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Kitabı oku: «Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, tome I», sayfa 6

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CHAPITRE XII.
Du Déluge

D'ABORD, dans la défense du peuple juif contre les attaques d'Appion89, recueillant les témoignages répandus dans les écrits de diverses nations, «maintenant, dit-il, j'interpellerai les momuments des Chaldéens, et mon témoin sera Bérose, né lui-même Chaldéen, homme connu de tous les Grecs qui cultivent les lettres, à cause des écrits qu'il a publiés en grec, sur l'astronomie et la philosophie des Chaldéens. Bérose donc, compulsant et copiant les plus anciennes histoires, présente les mêmes récits que Moïse, sur le déluge, sur la destruction des hommes par les eaux, et sur l'arche dans laquelle Noux90 [Noé] fut sauvé, et qui s'arrêta sur les montagnes d'Arménie; ensuite, exposant la série généalogique des descendants de Noux, il fixe le temps où vécut chacun d'eux, et il arrive jusqu'à Nabopolasar, etc.»

Ainsi l'histoire de Noé, du déluge et de l'arche, est une histoire purement chaldéenne, c'est-à-dire que les chapitres 6, 7, 8, 9, 10 et 11, sont tirés des légendes sacrées des prêtres de cette nation, à une époque infiniment reculée. Il est très-fâcheux que le livre de Bérose ne nous soit point parvenu; mais la piété des premiers chrétiens le regardant comme dangereux91, paraît l'avoir supprimé de bonne heure. Josèphe en cite un texte positif sur le fait du déluge, dans ses Antiquités Judaïques, livre Ier, chap. 6.

«De ce déluge, dit-il, et de l'arche font mention tous les historiens asiatiques; Bérose, entre autres, en parle ainsi: On prétend qu'une partie de cette arche subsiste encore sur les monts Korduens (Kurdestan) en Arménie; et que les dévots en retirent des morceaux de bitume, et vont les distribuant au peuple, qui s'en sert comme d'amulettes contre les maléfices.» Josèphe continue..... «Hiérôme, l'Égyptien, qui à écrit sur les antiquités phéniciennes, en parle aussi de même que Mnaseas et plusieurs autres. Nicolas de Damas lui-même, dans son livre 96e, dit:

«Au-dessus de Miniade, en Arménie, est une haute montagne appelée Baris, où l'on raconte que beaucoup de personnes se sauvèrent au temps du déluge; qu'un homme, monté sur un vaisseau, prit terre au sommet, et que long-temps les débris de ce vaisseau y ont subsisté. Cet homme pourrait être celui dont parle Moïse, le législateur des Juifs.»

On voit que Josèphe est loin d'inculper Bérose et les autres historiens, d'un plagiat envers Moïse, qu'il croit auteur de la Genèse; qu'au contraire il invoque les monuments chaldéens, phéniciens, arméniens, comme témoins premiers et originaux, dont la Genèse n'est qu'une émanation ou un pair.

Quant au détail du déluge, nous les trouvons, 1° dans un fragment d'Alexandre Polyhistor, savant compilateur du temps de Sylla, dont le Syncelle nous a transmis plusieurs passages précieux: 2° dans un fragment d'Abydène, autre compilateur qu'Eusèbe nous représente comme ayant consulté les monuments des Mèdes et des Assyriens92; ce qui explique pourquoi il diffère quelquefois de Bérose, dont le Syncelle l'appelle le copiste, avec Alexandre Polyhistor93. Ce que la Genèse raconte de Nouh ou Noé, ces auteurs le racontent de Xisuthrus, avec des variantes qui prouvent la diversité des monuments antiques, d'où émanaient ces récits. Un tableau comparé des textes sera plus éloquent que tous les raisonnements.

Monuments chaldéens, copiés par Alexandre Polyhistor, en son second livre94

Xisuthrus fut le 10e roi (comme Noé fut le 10e patriarche): sous lui arriva le déluge..... Kronos (Saturne) lui ayant apparu en songe, l'avertit que le 15 du mois Dœsius, les hommes périraient par un déluge: en conséquence il lui ordonna de prendre les écrits qui traitaient du commencement, du milieu, et de la fin de toutes choses; de les enfouir en terre dans la ville du soleil, appelée Sisparis; de se construire un navire, d'y embarquer ses parents, ses amis, et de s'abandonner à la mer. Xisuthrus obéit; il prépare toutes les provisions, rassemble les animaux quadrupèdes et volatiles; puis il demande où il doit naviguer; vers les Dieux, dit Saturne, et il souhaite aux hommes toutes sortes de bénédictions. Xisuthrus fabriqua donc un navire long de cinq stades et large de deux; il y fit entrer sa femme, ses enfants, ses amis et tout ce qu'il avait préparé. Le déluge vint, et bientôt ayant cessé, Xisuthrus lâcha quelques oiseaux qui, faute de trouver où se reposer, revinrent au vaisseau: quelques jours après il les envoya encore à la découverte; cette fois les oiseaux revinrent ayant de la boue aux pieds; lâchés une troisième fois, ils ne revinrent plus: Xisuthrus concevant que la terre se dégageait, fit une ouverture à son vaisseau, et comme il se vit près d'une montagne, il y descendit avec sa femme, sa fille et le pilote; il adora la terre, éleva un autel, fit un sacrifice, puis il disparut, et ne fut plus vu sur la terre avec les trois personnes sorties avec lui..... Ceux qui étaient restés dans le vaisseau ne les voyant pas revenir, les appelèrent à grands cris: une voix leur répondit en leur recommandant la piété, etc., et en ajoutant qu'ils devaient retourner à Babylone, selon l'ordre du destin, retirer de terre les lettres enfouies à Sisparis, pour les communiquer aux hommes; que du reste le lieu où ils se trouvaient était l'Arménie. Ayant ouï ces paroles, ils s'assemblèrent de toutes parts, et se rendirent à Babylone. Les débris de leur vaisseau, poussés en Arménie, sont restés jusqu'à ce jour sur les monts Korkoura; et les dévots en prennent de petits morceaux pour leur servir de talismans contre les maléfices. Les lettres ayant été retirées de terre à Sisparis, les hommes bâtirent des villes, élevèrent des temples, et réparèrent Babylone elle-même.

Récit du livre hébreux, la Genèse

«Et les dieux (Elahim) dit à Noh: Fais-toi un vaisseau, divisé en cellules et enduit de bitume: sa longueur sera de 300 coudées, sa largeur de 50, sa hauteur de 30. Il aura une fenêtre d'une coudée carrée. Je vais amener un déluge d'eau sur la terre; tu entreras dans l'arche, toi, tes fils, ta femme et les femmes de tes fils; et tu feras entrer un couple de tout ce qui a vie sur la terre, oiseaux, quadrupèdes, reptiles: tu feras aussi des provisions de vivres pour toi et pour eux. Noh fit tout ce que Dieu (Elahim) lui avait ordonné: et Dieu (Iahouh) dit encore: Prends sept couples des animaux purs, et deux seulement des impurs; sept couples aussi des volatiles..... Dans sept jours je ferai pleuvoir sur terre pendant 40 jours et 40 nuits: et Noh fit ce qu'avait prescrit (Iahouh); il entra dans l'arche âgé de 600 ans; et après sept jours, dans le second mois, le 17 du mois, toutes les sources de l'Océan débordèrent, et les cataractes des cieux furent ouvertes; et Noh entra dans le vaisseau avec sa famille et tous les animaux; et la pluie dura 40 jours et 40 nuits; et les eaux élevèrent le vaisseau au-dessus de la terre; et le vaisseau flotta sur les eaux; et elles couvrirent toutes les montagnes qui sont sous les cieux, à 15 coudées de hauteur; et tout être vivant fut détruit; et les eaux crurent pendant 150 jours; et Dieu (Elahim) se ressouvint de Noh; il fit souffler un vent; les eaux se reposèrent; les fontaines de l'Océan et les cataractes du ciel se fermèrent, et la pluie cessa; et les eaux s'arrêtèrent au bout de 150 jours, et le 7e mois, au 17e jour, l'arche se reposa sur le mont Ararat en Arménie, et les eaux allèrent et vinrent diminuant jusqu'au 10e mois; et le 10e mois au 1er jour, on vit les cimes des montagnes; 40 jours après (le 10e du 11e mois), Noh ouvrit la fenêtre du vaisseau, et lâcha le corbeau, qui alla volant jusqu'à ce que les eaux se retirassent; et Noh lâcha la colombe qui, ne trouvant point où reposer le pied (les cimes étaient pourtant découvertes), revint au vaisseau, et après 7 jours (le 17 du 11e), Noh la renvoya encore, et elle revint le soir portant au bec une feuille d'olivier; et 7 jours après (le 24 du 11e mois), il la lâcha encore, elle ne revint plus. L'an 601 de Noh, le 1er du mois, 7 jours après le dernier départ de la colombe, la terre fut sèche, et Noh leva le couvercle du vaisseau, et il vit la terre sèche, et le 27e du second mois, la terre fut sèche; et Dieu (Elahim) lui dit de sortir avec toute sa famille et tous les animaux; et Noh dressa un autel et y sacrifia des oiseaux et des animaux purs; et (Iahouh) Dieu en respira l'odeur avec plaisir, et dit: Je n'amenerai plus de déluge; et il donna des bénédictions et des préceptes à Noh: ne pas manger le sang des animaux (précepte de Moïse: l'âme est dans le sang); de ne pas verser le sang des hommes, etc.; et il fit alliance avec les hommes; et pour signe de cette alliance, je placerai, dit-il, un arc dans les nues (l'arc-en-ciel), et en le voyant, je me souviendrai de mon alliance avec tout être vivant sur la terre, et je ne les détruirai plus....; et Noh en sortant du vaisseau avait trois enfants, et il se livra à la culture de la terre et il planta la vigne, etc.

Nous ne transcrivons point le récit d'Abydène qu'Eusèbe a conservé dans sa Préparation évangélique (liv. IX, chap. 12), parce qu'il est infiniment abrégé, et qu'il ne diffère que dans deux circonstances. Dans son récit tiré des monuments mèdes et assyriens, Xisuthrus lâche les oiseaux 3 jours après que la tempête se fut calmée; ils reviennent 2 fois, ayant de la boue aux ailes et non aux pieds; à la troisième fois ils ne reviennent plus.

Ces textes seraient la matière d'un volume de commentaires: bornons-nous aux remarques les plus nécessaires pour tout homme sensé: les deux récits sont un tissu d'impossibilités physiques et morales; mais ici le simple bon sens ne suffit pas; il faut être initié à la doctrine astrologique des anciens, pour deviner ce genre de logogriphe, et pour savoir qu'en général tous les déluges mentionnés par les Juifs, les Chaldéens, les Grecs, les Indiens, comme ayant détruit le monde sous Ogygès, Inachus, Deucalion, Xisuthrus, Saravriata, sont un seul et même événement physico-astronomique qui se répète encore tous les ans, et dont le principal merveilleux consiste dans le langage métaphorique qui servit à l'exprimer. Dans ce langage, le grand cercle des cieux s'appelait mundus, dont l'analogue mondala signifie encore cercle en sanscrit: l'orbis des Latins en est le synonyme. La révolution de ce cercle par le soleil, composant l'année de 12 mois, fut appelée orbis, le monde, le cercle céleste. Par conséquent, à chaque 12 mois, le monde finissait, et le monde recommençait; le monde était détruit, et le monde se renouvelait. L'époque de cet événement remarquable variait selon les peuples et selon leur usage de commencer l'année à l'un des solstices ou des équinoxes: en Egypte, c'était au solstice d'été. A cette époque, le Nil donnait les premiers symptômes de son débordement, et dans 40 jours, les eaux couvraient toute la terre d'Egypte à 15 coudées de hauteur. C'était et c'est encore un océan, un déluge. C'était un déluge destructeur dans les premiers temps, avant que la population civilisée et nombreuse eût desséché les marais, creusé des canaux, élevé des digues, et avant que l'expérience eût appris l'époque du débordement. Il fut important de la connaître, de la prévoir: l'on remarqua les étoiles qui alors paraissaient le soir et le matin à l'horizon. Un groupe de celles qui coïncidaient fut appelé le navire ou la barque, pour indiquer qu'il fallait se tenir prêt à s'embarquer; un autre groupe fut appelée le chien, qui avertit; un troisième avait le nom de corbeau; un quatrième, de colombe95; un cinquième s'appelait le laboureur, le vigneron96; non loin de lui était la femme (la vierge céleste): tous ces personnages qui figurent dans le déluge de Noh et de Xisuthrus sont encore dans la sphère céleste; c'était un vrai tableau de calendrier dont nos deux textes cités ne sont que la description plus ou moins fidèle. Au moment du solstice et au début de l'inondation, la planète de Kronos ou Saturne, qui avait son domicile dans le cancer, ou plutôt le génie ailé, gouverneur de cette planète, était censé avertir l'homme ou le laboureur de s'embarquer. Il avertissait pendant la nuit, parce que c'était le soir ou la nuit que l'astre était consulté. Le calendrier des Égyptiens et leur science astrologique ayant pénétré dans la Grèce encore sauvage, ces tableaux non appropriés au pays y furent mal compris, et ils y devinrent les fables mythologiques de Deucalion, d'Ogygès et d'Inachus, dont le nom est Noh même, écrit en grec Noch et Nach. La Chaldée avait aussi son déluge, par les débordements du Tigre et de l'Euphrate, au moment où le soleil fond les neiges des monts Arméniens. Mais ce déluge avait un caractère malfaisant, par la rapidité et l'incertitude de son arrivée. Ce pays, d'une fertilité extrême, par conséquent peuplé de toute antiquité, dut avoir son calendrier propre ainsi que ses légendes: cependant les historiens nous assurent que les rites de l'Égypte y furent introduits avec une colonie de prêtres, peut-être par le moyen de Sésostris qui, vers l'an 1350, traversa ces régions en conquérant; peut-être par la voie des Ninivites ou plus anciennement: ce dut être déja une cause de variantes dans les légendes chaldéennes. Les déluges du Nil et de l'Euphrate n'arrivaient pas aux mêmes époques; une autre cause fut la précession des équinoxes qui, tous les 71 ans, change d'un degré la position du soleil dans les signes. Enfin les physiciens ayant étendu leurs connaissances géographiques, et ayant constaté que l'hémisphère du nord était comme noyé de pluies dans l'intervalle hybernal des deux équinoxes, il en résulta que l'idée et le nom de déluge furent appliqués au semestre d'hiver, tandis que le nom d'incendie fut donné au semestre d'été, ainsi que nous l'apprend Aristote. De là l'expression amphibologique que le monde éprouvait des révolutions alternatives d'incendie et de déluge; de là aussi une nouvelle source de variantes adoptées par l'écrivain juif, lorsqu'il fait durer la pluie 150 jours (près de 6 mois), après avoir dit qu'elle n'en dura que 40; il n'est donc pas étonnant qu'il y ait des discordances entre les divers compilateurs des monuments, puisqu'il a dû s'en introduire très-anciennement entre les monuments eux-mêmes et entre le calendriers tant indigènes qu'étrangers.

La différence la plus remarquable entre le récit chaldéen et le récit hébreu, est que le premier conserve le caractère astrologico-mythologique, tandis que le second est tourné dans un sens et vers un but moral. En effet selon l'hébreu, dont nous n'avons donné qu'un extrait, puisque le texte contient plus de 100 versets, le genre humain s'étant perverti, et des géans, nés des anges de Dieu et des filles des hommes, exerçant toutes sortes de violences, Dieu se repent d'avoir créé l'espèce; il se parle, il délibère, il se fixe au parti violent d'exterminer tout ce qui a vie. Cependant il aperçoit un homme juste, il en a pitié; il veut le sauver: il lui fait part de son dessein, il lui annonce le déluge, lui prescrit de bâtir un navire, etc. Quand le déluge a tout détruit, l'homme fait un sacrifice d' animaux purs (selon la loi de Moïse); Dieu en est si touché, qu'il promet de ne plus faire de déluge; il donne des bénédictions, des préceptes, un abrégé de loi; il fait alliance avec tous les êtres vivants; et pour signe de cette alliance, il invente l'arc-en-ciel qui se montrera en temps de pluie, etc.; tout cela chargé de redites avec quelques contradictions. Par exemple, la pluie dura 40 jours…; les eaux crûrent 150 jours, un vent souffla, et la pluie cessa. Le premier jour du dixième mois, «l'on vit les cimes des monts; 40 jours après, la colombe ne trouve pas où poser le pied, etc.»

Tout ce récit n'est-il pas un drame moral, une leçon de conduite que donne au peuple un législateur religieux, un prêtre? Sous ce rapport, on pourrait l'attribuer à Moïse; mais le nom pluriel Elahim, les dieux, très-mal traduit au singulier, Dieu, ne saurait se concilier avec l'unité dont Moïse fait la base de sa théologie. Le Dieu de Moïse est Iahouh: on ne voit jamais que ce nom dans ses lois et dans les écrits de ses purs sectateurs, tels que Jérémie. Pourquoi l'expression Elahim, les dieux, se trouve-t-elle si souvent et presque uniquement dans la Genèse? Par la raison que le monument est chaldéen, et parce que dans le système chaldéen comme dans la plupart des théologies asiatiques, ce n'est pas un Dieu seul qui créait, c'étaient les dieux, ses ministres, ses anges, et spécialement les décans et les génies des 12 mois qui créèrent chacun une partie du monde (le cercle de l'année). Le grand-prêtre Helqiah empruntant cette cosmogonie, n'a osé y changer une expression fondamentale qui peut-être avait cours chez les Hébreux, depuis leurs relations avec les Syriens; il est même possible qu'il n'ait rien ajouté de son chef à ce texte, quoique les animaux purs (selon la loi) et le nombre 7, indiquent une main juive, avec d'autant plus de raison, que le nom de Iahouh y est joint.

Long-temps avant Helquiah, la Grèce avait l'apologue «de Ioupiter irrité contre les géans et contre la génération coupable, lui annonçant la fin du monde, submergeant la terre de torrents qui se précipitent des cataractes du ciel, etc.» (Voyez Nonnus, Dionysiaq. lib. VI, vers. 230.)

Tout le système du Tartare et de l'Elysée tenait à cette théologie d'origine égyptienne et d'antiquité assez reculée, puisqu'elle était la base des mystères et des initiations: ce fut dans ces mystères que la science astrologique prit un caractère moral qui altéra de jour en jour le sens physique de ses tableaux hiéroglyphiques, etc.

Selon l'hébreu, après le déluge, Noh cultive la terre, plante la vigne; en cela, il'est Osiris et Bacchus qui tous deux sont le soleil dans la constellation Arcturus ou le Bouvier qui, après la retraite du Nil, annonçait au plat pays le temps de semer; et sur les coteaux du Faïoum, le temps de vendanger.

Ici les fragments de Bérose et de ses copistes ont une lacune qui correspond au chapitre X de la Genèse, où l'auteur juif décrit le partage de la terre entre les trois prétendus enfants de Noh, et donne la nomenclature de leurs prétendus enfants, selon leurs langues et nations: nous disons prétendus, parce que toute cette apparente généalogie est une véritable description géographique des pays et des peuples connus des Juifs à cette époque; description dans laquelle chaque nation est désignée, tantôt par un nom collectif, selon le génie de la langue, tantôt par un nom pluriel; et cela, dans un ordre méthodique de localités contiguës et d'affinités de langage. Imaginer que les noms pluriels de Medi, les Mèdes, Saphirouim, les Saspires, Rodanim, les Rhodiens, Amrim, les Amorrhéens, Aradim, les Aradiens, Masrim, les Égyptiens, Phélastim, les Philistins, etc., etc., soient des noms d'individus, et imaginer que ces individus fussent la troisième ou quatrième génération de trois familles qui seules sur le globe s'en seraient fait le partage, est un excès de crédulité et d'aveuglement qui passe toutes bornes; mais ce sujet nous écarterait trop: nous le traiterons dans un article particulier.

CHAPITRE XIII.
De la tour de Babel ou pyramide de Bel à Babylone

VIENNENT ensuite dans le chapitre XI, la séparation des familles, l'entreprise de la tour de Babylone et la confusion des langues. Nous trouvons l'équivalent de ce récit dans un fragment de Polyhistor. (Voy. le Syncelle, p. 44, et Eusèbe, Præpar. evang., lib. IX, c. XIV): la Sibylle porte ce texte:

«Lorsque les hommes parlaient (encore) une seule langue, ils bâtirent une tour très-élevée, comme pour monter au ciel, mais les dieux (Elahim) envoyèrent des tempêtes qui la renversèrent, et ils donnèrent à chaque (homme) un langage: de là est venu le nom de Babylone à cette cité. Après le déluge, existèrent Titan et Prométhée, etc.»

Ici, dit le Syncelle, Polyhistor oublie que selon ses auteurs, existait depuis des milliers d'années cette ville de Babylone, dont le nom n'est donné qu'à cette époque. Le même Syncelle poursuit son récit par ce fragment d'Abydène, qui porte, p. 44. «Il y en a qui disent que les premiers hommes nés de la terre, se fiant en leur force et en leur taille énorme, méprisèrent les dieux, dont ils voulurent devenir les supérieurs; que dans ce dessein, ils bâtirent une tour très-haute, mais que les vents, venant au secours des dieux, renversèrent l'édifice sur ses auteurs; et les décombres prirent le nom de Babylone: jusqu'alors le langage des hommes avait été un et semblable, mais de ce moment il devint multiple et divers; ensuite survinrent des dissensions et des guerres entre Titan et Saturne, etc.»

En nous offrant plusieurs versions, ces fragments nous montrent qu'il existait diverses sources dont le récit juif n'était qu'une émanation, sans être le type primitif, comme on le voudrait établir.

Quelle fut cette sibylle citée par Polyhistor? On ne nous le dit point; mais nous pensons la retrouver dans Moïse de Chorène, dont les premiers chapitres se lient à notre sujet, de manière à prouver l'authenticité et l'identité des sources communes. Cet écrivain, qui date du cinquième siècle avant J.-C., établit d'abord comme faits notoires: «Que les anciens Asiatiques, et spécialement les Chaldéens et les Perses, eurent une foule de livres historiques; que ces livres furent partie extraits, partie traduits en langue grecque, surtout depuis que les Ptolomées eurent établi la bibliothèque d'Alexandrie, et encouragé les littérateurs par leurs libéralités; de manière que la langue grecque devint le dépôt et la mère de toutes les sciences. Ne vous étonnez donc pas, continue-t-il, si pour mon histoire d'Arménie, je ne vous cite que des auteurs grecs, puisqu'une grande partie des livres originaux a péri (par l'effet même des traductions). Quant à nos antiquités, les compilateurs ne sont pas d'accord sur tous les points entre eux, et ils diffèrent de la Genèse sur quelques autres: cependant Bérose et Abydène, d'accord avec Moïse, comptent dix générations avant le déluge; mais selon eux, ce sont des princes, et des noms barbares avec une immense série d'années, qui diffèrent non-seulement des nôtres (qui ont 4 saisons), et des années divines, mais encore de celles des Égyptiens, etc. Abydène et Bérose comptent aussi 3 chefs illustres avant la tour de Babel; ils exposent fidèlement (c'est-à-dire comme la Genèse) la navigation de Xisuthrus en Arménie; mais ils mentent, quant aux noms, (c'est-à-dire qu'ils diffèrent de la Genèse)… Je préfère donc de commencer mon récit d'après ma véridique et chérie sibylle bérosienne, qui dit: Avant la tour et avant que le langage des hommes fût devenu divers, après la navigation de Xisuthrus, en Arménie, Zérouan, Titan et Yapétosthe gouvernaient la terre: s'étant partagé le monde, Zérouan, enflammé d'orgueil, voulut dominer les deux autres: Titan et Yapétosthe lui résistèrent, et lui firent la guerre, parce qu'il voulait établir ses fils rois de tout. Titan dans ce conflit s'empara d'une certaine portion de l'héritage de Zérouan: leur sœur Astlik, en se mettant entre eux, apaisa le tumulte par ses douceurs. Il fut convenu que Zérouan resterait chef; mais ils firent serment de tuer tout enfant mâle de Zérouan, et ils préposèrent de forts Titans à l'accouchement de ses femmes… Ils en tuèrent deux; mais Astlik conseilla aux femmes d'engager quelques Titans à conserver les autres, et de les porter à l'orient, au mont Ditzencets ou Jet des Dieux, qui est l'Olympe.»

Le lecteur voit qu'ici nous avons une sibylle comme dans Polyhistor; et elle est appelée Bérosienne. Les anciens nous apprennent que Bérose eut une fille dont il soigna beaucoup l'éducation, et qui devint si habile, qu'elle fut comptée au rang des sibylles. N'avons-nous pas lieu de voir ici cette femme savante, surtout quand il s'agit d'antiquités de son pays? Le fragment cité à une analogie marquée avec le Sem, Cham et Iaphet de la Genèse, et c'est par cette raison que le dévot auteur arménien le préfère aux récits de Bérose et d'Abydène; mais ce fragment nous reporte, comme les autres, à des traditions mythologiques qu'il nous importe de multiplier pour en éclaircir le sens. Notre Arménien en rapporte une très-ancienne de son pays, qui dit:

Un livre qui n'existe plus, a dit de Xisuthrus et de ses trois fils: «Après que Xsisutra eut navigué en Arménie, et pris terre, un de ses fils, nommé Sim, marcha entre le couchant et le septemtrio; et arrivé à une petite plaine sous un mont très-élevé, par le milieu de laquelle les fleuves coulaient vers l'Assyrie, il se fixa deux mois au bord du fleuve, et appela de son nom Sim, la montagne; de là il revint par le même (chemin), entre orient et midi, au point d'où il était parti; un de ses enfants cadets, nommé Tarban, se séparant de lui avec 30 fils, 15 filles et leurs maris, se fixa sur la rive du même fleuve…; d'où vint à ce lieu le nom de Taron, et à celui qu'il avait quitté, le nom Tseron, à cause de la séparation qui s'y était faite de ses enfants.

«Or, les peuples de l'Orient appellent Sim, Zerouan, et ils montrent un pays appelé Zaruandia.97 Voilà ce que nos anciens Arméniens chantaient dans leurs fêtes, au son des instruments, ainsi que le rapportent Gorgias, Bananus, David, etc.»

Nous touchons ici aux sources où a puisé l'auteur juif. Notre Arménien cite un autre écrit plus intéressant par son origine et ses développements; c'est le volume que le Syrien Mar I Bas trouva dans la bibliothèque d'Arshak, 80 ans après Alexandre, et qui portait pour titre:

«Ce volume a été traduit du chaldéen en grec. Il contient l'histoire vraie des anciens personnages illustres, qu'il dit commencer à Zerouan, Titan et Yapetosth; et il expose par ordre la série des hommes illustres nés de ces 3 chefs.»

Le texte commence: «Ils étaient terribles et brillants, ces premiers des dieux, auteurs des plus grands biens, et principes du monde et de la multiplication des hommes… D'eux vint la race des géans, au corps robuste, aux membres (ou bras) puissants (ou vigoureux), à l'immense stature, qui, pleins d'insolence, conçurent le dessein impie de bâtir une tour. Tandis qu'ils y travaillaient, un vent horrible et divin, excité par la colère des dieux (Elahim), détruisit cette masse immense, et jeta parmi les hommes des paroles inconnues qui excitèrent (ou causèrent) le tumulte et la confusion: parmi ces hommes, était le Iapétique Haïk, célèbre et vaillant gouverneur (præfectus), très-habile à lancer les flèches et à manier l'arc.98 Ce Haïk, beau, grand, à chevelure brillante, aux bras puissants, à l'œil perçant, plein d'hilarité, se trouvant l'un des géants les plus influents, s'opposa à ceux qui voulurent commander aux autres géants, et à la race des dieux, et il excita du tumulte contre l'impétueux effort de Belus. Le genre humain, dispersé sur la terre, vivait au milieu des géants, qui, mus de fureur, tirèrent leurs sabres les uns contre les autres, et luttèrent pour le commandement. Belus ayant eu des succès, et s'étant rendu maître de presque toute la terre, Haïk ne voulut pas lui obéir, et après avoir vu naître son fils Armenak dans Babylone, il alla vers le pays d'Ararat, placé au nord, avec son fils, ses filles et des braves, au nombre de 300, sans compter des étrangers qui s'y joignirent: il se fixa ou s'assit au pied d'un certain mont très-étendu dans la plaine, où habitaient quelques-uns des hommes dispersés. Haïk le soumit et y établit son domicile, etc.

Voilà donc un livre original chaldéen qui, à raison de sa célébrité, excita la curiosité d'Alexandre, et qui, par ce léger fragment, nous prouve 1° l'antiquité réelle des traditions recueillies par Bérose, par Abydène, par la Sibylle; 2° l'analogie de ces traditions avec celles du livre juif appelé la Genèse. Cette analogie est sensible dans ce qui concerne le déluge, l'homme sauvé dans un navire; les trois princes ou chefs du genre humain issu de cet homme; la séparation de leurs enfants; l'entreprise de la tour de Babel, la confusion qui en résulte, etc.; enfin dans ces géants, nés des enfants des dieux (Elahim) et des filles des hommes, géants grands de corps et fameux de nom dans les temps anciens (Genèse, ch. VI, v. 2 à 5); ce sont les propres expressions de la Genèse. Leur entreprise de monter aux cieux est la même que celle des géants chantés par les mythologues grecs, et cette ressemblance vient confirmer l'origine chaldéenne de toutes ces allégories, dont l'explication nous écarterait trop de notre sujet99. Nous nous bornerons à remarquer, que ces mêmes allégories se trouvent dans les récits cosmogoniques des sectateurs de Budha, réfugiés au Thibet, et qui, sous le nom de Samanéens, étaient une secte indienne, célèbre et déja ancienne au temps d'Alexandre. Leur cosmogonie qui, sous d'autres rapports, ressemble singulièrement à celle de la Genèse, parle comme ce livre, de la corruption des hommes, de la colère de Dieu, des déluges dont il punit le genre humain; et ils tournent dans un sens moral tout ce que les mythologues grecs présentent sous un aspect astrologique. Or, si l'on considère que les récits des Grecs se rapportent à une époque où la constellation du taureau ouvrait l'année et la marche des signes, c'est-à-dire au delà de 4000 ans avant notre ère, tandis que les récits des Juifs et des Perses indiquent l'agneau ou bélier comme réparateur, l'on pensera que les Grecs ont mieux gardé le type originel, parce qu'ils sont plus anciens que les autres, et que les autres l'ont altéré, parce qu'ils sont venus plus tard; en sorte que le système moral et mystique, dans lequel il faut comprendre l'Elysée, le Tartare, et toute la doctrine des mystères, n'aurait pas une origine plus reculée que 2500 à 2300 ans avant notre ère, et ce serait de l'Égypte et de la Chaldée que se seraient répandues dans l'Orient et dans l'Occident toutes ces idées, comme s'accordent à le témoigner tous les anciens auteurs grecs et même les arabes, qui ont eu en main d'anciens livres échappés aux ravages des guerres et du temps. Il est remarquable qu'un de ces livres, cité par le Syncelle sous le nom de livre d'Enoch, présente l'histoire des géants, nés des anges et des filles des hommes, presque dans les mêmes termes que les livres de Boudhistes du Thibet, et le livre de la Genèse; sans doute le livre d'Enoch est apocryphe quant au nom que lui a donné l'auteur anonyme, pour imprimer le respect, mais non quant à sa doctrine qui est chaldéenne et de haute antiquité. Revenons à nos confrontations.

89.Contre Appion, liv. I, § XIX.
90.Ce mot noux est la meilleure orthographe de l'hébreu nouh (Noé), parce que les Grecs n'ayant point l'aspiration h, la remplacent par χ, qui est le ch allemand et latin.
91.Voyez le Syncelle, pages 38 et 40, ligne 8. Cet auteur cite quelquefois le nom de Bérose; mais tous les passages qu'il produit, finissant par être rapportés à Polyhistor, Abydène et autres copistes de Bérose, il nous semble que déja l'original de Bérose n'existait plus.
92.Prœpar. Evang., lib. IX, cap. 12.
93.Nec me fugit Berosum et sequaces ejus Alexandrum Polyhistorem, et Abydenum, etc., page 14.
94.Le Syncelle, page 30, semble d'abord tirer ce passage de Bérose; mais en le terminant, il dit: Voilà ce qu'écrit Alexandre Polyhistor.
95.En Égypte ces oiseaux ne quittent pas la maison pendant que le sol est couvert d'eau: quand ils s'absentent, c'est le signe qu'ils trouvent à vivre et que la terre se découvre.
96.Arcturus, Bootes.
97.Pline, lib. VI, cap. 27.
98.Moses Chor., ch. 9. Ce Haïk a tous les caractères d'Apollon, chassé du ciel par Jupiter, qui, de l'aveu des Grecs, est identique au Belus babylonien.
99.Voyez Dupuis, Origine des Cultes, Table des matières, tome III, in-4°, art. Déluge, Orion, Titan, Géants, Belus, et sa Dissertation sur les grand cycles.
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
426 s. 27 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain