Sadece LitRes`te okuyun

Kitap dosya olarak indirilemez ancak uygulamamız üzerinden veya online olarak web sitemizden okunabilir.

Kitabı oku: «Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, tome II», sayfa 11

Yazı tipi:

CHAPITRE XII.
Rois de Babylone jusqu’à Nabukodonosor

EN ayant le mérite exclusif de nous donner la liste des rois babyloniens depuis Nabonasar, le Kanon astronomique n’y a pas joint celui de nous donner des détails instructifs sur leurs règnes, et l’on n’y supplée que très-imparfaitement par d’autres auteurs. Sans un passage du Syncelle, nous ignorerions pourquoi les rois antérieurs n’ont laissé aucune trace: il paraît que Nabonasar, en brûlant leurs actes, ne fit qu’imiter l’exemple de Ninus, qui, selon l’historien syrien Mar-ibas163, brûla aussi les histoires des rois qui l’avaient précédé. Le règne de Nabonasar, qui forme une ère, s’ouvrit le 26 février de l’an 747 avant J.-C. à midi. A cette époque dut régner à Ninive Teglat-Phalasar, qui l’an 742 s’empara de Damas et enleva quelques tribus juives. Il faut croire que Nabonasar lui parut trop puissant pour l’attaquer, et qu’il se contenta d’une apparence de tribut et de vassalité, comme il arrive quelquefois à la Porte ottomane, en des cas semblables. La dernière année de Nabonasar, en 734, paraît coïncider avec le temps où Salmanasar, autre roi de Ninive, était occupé d’une guerre opiniâtre contre les villes phéniciennes; ce prince prit Samarie et déporta les tribus juives en 730. Nabius, successeur de Nabonasar, n’avait régné que 2 ans: Xinzirus et Porus, qui régnèrent 5 ans, avaient succédé à Nabius et virent Salmanasar enlever une colonie de Babyloniens qui furent déportés à Samarie. Nous avons dit que cet acte indique un retour de puissance de la part des Ninivites sur les Babyloniens.

En 726 régna Ilulaïus, à l’époque où Sennachérib dut succéder à Salmanasar. En 721, à Ilulaïus succéda Mardok-empad, le Mérodak-Baladan des Hébreux, et le Bélésys de Ktésias… Cette année fut la première de Sardanapale, Asar-adonphal, fils de Sennachérib, et il semble que Mérodak lui dut sa nomination ou sa confirmation.

Depuis Mérodak jusqu’à Saos-Duchœus, en 667, 7 règnes et 2 interrègnes remplissent la courte durée de 54 ans; ce qui indique un état de troubles civils, et de partis contraires qui se disputent le pouvoir.

Parallèlement chez les Mèdes régnait Deïokès, qui, assez occupé de son intérieur, ne dut point inquiéter les Babyloniens. Saos-Duchæus, par son règne de 20 ans, indique un état de choses plus affermi, à raison de l’ascendant d’un des partis. Ce dut être lui dont les généraux emmenèrent captif à Babylone Manassé, roi de Juda, mort en 652. Le livre des Rois, plus authentique que les Paralipomènes, ne dit rien de ce fait, d’ailleurs peu important. En 645 régna Kinil-Adan, qui serait le Nabukodonosor de Judith, si saint Jérôme ne nous avertissait formellement que dès son temps les Juifs, malgré leur zèle dévot, reconnaissaient ce livre pour être apocryphe, ainsi que le livre encore plus romanesque intitulé Tobie. Si le lecteur veut jeter l’œil sur la note ci-jointe, il y verra les preuves de cette apocryphité admise par tous les bons critiques.164

Le livre intitulé Chronologie d’Hérodote165 prouve, page 150, que Kynil-Adan est le Nanibrus de Ktésias dans l’anecdote de Parsodas, laquelle se place entre les années 633 et 627.... Il semblerait que Nanibrus aurait succédé à Saos-Duchæus, comme à son père, sous le bon plaisir des rois mèdes.

Après Kynil-Adan, en 625, règne Nabopolasar qui est le premier Labynet d’Hérodote. C’est de lui que parle cet historien, lorsqu’après la bataille entre les Lydiens et les Mèdes, interrompue le 3 février au matin, par la célèbre éclipse de Thales, il dit: «Syennèsis, roi de Cilicie, et Labynet, roi de Babylone, furent les médiateurs de la paix; ils hâtèrent le traité, et ils l’assurèrent par un mariage.»

Ici le texte et le bon sens s’accordent à vouloir que si Syennèsis et Labynet furent présents, ils furent auxiliaires et sans doute vassaux, l’un du Lydien, l’autre du Mède; ceci cadre bien avec le récit de Ktésias: mais, dira-t-on, si la bataille eut lieu le 3 février au matin, et si le règne de Nabopolasar ne date que du 26 de ce mois (l’an 625), comment Hérodote l’appelle-t-il déjà roi? Cette difficulté se résout très-bien, en disant que Nabopolasar dut être le fils de Nanibrus-Kynil-Adan; qu’en sa qualité d’héritier, il put conduire le subside, même depuis 4 ans que durait cette guerre, et que son père étant mort l’année 624, cette année ne compte pas pour Nabopolasar, quoique déjà roi, attendu que dans cette liste les années appartiennent toujours aux princes qui les commencent. D’ailleurs Hérodote a pu lui anticiper le nom de roi.

Quant à la date de l’éclipse de Thalès au 3 février de l’an 625 avant J.-C., telle que nous l’admettons, elle résulte si positivement du texte d’Hérodote, que nous la croyons immuable (voyez la Chronologie d’Hérodote, page 7 et suivantes). Si donc aujourd’hui les calculs de nos astronomes représentent cette éclipse comme arrivée trop matin pour avoir été visible dans l’Asie mineure, il faut ou que les théories n’aient pas encore atteint une entière perfection, ou que le fait ait subi quelque altération de la part des narrateurs. Le savant auteur d’un ouvrage récent n’hésite pas à préférer cette seconde opinion lorsqu’il regarde cette éclipse comme une fiction d’Hérodote ou de ses auteurs166, mais en mettant à part l’infaillibilité de nos astronomes, il est ici des considérations morales que l’on ne peut écarter légèrement.

D’abord on ne voit pas comment les historiens babyloniens, mèdes et lydiens, intéressés au fait, ont pu s’entendre pour imaginer une fiction sans base; encore moins comment Hérodote, voyageur étranger, impartial, et d’un caractère éminemment sincère, a pu consulter les livres et converser avec les savants de ces divers peuples, sans trouver et sans noter quelque doute, s’il y en eut, sur un fait si remarquable, lui qui nous répète cette phrase de candeur: «Voilà ce que disent les uns; mais les autres prétendent que cela se passa autrement.»

Ensuite l’on doit remarquer qu’ici l’éclipse n’est pas l’accessoire, la broderie du fait, mais le fait principal lui-même, la cause occasionelle et déterminante d’un traité qui changea l’état politique de l’Asie, et cela de la manière la plus notoire, la plus remarquable, puisqu’une grande guerre fut terminée brusquement par l’un de ces prodiges célestes qui excitaient une terreur générale chez les anciens peuples. Ce fut encore une suite de l’éclipse, que le siège de Ninive par Kyaxarès, et son interruption par les Scythes, qui poussèrent jusqu’à Ascalon, où les arrêta Psammetik, roi d’Égypte. Cette dernière anecdote, Hérodote la tient des prêtres, égyptiens, comme il tient des Chaldéens celle de Labynet. Conçoit-on qu’il ait lié tous ces traits en un même récit, sans avoir fait une sorte de collation avec ces divers auteurs, et sans les avoir questionnés sur une éclipse aussi remarquable?

D’autre part, l’astronome, qui inculpe si facilement l’histoire de fiction, peut-il bien nous garantir la certitude mathématique des méthodes adoptées? Sans doute les Tables de la lune dressées par M. Burgh sont plus parfaites que celles de Mayer et de Mason; mais ne reste-il rien à y ajouter? par quels moyens sont-elles établies? N’est-ce pas en prenant pour jalons certaines éclipses de Ptolomée? Or que penser de l’exactitude de cet astronome, si quelques-unes de ses éclipses ne cadrent point avec les autres? Pour obtempérer à ces éclipses, l’on a supposé au mouvement de la lune une accélération progressive, représentée dans le calcul par une équation séculaire qui, pour l’an 625 avant J.-C., s’élève à environ un degré et demi: mais ne serait-ce pas ici la fiction; car si à la longitude donnée par les tables pour cette année-là, on ajoute l’équation 1°½, l’accélération se trouve beaucoup plus grande en ces temps anciens que dans les temps modernes, et cela est l’inverse du système régnant qui admet l’accélération croissante à mesure qu’elle s’approche de ces derniers. Ce système se trouve donc ici en contradiction avec lui-même, et sans doute c’est pour avoir senti cette contradiction, qu’un illustre astronome allemand, M. le baron de Zach, a proposé dans ses tables de la lune, page 3, de ne considérer les équations séculaires en longitude et en anomalie moyenne comme positives, c’est-à-dire croissantes, qu’après l’an 1700 (de notre ère), et comme négatives ou décroissantes, avant 1700. Alors le lieu moyen de la lune, au moment de l’éclipse du 3 février 625, moins avancé de 3 degrés qu’on ne le suppose, exigera que l’on augmente sa longitude (pour joindre le soleil) d’un espace qui, calculé en temps, peut retarder l’éclipse de près de 6 heures et la représenter comme arrivée entre 8 heures du matin et midi. L’on s’est donc trop pressé d’inculper l’exactitude d’Hérodote, et cette diversité d’opinion entre de savants astronomes, prouve que la science n’en est pas encore au point de prononcer d’emblée sur les historiens. De plus, il est dans les éclipses des incidents singuliers qui peuvent accroître leurs effets ténébreux d’une manière incompréhensible même pour les astronomes. Mæstlin, de qui fut élève Kepler, en cite un exemple frappant dans l’éclipse de soleil observée à Tubingen le 12 octobre 1605. Commencement à 1h 40´ après midi. Fin à 3h 6´ temps vrai. Grandeur, 10 doigts ⅓ ou ⅖. «Vers le milieu de cette éclipse, dit Mæstlin, le ciel étant parfaitement pur, survint tout à coup une obscurité semblable au crépuscule du soir, à tel point que l’on put voir Vénus, quoique rapprochée du soleil à 21 degrés, que les vignerons occupés à vendanger eurent peine à discerner les grappes, et que les maisons disparurent dans l’ombre.»

Voilà l’effet que produirait une éclipse totale, et néanmoins il s’en fallait 4 minutes que dans celle-ci le disque du soleil fût masqué: concluons que le récit d’Hérodote mérite une attention particulière et qu’il peut devenir un point de mire utile à nos astronomes. Revenons à notre sujet.

L’invasion des Scythes étant survenue, Kyaxarès fut réduit pendant 18 ans à être leur tributaire ou leur ennemi impuissant; pendant cet intervalle, le roi de Babylone protégé par ses fleuves, par ses canaux, par les inexpugnables remparts de sa ville, put braver la cavalerie scythe, ou la paralyser, comme Psammitik, par des présents annuels; et profitant de la faiblesse de Kyaxarès, il put cesser d’être son vassal, et devenir seulement son allié. C’est ce qui se déduit d’un passage d’Alexandre Polyhistor cité par le Syncelle, page 220, lequel nous apprend167 «qu’Astibaras (Kyaxarès) accorda sa fille Aroité à la demande que lui en fit Nabopolasar pour son fils Nabukodonosor.» Cet événement correspond aux années 607 ou 606. Il en résulte que Nabopolasar dut être le premier roi babylonien à la fois héréditaire et indépendant: en sorte que Babylone, vassale depuis sa fondation, en 1193, ne paraît avoir été capitale souveraine et indépendante, que vers les années postérieures à 625, quoique Hérodote lui attribue cet état sitôt après la subversion de Ninive en 717.

CHAPITRE XIII.
Règne de Nabopolasar, dit Nabukodonosor

IL n’existe pas de doute sur l’identité du Nabokolasar de la liste babylonienne, avec le Nabukodonosor des Hébreux168. Le règne brillant de ce prince semble avoir été le résultat naturel des trois précédents, qui pendant 60 ans de paix affermirent l’autorité, et accumulèrent les moyens de puissance qu’offrait un pays extrêmement fertile. D’autre part, l’emploi que Nabukodonosor fit de ces moyens, fut aussi le résultat de sa situation politique vis-à-vis de ses voisins. A l’est et au nord, l’empire mède lui opposait une barrière menaçante; à l’ouest, les petits états syriens, phéniciens et juifs, divisés et affaiblis, offraient une proie plus facile à son ambition: elle y prit son cours; mais parce que la résistance prolongée des villes de Tyr et de Jérusalem nécessita de sa part diverses expéditions répétées dont on a confondu quelques dates, il est nécessaire d’établir un ordre clair dans cette partie.

La 1re année du règne de Nabukodonosor est fixée par le kanon astronomique, à l’an 604 avant J.-C.; cette date devient un point de départ précis pour tous les faits relatifs soit antérieurs, soit postérieurs.

Jérémie dont l’autorité, comme écrivain contemporain, est prépondérante ici pendant une période de plus de 40 ans; Jérémie remarque169 en 3 chapitres différents, que l’an 1 de Nabukodonosor fut l’an 4 de Ihouaqim, fils de Josias. Par conséquent le règne de Ihouaqim date de l’an 607, et la mort de Josias, son père, se place à l’an 608. Ce prince avait régné 31 ans; par conséquent il avait commencé l’an 638. Jérémie ajoute, chapitre 25, que cette 4e année de Ihouaqim fut la 23e depuis l’an 13 de Josias, où Jérémie avait commencé sa mission prophétique. Ces 23 ans avant et compris l’an 604, remontent à l’an 626 inclus. Si l’on ajoutait 13 années pleines, on aurait 639; mais la 13e année de Josias doit se fondre dans la 1re des 23, et n’être que l’an 626, afin que la 1re de Josias reste l’an 638, comme l’exige le calcul premier de Jérémie.

Josias périt dans une bataille qu’il livra à Nékos, roi d’Égypte. Ce fils de Psammitik avait commencé de régner l’an 617; par conséquent l’an 608 fut la 10e année de son règne170. «Il avait entrepris, nous dit Hérodote, de creuser le canal qui conduit à la mer Rouge: 120,000 ouvriers périrent dans ce travail. Ce prince l’interrompit sur la réponse d’un oracle qui déclara qu’il travaillait pour le barbare: les Égyptiens appellent barbares tous ceux qui ne parlent pas leur langue.»

Ce barbare est clairement le Babylonien Nabopolasar, dont la puissance commença, vers l’année 610 ou 611, d’alarmer Nékos. La réponse de l’oracle suppose une question provocative: on devine aisément que ce fut Nékos qui dicta l’oracle, afin d’avoir un motif plausible de renoncer au canal, et de venir conquérir la Syrie. Hérodote a clairement désigné la défaite de Josias, lorsqu’il ajoute «que Nékos livra sur terre une bataille aux Syriens, près de Magdol171, et qu’après avoir remporté la victoire, il prit Kadyt-is, ville considérable de la Syrie.»

Cette ville de Kadyt-is n’est autre chose que Jérusalem (la sainte Salem), comme l’a très-bien vu Danville. Les Arabes ont conservé l’usage de l’appeler la Sainte par excellence, el Qods. Sans doute les Chaldéens et les Syriens lui donnèrent le même nom, qui dans leur dialecte est Qadouta, dont Hérodote rend bien l’orthographe quand il écrit Kadyt-is, puisque dans l’ancien grec, l’γ remplace sans cesse l’ou oriental, ainsi Bêrytos est Bérout; Ankyra est Angouriê comme Sylla est en latin Sulla, etc.

Nékos vainqueur déposa Ihouakas que les Juifs avaient élu après la mort de Josias; lui ayant substitué Ihouaqim son frère, il s’occupa de conquérir la Syrie de proche en proche jusqu’à l’Euphrate. Voilà cette prétendue rébellion du satrape d’Égypte dont parle Bérose en Josèphe (contr. App., lib. I, § XIX), laquelle détermina Nabopolasar à envoyer contre lui Nabukodonosor, son fils, à la tête d’une puissante armée. Josias avait péri en 608; Iouakas n’avait régné que 3 mois; Ihouaqim avait été installé en 607; les conquêtes de Nékos se firent en cette même année et pendant 606 et 605..... Il avait à subjuguer plusieurs petits états assez reluctants, tels que les Philistins, les Phéniciens, les rois de Damas, de Hama, de Hems, etc. En 605, il passe l’Euphrate et entre en Mésopotamie. Nabopolasar alarmé envoie contre lui Nabukodonosor, probablement en automne. Les armées se rencontrent, la bataille de Karchemis se livre en 604172. Nékos, complètement défait, se sauve en Égypte, d’où il ne sortit plus, dit le livre des rois. Nabukodonosor le poursuit rapidement jusqu’à la frontière d’Égypte. Il apprend la mort de son père: il avait à se venger du roi de Judée, Ihouaqim, créature de Nékos; mais il était encore plus pressé d’aller prendre possession d’un trône récemment élevé. «Dans ces circonstances, dit Bérose, il mit ordre aux affaires d’Égypte, de Cœlésyrie et des pays adjacents; et confiant à des chefs dévoués la conduite des nombreux prisonniers syriens, juifs, phéniciens, égyptiens qu’il emmenait, il partit avec peu de troupes, traversa le désert à grandes journées, et arriva à Babylone où les Chaldéens lui remirent le gouvernement, et il succéda à tous les états de son père173».

Voilà donc en l’an 604, 4e année de Ihouaqim, Nabukodonosor qui devient roi, évacue la Syrie, et se rend à Babylone. N’est-ce pas à cette époque qu’il faut placer le tribut dont parle le livre des Rois174, lorsqu’il dit: «Ihouaqim était âgé de 25 ans quand il régna, et il régna 11 ans? En son règne vint Nabukodonosor, roi de Babylone, qui lui imposa un tribut.... Ihouaqim le paya pendant 3 ans (604, 603, 602), puis il se révolta; alors Nabukodonosor envoya contre le pays de Juda des partis (latrones) de Chaldéens, de Syriens, de Moabites, d’Ammonites, etc., qui le désolèrent175, et le reste des actions de Ihouaqim est écrit dans les archives des rois. Ce prince s’endormit avec ses pères..... Son fils Ihouakin, âgé de 18 ans, régna à sa place pendant 3 mois.... et les généraux de Nabukodonosor vinrent l’assiéger; puis ce roi accourut lui-même, et Ihouakin étant sorti au-devant de lui, se rendit à discrétion, et fut emmené à Babylone, l’an 8 du règne de Nabukodonosor (597).»

Maintenant ajoutons à ces faits la circonstance du mariage de Nabukodonosor avec la fille de Kyaxar, du vivant de Nabopolasar, c’est-à-dire en l’an 606 ou 605, lorsque les succès alarmants de Nékos étaient la cause probable de cette alliance, et nous verrons un accord d’événements et de dates qui donne à ce tableau toute la vraisemblance historique. Pourquoi donc Alexandre Polyhistor nous dit-il176 «que sous le règne de Ioachim, roi de Jérusalem, le prophète Jérémie ayant surpris les Juifs qui sacrifiaient à une idole d’or appelée Baal, et leur ayant prédit des calamités prêtes à fondre, Ioachim ordonna de saisir le prophète pour le brûler. Mais Jérémie insista et assura que le feu ne serait employé qu’à cuire les aliments des Babyloniens, par la main des Juifs transférés captifs à Babylone. Nabukodonosor, informé de cette prophétie, pria Astibar, roi des Mèdes, de s’associer à lui pour marcher contre Jérusalem, et ayant formé une armée immense de Chaldéens et de Mèdes, il vint en effet assiéger cette ville, saisit vif le roi Ioachim et enleva tout ce qu’il y avait d’or, d’argent et d’airain dans le temple, laissant seulement l’arche et les tables de la loi à la garde de Jérémie.»

Il y a certainement erreur de dates et confusion de faits dans ce fragment; la prophétie indiquée par Polyhistor doit être celle du ch. 36 de Jérémie, où il est dit que «l’an 4e de Ihouaqim (604), Jérémie chargea Baruch d’écrire sous sa dictée tout ce qu’il avait prophétisé depuis l’an 13 de Josias; Baruch ayant terminé son travail l’an 5 de Ihouaqim (603) au 9e mois, alla faire de ce livre une lecture publique dans le temple: par suite de la rumeur que causa cette lecture; le livre fut porté au roi qui était dans son appartement d’hiver, près d’un brasier; ce prince en lut 3 ou 4 pages, les déchira, puis brûla tout le livre page à page, et donna ordre que l’on saisît Baruch et Jérémie pour les punir, mais on les cacha.»

Cette affaire étant de l’année 603, 2e de Nabukodonosor, lorsque ce monarque était rendu à Babylone, il ne peut avoir de suite assiégé Jérusalem, et enlevé le roi, surtout lorsque Jérémie et le livre des Rois n’en disent pas un seul mot. Polyhistor a sûrement confondu l’expédition de 597, et il a pris Iouakin pour son père Ihouaqim: la méprise est très-facile pour un Grec; mais à cette époque où Kyaxarès-Astibar assiégeait Ninive, ce prince n’a pas dû prêter ses troupes, et si les Mèdes accompagnèrent les Chaldéens, ce dut être dans l’expédition de 605 et 604, contre Nékos. Ainsi il y a confusion double.

La source de cette erreur semble être une phrase des Paralipomènes. Cette chronique dit au chap. 36, livre II:

«Ihouaqim régna 11 ans, et il fit le mal devant le Seigneur. Contre lui vint Nabukodonosor qui le lia de chaînes d’airain pour l’emmener à Babylone, et il emporta aussi les vases du temple. Son fils Iouakin régna à sa place, âgé de 8 ans, et il régna pendant 3 mois et 10 jours, et Nabukodonosor envoya contre lui et le fit amener à Babylone avec les vases

Il y a dans ce passage plusieurs fautes palpables. Selon la chronique des Rois, Iouakin avait 18 ans quand il régna, et non pas 8. Ce témoignage est confirmé par la circonstance qu’il vint se rendre de son gré à discrétion: un enfant de 8 ans ne vient pas, on l’amène. À cette époque (598), Nabukodonosor n’avait pas emporté les vases du temple, car Jérémie, témoin sur place, dit en son chap. 27: «Dieu s’est adressé aux colonnes, et à la mer d’airain, et aux vases d’airain que Nabukodonosor n’a point emportés quand il a emmené le fils de Iouakim, et il leur a dit: Maintenant vous serez déportés avec Sédéqiah

Si les vases ne furent pas emportés avec le fils, ils ne l’avaient donc pas été avec le père, et si l’enlèvement du père n’est mentionné à aucune époque, ni par Jérémie, témoin intéressé, ni par la Chronique des rois, rédigée long-temps avant les Paralipomènes, l’on a droit de dire que ce dernier livre, écrit tardivement et négligemment, a introduit cet enlèvement par la confusion du père avec le fils, ou par le motif dévot d’accomplir les menaces prophétiques de Jérémie en son chap. 36.

Depuis l’an 604, où Nabokodonosor emmena par le désert ses prisonniers à Babylone, l’on ne voit point ce prince reparaître en Syrie avant l’an 598: il est naturel de croire que les premières années de son règne furent employées, à organiser son empire, à surveiller les Mèdes et les Scythes, et à préparer une dernière expédition contre les deux seules cités qui lui résistassent encore en Syrie, contre Tyr et Jérusalem. Examinons les dates du siége de Tyr.

163.Voyez Moïse de Chorène, chap. 13, pag. 40.
164.Apud Hebrœos liber Judith inter apocrypha legitur..... Hieronymi opéra, tom. 1, pag. 1170, in-fol., 1693.
  Le savant Bernard de Montfaucon a voulu prouver l’authenticité du livre et du fait; mais sa dissertation, composée dans sa jeunesse, ne s’appuie que sur des anachronismes, ou sur des hypothèses, et ne sauve ni les contradictions palpables, ni l’ignorance évidente de l’anonyme, tant en géographie qu’en chronologie. Le lecteur peut lui-même en juger par ce précis de Judith que nous lui soumettons.
165.Arphaxad, roi à Ecbatanes, périssant dans une guerre contre les Assyriens, ne peut être que Phraortès qui périt dans son expédition contre les Assyriens de Ninive, comme nous l’a dit Hérodote. Mais Ecbatanes fut bâtie par Deïokès et non par son fils Phraortès. Ce roi mède périt l’an 636: à cette époque, Josias, âgé de 11 ans, était dans l’an 3e de son règne, ou plutôt de la régence du grand-prètre Helqiah..... Les Juifs revenaient de captivité..... De quelle captivité? Il y avait déjà 16 ans que Manassès était mort. Pourquoi le nom de Helqiah est-il altéré et différent dans les deux versions? La plus ancienne, qui est le grec, donne 6 ans de durée à la guerre; la version vulgate fait périr Arphaxad dans la même année, l’an 12 de Nabukodonosor..... Il est bien vrai que l’an 636 se trouve être l’an 11 de Kynil-Adan; mais alors l’une des versions s’est permis d’altérer le texte. Quel fut ce texte original? on l’ignore. L’hébreu qui a servi de modèle au latin, est mutilé: il a été fait sur le grec qu’il a abrégé et tronqué, comme font tous les extraits. Le grec est d’accord avec la version syriaque, très-ancienne aussi; mais ni l’une ni l’autre ne sont l’original qui a péri. Le latin cadre mieux avec la chronologie d’Hérodote, sur laquelle il a été calculé ou corrigé. Mais Hérodote dit que les Ninivites étaient indépendants, qu’ils étaient délaissés de tous les autres Assyriens; et l’histoire de Parsodas en Ktésias nous montre Kynil-Adan-Nanibrus, vassal d’Artæus-Kyaxarès.
  Dira-t-on que ce Nabukodonosor qui régna dans Ninive, fut un roi indigène à nous inconnu? En effet, l’auteur de Judith n’exprime pas qu’il fût roi de Babylone. Mais alors où est son garant? et lorsque ensuite il ajoute que Judith vécut jusqu’à l’âge de 105 ans (plus de 70 ans après cette guerre); qu’Israël ne fut plus troublé de son vivant ni long-temps après (dès 609, Josias fut tué et le pays conquis par Nékos); et lorsque dans le cantique de Judith, il dit le Perse a frémi de son audace, le Mède a été troublé de sa force; tous ces anachronismes ne décèlent-ils pas clairement la posthumité et l’ignorance de l’auteur? D’ailleurs sa géographie est un renversement manifeste, lorsque, traçant la marche d’Holopherne, il le fait partir de Ninive, le conduit en Cilicie jusqu’au mont Angê, ou plutôt Argœus: puis de Cilicie lui fait passer l’Euphrate pour l’établir en Mésopotamie, et y ruiner toutes les villes fortes qui y étaient, depuis le torrent de Mambré (qui est en Palestine) jusqu’à la mer Méditerranée. En voyant une faute si grossière ajoutée à tant d’autres invraisemblances, on se range à l’avis de ceux qui dans le livre intitulé Judith, voient un roman écrit au temps des Machabées, pour exciter le patriotisme juif contre la tyrannie des rois grecs. Il est possible que dans d’autres guerres, il y ait eu quelque anecdote semblable, et que quelque captive juive enlevée par un chef de troupe, l’ait tué, comme on le dit de Judith; mais les détails de ce livre sont tels, qu’il n’a pu être composé que par la femme même qui en fut le témoin et le héros (hypothèse absurde), ou par l’écrivain dramatique qui les puisa dans son imagination. Au reste, de tous les apocryphes juifs.... c’est le roman le mieux écrit et le plus intéressant.
166.Abrégé d’astronomie théorique et pratique, par M. Delambre, p. 335.
167.Et cela d’après Bérose, puisque le Syncelle remarque, p. 16, que Polyhistor copie ou suit habituellement Bérose.
168.Nabo-kol-asar s’explique bien, prophète tout victorieux, ou vainqueur de tout. Dans Nabo-kadn-asar, le mot kadn doit être le syriaque gad, signifiant la fortune. Aussi les Arabes ont-ils rendu ce mot par bakt-nasar, vainqueur fortuné. Kadn pourrait être aussi le mot arabe gadd-an, multum.
169.Jérém. chap. 25, v. I; chap. 36, v. i, et chap. 46.
170.Hérod., lib. II, nos 158 et 159.
171.Le livre de Jérémie, chap. 46, écrit aussi Magdoul; mais celui des Rois est plus correct lorsqu’il écrit Magdou ou Mageddo, attendu qu’il est contre toute vraisemblance que Josias soit allé combattre à Magdol qui est près de Peluse en Égypte; tandis qu’il est naturel qu’il se soit opposé à Nékos, près de Mageddo, ville de Palestine, d’où il fut ramené mourant à Jérusalem.
172.En la 4e de Ihouaqim, 1re de Nabukodonosor, Jérémie, chap. 46.
173.Joseph., cont. App., lib. I, § XIX.
174.Reg. II, chap. 24, v. 5.
175.Ces déprédations datent de 601, qui est la 7e année de Ihouaqim. Josèphe est donc en erreur palpable, lorsqu’il dit qu’en l’an 8 de ce prince (l’an 600), Nabukodonosor vint avec une grande armée lui imposer tribut. Josèphe a mal à propos fait partir de là les 3 ans de ce tribut.
176.Prépar. Évang. d’Eus., liv. IX, chap. 39.
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
382 s. 21 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain