Kitabı oku: «Leçons d'histoire», sayfa 13
NOTES
Nº Ier
PAGE 169.—Un homme de Dieu (Elahim), au nom de Jehovah ou Jehwh.
Le mot Jehovah n'est connu d'aucun indigène arabe, d'aucun Juif purement asiatique; son origine même chez les Européens qui le consacrent, n'est ni claire ni authentique: lorsque l'on présente aux Arabes, transcrites en leur alphabet, les quatre lettres hébraïques qui le composent, ils lisent ïahouah ou ïhwh; ils ne peuvent même prononcer à l'anglaise ou à la française le mot Jehovah, parce qu'en leur langue ils n'ont ni jé ni vé. Le célèbre auteur de la Polyglotte anglaise, le docteur Robert Walton, l'un des plus savants et des plus sensés biblistes qui aient écrit sur ces matières, blâme expressément la prononciation jehova comme inouïe aux anciens (Prolegom., pag. 49). «Il observe que les éditeurs des bibles ont eu l'audace de falsifier à cet égard les manuscrits mêmes; par exemple, à l'occasion du psaume 8, lorsque Jérôme observe qu'il faut lire le nom de Dieu de telle manière, les éditeurs ont mis qu'il faut lire Jehova, tandis que le manuscrit compulsé par Frobenius, porte Juo.»
Le premier auteur, ajoute Walton, qui ait lu Jehova, fut Pierre Galatin, en 1520, dans son traité de Arcanis catholicæ veritatis, tome 1er, liv. 2.
Nous avons vérifié cette citation sur l'original, qui dit seulement que, selon les docteurs juifs, il faut lire les quatre lettres par quatre syllabes ïah-hù-ve-hu (et cela par des raisons cabalistiques qui nous sont la preuve de leur ignorance en tout genre, etc.)
Il paraît que ce sont les théologiens allemands qui, les premiers s'étant faits disciples des rabbins, ont donné involontairement lieu à cette lecture; nous disons involontairement, parce que chez eux, le grand j ne vaut que notre petit i commun, et leur u ne vaut que le français ou, de manière qu'en écrivant jehuah, ils prononcent ïehouah, et non Jehovah; mais les Français et les Anglais lisant à leur manière cette écriture, ont introduit l'usage de Jehovah, auquel leur imagination a ensuite attaché des idées mystérieuses et emphatiques qui rappellent celles des anciens Juifs, chez lesquels la prononciation des quatre lettres ïhwh était censée évoquer les esprits et troubler toute la nature; par suite de cette folle idée, il était défendu de jamais prononcer ce nom: aussi les premiers chrétiens grecs et latins, tels qu'Origène, Aquila, Jérôme, l'ont-ils toujours traduit par les noms de Kyrios et Adonaï; c'est-à-dire maître ou seigneur. Ce n'est que dans des cas particuliers, que quelques anciens chrétiens se sont permis d'entrer en explication à cet égard: ce qu'ils en disent, s'accorde parfaitement avec la lecture actuelle des Arabes et des Juifs d'Asie; par exemple: Irénée, l'un des premiers écrivains dits ecclésiastiques, observe (liv. 2, contre les hérétiques, chap. dernier) «que les Grecs écrivent ïaô, ce qui «se dit en hébreu ïaoth.» (Le t seul est de trop.)
Théodoret, question 15 sur l'Exode, dit: «Le nom prononcé ïaô par les Juifs, se prononce ïabè par les Samaritains (ici b «est pour v, iavè).»
Diodore de Sicile, liv. 2, avait déja résolu la difficulté, en disant que Moïse avait feint (comme Lycurgue) de recevoir ses lois du Dieu ïaw. Avant Diodore, Strabon avait dit la même chose d'une manière encore plus explicative en ce passage digne d'être cité: «Moïse, l'un des prêtres égyptiens, enseigna que cela seul était la Divinité, qui compose le ciel, la terre, tous les êtres, enfin ce que nous appelons le monde; l'universalité des choses, la nature.» (Voy. Géograph. lib. XVI, pag. 1104, édit. de 1707.)
Le grec Philon, traducteur du Phénicien Sanchoniathon, se joint à toutes ces autorités, quand il dit que le dieu des Hébreux s'appelait ïeuô, ainsi que nous l'apprend Eusèbe en sa Préparation évangélique. Il est donc certain que jamais les Hébreux n'ont connu ce prétendu nom, si emphatiquement déclamé Jehovah par nos poëtes et nos théologiens, et ils ont dû le prononcer comme les Arabes actuels, ïehouh, signifiant l'être, l'essence, l'existence, la nature des choses, ainsi que l'a très-bien dit Strabon, qui en cette affaire n'a dû être que l'interprète des savants syriens de son temps, puisque très-probablement il n'a point su ces langues.
Si de ce mot ïhouh l'on ôte les deux h, selon le génie de la langue grecque, il reste ïou, base de Jupiter, ou ïu-pater (ïou générateur, l'essence de la vie), qui paraît avoir été connu très-anciennement des Latins, enfants des Pelasgues. Cette branche de théologie est plus profonde et bien moins juive qu'on ne le pense: elle paraît venir des Égyptiens ou des Chaldéens, qui, sous le nom de Barbares, sont pourtant reconnus par les Grecs pour les auteurs de toute science astronomique et physique, base primitive et directe de la théologie…
Pour épuiser ce sujet, ajoutons que chez les premiers chrétiens, la secte des gnostiques ou savants en traditions, avait recueilli celle qui donnait le nom de ïaô au premier et au plus grand des trois cent soixante-cinq dieux qui gouvernaient le monde; ce plus grand résidait dans le premier et le plus grand de tous les cieux (voy. Epiph. contr. hær. c. 26); or, selon Aristote, ce premier ciel est le siége et principe de tout mouvement, de toute existence, de toute vie, le vrai ïehouh de Moïse.
Quant au nom d'Elahim ou Eloïm, traduit Dieu, au singulier, il est incontestable qu'en hébreu, il est pluriel et signifie les Dieux. Cette pluralité fut la doctrine première; mais depuis que Moïse eut constitué chez eux le dogme de l'unité, le nom d'Elahim, les Dieux, ne gouverna plus que le singulier. La diversité d'emploi dans ces deux noms Elahim et ïehouh, est digne d'attention en nombre d'endroits.
Nº II
Page 171.—Parle, Jehwh, ton serviteur écoute.
Dans l'hébreu comme dans tous les idiomes anciens et dans l'arabe actuel, le tutoiement est toujours usité envers la seconde personne singulière, jamais le pluriel vous: cette dernière formule est une invention de notre Europe, dont l'origine ne serait pas indigne de recherches; le tu et toi porte un caractère d'égalité entre les personnes, qui semble appartenir spécialement à un état de société sauvage, dans lequel chaque individu se sent isolé, et considère comme tel son semblable; le vous, au contraire, semble indiquer un état de société civilisé et compliqué dans lequel chaque individu se sent soutenu d'une famille ou d'une faction dont il fait partie: le sauvage dit moi tout seul, et toi de même; l'homme civilisé dit: moi et les miens, nous: toi et les tiens, vous: l'homme en pouvoir, a dû commencer ce régime: moi et mes gens, nous voulons, nous ordonnons: en agissant contre l'homme faible, isolé, il lui a dit, toi qui es seul. Le vous est devenu un signe de puissance, de supériorité, un terme de respect… Le toi est resté un terme d'égalité non révérencieuse: voilà sans doute pourquoi le traducteur français catholique l'a banni comme un indice de mœurs grossières; mais parce que cette grossièreté est un trait essentiel du tableau, c'est commettre un faux matériel que de le dissimuler.—Il en est de même de plusieurs expressions ordurières et obscènes que dissimulent toutes les traductions. On a honte de la grossièreté des mots et des mœurs; et l'on n'a pas honte de la grossière absurdité des idées et des opinions que l'on nous fait digérer! Voilà ce peuple chéri que l'on veut avoir été élu, pour attirer sur soi son manteau!
Nº III
Page 187.—Les devins consultés par les riches comme par les pauvres, etc.
A l'appui de notre voyageur, et au sujet des ruses des devins et de la crédulité du peuple, même galonné, nous voulons consigner ici une anecdote dont nous garantissons la vérité.
En 1781, l'éditeur du présent ouvrage résidant à Paris, eut occasion de connaître un particulier qui avait exercé et qui exerçait encore quelquefois la profession de devin; le hasard de quelques intérêts réciproques amena entre eux assez d'intimité pour que ce particulier s'ouvrît sur les mystères de son art, en y mettant seulement la condition de n'être jamais compromis: cette condition a été fidèlement remplie, et aujourd'hui même pour ne point l'enfreindre, nous taisons les noms en citant les faits que voici.
Vers 1765, M***, employé dans les bureaux de police de M. de Sartines, se trouva réformé et par suite assez embarrassé comment vivre: tandis qu'il était à la police, il avait dû suivre entre autres affaires une sorte de procès que des plaignants, escroqués, avaient intenté à une femme tireuse de cartes. Les interrogatoires lui avaient procuré des détails instructifs et curieux sur certains principes généraux établis comme bases de l'art: il avait trouvé qu'au total, cet art était un calcul de probabilité qui, manié avec adresse, devenait susceptible d'applications heureuses; l'idée lui vint d'en faire une étude régulière, et d'en tirer le meilleur parti possible pour sa situation; il commença par diviser et classer la matière exploitable, c'est-à-dire la crédulité publique, 1º en ses deux sexes, hommes et femmes; 2º en ses quatre âges, savoir, enfance, puberté, âge mûr et vieillesse; 3º en mariés et non mariés, en maîtres et en serviteurs; 4º en clercs et laïques, nobles et roturiers, gens de métier et riches, etc.; ensuite ayant établi les accidents généraux qui sont communs à toutes les classes, il distribua les accidents spéciaux plus habituels à chacune, et finalement les accidents plus rares et plus individuels. De ce travail, résulta une masse d'environ quatre mille articles des accidents de la vie humaine qui se rencontrent le plus ordinairement. Tandis que M*** exécutait ce travail de cabinet et de théorie, il se livrait à un autre de pratique non moins important; il employait tous ses loisirs à courir le monde et les réunions publiques pour connaître de figure et de nom les personnes marquantes, et pour apprendre tout ce qui concernait les affaires de famille et celles d'état; il fréquentait surtout les auberges où mangeaient les valets des grandes maisons, et celles où se réunissaient les mendiants. Il prenait divers déguisements, même de femme; la nature l'avait favorisé d'une figure propre à jouer tous les rôles: sous un visage bénin et presque niais, il cachait un esprit vraiment subtil, plein de sagacité et de pénétration. Lorsqu'il se vit fort de matériaux et de moyens, il s'établit dans le quartier de la Place des Victoires, où il fut bientôt consulté par les filles qui lui firent connaître les entretenues, qui, elles-mêmes, lui adressèrent leurs amants de haut rang, etc., de manière qu'en quelques années il acquit une somme assez considérable pour assurer son indépendance; ses succès furent tels, que parmi ses cliens il compta des personnes de haut rang, des gens de cour et de barreau, des ecclésiastiques, et même deux prélats qu'il reconnut très-bien: la plus curieuse de toutes ces histoires, fut celle de M. le duc d'O***.
En 1779, vers les onze heures du soir, notre devin entend frapper à la porte de sa chambre trois coups en maître: il venait de se coucher; il saute du lit, allume sa chandelle à sa veilleuse, ouvre la porte, et voit entrer un homme bien vêtu, de bonne taille, et portant un chapeau rond si enfoncé sur les yeux, qu'il était difficile de voir la figure.—Puisque vous êtes devin, dit cet homme, pourquoi ne deviniez-vous pas ma venue?—Je ne devine pas, répondit M***; je consulte le sort au besoin, et le sort m'éclaire.—Eh bien, consultez-le sur ce que je viens vous demander. Notre devin prend ses cartes, assez inquiet de ce qui allait arriver, son chagrin était de ne pas voir la figure: il jette des mots insignifiants pour entamer conversation; il fait tomber les mouchettes, se baisse pour les ramasser, et dans ce mouvement, il saisit les traits du personnage qu'il reconnaît pour M. le duc d'O***. Ce fut partie gagnée: notre homme offre un siége d'un air indifférent, lui-même s'assied sans façon, avec recueillement; il bat les cartes, en tire une première qui annonce une affaire de famille; à la seconde, il jette un cri d'effroi:—Ah! Dieu, je suis perdu!—Comment cela? dit le duc.—Un piége m'est tendu par un homme puissant; je ne puis continuer mon opération.—Le duc le rassure; le devin tire une autre carte qui désigne plus spécialement le consultant; le duc avoue qu'il vient pour sa femme; le devin savait comme tout le monde, que madame la duchesse était grosse, et même à peu près de combien de mois: il se doute que le consultant veut savoir si l'enfant sera mâle ou femelle; il tire une carte en conséquence; le sort déclare un enfant mâle après un accouchement un peu laborieux; le duc se lève sans dire mot, et après avoir ouvert la porte: Cent louis, dit-il, si c'est vrai; cent coups de canne, si c'est faux, et il part en poussant la porte.
Voilà notre devin sur le qui-vive: pendant plusieurs jours, il rôde autour de l'hôtel ou palais; il tâche d'accoster les gens de service; il capte un jeune homme qu'il régale plusieurs fois au café voisin; il apprend le terme supposé pour l'accouchement; il prétexte un intérêt de l'annoncer à une personne qui a fait une forte gageure que ce sera une fille, il y aura quelque chose à partager; le jeune homme promet d'informer à l'heure; le terme arrive; le devin ne quitte plus le café; l'accouchement se fait; il est averti à l'instant; c'est un garçon (qui a été feu M. le comte de B…). Notre homme part à la course, monte à sa chambre, allume vite sa veilleuse et se couche. A peine une demi-heure s'était écoulée, il entend monter à pas de loup; il feint un sommeil profond; les trois mêmes coups l'éveillent: il sollicite un peu de patience, fait de la lumière; et ouvre. Le monsieur au chapeau enfoncé entre et dit simplement bonsoir, jette sur la table une bourse qui sonne, se retourne et part; le devin compte les louis, il y en avait juste cent; ce fut une indemnité pour quelques autres aventures. Elles n'étaient pas toutes aussi heureuses; l'une d'elles l'avait brouillé avec la police. Un homme, qu'elle poursuivait, l'avait consulté pour sortir de Paris: le sort avait répondu, sortez par la porte haute; l'homme avait réussi par la barrière d'Enfer; mais il avait été repris; il fallut, pour calmer cette affaire, employer des amis et de l'argent.
C'eût été un recueil curieux que celui de toutes les anecdotes qui lui étaient arrivées dans ce genre de profession; il en avait retiré des résultats philosophiques très-piquants sur les divers degrés et dispositions de crédulité des divers âges, sexes, tempéraments et professions. Le plus fort de sa clientelle avait été en femmes, surtout de l'âge moyen, en joueurs, en plaideurs, en militaires, en entrepreneurs de commerce; il avait remarqué que cette vivacité d'idées que l'on appelle de l'esprit, loin d'empêcher la crédulité, y était plutôt favorable; que l'ignorance en choses physiques en était surtout la cause essentielle; que les plus rares de tous ses consultants avaient été des physiciens, des médecins et des mathématiciens; néanmoins il en citait quelques exemples, avec cette circonstance que les individus étaient ce qu'on appelle dévots; du reste, il convenait que l'art n'était qu'habileté et ruse; il était persuadé que les anciens ministres des temples et des oracles y étaient très-versés, et qu'ils en avaient fait des études profondes au moyen desquelles ils avaient pu pratiquer des tours de fantasmagorie dont aujourd'hui l'on n'a plus d'idée. (Il n'avait pas vu ceux dont les Robertson et les Comte nous ont étonné et instruit depuis quelques années.)
Nº IV
Pag. 224. L'obscur laconisme de l'hébreu dans ce passage, n'a été compris d'aucun traducteur: le grec ne présente pas de sens raisonnable; le latin qui a voulu en faire un, et qui a été copié par le français, l'anglais, etc., s'exprime ainsi:—«Sont-ce des holocaustes et des victimes que le Seigneur demande? n'est-ce pas plutôt que l'on obéisse à sa voix? L'obéissance est meilleure que les victimes; il vaut mieux lui obéir que de lui offrir les béliers les plus gras, car c'est une espèce de magie de ne vouloir pas se soumettre; et ne pas se rendre à sa volonté, c'est le crime de l'idolâtrie.»
L'on voit que ceci est un pur radotage privé de sens. Voici le texte:
An voluntas Domino in ascensionibus et victimis, sicut audiens Hé Hafs l'ïehouh bé aloût oua zabahim ke somâ
in verbo Dei? Hîc audiens ex victimâ bonum (ou boni) in inspectione be qôl ïehouh heneh semâ me zabah toub le heqsib
adipis arietum; quia peccatum divination rebellio et vacuitas mableb aïlïm ki Hâtat quesm meri ou âoun
et idolis fiducia. ou tarafim he fasr.
Le latin ne rend pas parfaitement le texte, parce que dans l'hébreu les genres manquent de signes comme dans l'anglais; par exemple, toub est comme good, et peut signifier bon, bonne, bonté. L'on voit la difficulté de saisir le sens d'un style si oraculaire; mais quelle est ici la pensée de Samuël? il se dit interprète de Dieu, recevant sa parole tête à tête comme Moïse; si d'autres que lui parvenaient à connaître cette parole ou cette volonté par le moyen des victimes, son privilége serait perdu: il a donc intérêt de décréditer ce moyen, et comme il en connaît la fausseté, en le décréditant, il met les prêtres hors de pair avec lui sans qu'ils osent s'en plaindre; ce doit être là le sens de ses paroles à Saül. Le français littéral peut se dire ainsi:
«Dieu veut-il des victimes et des (fumées) montantes (de grillades); (car c'est le vrai sens d'holocaustes), autant que l'audition (obéissante) à sa parole? Ici l'on écoute (on veut connaître) le bon (succès) par la victime en regardant avec attention la graisse des béliers.»
Or, ou mais (le mot hébreu ki a une multitude de sens, même le disjonctif), or, ou mais, le péché de devination est révolte, chimère, confiance aux idoles, etc.
Du moins ici il y a un sens raisonnable et non pas forcé ou nul, comme lorsque le mot toub est traduit par meilleur et que l'on renverse la phrase pour le placer. On ne saurait le nier, les livres hébreux sont encore à traduire. On a beau nous vanter nos pères en doctrines; les anciens ont manqué totalement de critique, et de plus, ils ont manqué des moyens scientifiques que le temps a cumulés en faveur des modernes: il est démontré que les prétendus septante n'ont point entendu l'hébreu, malgré toute la fable d'inspiration dont on a voulu les entourer, et dont la fourberie est démontrée par le savant bénédictin Montfaucon, dans les Hexaples d'Origène, tom. 1er.
Nº V
Pag. 230.—Je ne concilie pas cette présentation avec celle du chapitre suivant, qui est le XVII.
Pour mettre le lecteur plus en état de prononcer lui-même à cet égard, nous lui soumettons la substance fidèle de ce chapitre 17, un peu trop long pour être cité mot à mot.—Il débute par mettre en présence les deux armées et camps des Philistins et des Hébreux sans avoir dit un mot des causes ni des antécédents de cette guerre, ce qui déjà indique qu'il n'est pas la suite positive du chapitre 16, qui finit par le récit de la première présentation.
«Un Philistin de taille gigantesque, né bâtard, et nommé Goliath, s'avance entre les deux camps, et défie au combat le plus vaillant des Juifs. (Le narrateur décrit d'une manière instructive et curieuse les détails de son armure.) Pendant quarante jours, soir et matin, Goliath recommence son défi en posant pour condition que les compatriotes du vaincu deviendront les esclaves des compatriotes du vainqueur. Les Hébreux restent stupéfiés de frayeur; or, un homme de Bethléem avait huit enfants dont trois étaient au camp, et David, le plus jeune, allait et venait de la maison au camp leur porter des vivres: et un matin qu'il en apportait, il vit Goliath, le géant, qui, à son ordinaire, défiait les Hébreux. Il s'informa de ce que cela signifiait, et un Hébreu lui dit: Vous voyez cet homme qui insulte Israël; si quelqu'un peut le vaincre, le roi l'enrichira, il lui donnera sa fille, il affranchira la maison de son père, et la rendra libre (les Hébreux étaient donc serfs). Et le frère aîné de David l'entendant parler lui dit: Que fais-tu ici? et pourquoi as-tu quitté ce peu de troupeaux que nous avons? Je connais ton orgueil et la malice de ton cœur.» (Ces derniers mots semblent faire allusion aux prétentions que l'onction royale aurait déja données à David.) «Tu viens voir le combat, retourne à la maison. Et David alla d'un autre côté, continuant de questionner les uns et les autres, tellement que ses discours parvinrent aux oreilles du roi: et il fut conduit devant Saül, à qui il dit avec assurance qu'il combattrait le géant, et qu'il le vaincrait. Saül lui fit essayer les armes d'usage, savoir la cuirasse, le casque, le bouclier; David dit que tout cela le gênait, et qu'il ne voulait que sa fronde, son bâton et cinq pierres polies qu'il choisit dans le torrent: ainsi armé, il s'avance vers le géant: entre eux deux se passe un dialogue selon les mœurs du temps, dans le style des guerriers d'Homère. David prend son temps, et de sa fronde lance une pierre qui frappe le Philistin au front et le renverse à terre (le texte dit qu'elle entra dans le front; cela ne se conçoit pas; une petite pierre a eu trop peu de poids pour cet effet; une grosse pierre a eu trop de volume); il se précipite sur le géant vaincu, saisit son épée (ou plutôt son coutelas), et lui coupe la tête qu'il apporta à Jérusalem, et il mit les armes du Philistin dans le Tabernacle.» (Cette mention de Jérusalem est étonnante; le tabernacle n'y fut posé que dans la suite par David même.) L'historien continue et dit, «qu'au moment où David marcha contre le Philistin, Saül dit du chef de sa garde, Abner, de qui est fils ce jeune homme (nar)? Abner répond: Sur ma vie je l'ignore. Demandez-le-lui, dit le roi; et quand David revint, Abner le prit et le mena au roi, tenant la tête du géant; et Saül lui dit: De qui es-tu fils?—D'Isaï de Bethléem, répondit David; et de ce moment le cœur de Jonathas, fils de Saül, s'attacha à David, et il ne cessa de l'aimer. Or, Saül, ce jour-là, prit David à son service et il ne le laissa plus retourner chez son père» (ceci diffère entièrement du chap. 16, où Saül envoie prendre David chez son père); «et il lui donna un commandement, puis diverses entreprises périlleuses, où David réussit toujours: or, quand Saül, de retour de cette expédition (qui avait fini par une déroute complète des Philistins), passa dans les villes et villages des Hébreux, les femmes et les filles sortirent au-devant de lui, chantant: Saül en a tué mille, David en a tué dix mille; et Saül blessé de ce chant, dit en lui-même: Ils m'en donnent mille, ils lui en donnent dix mille; bientôt ils lui donneront le royaume, et dès lors il voulut le perdre.—Et un jour qu'il fut saisi du malin esprit de Dieu, et que David jouait de la lyre en dansant devant lui, Saül tenta deux fois de le percer de sa lance, mais David l'évita, et le fer frappa dans la muraille: David continua de prospérer, et Saül lui promit une de ses filles s'il tuait cent Philistins, etc.»
Assurément le récit de ce chapitre, quant à la présentation, diffère matériellement du précédent: dans le chap. 16, après l'onction clandestine de David, en la maison de son père, à Bethléem, Saül l'envoie chercher pour jouer de la harpe, et il le retient à son service; aucune mention n'est faite du combat, ni de la guerre philistine, ce qui exige un laps de temps. Dans ce chapitre 17, où il devrait à ce titre déja le bien connaître, il le voit pour la première fois, il s'enquiert de sa famille et de son nom; cela n'est pas conciliable et ne peut s'expliquer qu'autant que l'on admet ici deux récits originaux, venant de deux mains différentes, que le compilateur a cousus l'un à l'autre sans raccord, n'osant probablement rien changer à deux autorités qui lui ont imposé respect. Ce compilateur a dû être Esdras, et les narrateurs premiers ont pu être Samuel, Gad ou Nathan, comme l'ont dit les Paralipomènes.