qu'il envoya à l'autre bout de la chambre, faites-moi le plaisir d'aller voir quelques moments sur le palier, si j'y suis. Il faut que je sorte.

– Vous!.. s'écria sa garde-malade. Vous n'y pensez pas?

– Il le faut, reprit-il en promenant son regard autour de la chambre. Où sont mes habits?

– Oh! que je suis heureuse!.. Vous n'en avez plus du tout.

– M'dame!.. dit M. Swiveller profondément étonné.

– J'ai été obligée de les vendre les uns après les autres afin de me procurer les médicaments qui vous étaient ordonnés. Mais ne vous occupez pas de cela, ajouta vivement la marquise en voyant Richard retomber en arrière sur son oreiller; vous n'auriez seulement pas la force de vous tenir debout.

– Je crains bien, dit tristement Richard, que vous n'ayez raison.

Que faire? Mon Dieu! que faire?»

Il lui suffit naturellement d'un moment de réflexion pour sentir qu'avant toute chose il fallait se mettre en rapport avec un des MM. Garland. Il n'était pas impossible que M. Abel ne fût pas encore sorti de l'étude. En moins de temps qu'il n'en faut pour le raconter, la petite servante eut l'adresse écrite au crayon sur un bout de papier, avec un portrait verbal, véritable signalement du père et du fils, assez frappant pour qu'elle pût reconnaître sans la moindre difficulté, soit l'un soit l'autre des MM. Garland; enfin une recommandation spéciale de se méfier de M. Chukster, vu son antipathie bien connue pour Kit. Munie de ces minces renseignements, elle s'élança avec ordre de ramener M. Garland ou son fils M. Abel.

«Je suppose, dit Richard au moment où elle fermait lentement la porte et jetait un dernier regard dans la chambre pour s'assurer si le malade était bien à son aise, je suppose qu'il ne reste plus rien ici, pas même une veste?

– Non, rien.

– C'est embarrassant, dit-il, en cas d'incendie; un parapluie au moins eût servi à quelque chose. Mais c'est égal, ce que vous avez fait est bien fait, chère marquise. Sans vous, je serais un homme mort.»

CHAPITRE XXVIII

Bien heureusement pour la petite servante qu'elle était vive et alerte; sans cela, la course qu'elle entreprenait toute seule, dans le voisinage même de l'endroit où elle courait le plus de risque à se montrer, eût eu pour effet peut-être d'amener une restauration de la suprême autorité de miss Sally sur sa personne. Ne se dissimulant pas le péril qu'elle courait, la marquise n'eut pas plutôt quitté la maison, qu'elle se jeta dans la première rue sombre et écartée qui s'offrit à elle; et, sans s'inquiéter du terme assigné à sa course, elle ne songea tout d'abord qu'à mettre deux bons milles de briques et de plâtre entre elle et Bevis- Marks.

Une fois qu'elle eut accompli ce premier point, elle commença à se diriger vers l'étude du notaire. En s'informant avec adresse auprès des marchandes de pommes et des écaillères, au coin des rues, plutôt que dans les brillantes boutiques ou auprès des personnes bien mises, au risque d'un accueil plus ou moins poli, elle obtint assez bien les renseignements nécessaires. Comme les pigeons voyageurs, d'abord perdus dans un lieu qui leur est inconnu, aspirent l'air au hasard pendant quelque temps, avant de s'élancer vers le lieu de leur message, de même la marquise fit des détours avant de se croire en sûreté, puis elle se dirigea vivement vers le but qui lui avait été assigné.

Elle n'avait point de chapeau; rien sur la tête qu'une grande coiffe portée au temps jadis par Sally Brass, dont le goût en fait de couture était, comme on sait, tout particulier. Sa course était plutôt entravée qu'aidée par ses souliers en savate qui s'échappaient sans cesse de ses pieds, et qu'elle avait ensuite bien de la peine à retrouver au milieu du flot des passants. La pauvre petite créature éprouva tant d'embarras et de retard pour retrouver ces objets de toilette dans la boue et le ruisseau, et fut tellement coudoyée pendant ce temps-là, poussée, heurtée et portée de main en main, qu'au moment où elle atteignit enfin la rue du notaire, elle était presque épuisée et à bout de forces: elle en avait la larme à l'oeil.

Mais enfin la voilà arrivée, c'était une grande consolation; d'autant plus que par la fenêtre de l'étude elle vit briller des lumières, et put espérer par conséquent qu'il n'était pas trop tard. Elle s'essuya donc les yeux avec le revers de sa main, et, montant tout doucement les degrés du perron, regarda à travers les vitres.

M. Chukster était debout derrière son bureau. Il faisait ses dispositions de fin de journée, comme de tirer ses poignets, de relever son col de chemise, de rattacher plus gracieusement sa cravate et d'arranger secrètement ses moustaches à l'aide d'un petit morceau de miroir d'une forme triangulaire. Devant le feu se tenaient deux gentlemen: l'un d'eux lui parut être le notaire, et elle ne se trompait pas; l'autre, qui boutonnait sa grande redingote pour s'apprêter à partir, M. Abel Garland.

Ces observations faites, la petite rusée tint conseil avec elle- même. Elle résolut d'attendre dans la rue la sortie de M. Abel. Alors elle n'aurait plus à craindre d'être forcée de parler devant M. Chukster, et il lui serait plus facile de remplir son message. Dans cette intention, elle se laissa glisser au bas de la fenêtre, traversa la rue et alla s'asseoir sur le pas d'une porte juste en face.

À peine avait-elle pris cette position, qu'un poney arriva en dansant tout le long de la rue avec ses jambes en zigzag et sa tête qui se tournait de tous côtés. Derrière le poney un phaéton, et dans le phaéton un homme; mais le poney ne semblait s'inquiéter ni du phaéton ni de l'homme: car tour à tour il se levait sur ses jambes de derrière, ou s'arrêtait, ou s'élançait, ou s'arrêtait de nouveau, ou reculait, ou se jetait de côté, sans le moindre égard pour l'un ni pour l'autre, selon que la fantaisie l'en prenait, et comme s'il avait à coeur de montrer qu'il était l'animal le plus libre qu'il y eût dans le monde. Quand la voiture arriva à la porte du notaire, l'homme dit d'une manière très-respectueuse: «Ohah! c'est ici!» ayant l'air de faire entendre que, s'il prenait l'extrême liberté d'émettre un voeu, ce serait celui de s'arrêter en cet endroit. Le poney fit une pause d'un moment; mais, comme s'il eût réfléchi que s'arrêter lorsqu'on l'en priait serait établir un précédent peu convenable et même dangereux, il repartit immédiatement, courut au trot allongé jusqu'au coin de la rue, tourna, revint sur ses pas, et alors s'arrêta de sa propre volonté.

«Oh! vous faites un joli coco!.. dit l'homme qui ne voulait pas s'aventurer légèrement à peindre le poney sous des couleurs plus tranchées avant d'avoir mis en toute sécurité pied à terre sur le trottoir. Je voudrais bien te voir une bonne fois récompensé comme tu le mérites, va!

– Qu'est-ce qu'il a fait? dit M. Abel qui tournait un châle autour de son cou tout en descendant les marches.

– Il y a de quoi mettre un homme hors de lui, répondit le valet d'écurie. C'est bien le coquin le plus vicieux… Ohah! vas-tu rester tranquille!

– Ce n'est pas le moyen qu'il reste tranquille, si vous lui lancez des injures, dit M. Abel qui s'installa dans la voiture, les guides en main. Il est très-bon enfant quand on sait le prendre. Voici, depuis longtemps, la première fois qu'il sort, car il a perdu son conducteur, et jusqu'à ce matin il n'a pas voulu bouger. Les lanternes sont prêtes, n'est-ce pas? Bien. Trouvez- vous ici demain, à la même heure, s'il vous plaît, pour tenir mon cheval. Bonsoir.»

Après une ou deux cabrioles de son invention, le poney céda à la douceur de M. Abel et se mit à trotter gentiment.

Durant tout ce temps, M. Chukster s'était tenu debout sur le seuil de la porte. En le voyant, la petite servante n'avait pas osé s'approcher. Elle n'eut donc d'autre parti à prendre que de courir après le phaéton et de crier à M. Abel d'arrêter. Mais, par suite de cette course haletante, elle était hors d'état de se faire entendre. Le cas était désespéré, car le poney pressait le pas. La marquise se pendit quelques instants à la voiture; mais sentant qu'elle ne pouvait aller plus loin, et que bientôt même il lui faudrait renoncer à son projet, elle grimpa, d'un bond vigoureux, sur le siège de derrière, et, dans cette ascension, perdit sans retour un de ses souliers.

M. Abel étant dans une disposition d'esprit rêveuse, et ayant d'ailleurs assez à faire de diriger le poney, allait au petit trot sans se retourner. Il était bien loin de songer à l'étrange figure qu'il traînait derrière lui, jusqu'à ce que la marquise, un peu remise de sa suffocation, de la perte de son soulier et de la nouveauté de sa situation, jeta tout près de son oreille ces mots:

«Dites donc, monsieur…»

Il se retourna vivement et, arrêtant le poney, s'écria avec une certaine émotion:

«Mon Dieu! qu'est-ce que c'est que ça?

– N'ayez pas peur, monsieur, répondit la messagère encore haletante. Oh! j'ai tant couru après vous!

– Que voulez-vous? dit M. Abel. Comment êtes-vous là?

– Je suis montée par derrière, répondit la marquise. Oh! je vous en prie, conduisez-moi, monsieur… sans vous arrêter… vers la Cité. Oh! je vous en prie, hâtez-vous… C'est une affaire importante. Il y a là quelqu'un qui désire vous voir. Il m'a envoyée vous demander de venir tout de suite, parce qu'il sait toute l'affaire de Kit, et qu'il peut le sauver encore en prouvant son innocence!..

– Que me dites-vous là, mon enfant!

– La vérité, sur ma parole, sur mon honneur. Mais veuillez tourner de ce côté, et vivement, s'il vous plaît. Je suis partie depuis si longtemps, qu'il doit croire que je me suis perdue.»

Involontairement, M. Abel poussa le poney en avant. Le poney, obéissant à une secrète sympathie, ou bien écoutant un nouveau caprice, s'élança rapidement et sans ralentir son pas, sans, se livrer à aucun acte d'excentricité avant d'avoir atteint la porte de la maison où logeait M. Swiveller: là, chose merveilleuse! il consentit à s'arrêter au moment même où M. Abel lui en intima l'ordre.

«Voyez! dit la marquise montrant une fenêtre faiblement éclairée; c'est cette chambre là-haut. Venez!»

M. Abel, qui était bien une des créatures du monde les plus simples et les plus modestes, et qui à cette simplicité joignait une timidité naturelle, hésita; car il avait entendu parler, et il le croyait mordicus, de personnes attirées dans des lieux équivoques, en des circonstances semblables, par des guides comme la marquise, pour s'y voir volées et même assassinées.

Cependant sa sympathie pour Kit l'emporta sur toute autre considération. Ainsi, confiant Whisker aux soins d'un homme qui précisément se tenait près de là pour gagner quelque chose, il laissa sa compagne de route lui prendre là main pour le conduire jusqu'au haut d'un escalier étroit et obscur.

Sa surprise ne fut pas médiocre quand il se vit introduit dans une chambre de malade éclairée d'une lueur douteuse, où un homme dormait tranquillement dans son lit.

«N'est-ce pas, dit son guide à voix basse mais avec une certaine chaleur, n'est-ce pas que ça fait plaisir de le voir reposer comme ça?.. Oh! si vous l'aviez vu il y a deux ou trois jours seulement! quelle différence!»

Le jeune M. Garland ne répondit rien, et, à dire vrai, il aimait mieux se tenir très-loin du lit et très-près de la porte. Son guide, qui paraissait comprendre sa répugnance, moucha la chandelle, la prit à la main et s'approcha du malade. Au même moment le dormeur tressaillit… M. Abel reconnut dans ce visage dévasté par la souffrance les traits de Richard Swiveller.

«Qu'est-ce que ceci? dit-il d'un ton amical et en s'élançant vers lui; vous avez donc été malade?

– Très-malade, répondit Richard, à deux doigts de la mort. Il ne s'en est fallu de rien que vous vinssiez à apprendre que votre très-humble Richard était dans sa bière, sans l'amie que j'ai envoyée à votre recherche… Une autre poignée de main, marquise, s'il vous plaît… Asseyez-vous, monsieur.»

M. Abel, qui ne parut pas médiocrement surpris d'entendre conférer une telle qualité à son guide, prit une chaise et s'assit auprès du lit.

«J'ai envoyé chez vous, monsieur, dit Richard; elle vous a sans doute appris déjà pour quel motif.

– En effet, j'en suis encore tout bouleversé. Je ne sais réellement que dire ni que penser.

– Vous le saurez bientôt, répliqua Dick. Marquise, asseyez-vous au pied du lit, s'il vous plaît. Maintenant, racontez à ce gentleman tout ce que vous m'avez raconté à moi-même, d'un bout à l'autre. Vous, monsieur, ne dites rien.»

L'histoire fut répétée exactement de la même manière que la première fois, sans addition, sans omission non plus. Durant tout le récit, Richard Swiveller tint ses yeux fixés sur le visiteur; et quand la marquise eut achevé, il reprit aussitôt la parole:

«Vous venez, dit-il, d'entendre tous ces détails, et vous ne les oublierez pas. Je suis trop affaibli, trop épuisé pour pouvoir vous donner aucun conseil; mais vous et vos amis vous saurez bien ce que vous aurez à faire. Après ce long retard, chaque minute est un siècle. Si jamais dans votre vie vous vous êtes hâté de retourner chez vous, que ce soit surtout ce soir. Ne vous arrêtez pas pour me dire un seul mot, mais partez. On la trouvera ici si l'on a besoin d'elle. Et quant à moi, vous êtes bien sûr de me trouver au logis une semaine ou deux au moins. Il y a pour cela plus d'une bonne raison. Marquise, une lumière. Si vous perdez une minute de plus à me regarder, monsieur, je ne vous le pardonnerai jamais!»

M. Abel n'avait pas besoin d'être stimulé davantage. En un instant il fut parti; et quand la marquise, qui l'avait éclairé sur l'escalier, revint, elle annonça que le poney s'était mis en plein galop sans faire la moindre objection préliminaire.

«C'est bien! dit Richard. Il a du coeur, et à partir de ce moment je l'honore. Mais soupez donc, prenez donc un pot de bière; je suis sûr que vous devez être accablée de fatigue. Prenez un pot de bière. Cela me fera autant de bien de vous voir boire que si je buvais moi-même.»

Il ne fallait rien moins que cette assurance pour déterminer la petite garde-malade à se permettre un tel luxe. Elle se mit donc à boire et à manger, à la grande satisfaction de M. Swiveller, puis elle lui donna à boire, remit tout en ordre, s'enveloppa d'un vieux couvre-pied et se coucha sur le tapis devant le feu.

Pendant ce temps, M. Swiveller murmurait dans son sommeil: «Étale, oh! étale un lit de roseaux, nous y reposerons jusqu'aux lueurs matinales… Bonne nuit, marquise.»

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
28 eylül 2017
Hacim:
440 s. 1 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain
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