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Kitabı oku: «Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F)», sayfa 31

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FAÇADE, s. f. Vistz. On applique le nom de façade aujourd'hui à toute ordonnance d'architecture donnant sur les dehors, sur la voie publique, sur une cour, sur un jardin. Mais ce n'est que depuis le XVIe siècle, en France, que l'on a élevé des façades comme on dresserait une décoration devant un édifice, sans trop se soucier du plus ou moins de rapports de ce placage avec les dispositions intérieures. Les anciens, non plus que les architectes du moyen âge, ne savaient ce que c'était qu'une façade dressée avec la seule pensée de plaire aux yeux des passants.



Les faces extérieures des bons monuments de l'antiquité ou du moyen âge ne sont que l'expression des dispositions intérieures. Pour les églises, par exemple, les façades principales, celles qui sont opposées au chevet, ne sont autre chose que la section transversale des nefs. Pour les maisons, les façades sur la rue consistent en un pignon si la maison se présente par son petit côté, en un mur percé de portes et de fenêtres si au contraire la maison présente vers l'extérieur son grand côté. Tout corps de logis du moyen âge est toujours bâti sur un parallélogramme, des pignons étant élevés sur les deux petits côtés opposés. Ainsi, fig. 1, le corps de logis du moyen âge présente deux pignons A et deux murs latéraux B. Si plusieurs bâtiments sont agglomérés, ils forment une réunion, fig. 2, d'un plus ou moins grand nombre de ces logis distincts, et leurs façades ne sont autre chose que la disposition plus ou moins décorée des jours ouverts sur les dehors. Ce principe fait assez voir que ce que nous entendons aujourd'hui par façade n'existe pas dans l'architecture du moyen âge. Une église, un palais, une maison, possèdent leurs faces extérieures, leurs vistz; mais ces faces ne sont autre chose que l'apparence nécessaire des dispositions du plan, des logements ou des constructions intérieures. En un mot, dans l'architecture du moyen âge, la façade ne peut être séparée de l'ordonnance générale du bâtiment, elle en est la conséquence. Nous renvoyons donc nos lecteurs aux articles: CATHÉDRALE, CHÂTEAU, MAISON, PALAIS, ARCHITECTURE religieuse, monastique et militaire.

FAÎTAGE, s. m. Partie supérieure d'un comble à deux égoûts (voy. CHARPENTE, CRÊTE, FAÎTIÈRE).

FAÎTE, s. m. Pièce de bois horizontale qui réunit les deux extrémités supérieures des poinçons de fermes (voy. CHARPENTE).

FAÎTIÈRE, s. f. Tuile de couronnement d'un comble à deux égoûts. Ces tuiles sont unies ou ornées, simples ou doublées. Lorsque les faîtières sont ornées, elles composent une véritable crête de poteries plus ou moins découpée sur le ciel. Les tuiles faîtières de l'époque romane sont généralement d'une très-grande dimension, posées jointives, et souvent ornées de boutons servant à les poser facilement. Ces boutons forment la décoration continue ou la crête du faîtage. Nous avons vu encore sur les combles de l'église de Vézelay des débris de très-anciennes faîtières (du XIIe siècle probablement) qui n'avaient pas moins de 0,70 c. de longueur, et qui devaient être posées jointives avec un calfeutrage en mortier entre-deux.



Voici, fig. 1, une de ces faîtières en terre cuite d'une bonne qualité, vernissée à l'extérieur d'une couverte brun-verdâtre. Les bords A extrêmes étaient légèrement relevés pour éloigner l'eau de pluie du joint, lequel était garni de mortier. Les boutons, d'une saillie de 0,12 c. à 0,15 c., étaient assez grossièrement modelés à la main. Plus tard on reconnut que ces tuiles faîtières jointives, malgré les calfeutrages en mortier, laissaient passer l'humidité dans les charpentes, et on chevaucha ces faîtières, ainsi que l'indique la fig. 2. Toutefois, pour éviter leur dérangement par l'effet du vent, on les posait toujours sur mortier, en ayant le soin de ne pas laisser de bavures. Vers le commencement du XIIIe siècle on fabriquait aussi des faîtières à recouvrement sur les combles en tuiles (3), chaque faîtière portant un bourrelet A revêtissant le rebord B de sa voisine.



Une couverte vernissée au feu recouvrait toujours ces faîtières pour les rendre moins perméables à l'humidité et donner moins de prise au vent, car le vent n'agit pas sur une surface polie comme sur un corps rugueux. Il est certain que les tuiliers du moyen âge observaient, dans la confection des faîtières, les lois qui guidaient les plombiers; ils avaient compris que ces faîtières devaient avoir un poids assez considérable pour résister au vent et pour appuyer le faîtage des combles, lequel a toujours besoin d'être chargé, principalement lorsque ces combles se composent de chevrons portant ferme (voy. CHARPENTE, CRÊTE); aussi, donnèrent-ils bientôt aux appendices décoratifs, qui ne sont guère que des boutons peu saillants ou de légers reliefs pendant l'époque romane, des formes plus décidées, plus saillantes, et un plus grand poids par conséquent. On voyait, il y a quelques années, dans le petit musée que M. Ruprich Robert avait installé dans une des dépendances de la cathédrale de Bayeux, deux faîtières en terre cuite très-curieuses par leur fabrication. Nous les donnons ici toutes deux (4 et 4 bis).




Elles paraissent appartenir au XIIIe siècle, sont d'une petite dimension, et le vernis qui les couvre est brun. Ces faîtières étaient posées jointives. On voit encore à Troyes, sur des maisons voisines de la cathédrale, quelques tuiles faîtières conformes au dessin, fig. 5, vernies en brun. Ces appendices ajourés, formant crête, étaient nécessairement soudés sur la faîtière avant la cuisson. Mais au feu beaucoup se gerçaient ou se déformaient. Ces pièces de terre, à cause de leur forme et de leur dimension, prenaient beaucoup de place dans le four, étaient difficiles à caser, et leur cuisson devait être souvent inégale. Lorsqu'au XIVe siècle les édifices publics et privés devinrent plus riches et plus délicats, il fallut nécessairement donner aux crêtes de combles recouverts en tuiles des formes plus sveltes, se détachant plus légèrement sur le ciel; alors on fit des faîtières dont les ornements se rapportaient. C'est d'après ce système que sont fabriquées les tuiles faîtières de l'église Sainte-Foi de Schelestadt 468. Elles se composent de la faîtière proprement dite, fig. 6, portant une tige double ajourée, percée au sommet d'un trou cylindrique dans lequel entre un petit goujon en fer. La partie supérieure de ce goujon, dépassant le lit B, reçoit une feuille d'érable A, proprement moulée et vernissée. Ces faîtières datent du commencement du XIVe siècle.



L'oxydation des goujons et le peu d'assiette de ces ornements devaient souvent causer la brisure de ces tiges délicates; cependant on prétendait de plus en plus donner de l'importance aux crêtes en terre cuite; on revint donc vers le XVe siècle aux soudures avant la cuisson, mais en faisant porter les ornements élevés aux sous-faîtières qui étaient courtes, et ne décorant les faîtières de recouvrement que d'ornements peu saillants. C'est suivant ce mode qu'étaient fabriquées les anciennes faîtières du comble de la cathédrale de Sens, dont la couverture en tuiles vernissées date de la fin du XVe siècle (7). Les sous-faîtières A sont vernies en jaune, et les grandes faîtières de recouvrement en vert 469. On remarquera les trous qui traversent de part en part le vase à double panse de la sous-faîtière; ces trous, qui sont à peine visibles à la hauteur où est placée cette crête, n'ont d'autre but que de produire des sifflements sous l'action du vent, ce qui probablement plaisait fort aux voisins de l'église. Nous avons souvent trouvé sur les couronnements des édifices, et particulièrement des combles, la trace de ces singulières fantaisies musicales. On n'attachait pas, pendant le moyen âge, à certains phénomènes naturels, les idées romanesques qui nous ont été suggérées par la littérature moderne; le sifflement du vent à travers les créneaux et les découpures des édifices, qui fait naître dans notre esprit de sinistres pensées, était peut-être pour les oreilles de nos pères une harmonie réjouissante. Quoi qu'il en soit, l'idée de couronner le comble d'un édifice par une centaine de sifflets est passablement originale.

Pour éviter les difficultés que présentait encore la cuisson des pièces A de la figure précédente, on imagina de former ces pièces élevées de poteries posées les unes sur les autres en recouvrement, comme nous voyons qu'on le faisait aussi pour les épis en terre cuite (voy. ÉPIS).



Voici (8) un faîtage ainsi combiné 470. La sous-faîtière porte une sorte de goulot B (voir le profil B'), sur lequel vient s'emboutir le chapeau C en forme de tourelle percée de quatre trous. Les sous-faîtières sont vernies en noir-verdâtre ainsi que les faîtières, les chapeaux sont couverts d'un vernis jaune, le petit toit est noir. Il y a lieu de croire que tous les combles en tuiles étaient autrefois couronnés par ces faîtières découpées; on n'en trouve aujourd'hui qu'un bien petit nombre en place; mais grâce à la négligence bien connue des couvreurs qui ne prennent pas la peine de descendre les tuiles remplacées, lorsqu'ils réparent les toitures, on peut recueillir dans les reins des voûtes de nos édifices du moyen âge quantité de débris de poteries, fort précieux souvent, puisqu'ils nous donnent en fragments des spécimens de ces décorations de combles: aussi, ne saurions-nous trop recommander aux architectes appelés à réparer de vieux bâtiments l'examen de ces débris accumulés sous les toits par la négligence des couvreurs.

FANAL, s. m. (voy. LANTERNE des morts). Les fanaux destinés à présenter la nuit un point lumineux pour guider les navigateurs, sur mer ou sur les fleuves, ne consistaient qu'en une grosse lanterne suspendue à une potence au sommet d'un tour. La Tour de Nesle, à Paris, portait un fanal que l'on allumait toutes les nuits pour indiquer aux mariniers l'entrée de Paris. Sur le bord de la mer, où ces lanternes ne pouvaient fournir un feu assez vif pour être vu de loin, on plaçait sur des tours des cages en fer que l'on remplissait d'étouppe goudronnée. Un guetteur était chargé d'entretenir ces feux pendant la nuit.

FENÊTRE, s. f. Fenestre, fenestrele (petite fenêtre), voirrière, voerrière. L'architecture du moyen âge étant peut-être de toutes les architectures connues celle qui se soumet le plus exactement aux besoins, aux convenances, aux dispositions des programmes, il n'en est pas qui présente une plus grande variété de fenêtres, particulièrement au moment où cette architecture abandonne les traditions romanes. En effet, une fenêtre est faite pour donner du jour et de l'air à l'intérieur d'une salle, d'une chambre; si le vaisseau est grand, il est naturel que la fenêtre soit grande; s'il ne s'agit que d'éclairer et d'aérer une cellule, on comprend que la fenêtre soit petite. Dans une église où l'on se réunit pour adorer la Divinité, on n'a pas besoin de voir ce qui se passe au dehors; mais dans une salle affectée à un service civil, il faut pouvoir au contraire regarder par les fenêtres; pour regarder par les fenêtres il faut les ouvrir facilement. Voilà donc des données générales qui doivent nécessairement établir une différence dans les formes des fenêtres appartenant à des édifices religieux et civils.

Les habitations privées des Romains n'étaient point du tout disposées comme les nôtres. Les pièces réservées pour le coucher, les chambres, en un mot, étaient petites, et ne recevaient souvent de jour que par la porte qui donnait sur un portique.



Chez les gens riches on établissait, outre les cours entourées de portiques, de grandes pièces qui étaient destinées aux réunions, aux banquets, aux jeux, et on avait le soin de disposer autant que possible ces pièces vers l'orientation le plus favorable; souvent alors les jours, les fenêtres n'étaient fermés que par des claires-voies en bois, en métal, ou même en pierre et en marbre. Bien que les Romains connussent le verre, ils ne le fabriquaient pas en grandes pièces; c'était évidemment un objet de luxe, et dans les habitations vulgaires il est probable qu'on s'en passait, ou du moins qu'on ne l'employait qu'avec parcimonie. Pendant les premiers siècles du moyen âge le verre devait être une matière assez rare pour qu'on évitât de l'employer. Observons ceci d'abord, c'est qu'aujourd'hui encore, en Italie, en Espagne, et même dans le midi de la France, on ne demande pas dans les intérieurs la lumière que nous aimons à répandre dans nos appartements ou dans nos édifices publics. Dans les pays méridionaux la vie est extérieure, on ne s'enferme guère que pour méditer et pour dormir; or, pour se livrer à la méditation, on n'a pas besoin d'une grande lumière, encore moins pour dormir et se reposer. Les Romains, qui ne modifiaient pas leur architecture en raison du climat, mais qui bâtissaient à Paris ou à Cologne comme à Rome, avaient laissé dans les Gaules des traditions qui ne furent abandonnées qu'assez tard. Dans les édifices publics, les fenêtres étaient de grandes baies cintrées percées sous les voûtes à travers les murs de remplissage; dans les habitations, les fenêtres n'étaient que des ouvertures assez étroites, rectangulaires, pour pouvoir recevoir des châssis de bois sur lesquels on posait du papier huilé, des canevas ou des morceaux de verre enchâssés dans un treillis de bois ou de métal. Rarement dans les édifices publics les fenêtres étaient vitrées; ou bien elles étaient assez étroites pour empêcher le vent de s'engouffrer dans les intérieurs; ou, si elles étaient larges, on les garnissait de réseaux de pierre, de métal ou de bois destinés à tamiser l'air venant de l'extérieur. Beaucoup d'églises et de salles romanes, jusqu'au XIIe siècle, possédaient des fenêtres sans aucune fermeture ou claire-voie. La forme de ces fenêtres est indiquée dans la fig. 1. Ne devant pas être garnies de châssis, il était naturel de cintrer ces baies et de leur donner à l'intérieur un large ébrasement pour faciliter l'entrée de la lumière. Lorsque ces baies étaient étroites (ce qui était fréquent, afin de rompre autant que possible l'effort du vent), on ne se donnait pas la peine de bander un arc appareillé au-dessus des jambages à l'extérieur; mais on se contentait de tailler une pierre suivant la figure d'un cintre, et l'arc appareillé était réservé pour l'ébrasement, afin de soutenir la charge de la construction supérieure.



La pierre taillée extérieure, formant linteau cintré, n'avait alors que l'épaisseur du tableau AB (2). Presque toujours pendant les premiers siècles, c'est-à-dire du VIIIe au XIe, les jambages de ces baies se composent de grandes pierres en délit avec liaisons au-dessus de l'appui et sous l'arc. La fenêtre primitive romane était ainsi construite comme la fenêtre antique. Quant aux proportions de ces fenêtres percées dans des édifices, elles sont soumises à la place qui leur est assignée; elles sont habituellement courtes dans les étages inférieurs, et longues dans les étages supérieurs. D'ailleurs, l'idée de défense dominant dans toutes les constructions romanes du VIIIe au XIIe siècle, on avait le soin de ne percer que de petites fenêtres à rez-de-chaussée, assez étroites souvent pour qu'un homme n'y pût passer; ou bien, si l'on tenait à prendre des jours assez larges, on divisait la fenêtre par une colonnette ainsi que l'indique la fig. 3. Dans ce cas, la baie consistait réellement en une arcade ayant la largeur EF et le cintre D; du côté de l'extérieur on posait un linteau à double cintre G sur une colonnette dont la fonction véritable était de servir de clôture, de claire-voie. Le cintre D n'apparaissait pas à l'extérieur et servait d'arc de décharge de H en K. Notre figure montre en A la fenêtre du côté extérieur, et en B en coupe sur les milieux des petits arcs C et du grand arc D.



Suivant les provinces, les fenêtres présentent pendant la période romane, et jusque vers le milieu du XIIIe siècle, des dissemblances frappantes. Larges relativement dans le Nord, elles sont de plus en plus étroites lorsqu'on se rapproche du Midi; et cependant il est à cette règle générale quelques exceptions: ainsi les fenêtres des édifices religieux de l'Auvergne, de la Saintonge, du Périgord, et d'une partie du Languedoc, sont pendant les XIe et XIIe siècles aussi grandes que les fenêtres de l'Île-de-France et de la Normandie, tandis que sur les bords de la Saône et du Rhône elles sont fort petites. Nous donnerons ici quelques exemples qui confirmeront notre dire. Commençons par les fenêtres des édifices religieux ou des monuments publics élevés sur les mêmes données quant à la disposition des jours. Il est une loi observée déjà par les architectes romans et développée avec beaucoup d'intelligence par les constructeurs du XIIIe siècle, qu'il nous faut avant tout faire connaître à nos lecteurs, car elle paraît être à peu près oubliée de notre temps.



La lumière qui passe à travers une baie donnant dans un intérieur forme un cône ou une pyramide suivant la figure de la baie; c'est-à-dire qu'au lieu d'être divergents, les rayons lumineux sont convergents de l'extérieur à l'intérieur: ainsi (4), soit une baie abcd, l'extérieur étant en A, la lumière directe, pleine, formera la pyramide abcde, et tout ce qui ne sera pas compris dans cette pyramide ne recevra qu'une lumière diffuse ou de reflet. La pyramide sera plus ou moins allongée suivant que la baie sera plus ou moins orientée vers le cours du soleil. Si même les rayons du soleil viennent à traverser cette baie, le faisceau lumineux formera un prisme, mais qui est point indéfini.



En supposant, par exemple, un trou carré dans un mur (5), abcd, l'extérieur étant en A, les rayons solaires passant par cette baie formeront le prisme abcd, a'b'c'd'. Mais si nous avons en B un mur éloigné de la baie de plus de vingt fois la diagonale du carré, la projection des rayons solaires perce-mur sera déjà fort altérée; si ce mur est à une distance de cent fois la longueur de la diagonale du trou carré, il n'y aura plus qu'un spectre diffus; si beaucoup plus loin, les rayons solaires ne laisseront plus de trace: la lumière directe solaire est donc elle-même altérée par les bords du diaphragme qui lui permet de s'introduire dans un vaisseau fermé. Une personne placée au fond d'un souterrain de cinq cent mètres de long dont l'orifice ne serait que de deux mètres, en admettant que les rayons solaires passassent par l'axe de ce souterrain, distinguerait parfaitement son orifice, mais ne recevrait aucune lumière. Ainsi, en admettant même l'intervention directe des rayons solaires, le faisceau lumineux va toujours en diminuant de diamètre de l'extérieur à l'intérieur: donc, toute fenêtre doit avoir une ouverture proportionnée à l'étendue du vaisseau à éclairer; si cette ouverture est trop petite, on voit la fenêtre, mais elle ne donne plus de lumière directe, et ce n'est pas tant la multiplicité des jours qui donne de la lumière franche dans un intérieur que leur dimension relative. Une salle carrée de vingt-cinq mètres de côté, qui serait éclairée par vingt fenêtres de 1m,00 c. de surface chacune, serait parfaitement sombre dans son milieu, tandis que deux fenêtres de dix mètres de surface chacune, percées dans deux de ses parois opposées, éclaireraient assez ce milieu pour qu'on y pût lire. Les surfaces lumineuses, les fenêtres en un mot, doivent donc être calculées en raison de l'étendue des intérieurs. Il est entendu d'ailleurs que nous ne parlons que des fenêtres prenant le jour direct du ciel, car si elles ne reçoivent que des jours de reflet, il est évident que la pyramide ou le cône lumineux qu'elles produiront à l'intérieur sera beaucoup plus court. L'observation avait peu à peu amené les architectes du XIIe siècle à appliquer ces lois que l'amour pour la symétrie nous a fait négliger, car nous en sommes arrivés, pour obtenir à l'extérieur des façades percées de jours de pareilles dimensions, à éclairer de grandes salles et de petites pièces au moyen de jours semblables entre eux; nous ne savons plus, ou nous ne voulons plus (pour contenter certaines lois classiques que les anciens se sont bien gardés d'appliquer) produire de grands effets de lumière intérieurs au moyen de jours plus ou moins larges; nous avons perdu le sentiment du pittoresque dans la façon d'éclairer les intérieurs. Cependant la disposition des jours dans un intérieur, surtout si le vaisseau est grand, divisé, est un des moyens d'obtenir sans frais des effets puissants. Nous voyons l'architecture romane, quand elle se dégage de la barbarie, pousser très-loin déjà cette connaissance de l'introduction de la lumière du jour dans l'intérieur de ses églises et de ses grandes salles; cette architecture admet que certaines parties d'un vaisseau doivent être plus éclairées que d'autres; elle inondera un sanctuaire de lumière et laissera la nef dans un demi-jour, ou bien elle prendra dans les extrémités du transsept des jours énormes, tandis qu'elle laissera le sanctuaire dans l'obscurité, ou bien encore elle percera de petites fenêtres dans les murs des collatéraux, tandis qu'elle rendra les voûtes hautes lumineuses; elle procédera avec la lumière comme elle procède quand il s'agit de décorer une ordonnance, elle sait faire des sacrifices; elle est sobre ici pour paraître plus brillante sur tel point; elle use des moyens qui ont été le privilége de notre art avant l'ère classique; elle pense que les fenêtres n'existent pas par elles-mêmes; que leur dimension, leur forme, sont la conséquence du vide à éclairer. Il est à croire que les architectes grecs, les architectes romains et ceux du moyen âge seraient fort surpris s'ils nous voyaient donner dans des publications sur l'art de l'architecture des exemples de fenêtres sans dire comment, où et pourquoi ces baies sont faites, quelles sont les salles qu'elles éclairent. Cela est, en effet, aussi étrange que le serait, dans une publication sur l'histoire naturelle des animaux une collection d'oreilles présentées sans tenir compte des têtes qui les portent. Une oreille d'âne est fort belle assurément, mais à la condition qu'elle ornera la tête d'un âne. Nous essaierons donc, en présentant des exemples de fenêtres, puisqu'il s'agit ici de ce membre important de l'architecture, d'indiquer leur place et leur fonction, d'expliquer les raisons qui ont fait adopter telle ou telle forme et disposition.

FENÊTRES APPARTENANT À L'ARCHITECTURE RELIGIEUSE.--Nous avons dit déjà que dans les églises anciennes, c'est-à-dire dans celles qui ont été construites du VIIIe au XIe siècle, les fenêtres ne recevaient pas de vitraux, que les vitraux étaient une exception; que ces fenêtres étaient béantes ou fermées, pour briser le vent, par des claires-voies en pierre, en bois ou en métal. C'était une tradition antique. Dans les rudes contrées de la haute Bourgogne, les églises clunisiennes n'admettaient aucune fermeture à leurs fenêtres jusqu'au XIIe siècle. Les fenêtres de la nef de l'église de Vézelay, 1190 à 1110, hautes et basses, étaient sans vitres, sans claires-voies, laissant passer librement l'air et la lumière. Voici, fig. 6, une de ces fenêtres 471. La section horizontale de ces baies en A donne un double biseau sans feuillure ni repos pour recevoir un châssis. Ce bizeau à l'extérieur avait l'avantage: 1º de permettre à la lumière de s'introduire facilement; 2º de rompre l'action du vent qui s'engouffrait entre ces deux surfaces inclinées. Une pente B à l'extérieur rejette les eaux pluviales. À l'intérieur l'appui C règne au niveau des tailloirs des chapiteaux. L'archivolte D est immédiatement placée sous le formeret de la voûte; le cintre de ces baies n'est donc point concentrique au cintre des formerets, mais profite de toute la hauteur du collatéral pour introduire le plus de jour possible. En E nous présentons l'aspect extérieur de la fenêtre.

Dans les provinces de l'Ouest cependant, vers la même époque, les moeurs étaient plus douces, et on ne laissait pas ainsi les intérieurs exposés à tous les vents; les fenêtres, à la fin du XIe siècle, étaient petites, étroites, et souvent garnies de claires-voies en pierre d'un travail assez délicat et d'un joli dessin. Il n'existe qu'un très-petit nombre d'exemples de ces claires-voies, remplacées plus tard par des verrières.



Nous en donnons un, fig. 7, qui provient de l'église de Fenioux 472. C'est une dalle de 0,055m d'épaisseur sur une largeur de 0,27 c.



La pierre est dure et finement taillée; les ajours biseautés à l'intérieur et à l'extérieur. Notre figure présente la face extérieure de la dalle qui n'est point posée en feuillure, mais dans l'ébrasement même de la baie, ainsi que l'indique la fig. 7 bis, A étant le côté extérieur. Les jambages des fenêtres ouvertes dans les murs des édifices religieux des Xe et XIe siècles étaient habituellement dépourvus de toute décoration; les archivoltes seules, au XIe siècle, étaient parfois entourées d'un cordon mouluré, uni ou avec billettes; cependant déjà, dans les sanctuaires, on cherchait à éviter cet excès de simplicité en plaçant sous les archivoltes deux colonnettes en guise de pieds-droits, et cela comme une sorte d'encadrement qui donnait de l'importance et de la richesse à la baie. Cette méthode est suivie dans les monuments des provinces du centre qui datent de cette époque, en Auvergne, dans le Nivernais et le Berri, dans une partie du Languedoc, du Lyonnais et du Limousin. Les tableaux de la fenêtre restent simples, et sont comme entourés par une arcade portée à l'intérieur sur des colonnettes. C'est ainsi que sont faites les fenêtres du sanctuaire des églises de Notre-Dame-du-Port à Clermont 473, de Saint-Étienne de Nevers 474. Ces dernières fenêtres furent toujours fermées par des panneaux de morceaux de verres enchâssés dans du plomb et maintenus au moyen de barres de fer (voy. VITRAIL). Lorsque les nefs étaient voûtées en berceau, bien rarement les fenêtres hautes pénétraient la voûte, l'extrados de leur archivolte était posé immédiatement sous la naissance du berceau; cette disposition obligeait les architectes à monter les murs goutterots beaucoup au-dessus des archivoltes de ces fenêtres afin de pouvoir poser, soit un massif portant une couverture à crû sur la voûte, soit une charpente. Cette portion de muraille nue au-dessus de baies relativement petites produisait un assez mauvais effet; aussi, dans les contrées où l'art de l'architecture romane était arrivé à un certain degré d'élégance et de finesse, cherchait-on à meubler ces parties nues. Les murs de la nef de la cathédrale du Puy-en-Vélay présentent un de ces motifs de décoration murale extérieure entre les fenêtres percées sous la voûte haute et la corniche (8).



Des panneaux renfoncés, pratiqués dans l'épaisseur de la muraille et décorés de mosaïques et de colonnettes, occupent les parties vagues, encadrent les baies d'une façon gracieuse sans enlever à la construction l'aspect de solidité qu'elle doit conserver. La fenêtre est elle-même fermée par une double archivolte bien appareillée, celle extérieure portant sur deux colonnettes. Ainsi, d'une petite baie très-simple en réalité, les architectes auvergnats de la fin du XIe siècle ont fait un motif de décoration d'une grande importance à l'extérieur.

Il n'est pas nécessaire de nous étendre longuement sur les fenêtres romanes des édifices religieux; outre qu'elles présentent peu de variétés, nous avons tant de fois l'occasion d'en donner des exemples dans le cours de cet ouvrage, que ce serait faire double emploi d'en présenter ici un grand nombre; cependant nous devons signaler certaines fenêtres qui appartiennent exclusivement aux monuments carlovingiens de l'Est, et qui possèdent un caractère particulier.



Ces fenêtres, doubles ou triples, reposent leurs archivoltes (9) sur des colonnettes simples, en marbre ou en pierre très-dure (afin de résister à la charge), surmontées d'un tailloir gagnant dans un sens l'épaisseur du mur; disposition que fait comprendre la coupe A 475. Les colonnettes n'étaient, dans ce cas, que des étançons posés au milieu de l'épaisseur du mur et portant une charge équilibrée. Il n'est pas besoin de dire que ces fenêtres n'étaient point vitrées; aussi, n'étaient-elles percées ordinairement que dans des clochers ou des galeries ne s'ouvrant pas sur l'intérieur. Ces sortes de fenêtres se voient encore dans quelques clochers italiens bâtis en brique, clochers prétendus lombards.

Arrivons à l'époque de transition pendant laquelle les fenêtres des édifices religieux adoptent des formes très-variées.

La cathédrale de Noyon, bâtie vers 1150, nous fait voir déjà un système de fenestrage entièrement nouveau. Les parties supérieures des bras de croix de cette église, bâtis sur plan circulaire, sont éclairées par de longues fenêtres jumelles plein cintre, s'ouvrant sur une galerie extérieure passant à travers de gros contre-forts buttant les arêtes des voûtes.



Le plan, fig. 10, nous montre les fenêtres jumelles en C avec leur feuillure pour recevoir un vitrage, la galerie extérieure en B, l'intérieur du vaisseau étant en A. Une longue colonnette monolithe répète extérieurement la double baie en laissant passer tout le jour possible. Un arc de décharge reposant sur les pieds-droits et colonnettes D porte la corniche supérieure.



La vue perspective (11), prise à l'extérieur, fait saisir l'ensemble de cette disposition, nouvelle alors. Par ce moyen l'architecte obtenait à l'intérieur, sous les voûtes, un très-beau jour; il possédait une galerie de service qui facilitait la pose et l'entretien des verrières, une saillie qui mettait celles-ci à l'abri du vent et de la pluie, une construction légère et solide à la fois, car le grand arc de décharge, double, portait la partie supérieure de la construction et la charpente. On s'aperçoit ici, déjà, que les architectes cherchaient à introduire de larges rayons lumineux dans les intérieurs, qu'ils supprimaient les murs et sentaient la nécessité d'augmenter les surfaces translucides à mesure qu'ils élevaient des monuments plus vastes. Ce principe si vrai amena rapidement des modifications très-importantes dans la structure des édifices religieux. L'espace laissé entre les piles portant les voûtes et les formerets de ces voûtes devenait claire-voie vitrée; mais comme il fallait maintenir les armatures en fer destinées à porter les verrières, et que ces armatures présentaient au vent une énorme surface, on divisa les vides par des piles, des arcs, des oeils et des découpures en pierre qui opposaient un obstacle solide aux efforts du vent, qui étaient durables et permettaient de remplacer facilement les parties de vitraux enfoncés par les ouragans. Les remplissages en pierre étaient si bien pour les architectes une nécessité de construction, qu'ils n'en posaient point dans les baies qui, par leur position près du sol ou leur étroitesse imposée par le faible écartement des piles, pouvaient, sans inconvénient, être armées de simples barres de fer. Dans les collatéraux, par exemple, les architectes ne croyaient pas encore qu'il fût nécessaire d'ouvrir complétement les murs entre les contre-forts, parce que ces collatéraux, n'étant pas très-larges, n'avaient pas besoin d'une aussi grande surface de lumière que les nefs principales, puis parce qu'on s'attachait encore aux traditions romanes, tenant toujours à bien fermer les parties basses des édifices. Dans l'église Saint-Yved de Braisne, les bas-côtés du choeur et la nef haute même présentent ainsi des fenêtres à l'état de transition (12), tandis que dans la cathédrale de Soissons, les fenêtres basses sont à peu près semblables à celles de Saint-Yved, mais les fenêtres hautes de la nef possèdent déjà des claires-voies de pierre, des meneaux, construits en assises sous les archivoltes concentriques aux formerets des voûtes hautes.

468
   Ce dessin nous a été fourni par M. Roeswilwald.


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469
   Des fragments de ces faîtières recueillies par M. Lefort, inspecteur diocésain de Sens, sont déposés dans le bureau de l'agence des travaux.


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470
   Fragments trouvés sur les voûtes de l'église de Semur en Auxois, qui paraissent dater du XVe siècle.


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471
   Des collatéraux; celles de la nef haute sont tracées sur le même plan, seulement elles sont plus longues et portent à l'intérieur un appui très-incliné pour permettre à la lumière du ciel de frapper directement le pavé.


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472
   M. Abadie a recueilli des fragments de claires-voies qu'il a bien voulu nous communiquer. L'église de Fenioux dépend de la Saintonge, elle est située aujourd'hui dans le département de la Charente-Inférieure; c'est un des plus curieux monuments de cette partie de la France.


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473
   Voy. CHAPELLE, fig. 26 et 27.


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474
   Voy. ARCATURE, fig. 16.


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475
   De la cathédrale de Spire (clochers), XIIe siècle.


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Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
1052 s. 371 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain