Kitabı oku: «Un Trône pour des Sœurs », sayfa 13
“C'est une chose nécessaire”, dit Sebastian. “Ce qui est encore plus important, c'est que je n'ai pas vraiment le choix. Mère a décidé qu'il fallait que j'aie plus l'air d'un vrai prince.”
Sophia aurait ri à cette idée si la situation n'avait pas été aussi grave. Sebastian allait partir à la guerre, où il n'aurait aucune garantie d'être en sécurité, où tout pourrait arriver.
“Que tu ressembles plus à Rupert, c'est ça ? Tu peux me faire confiance : par rapport à lui, par rapport à n'importe qui d'autre, le prince parfait, c'est toi.”
“Je voudrais que ce soit toi qui prenne cette décision”, dit Sebastian. “Si c'était le cas, je pourrais rester ici avec toi. Malheureusement, ma mère dit qu'il faut que je ressemble à un prince pour l'Assemblée des Nobles. C'est pour cela qu'on m'a donné un commandement. Je suis censé être officier dans la cavalerie de la maison royale.”
“Censé être aussi fringant que possible ?” demanda Sophia mais, alors même qu'elle posait la question, elle sentit le découragement l'envahir.
Pire encore, elle se surprit à soupçonner la douairière. Il y avait des guerres sur le continent depuis toujours et c'était seulement maintenant que la mère de Sebastian l'envoyait y prendre part ? Était-ce vraiment que la violence s'était accrue ou la douairière cherchait-elle juste un moyen de séparer son fils de la fille qu'il venait de rencontrer ? Sophia savait que la mère de Sebastian ne lui faisait pas confiance.
Ou peut-être était-ce Rupert qui l'avait fait. Peut-être le frère aîné avait-il murmuré les paroles adéquates dans les oreilles de sa mère, lui avait-il suggéré de faire un homme de Sebastian ou lui avait-il fait croire qu'il fallait que le peuple entende dire que Sebastian se débrouillait bien à la guerre. Quand ils avaient été ensemble, Sophia avait vu sa jalousie. Elle avait également vu ce qu'il voulait d'elle. Était-ce juste un moyen de l'isoler ?
Sophia ne voulait pas réfléchir plus longtemps à ce que cela pouvait signifier. Il y avait le risque que courait Sebastian, le danger qui allait avec la guerre … mais il y avait aussi le problème plus pragmatique de son absence. Dans le meilleur des cas, on la laisserait vivre au palais pendant qu'elle l'attendrait. Dans le pire des cas, on pourrait lui demander de partir dès le moment où sa protection aurait disparu. On pourrait la mettre à l'écart d'une façon qui serait une petite insulte pour une vraie noble mais qui serait catastrophique pour elle.
“Ne crains rien, Sophia”, dit Sebastian. “Je suis sûr que je ne courrai aucun danger, et je ne permettrai pas non plus qu'il t'arrive quelque chose. C’est en partie pour cette raison que j'ai fait tout ça. Je veux être sûr de mon fait.”
Sophia fronça légèrement les sourcils. “Sûr de quoi ?”
“Que tu diras oui.”
Le cœur de Sophia se mit à battre plus vite quand Sebastian se leva et retourna là où leur bateau était amarré. Il avait quelque chose dans la main et, quand Sophia y vit une boîte à bijoux, elle osa à peine respirer. Elle pouvait imaginer au moins une chose que Sebastian pouvait faire et qui expliquerait en grande partie ce qui se passait aujourd'hui, une chose qui expliquerait tout aussi bien pourquoi Angelica avait eu l'air furieuse au palais.
Quand Sebastian se mit sur un genou, Sophia se leva, surprise, mais cela aida simplement Sebastian à lui prendre la main plus facilement et à la tenir pendant qu'il ouvrait la boîte qu'il tenait.
A l'intérieur, la bague était en or blanc brillant, avec des diamants qui avaient dû être importés de l'autre côté du monde et des saphirs violet profond qui étaient presque aussi rares. L'anneau était fabriqué à partir de fils qui s'entrelaçaient et qui étaient tressés pour former quelque chose de délicat et d'élégant. C'était le genre de bague qu'un maître joaillier avait dû passer des jours à confectionner et elle avait un air ancien qui suggérait qu'elle avait probablement été léguée par les ancêtres de la famille royale longtemps avant les guerres civiles.
“Sophia”, dit Sebastian. “Je voulais prendre mon temps avant de me décider mais, en vérité, je sais déjà ce que je veux vivre avec toi et je … je veux le faire avant de devoir partir. Je veux que tu sois mon épouse.”
“Tu me demandes de t'épouser ?” demanda Sophia.
Sebastian hocha la tête.
Il n'y avait qu'une réponse possible et elle éliminait toutes les objections auxquelles Sophia aurait pu penser, toutes les inquiétudes qu'elle aurait pu avoir sur la façon dont les autres gens allaient peut-être réagir. Elle serra fermement Sebastian dans ses bras et l'embrassa.
“Oui, Sebastian ! Oui, je veux t'épouser.”
CHAPITRE VINGT-ET-UN
Le lendemain, Kate se fit presque mal à la main par trois fois tellement elle était distraite. Elle ne cessait de regarder l'endroit où son cheval volé était attaché, en train de brouter joyeusement de l'herbe et de l'avoine. La première fois que cela se produisit, Thomas rit et lui dit de faire attention. La deuxième fois, il fronça les sourcils.
Cette fois-ci, il s'arrêta de forger une paire de fers à cheval et laissa les flammes se réduire à une lueur orange.
“Non, ne t'arrête pas à cause de moi”, dit Kate. “Si tu t'arrêtes de travailler le métal, il va —”
“Je sais ce que ça fera”, dit Thomas, “mais je préférerais que mes fers à cheval soient gâchés que te voir te briser toutes les jointures en maniant un marteau à l'aveuglette.”
Kate ne voulait pas non plus se faire mal mais elle acceptait de prendre le risque pour ne pas laisser tomber le forgeron. Elle n'allait pas gâcher le travail de Thomas juste parce qu'elle était occupée à rêver de fontaines qui pouvaient faire d'elle une bretteuse expérimentée.
“Qu'est-ce qu'il y a ?” dit Thomas. “Est-ce que c'est Will qui te distrait ?” Il alla à la fenêtre. “Le cheval ? Penses-tu à nous quitter, Kate ?”
Il le disait avec une pointe de déception et Kate le comprenait. Thomas lui avait beaucoup donné et, maintenant, elle ne faisait pas attention au travail qu'il lui confiait.
“Ce n'est pas ça”, dit Kate. “C'est juste … tu as entendu dire ce qui s'est passé au terrain d'entraînement ?”
Elle vit Thomas hocher la tête et devina que Will lui avait tout raconté, ou alors, un des soldats en avait parlé en venant faire aplanir une grève ou un casque.
“Il y a un endroit où je pourrais apprendre à me battre”, dit-elle.
“Tu t'en irais définitivement ?” demanda Thomas.
“Je reviendrais”, insista Kate. “Je veux continuer à vivre ici.”
Elle était étonnée de se rendre compte que c'était vrai. C'était la première fois qu'elle avait une vraie maison, la première fois qu'elle avait des gens qui semblaient tenir à elle. Même Winifred semblait l'apprécier, à sa façon; c'était juste qu'elle s'inquiétait profondément pour le bien-être de son fils et de son époux. C'était le premier endroit où Kate avait l'impression qu'elle faisait quelque chose d'utile.
Et puis, il y avait Will. Kate n'était pas sûre de ce qu'elle ressentait pour Will, pas encore. Elle n'avait jamais eu l'occasion de rencontrer des garçons qui ne soient pas des brutes menaçantes et, ici et maintenant, il y en avait un et elle l'appréciait. Elle l'appréciait beaucoup.
“Dans ce cas, on dirait que tu devrais partir”, dit Thomas, “avant que ta distraction ne te pousse à te blesser.”
“Mais —” commença Kate. Elle avait au moins prévu de finir le travail du jour.
Thomas secoua la tête. “Je pourrai faire sans apprentie un autre jour, ou deux s'il le faut. Vas-y. J'essaierai de sauver ces fers à cheval.”
Kate n'eut pas besoin de seconde invitation. Elle se précipita vers le cheval qu'elle avait volé, chercha et trouva la sellerie puis commença à la fixer. Alors qu'elle avait à moitié fini, elle vit Will sortir de la maison.
“Kate ? Tu ne t'en vas pas, hein ?”
Il avait l'air d'avoir peur qu'elle parte, peut-être qu'elle ait envie de partir après ce qui s'était passé avec son régiment.
“Je ne pars que pour quelque temps”, dit Kate, qui sourit alors en constatant que c'était le genre de chose qu'un garçon pourrait dire en partant faire la guerre. “C'est juste que … il y a des choses qu'il faut que je fasse. Il faut que je devienne plus forte.”
“Pourquoi ?” demanda Will. “Tu es en sécurité, ici. Je pourrais te protéger.”
Kate secoua la tête. Ce n'était pas assez. Elle ne voulait pas se contenter d'être en sécurité quand Will était là pour la protéger. Elle ne voulait pas devoir dépendre de quelqu'un d'autre pour rester en sécurité, même de lui. Elle voulait être forte toute seule et, maintenant, il y avait un moyen d'y arriver.
“Je pourrais venir avec toi”, suggéra Will.
“Je pense qu'il faut que je le fasse seule”, dit Kate, parce que, si elle en avait dit plus, elle aurait dû expliquer exactement ce qu'elle prévoyait. Même après tout ce que Geoffrey avait dit, elle avait quand même du mal à croire qu'il existe une fontaine magique qui puisse la rendre invincible. Si elle essayait de l'expliquer à Will, ce serait encore pire.
“Essaie au moins de rester prudente”, dit Will en s'approchant d'elle, tellement près que, l'espace d'un instant, Kate pensa qu'il allait l'embrasser. Cependant, il n'en fit rien et Kate s'en sentit un peu déçue.
Peut-être le ferait-il quand elle reviendrait.
“Je le ferai”, dit Kate, “et je reviendrai bientôt, tu verras.”
Elle reviendrait. Avec la force qu'elle obtiendrait grâce à la fontaine, elle pourrait faire toutes les choses qu'elle avait toujours voulu faire.
***
La chevauchée jusqu'à la forêt prit plus longtemps que Kate ne s'y était attendue. Son cheval était fort et rapide mais Kate n'était pas assez bonne cavalière pour lui faire prendre la direction du sud à plein galop. Au lieu de ça, elle chevaucha à une allure soutenue. Elle resta d'abord sur les larges routes pavées puis tourna dans les chemins de terre quand les arbres firent leur apparition.
Elle essaya de se souvenir de la carte du livre. L'endroit qui avait été indiqué dessus avait été précis mais elle n'avait pas vu la carte bien longtemps. Il y avait eu des panneaux d'indication et un escalier. Kate espérait juste qu'ils seraient faciles à trouver.
Ils le furent. Elle trouva le premier avant d'atteindre la forêt. C'était un bloc de pierre dont les indications avaient presque été effacées par le passage du temps et par la pluie. Avec ses doigts, Kate reconnut un dessin qui aurait pu être une fontaine ou la gueule d'une grande bête. Il y avait une flèche de taillée dans la pierre et elle désignait une piste plus petite, que Kate suivit.
Peu à peu, le feuillage se mit à encercler Kate puis se rapprocha tellement qu'elle dut finalement descendre de cheval et le mener en lui tenant la bride. Elle ne voulait pas le laisser mais la piste devenait si étroite que, si les choses continuaient comme ça, elle devrait peut-être s'y résoudre bientôt.
Elle aperçut par hasard un morceau de pierre sculptée à côté de la piste et il formait un tel contraste avec les branches emmêlées qui la freinaient qu'elle s'arrêta et le regarda de plus près. Elle écarta un amas de lierre du pied et vit que, au-dessous, il y avait un bloc de pierre qui formait une marche. Une autre se tenait au-dessus puis encore une autre, formant un escalier de pierre que le temps et la mousse avaient presque englouti.
Alors, Kate attacha son cheval, prit un couteau dans ses sacoches de selle et l'épée en bois qu'elle avait fabriquée pour s'entraîner à la conception d'épées. Elle utilisa l'épée en bois pour éclaircir un peu du feuillage entremêlé qui se trouvait devant elle. Quand il lui fallait du tranchant, elle coupait avec le couteau.
A force de taillader, elle trouva d'autres pierres qui formaient un autre panneau indicateur qui, lui, était presque aussi grand qu'elle. Il portait des symboles gravés qui formaient les lignes et les courbes d'une langue inconnue dans le royaume. Il y avait aussi quelque chose d'autre : l'image d'une fontaine.
Quand elle la vit, Kate en eut le souffle coupé et se dépêcha de monter le reste des marches en osant espérer que cette histoire soit vraie. Elle avait été sûre que ce n'était qu'une histoire, puis qu'elle n'arriverait jamais à retrouver la fontaine même si elle existait vraiment. Maintenant, on aurait dit qu'elle n'était peut-être plus très loin.
Kate glissa et trébucha en montant l'escalier en pierre. La mousse cédait sous ses pieds et les ronces qui avaient l'air solides quand elle les saisissait se rompaient. Elle finit par s'appuyer sur son épée d'entraînement comme si cela avait été une canne, s'en servant pour tester le sol devant elle alors qu'elle montait l'escalier croulant comme elle le pouvait. Chaque marche avait l'air conçue pour la défier pendant son avancée.
“J'espère que la fontaine en vaut la peine”, dit Kate en grimpant.
Le haut n'était pas loin mais l'escalade fut si difficile qu'il lui fallut de longues minutes pour l'atteindre. Quand elle arriva en haut, il y avait un autre court sentier entre d'autres arbres encore plus denses qui semblaient bloquer la lumière et transformer le monde en quelque chose d'étrange et d'inconnu. Leurs branches s'emmêlaient pour former une sorte de voûte de feuilles et Kate y entra et se retrouva dans un espace ouvert de l'autre côté.
A cet endroit, il n'y avait pas d'arbres, juste d'autres vieilles pierres qui ressemblaient à celles qu'elle avait escaladées pour arriver jusqu'ici. L'endroit abritait les ruines de quelque chose qui avait l'air beaucoup plus ancien, avec des fragments de mur qui dépassaient du sol comme des dents et des colonnes brisées qui ressemblaient à des doigts qui traversaient l'herbe comme pour attraper quelque chose. Toutes ces ruines étaient les restes délabrés d'une époque lointaine située avant les guerres civiles, peut-être même avant le royaume.
La fontaine se dressait au cœur des ruines et, dès que Kate la vit, elle fut déçue.
A une autre époque, elle avait peut-être été impressionnante. Elle était large et sombre, taillée dans une pierre locale avec tant de finesse qu'elle semblait être un prolongement naturel du paysage plutôt qu'un bâtiment fabriqué par la main de l'homme. Elle avait la forme d'un grand coquillage qui se retroussait en dévoilant une statue au centre. La statue avait dû représenter une femme mais, maintenant, elle était tellement recouverte de mousse que c'était difficile à dire.
La fontaine ne coulait plus.
Ce fait, plus que tout le reste, indiqua à Kate qu'elle s'était déplacée pour rien. Des pierres croulantes, ce n'était guère prometteur mais, finalement, cela ne signifiait rien. Cela dit, elle était venue chercher une fontaine. Elle avait supposé que son eau aurait quelque chose de spécial, quelque chose de magique. Maintenant qu'il n'y avait pas d'eau, elle avait l'impression qu'elle s'était laissée emporter par ce que Geoffrey lui avait dit. Ça avait l'air stupide de passer son temps ici plutôt qu'à la forge à fabriquer l'épée qui, actuellement, n'était qu'en bois.
Kate s'assit contre la fontaine et ferma les yeux pour ne pas pleurer. Elle avait été vraiment bête de venir ici, bête de s'imaginer qu'elle pourrait être aussi forte que les garçons du régiment de Will. Cela avait été un rêve creux.
“Pourquoi une fontaine rendrait-elle les gens forts ?” demanda Kate à la forêt qui s'étendait autour d'elle.
“Les fontaines ne peuvent pas le faire”, dit la voix d'une femme, “mais si les gens cherchent une fontaine, je peux les trouver plus facilement.”
Kate ouvrit brusquement les yeux et se leva, tendant son épée d'entraînement en bois devant elle. Une femme se tenait à côté. Elle portait une robe à capuche d'un vert forêt profond. Elle avait des cheveux foncés qui semblaient être entremêlés de lierre et des yeux d'un vert feuille qui semblaient être le même que celui des plantes qui l'entouraient. Elle était plus âgée que Kate, avait peut-être trente ans mais quelque chose dans son apparence suggérait qu'elle était peut-être encore plus âgée.
“On m'a déjà menacée avec beaucoup de choses !” dit la femme, qui écarta doucement l'épée d'entraînement de Kate et ajouta : “Mais jamais avec un bâton.”
“Je —” Kate baissa son arme. “Je suis désolée, vous m'avez fait peur.”
“Mais tu es venue ici”, dit-elle. “Tu es venue chercher de l'aide, ou alors, tu ne serais pas ici.”
“Je ne m'attendais pas …” commença Kate, qui se rendit alors compte qu'elle devait avoir l'air idiote. “Qui êtes-vous donc ?”
Instinctivement, Kate tenta de lire dans les pensées de l'autre femme mais elle n'y trouva qu'une chose qui paraissait aussi solide qu'un mur. Quand elle essaya de traverser cet obstacle, elle glissa dessus puis regarda fixement l'autre femme, sous le choc.
“Avec un talent comme le tien, on ne peut pas me lire aussi facilement”, répondit-elle, même si elle n'avait pas l'air fâchée par la tentative d'intrusion. Elle en avait presque l'air heureuse et Kate ne s'était pas attendue à cette réaction. “Et maintenant, tu te demandes si nous sommes semblables. Nous ne le sommes pas, ma fille. Mes pouvoirs sont une version beaucoup plus sombre et beaucoup plus tordue des tiens. Tu devrais éviter d'essayer d'y regarder trop profondément.”
Kate eut soudain un bref aperçu de l'esprit de cette femme, comme si elle le lui avait envoyé par télépathie, et elle leva involontairement les mains à ses oreilles et hurla. C'était si sombre, si affreux, une succession floue d'images horribles qui se mouvaient toutes trop vite pour qu'on puisse les distinguer mais qui laissaient une impression d'horreur incroyable.
Finalement, les images s'arrêtèrent.
Kate enleva les mains de ses oreilles, respirant avec difficulté, les yeux fixes et écarquillés. Jamais dans sa vie quelqu'un ne lui avait envahi l'esprit comme ça. Elle avait toujours supposé qu'elle était inattaquable, qu'aucun autre esprit n'était plus puissant que le sien.
Elle regarda cette femme (si c'en était bien une) de la tête aux pieds avec une nouvelle peur et un nouveau respect. Peut-être n'aurait-elle pas dû venir ici, après tout.
La femme lui répondit avec un sourire laid et invasif.
“Qui êtes-vous ?” redemanda Kate.
La femme resta silencieuse longtemps puis, finalement, elle parla.
“Certains m'appellent Siobhan”, dit-elle, “mais les noms ne sont que des étiquettes pour les faibles. Tu es venue ici pour une raison précise. Demande ce que tu veux et je te dirai le prix.”
Kate cligna des yeux.
“Je ne comprends pas”, dit Kate.
La femme fronça les sourcils et Kate devina qu'elle n'avait pas aimé sa réponse.
“Ne me fais pas perdre mon temps, ma fille. Tu es venue ici pour une raison précise. Tu cherchais quelque chose. Qu'est-ce que c'était ?”
Kate déglutit mais refusa de se laisser intimider le ton de Siobhan. Elle voulait être forte.
“Je veux pouvoir me battre”, dit-elle. “Je veux avoir assez de pouvoir pour ne plus jamais être à la merci de quiconque.”
L'autre femme resta silencieuse pendant quelques secondes. Kate sentait son cœur lui battre dans la poitrine. Que ferait-elle quand l'autre femme dirait non ? Que ferait-elle quand Siobhan lui dirait que c'était impossible et que Kate lui faisait perdre son temps ?
“Tu as un talent et je pourrais t'apprendre à le renforcer. Je pourrais t'apprendre à te battre de plusieurs façons qui n'ont rien à voir avec la force brute des hommes. Je pourrais t'apprendre à maîtriser des pouvoirs qui dépassent tout ce que tu as jamais vu.”
Elle présentait la chose si simplement alors que, toute sa vie, on avait dit à Kate qu'il y avait des choses trop mauvaises pour qu'on puisse même en parler. Ce n'était pas pour rien que Kate et Sophia avaient caché ce qu'elles savaient faire.
“Tu ne serais plus obligée d'avoir peur de ce que tu es”, dit Siobhan. “Tu pourrais être forte. Tu pourrais être libre. Moi et les miens, on peut aider les gens comme toi, si tu l'acceptes.”
Une partie de Kate voulait dire oui mais elle restait méfiante. Les gens étaient rarement aussi désintéressés.
“Et que demanderais-tu en échange ?” demanda Kate.
Siobhan eut l'air contente. “En échange, je demanderais deux choses.”
“Deux choses ?” répliqua Kate.
“Tu me demandes beaucoup”, répondit la femme. “Deux choses, ça ne me semble pas déraisonnable.”
Elle le disait d'un ton badin comme si tout cela n'était qu'un jeu. Le rire qui suivit avait presque l'air inhumain, comme si c'était la forêt elle-même qui riait.
“Quelles choses ?” demanda Kate en dépit de ses doutes.
“Tu devras devenir mon apprentie et apprendre tout ce que je voudrai t'apprendre.”
Cela n'avait pas l'air si différent de l'accord qu'elle avait passé avec Thomas. De beaucoup de façons, cela n'avait pas l'air si différent du meilleur genre d'arrangement qu'elle aurait pu obtenir avec son contrat synallagmatique.
“Et la deuxième chose ?” demanda Kate.
L'autre femme entra dans la fontaine et, l'espace d'un instant, miroita. Kate vit une image de la fontaine brillante et neuve, pleine d'eau. La statue qui se dressait au-dessus brillait elle aussi et ressemblait beaucoup trop à Siobhan la sorcière au goût de Kate.
Il y eut un silence prolongé, puis la sorcière répondit :
“Une faveur.”
Kate pencha la tête de côté. “Quelle faveur ?”
Siobhan fit résonner son rire inquiétant une fois de plus. Elle semblait beaucoup trop apprécier la situation. “Je n'ai pas décidé mais il faudrait que tu me l'accordes quelle qu'elle soit.”
C'était beaucoup demander et Kate n'était pas sûre de pouvoir l'accepter.
Elle secoua la tête. C'était trop. C'était beaucoup trop. Elle sentait les ténèbres de cette femme et que, quelle que soit la faveur, elle serait horrible. Ce serait comme vendre son âme.
Elle recula de la fontaine, pas à pas.
“Non”, dit-elle, étonnée de s'entendre dire ces mots, étonnée de s'entendre rejeter la seule chose qu'elle ait jamais voulue.
La seule réponse de la femme fut un sourire dérangeant, comme si elle savait que Kate n'avait pas le choix.
Kate recula et, dès qu'elle atteignit les marches, elle courut en trébuchant. Le rire dément de Siobhan la suivit.
“Quand tu changeras d'avis, je serai là.”