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Kitabı oku: «Œuvres complètes de lord Byron, Tome 12», sayfa 24

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LETTRE CCCCLXVI

A M. MURRAY

Pise, 3 novembre 1821.

«Les deux passages ne peuvent être changés sans faire parler Lucifer comme l'évêque de Lincoln, ce qui ne serait pas dans le caractère du susdit Lucifer. L'idée des anciens mondes est de Cuvier, comme je l'ai expliqué dans une note additionnelle jointe à la préface. L'autre passage est aussi dans l'esprit du personnage; si c'est une absurdité, tant mieux, puisque alors cela ne peut faire du mal, et plus on rend Satan imbécile, moins on le rend dangereux. Quant au chapitre «des alarmes,» croyez-vous réellement que de telles paroles aient jamais égaré personne? Ces personnages sont-ils plus impies que le Satan de Milton ou le Prométhée d'Eschyle? Adam, Ève, Ada et Abel ne sont-ils pas aussi pieux que le Catéchisme?

»Gifford est un homme trop sage pour penser que de telles choses puissent jamais avoir quelque effet sérieux. Qui fut jamais changé par un poème? Je prie de remarquer qu'il n'y a dans tout cela aucune profession de foi ou hypothèse de mon propre cru; mais j'ai été obligé de faire parler Caïn et Lucifer, conformément à leurs caractères, et certes cela a toujours été permis en poésie. Caïn est un homme orgueilleux: si Lucifer lui promettait un royaume, il l'élèverait; le démon a pour but de le rabaisser encore plus dans sa propre estime, qu'il ne se rabaissait lui-même auparavant, et cela en lui montrant son néant, jusqu'à ce qu'il ait créé en lui cette disposition d'esprit qui le pousse à la catastrophe, par une pure irritation intérieure, non par préméditation, ni par envie contre Abel (ce qui aurait rendu Caïn méprisable), mais par colère, par fureur contre la disproportion de son état et de ses conceptions, fureur qui se décharge plutôt sur la vie et l'auteur de la vie, que contre la créature vivante.

»Son remords immédiat est l'effet naturel de sa réflexion sur cette action soudaine. Si l'action avait été préméditée, le repentir aurait été plus tardif.

»Dédiez le poème à Walter Scott, ou, si vous pensez qu'il préfère que les Foscari lui soient dédiés, mettez la dédicace aux Foscari. Consultez-le sur ce point.

»Votre première note était assez bizarre; mais vos deux autres lettres, avec les opinions de Moore et de Gifford, arrangent la chose. Je vous ai déjà dit que je ne puis rien retoucher. Je suis comme le tigre: si je manque au premier bond, je retourne en grognant dans mon antre; mais si je frappe au but, c'est terrible…

»Vous m'avez déprécié les trois derniers chants de Don Juan, et vous les avez gardés plus d'un an; mais j'ai appris que, malgré les fautes d'impression, ils sont estimés, – par exemple, par l'Américain Irving.

»Vous avez reçu ma lettre (ouverte) par l'entremise de M. Kinnaird; ainsi, je vous prie, ne m'envoyez plus de Revues. Je ne veux plus rien lire de bien ni de mal en ce genre. Walter-Scott n'a pas lu un article sur lui pendant treize ans.

»Le buste n'est pas ma propriété, mais celle d'Hobhouse. Je vous l'ai adressé comme à un homme de l'amirauté, puissant à la douane. Déduisez, je vous prie, les frais du buste ainsi que tous autres.»

LETTRE CCCCLXVII

A M. MURRAY

Pise, 9 novembre 1821.

«Je n'ai point lu du tout les Mémoires, depuis que je les ai écrits, et je ne les lirai jamais: c'est assez d'avoir eu la peine de les écrire; vous pouvez m'en épargner la lecture. M. Moore est investi (ou peut s'investir) d'un pouvoir discrétionnaire pour omettre toutes les répétitions ou les expressions qui ne lui semblent pas bonnes, vu qu'il est un meilleur juge que vous ou moi.

»Je vous envoie ci-joint un drame lyrique (intitulé Mystère, d'après son sujet) qui pourra peut-être arriver à tems pour le volume. Vous le trouverez assez pieux, j'espère; – du moins quelques-uns des choeurs auraient pu être écrits par Sternhold et Hopkins eux-mêmes. Comme il est plus long, plus lyrique et plus grec que je n'avais d'abord l'intention de le faire, je ne l'ai pas divisé en actes, mais j'ai appelé ce que je vous envoie, première partie, vu qu'il y a une suspension de l'action, qui peut, ou se terminer là sans inconvénient, ou se continuer d'une manière que j'ai en vue. Je désire que la première partie soit publiée avant la seconde, parce qu'en cas d'insuccès, il vaut mieux s'arrêter que de continuer un essai inutile.

»Je désire que vous m'accusiez l'arrivée de ce paquet par le retour du courrier, si vous le pouvez sans inconvénient, en m'envoyant une épreuve.

»Votre très-obéissant, etc.

»P. S. Mon désir est que ce poème soit publié en même tems et, s'il est possible, dans le même volume que les autres, parce qu'au moins, quels que soient les mérites ou démérites de ces pièces, on avouera peut-être que chacune est d'un genre différent et dans un différent style.»

LETTRE CCCCLXVIII

A M. MOORE

Pise, 16 novembre 1821.

«Il y a ici M. ***, génie irlandais, avec qui nous sommes liés. Il a composé un excellent commentaire de Dante, plein de renseignemens nouveaux et vrais, et d'observations habiles; mais sa versification est telle qu'il a plu à Dieu de la lui donner. Néanmoins, il est si fermement persuadé de l'égale excellence de ses vers, qu'il ne consentira jamais à séparer le commentaire de la traduction, comme je me hasardai à lui en insinuer délicatement l'idée, – sans la peur de l'Irlande devant les yeux, et avec l'assurance d'avoir assez bien tiré en sa présence (avec des pistolets ordinaires) le jour précédent.

»Mais il est empressé de publier le tout, et doit en avoir la satisfaction, quoique les réviseurs doivent lui faire souffrir plus de tourmens qu'il n'y en a dans l'original. En vérité, les notes sont bien dignes de la publication; mais il insiste à les accompagner de la traduction. Je lui ai lu hier une de vos lettres, et il me prie de vous écrire sur sa poésie. Il paraît être réellement un brave homme, et j'ose dire que son vers est très-bon irlandais.

»Or, que ferons-nous pour lui? Il dit qu'il se chargera d'une partie des frais de la publication. Il n'aura de repos que lorsqu'il aura été publié et vilipendé, – car il a une haute opinion de lui-même, – et je ne vois pas d'autre ressource que de ne le laisser vilipender que le moins possible, car je crois qu'il en peut mourir. Écrivez donc à Jeffrey pour le prier ne pas parler de lui dans sa Revue; je ferai demander la même faveur à Gifford par Murray. Peut-être on pourrait parler du commentaire sans mentionner le texte; mais je doute que les chiens… – car le texte est trop tentant.

»J'ai à vous remercier encore, comme je crois l'avoir déjà fait, pour votre opinion sur Caïn. .........

»Je vous adresse cette lettre à Paris, suivant votre désir. Répondez bientôt, et croyez-moi toujours, etc.

»P. S. Ce que je vous ai écrit sur l'abattement de mes esprits est vrai. À présent, grâce au climat, etc. (je puis me promener dans mon jardin et cueillir mes oranges, et, par parenthèse, j'ai gagné la diarrhée pour m'être trop livré à ce luxe méridional de la propriété), mes esprits sont beaucoup mieux. Vous semblez penser que je n'aurais pu composer la Vision, etc., si mes esprits eussent été abattus; – mais je crois que vous vous trompez. La poésie, dans l'homme, est une faculté ou ame distincte, et n'a pas plus de rapport avec l'individu de tous les jours, que l'inspiration avec la pythonisse une fois éloignée de son trépied.»

La correspondance que je vais maintenant insérer ici, quoique publiée depuis long-tems par celui164 qui l'eut avec Lord Byron, sera, je n'en doute pas, relue avec plaisir, même par ceux qui sont déjà instruits de toutes les circonstances, vu que, parmi les étranges et intéressans événemens dont ces pages abondent, il n'y en a peut-être aucun aussi touchant et aussi singulier que celui auquel les lettres suivantes ont trait.

Note 164: (retour) Voir les Pensées sur la dévotion privée, par M. Sheppard. (Note de Moore.)

A LORD BYRON

From Somerset, 21 novembre 1821.

Milord,

«Il y a plus de deux ans, une femme aimable et aimée m'a été enlevée par une maladie de langueur après une très-courte union. Elle avait une douceur et un courage invariables, et une piété toute intérieure, qui se révélait rarement par des paroles, mais dont l'active influence produisait une bonté uniforme. À sa dernière heure, après un regard d'adieu sur un nouveau-né, notre unique enfant, pour qui elle avait témoigné une affection inexprimable, les derniers mots qu'elle murmura furent: «Dieu est le bonheur! Dieu est le bonheur!» Depuis le second anniversaire de sa mort, j'ai lu quelques papiers qui, pendant sa vie, n'avaient été vus de personne, et qui contiennent ses plus secrètes pensées. J'ai cru devoir communiquer à votre seigneurie un morceau qui sans doute est relatif à vous, vu que j'ai plus d'une fois entendu ma femme parler de votre agilité à gravir les rochers à Hastings.

«Ô mon Dieu! je me sens encouragé par l'assurance de ta parole à te prier en faveur d'un être pour qui j'ai pris dernièrement un grand intérêt. Puisse la personne dont je parle (et qui est maintenant, nous le craignons, aussi célèbre par son mépris pour toi que par les talens transcendans dont tu l'as douée) être réveillée par le sentiment de son danger, et amenée à chercher dans un convenable sentiment de religion cette paix de l'ame qu'elle n'a pu trouver dans les jouissances de ce monde! Fais-lui la grâce que l'exemple de sa future conduite produise plus de bien que sa vie passée et ses écrits n'ont produit de mal; et puisse le soleil de la justice, qui, nous l'espérons, luira un jour à venir pour lui, briller en proportion des ténèbres que le péché a rassemblées autour de lui, et le baume que répand ta lumière avoir une efficacité et une bienfaisance proportionnées à la vivacité de cette agonie, légitime punition de tant de vices! Laisse-moi espérer que la sincérité de mes efforts pour parvenir à la sainteté, et mon amour pour le grand auteur de la religion, rendront cette prière plus efficace, comme toutes celles que je fais pour le salut des hommes. – Soutiens-moi dans le chemin du devoir; – mais ne me laisse jamais oublier que, quoique nous puissions nous animer nous-mêmes dans nos efforts par toutes sortes de motifs innocens, ces motifs ne sont que de faibles ruisseaux qui peuvent bien accroître le courant, mais qui, privés de la grande source du bien (c'est-à-dire d'une profonde conviction du péché originel, et d'une ferme croyance dans l'efficacité de la mort du Christ pour le salut de ceux qui ont foi en lui, et désirent réellement le servir), tariraient bientôt, et nous laisseraient dénués de toute vertu comme auparavant.»

31 juillet 1814, HASTINGS.»

»Il n'y a, milord, dans cet extrait, rien qui puisse, dans un sens littéraire, vous intéresser; mais il vous paraîtra peut-être à propos de remarquer quel intérêt profond et étendu pour le bonheur d'autrui la foi chrétienne peut éveiller au milieu de la jeunesse et de la prospérité. Il n'y a rien là de poétique ni d'éclatant, comme dans les vers de M. de Lamartine, mais c'est là qu'est le sublime, milord; car cette intercession était offerte, en votre faveur, à la source suprême du bonheur. Elle partait d'une foi plus sûre que celle du poète français, et d'une charité qui, combinée à la foi, se montrait inaltérable au milieu des langueurs et des souffrances d'une prochaine dissolution. J'espère qu'une prière qui, j'en suis sûr, était profondément sincère, ne sera peut-être pas à jamais inefficace.

»Je n'ajouterais rien, milord, à la renommée dont votre génie vous a environné, en exprimant, moi, individu inconnu et obscur, mon admiration pour vos oeuvres. Je préfère être mis au nombre de ceux qui souhaitent et prient que «la sagesse d'en haut» la paix et la joie entrent dans une ame telle que la vôtre.»

John SHEPPARD.

Quelque romanesque que puisse paraître aux esprits froids et mondains la piété de cette jeune personne, il serait à désirer que le sentiment vraiment chrétien qui lui dicta sa prière, fût plus commun parmi tous ceux qui professent la même croyance; et que ces indices d'une nature meilleure, si visibles même à travers les nuages du caractère de Byron, après avoir ainsi engagé cette jeune femme innocente à prier pour lui quand il vivait, pussent inspirer aux autres plus de charité envers sa mémoire, aujourd'hui qu'il est mort.

Lord Byron fit à cette touchante communication, la réponse suivante:

LETTRE CCCCLXIX

A M. SHEPPARD

Pise, 8 décembre 1821.

«Monsieur,

»J'ai reçu votre lettre. Je n'ai pas besoin de vous dire que l'extrait qu'elle contient m'a touché, parce qu'il m'aurait fallu manquer de toute sensibilité pour le lire avec indifférence. Quoique je ne sois pas entièrement sûr qu'il ait été écrit à mon intention, cependant la date, le lieu, avec d'autres circonstances que vous mentionnez, rendent l'allusion probable. Mais quelle que soit la personne pour qui il ait été écrit, toujours est-il que je l'ai lu avec tout le plaisir qui peut naître d'un si triste sujet. Je dis plaisir, – parce que votre brève et simple peinture de la vie et de la conduite de l'excellente personne que vous devez sans doute retrouver un jour, ne peut être contemplée sans l'admiration due à tant de vertus, et à cette piété pure et modeste. Les derniers momens de votre femme furent surtout frappans: et je ne sache pas que, dans le cours de mes lectures sur l'histoire du genre humain, et encore moins dans celui de mes observations sur la portion existante, j'aie rencontré rien de si sublime, joint à si peu d'ostentation. Incontestablement, ceux qui croient fermement en l'Évangile, ont un grand avantage sur tous les autres, – par cette seule raison que, si ce livre est vrai, ils auront leur récompense après leur mort; et que s'il n'y a pas d'autre vie, ils ne peuvent qu'être plongés avec l'incrédule dans un éternel sommeil, après avoir eu durant leur vie l'assistance d'une espérance exaltée, sans désappointement subséquent, puisque (à prendre le pire) «rien ne peut naître de rien,» pas même le chagrin. Mais la croyance d'un homme ne dépend pas de lui. Qui peut dire: «Je crois ceci, cela, ou autre chose?» et surtout, ce qu'il peut le moins comprendre. J'ai toutefois observé que ceux qui ont commencé leur vie avec une foi extrême, l'ont à la fin grandement restreinte, comme Chillingworth, Clarke (qui finit par être arien), Bayle, Gibbon (d'abord catholique), et quelques autres; tandis que, d'autre part, rien n'est plus commun que de voir le jeune sceptique finir par une croyance ferme, comme Maupertuis et Henry Kirke White.

»Mais mon objet est d'accuser la réception de votre lettre, non de faire une dissertation. Je vous suis fort obligé pour vos bons souhaits, et je vous le suis infiniment pour l'extrait des papiers de cette créature chérie dont vous avez si bien décrit les qualités en peu de mots. Je vous assure que toute la gloire qui inspira jamais à un homme l'idée illusoire de sa haute importance, ne contrebalancerait jamais dans mon esprit le pur et pieux intérêt qu'un être vertueux peut prendre à mon salut. Sous ce point de vue, je n'échangerais pas l'intercession de votre épouse en ma faveur contre les gloires réunies d'Homère, de César et de Napoléon, pussent-elles toutes s'accumuler sur une tête vivante. Faites-moi au moins la justice de croire que,

 
Video meliora proboque 165.
 

quoique le «Deteriora sequor» puisse avoir été appliqué à ma conduite.

Note 165: (retour) Ovid. Métamorph. Disc. de Médée.

 
Video meliora proboque
Deteriora sequor.
«Je vois et j'approuve le parti du devoir; je suis le parti contraire.»
 

Note du Trad.)

»J'ai l'honneur d'être votre reconnaissant et obéissant serviteur,

BYRON.

»P. S. Je ne sais pas si je m'adresse à un ecclésiastique; mais je présume que vous ne serez pas offensé par la méprise (si c'en est une) de l'adresse de cette lettre. Quelqu'un qui a si bien expliqué et si profondément senti les doctrines de la religion, excusera l'erreur qui me l'a fait prendre pour un de ses ministres.»

LETTRE CCCCLXX

A M. MURRAY

Pise, 4 décembre 1821.

»Je vois dans les journaux anglais, – dans le Messenger de votre saint allié Galignani, – que «les deux plus grands exemples de la vanité humaine dans le présent siècle» sont, premièrement «l'ex-empereur Napoléon,» et secondement «sa seigneurie, etc., le noble poète,» c'est-à-dire, votre humble serviteur, moi, pauvre diable innocent.»

»Pauvre Napoléon! il ne songeait guères à quelles viles comparaisons le tour de la roue du destin le réduirait!

»Je suis établi ici dans un fameux et vieux palais féodal, sur l'Arno, assez grand pour une garnison, avec des cachots dans le bas et des cellules dans les murs, et si plein d'esprits, que le savant Fletcher, mon valet, m'a demandé la permission de changer de chambre, et puis a refusé d'occuper sa nouvelle chambre, parce qu'il y avait encore plus d'esprits que dans l'autre. Il est vrai qu'on entend les bruits les plus extraordinaires (comme dans tous les vieux bâtimens), ce qui a épouvanté mes domestiques, au point de m'incommoder extrêmement. Il y a une place évidemment destinée à murer les gens, car il n'y a qu'un seul passage pratiqué dans le mur, et fait pour être remuré sur le prisonnier. La maison appartenait à la famille des Lanfranchi (mentionnés par Ugolin dans son rêve comme ses persécuteurs avec les Sismondi), et elle a eu dans son tems un ou deux maîtres farouches. L'escalier, etc., dit-on, a été bâti par Michel-Ange. Il ne fait pas encore assez froid pour avoir du feu. Quel climat!

»Je n'ai encore rien vu ni même entendu de ces spectres (que l'on dit avoir été les derniers occupans du palais); mais toutes les autres oreilles ont été régalées de toutes sortes de sons surnaturels. La première nuit j'ai cru entendre un bruit bizarre, mais il ne s'est pas reproduit. Je ne suis là que depuis un mois.

»Tout à vous, etc.»

LETTRE CCCCLXXI

A M. MURRAY

Pise, 10 décembre 1821.

«Aujourd'hui, à cette heure même (à une heure), ma fille a six ans. Je ne sais quand je la reverrai, ou si même je dois la revoir jamais.

»J'ai remarqué une curieuse coïncidence, qui a presque l'air d'une fatalité.

»Ma mère, ma femme, ma fille, ma soeur consanguine, la mère de ma soeur, ma fille naturelle et moi, nous sommes tous enfans uniques.

»N'est-ce pas chose bizarre, – qu'une telle complication d'enfans uniques? À propos, envoyez-moi la miniature de ma fille Ada. Je n'ai que la gravure, qui ne donne que peu ou point d'idée de son teint.

»Tout à vous, etc.»

LETTRE CCCCLXXII

A M. MOORE

Pise, 12 décembre 1821.

«Ce que vous dites sur les deux biographies de Galignani est fort amusant; et si je n'étais paresseux, je ferais certainement ce que vous désirez. Mais je doute à présent de mon fonds de gaîté, – assez pour ne pas laisser le chat sortir du sac166. Je désire que vous entrepreniez la chose. Je vous pardonne et vous accorde indulgence (comme un pape), par avance, pour toutes les plaisanteries qui maintiendront ces sots dans leur chère croyance qu'un homme est un loup-garou.

Note 166: (retour) M. Galignani ayant exprimé le désir d'avoir une petite biographie de Lord Byron, pour la placer à la tête de ses oeuvres, j'avais dit par plaisanterie, dans une lettre précédente à mon noble ami, que ce serait une bonne satire de la disposition du monde à le peindre comme un monstre, que d'écrire lui-même pour le public, tant anglais que français, une sorte de biographie héroï-comique, où il raconterait, avec un assaisonnement d'horreurs et de merveilles, tout ce qu'on avait déjà publié ou cru sur son compte, et laisserait même l'histoire de Goëthe sur le double meurtre de Florence. (Note de Moore.)

»Je crois vous avoir dit que l'histoire du Giaour avait quelque fondement dans les faits; ou si je ne vous l'ai pas dit, vous le verrez un jour dans une lettre que lord Sligo m'a écrite après la publication du poème...............

»Le dénoûment dont vous parlez pour le pauvre ***, a été sur le point d'avoir lieu hier. Allant à cheval assez vite derrière M. Medwin et moi, en tournant l'angle d'un défilé entre Pise et les montagnes, il s'est jeté par terre, – et s'est fait une assez forte contusion; mais il n'est pas en danger. Il a été saigné, et garde la chambre. Comme je le précédais de quelques centaines d'yards167, je n'ai pas vu l'accident; mais mon domestique, qui était derrière, l'a vu, et il dit que le cheval n'a pas bronché, – excuse ordinaire des écuyers démontés. Comme *** se pique d'être bon écuyer, et que son cheval est réellement une assez bonne bête, je désire entendre l'aventure de sa propre bouche, – attendu que je n'ai encore rencontré personne qui réclamât une chute comme chose de son fait......

»À toujours et de coeur, etc.»

»P. S.13 décembre.

«Je vous envoie ci-joint des vers que j'ai composés il y a quelque tems; vous en ferez ce qu'il vous plaira, vu qu'ils sont fort innocens168. Seulement, si vous les faites copier, imprimer ou publier, je désire qu'ils soient plus correctement reproduits qu'on n'a coutume de le faire quand, «des riens deviennent des monstruosités» comme dit Coriolan.

Note 167: (retour) L'yard vaut trois pieds. (Note du Trad.)

Note 168: (retour) Voici ces vers:

 
Oh! ne me parlez pas d'un grand nom dans l'histoire,
Les jours de notre jeunesse sont les jours de notre gloire.
Le myrte et le lierre du doux âge de vingt-deux ans
Valent tous vos lauriers, quelle qu'en soit l'abondance.
 
 
Que sont les guirlandes et les couronnes pour le front ridé?
Des fleurs mortes, mouillées de la rosée d'avril.
Arrière donc de la tête blanchie tous ces honneurs!
Que m'importent ces tresses qui ne donnent que la gloire?
 
 
Ô Renommée! Si jamais je m'enivrai de tes louanges,
Ce fut moins pour le plaisir de tes phrases sonores,
Que pour voir les yeux brillans d'une femme chérie révéler
Qu'elle ne me jugeait point indigne de l'aimer.
 
 
C'est là surtout que je te cherchai, c'est là seulement que je te trouvai.
Le regard féminin fut le plus doux des rayons qui t'environnaient;
Quand il brilla sur quelque éclatante partie de mon histoire,
Alors je connus l'amour, et je sentis la gloire.
 

»Il faut réellement que vous fassiez publier ***: il n'aura pas de repos jusque-là. Il vient d'aller avec la tête cassée à Lucques, suivant mon désir, pour essayer de sauver un homme du supplice du feu. L'Espagnole, dont la jupe règne sur Lucques, avait condamné un pauvre diable au bûcher, pour vol d'une boîte de pains à chanter169 dans une église. Shelley et moi, nous nous sommes armés contre cet acte de piété, et nous avons troublé tout le monde pour faire commuer la peine. *** est allé voir ce qu'on peut faire.»

B.

Note 169: (retour) Wafer-box, boîte de pains à cacheter, à chanter messe, c'est ce que les ames dévotes appellent un ciboire. (Note du Trad.)

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
03 temmuz 2017
Hacim:
390 s. 1 illüstrasyon
Tercüman:
Telif hakkı:
Public Domain

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