Kitabı oku: «Actrice», sayfa 4

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- C’est incroyable, dit-elle avant de s’éloigner.

Deux hommes portant des guitares la regardèrent avant de détourner leurs regards sur le côté. Elle portait sa colère en elle comme une odeur qui poussait les gens à reculer. Qu’il aille se faire foutre, pensa-t-elle, il avait plus besoin de moi que moi de lui. Il peut se faire ces filles si c’est ce qu’il veut. Calme-toi, se dit-elle surprise par son calme, les gens regardent.

Elle ralentit son rythme, détendit ses épaules, leva la tête. Respira plus profondément et retint ses larmes. Elle poussa la porte pour entrer dans le bar, où Stefan s’était affaissé dans un coin, la bouche légèrement ouverte. Elle s’assit en face de lui et après un instant ses yeux pâles s’ouvrirent sur elle. Il avala quelque chose et fronça des sourcils.

- Prêt à revenir sur la planète Terre ?

- Pas vraiment.

Stefan se redressa, alerte.

- Qu’est-ce qui s’est passé ? Tu as une sale gueule, excuse-moi de te le dire. Sale gueule, c’est bien peu.

- Réconforte-moi, pourquoi tu ne le fais pas. As-tu appelé un taxi ?

- Le moteur tourne, dit-il en pointant vers la fenêtre. Tu vas bien ?

Elle sentit un sourire se former :

- La vie est une expérience par la pratique, n’est-ce pas ? Et je n’aime pas les leçons en ce moment.

Stephan se leva et lui tendit une main. Ils se dirigèrent vers la sortie. L’air froid la gifla au visage et lui éclaircit les idées.

- Si je pleure dans le taxi, dit-elle, ne fais pas attention. Je viens de me rendre compte que je ne peux pas avoir la paix dans le monde et je suis triste, d’accord ?

- La paix mondiale est une saloperie. Lance-toi dans une chose plus simple la prochaine fois. La fin d’Europop, par exemple.

- Et plus jamais de chansons d’amour suédoises, dit-elle en riant malgré elle.

- Tu laisses Abba tranquille, dit-il l’air indigné. Ils dominent mon monde.

CHAPITRE SIX

Mai sortit de sa chambre à moitié endormie, elle vit Billie manger des céréales en regardant la télévision du matin. Sept heures et le monde conspirait déjà pour qu’elle se sente mal. A peine l’aube mais les grincements et les toussotements de la vie urbaine avaient déjà commencés.

- Je n’t’ai pas entendu arriver. Tu es déjà sortie ou est-ce que tu te réchauffes ?

- Dès que j’ai fini ça. J’ai ramené les miens, j’espère que ça ne te dérange pas. J’ai pris seulement un peu de lait.

- C’est cher, le lait. Je pourrais le déduire de ton salaire. Quoi de neuf ?

- Regarde !

Comme si c’était prévu, l’image avait changé pour montrer une vue grand-angle de deux présentateurs, un homme aux cheveux gris et une femme blonde, tous deux avec des dents à changer, un canapé à leur droite maintenant en grand plan.

Blonde et souriante, des longues jambes allongées devant elle, un bras posé sur le canapé.

- Oh mon Dieu, l’épouse de Frankenstein !

Les questions commencèrent – Comment elle allait ? Comment c’était de travailler avec cinq débutés sur cette chorégraphie ? Qu’est-ce qui était prévu pour elle très prochainement ?

Puis l’objectif réel : Nous avons appris que vous étiez en tête du sondage de Daily Paper pour trouver une étoile pour Deannah’s Quest. Qu’en pensez-vous ?

…si honorée, ce serait une excellente opportunité, c’est un grand rôle dans un grand film, ce pourrait l’avancement de carrière à celle qui obtient le rôle…

- L’avancement de carrière ? lança Billie. L’anglais est sa deuxième langue, Conneries étant sa première langue.

Selon vous, d’où proviendra la concurrence ? Après tout, il y a de nombreuses jeunes actrices brillantes en ce moment.

Je dis simplement que je suis honorée d’être dans la course.

Mais vous devez avoir une idée…

Eh bien, Ginny Blake s’en sort pas mal dans le sondage, et Deborah Cash. L’une ou l’autre serait génial es , elles sont toutes deux jeunes et si talentueuses.

Et Mai Rose ? Beaucoup de gens la soutiennent.

Bien sûr, elle a également beaucoup de talent s . Mais j e crois qu’elle est retenue par sa nouvelle pièce en ce moment, et bien sûr son film d’action va bientôt sortir. Je l’ai vu l’autre soir, en fait. Elle avait l’air d’être très trapue . Très musclée , pour ses scènes d’action, j’ai entendu dire.

Oh, donc vous vous connaissez ?

Oui, nous sommes des amies depuis longue date . En fait, elle m’a remplacée dans Amberside Terrace lorsque je me suis retirée. Elle a très bien réussi.

Va-t-elle donc être en concurrence contre vous ?

Un rire, une main pour toucher le bras du présentateur en complet.

Je suis sûre qu’elle ne voudra pas s’impliquer. Elle a sa carrière toute tracée.

Alors quelle est la suite pour Helena Cross ? Je veux dire, si vous n’obtenez pas ce rôle ?

Oh, je ne vois pas aussi loin dans le futur. Je ne suis pas une fille qui fait des plans, ni calculatrice. Je laisse mon agent faire tout le sale boulot !

Les intervieweurs la remercièrent et passèrent l’antenne à leur badinage de nouvelles de divertissement…

En p arlant de Mai Rose, il y a eu des commérages , que ta rd la nuit dernière e lle avait rompu sa longue relation avec Alfie Cox, le batteur du nouveau groupe canon The Gastric Band. D es sources disent qu’il y avait eu une altercation bruyante entre les deux en coulisses et que Mai Rose était repartie avec un homme blond…

- Éteins-la !

Billie trouva la télécommande et éteignit la télé. Sa tête dépassant à peine le dossier du canapé se tourna et regarda Mai, les yeux parcourant son visage comme si elle cherchait des blessures physiques.

Mai avait froid. Le chauffage n’avait pas été allumé depuis longtemps et l’hiver était aux portes, mais le froid était plus profond qu’une sensation physique. C’était comme si de la glace se glisser dans ses veines, engourdissant sa capacité à sentir, goûter et toucher. Elle faisait la sourde oreille à ce que le monde semblait avoir l’intention de lui faire subir. Elle se demandait si elle avait choisi cette réaction par opposition à la colère, la peur ou la frustration. Pourquoi froid ? Pourquoi la mort du cœur ?

- Tu veux que je t’apporte quelque chose ? demanda Billie. Je ne reste qu’une demi-heure – George a besoin de moi ce matin.

- Non, répondit Mai. Sors les chiens et vas-y.

- Ne t’inquiète pas pour cette pute. Toute cette merde d’autopromotion se retournera contre elle.

- Vas-y.

Billie se leva en entendant l’émotion derrière les paroles de Mai. Elle emmena son bol de céréales dans la cuisine et revint à l’embrasure de la porte.

- Je cuisinerai ce soir. Je te préparerai quelque chose. Savoureux et nourrissant. Pas de fruits.

Mai hocha la tête et se dirigea vers la salle de bain. Peut-être qu’une douche la réchaufferait. Ensuite elle pourrait passer un peu de temps à tracer sa journée. Planifier. Réfléchir aux choses.

Premier point du programme, une douche.

Deuxième, appeler Eric.

Fin de l’acte deux – Mai a dû écouter un long discours intense en montrant une passion idéaliste. L’acteur avait de l’expérience et une belle voix, ce n’était donc pas difficile. Il s’appelait David – un homme gentil, fort d’une classe moyenne, les cheveux plaqués en arrière, la trentaine avancée. Il lui faisait de temps en temps un clin d’œil comme pour dire, je suis de ton côté jusqu’au bout de toutes ces conneries.

Ce matin, Pedro avait décidé que faire des allers-retours au fond de la salle serait son motif. Il semblait être plus déterminé à écouter qu’à regarder. Il avait également le geste un peu mou. Mai se retrouva à écouter David en regardant Pedro.

Ils parcoururent les cinq dernières pages de l’acte tranquillement jusqu’à ce qu’une chose arrive à satisfaire les fonctions critiques de Pedro, assez pour qu’ils puissent prendre leur pause-déjeuner. David lui toucha le bras, amicalement.

- Parle un peu plus fort. Lundi, ta voix allait, très forte. Aujourd’hui, c’est un peu piano. Il te tiendra pour ça à moins que tu l’équilibres.

- Merci. J’ai quelque chose en tête qui me tracasse.

- Eh bien, assure-toi que ce soit la pièce, ma chère, au moins lorsque tu joues.

- Désolée.

- Pas de problème. Oh, et assure-toi également de baiser cette pute.

Mai sourit – la première émotion honnête qu’elle avait ressentie ce matin.

Avant qu’ils ne commencent le travail de l’après-midi, Pedro était venu à elle et l’emmena dehors. Il la conduisit aux portails de l’école et se tint à côté d’elle à regarder les piétons et la circulation tournailler. Il posa sa main sur son épaule et parla calmement.

- Cette après-midi, nous allons commencer le troisième acte. C’est le point tournant de la pièce. On voit le désespoir d’une femme plus âgée, brûlant d’envie pour un amour perdu et la trahison de son amant lorsqu’il se tourne vers toi. Toi, Mai, tu n’as pas grand-chose à faire dans cet acte, mais tu es constamment présente, comme une ombre qui pèse sur tous les autres personnages. Sur toi, dépend le bonheur de beaucoup – l’écrivain condamné qui t’aime et qui à son tour est aimé par une autre ; l’écrivain plus âgé qui commence à t’aimer, la femme qui l’aimerait. Et tu es une fille de la campagne, naïve et impatiente d’apprendre, piégée par un rêve de gloire et de succès.

- Pedro, que veux-tu que je fasse ?

- Tu es le centre de cette pièce. Cet après-midi, je veux que tu dises tes lignes, bien sûr, mais je veux que tu fasses prendre conscience aux autres que tu regardes. Aujourd’hui, ils performeront pour gagner ton amour et tu dois être présente, là où ils peuvent te voir.

- C’est tout ?

- Non, ce n’est pas tout. A partir de demain, je veux que tu t’habilles pour le rôle. Plus de jeans et de gros pulls. Une jupe, peut-être des bottes, un haut simple. Transforme-toi en cette fille, et rends-toi désirable à ceux qui doivent te désirer. Je sais que tu es impliquée dans cette stupide compétition dans les journaux. Tu dois gagner l’amour de plusieurs milliers de personnes qui ne te connaissent pas. A partir de demain, tu dois gagner l’amour de ceux d’entre nous, ici, qui te connaissent.

Une étrange sensation prit forme au fond de son ventre, une nécessité d’accomplir ce travail. Elle comprit ce qu’il voulait dire, même si une partie de son intellect se révoltait contre l’idée. A la télévision, elle avait gagné les cœurs de millions de personnes – mais c’était le scénario qui l’avait fait surmonter les difficultés et les problèmes et qui lui avait permis ensuite de survivre. Elle devait uniquement se révéler. Pedro lui demandait de gagner ce même amour, de s’investir dans le rôle – une chose qu’on lui avait jamais demandé de faire. Des idées se mirent à bourdonner dans sa tête. Elle sentit un sourire sur ses lèvres qu’elle savait avoir été déclenché par défi.

L’après-midi était consacrée essentiellement à Linda, une femme que Mai avait vu à la télévision pendant plusieurs années et qui avait également eu une longue carrière. Mai observait comment elle écoutait les autres personnages – son fils, le jeune homme qu’elle voulait pour son amoureux, ceux qui dépendaient d’elle pour vivre. Elle étudiait la façon dont elle se tenait immobile et laissait sa voix faire le travail. Elle savait que plus tard dans l’acte, le personnage deviendra émotif, désemparé et voulait voir comme Linda gérerait les directions physiques de la scène – se jeter aux pieds de son amoureux par désespoir. Ensuite révéler au public que tout n’était que de la comédie pour le reconquérir.

Elle remarqua que les autres acteurs observaient également attentivement. Elle avait un charisme et une force adaptés à son rôle. Regarde et apprends, se dit Mai. Et exerces la voix. Les yeux et la voix et puis le minimum de gestes pour obtenir un impact maximal.

Eric avait choisi un bar sur la rive sud (South Bank) qui avait une vue magnifique sur Tower Bridge, illuminé tel une carte postale gigantesque de néon dans la nuit.

Il avait échangé sa veste de sport beige contre un costume chic et il mangeait des cacahuètes.

- Tu réalises que cela te donnera la mauvaise haleine ? dit-elle se glissant sur le banc à côté de lui.

- Tu réalises ça fait combien de temps que je t’attends ? Dix-huit heures, tu avais dit.

- Un imprévu. On appelle ça le travail.

- Je t’ai pris un spritzer au vin blanc, dit-il en faisant un geste vers un verre contenant un liquide jaune.

- Vin blanc ? On dirait du jus de banane.

Il ignora sa plainte :

- Il s’agit donc du sondage Deannah, comme ils ont sûrement commencé à l’appeler. Ça aura une marque et un logo la semaine prochaine. Qu’est-ce qui se passe ?

- Personne des journaux ne m’a encore parlé. Est-ce que tu me gardes en isolement ou quoi ? Je dois sortir et parler aux gens, non ? Helena Cross était partout à la télé, ce matin. Que dois-je faire pour me rendre visible ?

Eric la regarda à travers ses yeux recouverts, comme si l’absurdité de sa conversation l’avait plongée dans de nouvelles profondeurs. Il tendit le bras à côté de lui et souleva une copie de Daily Paper, qu’il jeta sur la table.

- As-tu au moins vu ça ? Celui d’aujourd’hui.

Mai feuilleta jusqu’à la section showbiz. Une double page montrait son profil sur la page de gauche à regarder Helena Cross sur la droite, qui avait l’air de la fixer. Les photos avaient été extrêmement retouchées pour retirer les arrière-plans respectifs et des sourcils froncés mis sur chacune d’elles.

- Tu y es déjà, dit Eric, à jouer les grands bras, semble-t-il. Entre parenthèses, qu’est-ce que c’est cette histoire de toi et Alfie ? C’est vrai ?

- Il se passe quelque chose, dit-elle. J’essaie toujours de déterminer exactement quoi. D’où ont-ils eu cette photo ? J’ai l’air d’une femme des cavernes avec ces faux sourcils. Que dois-je dire à l’interview ?

- Que tu es très ravie, que tu souhaites bonne chance à tout le monde et que la meilleure gagne. Ils ont trouvé quelque chose sur toi et Helena, que vous vous êtes toutes deux présentées pour le même rôle dans Amberside. On dit qu’elle souffre toujours de l’injustice du casting pour ce boulot. Celui-ci sera différent, ce sera le grand public britannique qui votera etc…

- Suis-je bien acceptée ?

- Il y a beaucoup de choses que je peux faire avec les matériaux que tu me donnes, dit-il. Peut-être que tu devrais reprendre avec le jeune Ringo Starr et jouer aux amoureux. Tu verras, ce sera le prochain pas d’Helena. Une édition spéciale de Hello!, où elle exhibe sa belle maison et le nouvel homme dans sa vie. Quelque chose également dans les mags pour filles. Est-ce que Jackie marche toujours ?

Mai ferma les yeux.

- Peut-on se montrer prudents pour une fois ?

- Quoi – une interview au Financial Times ?

- Je ne sais pas… quelque chose d’un peu plus important pourrait récolter les votes des adultes. J’ai encore beaucoup trop d’adolescents à cause d’Amberside.

- S’ils se souviennent de toi.

- Admettons. Mais je veux élargir l’attrait. Ça aiderait également le journal, si la compétition est un peu plus… quel est le mot ?

- Sérieuse.

- Sérieuse. C’est ça. Ils ont ces choses dans les magazines du week-end – Dix Choses que je connais, Quinze que j’ai apprises.

- Une demi-douzaine serait, je pense, une bonne idée pour faire de la promo. Je comprends ce que tu veux dire. J’ai un cafteur à Indy. Je vais voir si je peux arriver à quelque chose.

- Tu vois ! Tu peux même dire que c’était ton idée.

- Pendant ce temps-là, ta-da, j’ai quelque chose de prévue pour demain. Une de ces mags de télé.

Mai soupira.

- Je déteste ça. Je ne peux pas être occupée ? Indisposée ?

- Pas si tu veux gagner. Le grand public est fasciné par les ragots. Tu auras une photo en première page.

- Ah, super ! A quelle heure demain ?

- Appelle-moi quand tu seras libre. Ils sont flexibles.

- Bien sûr qu’ils le sont. Tu ne sais pas que je suis une grande star ?

Le bar commençait à se remplir et Eric, devenu agité, finit son verre.

- Autre chose ? J’ai une vie privée, tu sais ?

Mai tendit sa main pour toucher le col de son costume.

- Alcooliques anonymes ? Apéritif au Ritz ?

- Mon premier soir de Stephen à Donmar. Je vois sa mère là-bas. La première fois qu’on parle depuis environ deux ans. Il y a fallut de putain Samuel Beckett pour qu’on se reparle. N’est-ce pas ironique ?

- Je ne dis rien.

- Exactement.

Elle le sentit avant d’arriver à la porte. Quelque chose de consistant avec une prépondérance orientale. Elle eut un flash proustien – étant enfant, avant que papa Rose ne meure, une espèce de nappe sur la table de la cuisine, des récipients en étain, de la sauce à orange visqueuse. Elle devait avoir cinq ans et son père avait invité une personne à la maison sans le dire à Geraldine. C’était donc un prêt-à-emporter chinois, le premier que Mai avait jamais vu – ou sentit. Les hommes s’était assis dans la salle de devant à la chaleur de la cheminée, les bûches craquelant, Geraldine servant la substance visqueuse dans les assiettes, les yeux fléchés, la bouche retroussée, une mauvaise ambiance dans la maison.

C’était du passé. Elle ne savait pas qui était l’homme et ne l’avait jamais revu depuis pour autant qu’elle le sache.

A l’intérieur, l’odeur s’était déterminée. Elle entra dans la cuisine en déroulant son écharpe, poussant les chiens de ses genoux.

- Je devine du bœuf et quelque chose comme de l’anis.

- Tu ne discutes pas avec Jamie ou Heston, dit Billie. Ils viennent et font sauter la maison. Ensuite ils étaleront une grande quantité d’huile d’olive partout. T’as faim ?

- Et tentée maintenant. Tape là.

Elle se changea et se lava le visage. Puis revint à sa garde-robe et se demanda ce qui lui ferait plaisir à Pedro demain. Elle avait une jupe qui, avec un peu d’imagination, pourrait être décrite comme vaguement paysanne. Mais le haut qui serait le plus approprié était celui que les gens de Stella McCartney lui avaient offert. Il avait des manches courtes avec un motif à fleurs jaunes sur un fond blanc, avec un col blanc. Si les paysans aimaient les fleurs, c’était paysan.

Billie prépara la table rarement utilisée, qui était disposée au bout du coin repas du salon. Le volume de la télévision était baissé, ils passaient des groupes de gens en pardessus qui étaient en confrontation. Probablement un documentaire sur les relations industrielles – la phrase que sa mère utilisait pour décrire tout type de programme de non-fiction qui n’avait aucun lien direct avec l’art.

Billie apporta deux assiettes fumantes de ragoût de bœuf. Mai repéra les légumes et la sauce.

- J’ai fait des courses, dit Billie. J’ai mis le reçu dans la cuisine. Une queue de dingue à Sainsbury’s ce matin.

Mai pensa qu’elle était nerveuse. C’était la première fois que Billie avait réellement cuisiné pour eux deux et c’était comme si une frontière avait été franchie. Elle avait l’étrange impression qu’elle avait été capturée au lasso et qu’elle fut attirée vers une chose, mais elle ne savait pas quoi. Vie de famille ? Relation amicale ?

Le bœuf fondait dans la bouche et était agréablement épicé, l’anis étoilé ajoutant un effet oriental. Elle prit la dernière tranche de pain du panier et essuya son assiette avec.

- Dis à Jamie que j’ai aimé.

- C’était bon ? Pas trop salé ?

- C’était délicieux.

Un bruit venant de la chambre.

- Ton téléphone.

Mai fait un signe d’agacée et dit :

- Ils laisseront un message.

Elle avait fait un somme sur le canapé pendant que Billie faisait la vaisselle – elle avait insisté. L’odeur du bœuf persistait encore. Mai vit le visage de sa mère dans sa tête, belle, cheveux noirs, sourcils arqués et de petites fossettes au milieu du menton. Toujours un soupçon de rose sur ses joues qui n’était jamais artificiel, seulement son teint de peau. Comment c’était vraiment entre ses parents ? Sa mère était souvent absente au travail et il y avait une nounou – une fille des Philippines qui leur préparaient d’étranges plats orientaux, pour elle et Jake. Le fish and chips était devenu aussi féérique pour eux que les calamars pour les copains d’école. Il y avait toujours des sauces qui bouillaient sur la cuisinière.

Son père était souvent à la maison avec eux. Elle n’avait aucun souvenir de lui, mise à part les photos de famille, mais elle devinait qu’il était physiquement fort, un homme dynamique, une personne qui pouvait piéger une jeune actrice. Il était énergique – il les emmenait au cinéma sur un coup de tête, ou au parc à thème quelque part. Jake courait vers les machines tourbillonnantes et les manèges dangereux, pendant qu’elle tenait fermement la main de Papa Rose et regardait Jake se jeter comme un personnage de dessin animé. Pas étonnant qu’il ait fini dans l’armée.

Et puis Papa Rose était parti.

Geraldine en deuil. Beaucoup de gens dans la maison. Elle et Jake lui avait demandé de rester tranquille, mais les adultes étaient gentils avec elle. Elle ne souvenait pas être allée à l’église, mais il y avait des photos d’elle, Jake et Geraldine parmi des groupes en deuil, défilant à travers une porte gothique. La presse – toujours là, toujours après vous, toujours à chercher à prendre des prises impertinentes sordides. Elle ne savait pas pourquoi Geraldine avait gardé les coupures, mais elles étaient soigneusement classées dans des albums, comme si la mort de son mari n’était qu’une étape dans sa carrière…

Le temps passé sous les projecteurs avait sûrement un impact sur vos priorités, pensa-t-elle.

Son téléphone sonna à nouveau dans la chambre. Lorsqu’il s’arrêta, elle se leva et alla vérifier les messages.

Alfie : C’est encore moi. S’il-te-plait appelle-moi. J’ai tellement de merde des gars, toute cette publicité.

Oui, il ne pensait qu’à lui.

Elle et Billie étaient maintenant tel un vieux couple marié, étendues sur le canapé à regarder les infos du soir. Paxman anéantissant un politicien en défendant la réduction de l’aide de santé. Elle regardait uniquement parce que sa mère refusait la politique à la maison. Regarder les infos de toute sorte était une sorte de rébellion.

Les gros titres résumés, un éventail de journaux sur la table devant lui. Des disputes à la Chambre sur les réductions. Une victoire sportive en Inde. Et juste un peu d’humour, Helena Cross est actuellement en tête de la compétition de Daily Paper. Puis Ginny Blake. Mai Rose est finalement apparue, mais bien loin après Miss Cross… Bonne nuit.

- Ça fait plaisir. Merci, Paxo.

Billie bâilla :

- T’as parlé à Eric ? Qu’est-ce qui se passe ?

Mai se leva et s’étira. Elle ne voulait vraiment pas parler de tout ça. C’était puéril.

- Il est sur l’affaire. Un Rottweiler. En peau de mouton.

- Ça va commencer, tu verras.

- Pourquoi es-tu toujours aussi positive, même avec la plus petite des preuves ?

- En général parce que les alternatives sont trop tragiques à supporter.

Elle se leva et enlaça Mai d’une façon étrange :

- A sept heures, ici, demain.

- Tu pourrais aussi bien déménager à ce rythme-là.

Billie lui lança un regard étrange, puis alla chercher son manteau.

Dans la chambre, il y avait un texto d’Eric : Interview demain. Appelle pour convenir de l’heure. Doigts croisés. Tarragon.

Elle ressortit ses vêtements paysans et les prépara pour le lendemain matin. Et elle prépara une explication pour la journaliste sans doute hyper hip-hop de Daily Paper, qui s’attendrait à rencontrer une actrice portant la dernière création de mode. Mai devra probablement la convaincre que le chemisier était de Jonathan Anderson, même s’il n’était pas assez large.

Elle savait d’avance que ça se passerait mal.

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Litres'teki yayın tarihi:
09 nisan 2019
Hacim:
341 s. 2 illüstrasyon
ISBN:
9788873042112
Tercüman:
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