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Kitabı oku: «Henri V», sayfa 3

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SCÈNE III

Londres. – La maison de l'hôtesse Quickly, dans East-Cheap
Entrent PISTOL, NYM, BARDOLPH, LE PAGE DE FALSTAFF ET L'HÔTESSE QUICKLY

L'HÔTESSE, à Pistol. – Je t'en prie, mon coeur, mon cher petit mari, souffre que je te ramène à Staines.

PISTOL. – Non, mon grand coeur est tout navré. Allons, Bardolph, réveille ton humeur joviale; Nym, ranime tes bravades et ta verve; et toi, petit drôle, arme ton courage, car Falstaff est mort: il nous faut témoigner nos regrets.

BARDOLPH. – Je voudrais être avec lui quelque part, soit au ciel ou en enfer.

L'HÔTESSE. – Oh! certainement il n'est pas en enfer: il est dans le sein d'Arthur, si jamais homme y fut. Il a fait la plus belle fin; il a passé comme un enfant dans sa robe baptismale! Il était entre midi et une heure, quand il a passé: oui, précisément à la descente de la marée 12; quand une fois j'ai vu qu'il commençait à chiffonner ses draps, à jouer avec des fleurs 13, et à rire en regardant le bout de ses doigts, j'ai bien vu qu'il n'y avait plus pour lui qu'un chemin à prendre; car il avait le nez aussi pointu que le bec d'une plume, et il parlait des champs verdoyants. – «Comment donc, sir John, lui dis-je? Qu'est-ce donc, cher homme? allons, prenez courage.» Mais il se mit à crier: Mon Dieu! mon Dieu! mon Dieu? trois ou quatre fois; et pour le réconforter, je lui dis qu'il ne devait pas penser à Dieu, que je ne croyais pas qu'il fût encore nécessaire de s'embarrasser la tête de ces pensées-là; mais il me dit pour toute réponse de lui couvrir davantage les pieds. Je mis ma main dans le lit pour les tâter, et ils étaient froids comme marbre. Je lui tâtai les genoux, et puis un peu plus haut, et de là un peu plus haut encore, mais tout était déjà froid comme marbre!

NYM. – On dit qu'il criait après le vin d'Espagne?

L'HÔTESSE. – Oh! cela est bien vrai.

BARDOLPH. – Et après les femmes.

L'HÔTESSE. – Ah! cela n'est pas vrai, par exemple.

LE PAGE. – Très-vrai; car il a dit que c'étaient des diables incarnés.

L'HÔTESSE. – Il est vrai qu'il n'a jamais pu souffrir la carnation… C'était une couleur qui ne lui revenait point.

LE PAGE. – Il disait un jour que le diable l'emporterait à cause des femmes.

L'HÔTESSE. – Il est bien vrai qu'il déclamait de temps en temps contre les femmes; mais c'est qu'il était goutteux dans ce temps-là, et puis c'était de la prostituée de Babylone qu'il parlait.

LE PAGE. – Ne vous souvenez-vous pas d'un jour qu'il aperçut une mouche sur le nez de Bardolph, et qu'il dit que c'était une âme damnée qui brûlait dans l'enfer?

BARDOLPH. – Eh bien, eh bien! l'aliment qui entretenait ce feu-là est au diable. Ce nez rubicond est toute la fortune que j'aie amassée à son service.

NYM. – Décamperons-nous, enfin? Le roi sera parti de Southampton.

PISTOL. – Allons, partons. Tends-moi tes lèvres, mon amour; aie bien soin de mes effets et de mes meubles; prends le bon sens pour guide. Choisissez et payez comptant, voilà tout ce que tu as à dire. Ne fais crédit à personne; car les serments ne sont que paille légère, et la foi des hommes ne vaut pas une feuille d'oublie; tiens bien est le meilleur chien de basse-cour, ma poulette; c'est pourquoi, prends caveto 14 pour ton conseiller. Va à présent essuyer tes yeux 15. Allons, camarades, aux armes, partons pour la France; et comme des sangsues, mes amis, suçons, suçons jusqu'au sang.

LE PAGE. – Ma foi, c'est une mauvaise nourriture, à ce qu'on dit.

PISTOL, au page. – Prends un baiser sur ses douces lèvres, et marche: allons.

BARDOLPH. – Adieu, notre hôtesse.

NYM. – Je ne saurais t'embrasser, moi; voilà le plaisant de la chose; mais ça n'y fait rien. – Adieu toujours.

PISTOL. – Fais voir que tu es une bonne ménagère; sois sédentaire, je te l'ordonne.

L'HÔTESSE. – Bon voyage: adieu.

(Ils sortent.)

SCÈNE IV

France. – Appartement dans le palais du roi de France
Entrent LE ROI, LE DAUPHIN, LE DUC DE BOURGOGNE, LE CONNÉTABLE, et suite. Fanfares

LE ROI DE FRANCE. – Ainsi l'Anglais s'avance contre nous avec une armée nombreuse. Il est important de lui répondre par une défense digne de notre trône. Les ducs de Berry, de Bretagne, de Brabant et d'Orléans vont partir; et vous aussi, dauphin, pour visiter, réparer et fortifier nos villes de guerre, les pourvoir de braves soldats, et de toutes les munitions nécessaires; car l'Angleterre s'approche avec une violence égale à celle d'eaux qui se précipitent vers un gouffre. Il est donc à propos de prendre toutes les mesures que la prévoyance et la crainte nous conseillent, à la vue des traces récentes qu'a laissées sur nos plaines l'Anglais fatal à la France, qui l'a trop méprisé.

LE DAUPHIN. – Mon auguste père, il convient, sans doute, de nous armer contre l'ennemi. La paix elle-même, quand la guerre serait douteuse, et qu'il ne s'agirait d'aucune querelle, la paix ne doit jamais assez endormir un royaume, pour dispenser de lever, d'assembler des troupes, d'entretenir les places fortes, et de faire tous les préparatifs comme si l'on était menacé d'une guerre: c'est d'après ce principe que je dis qu'il est à propos que nous partions tous pour visiter les parties faibles et endommagées de la France; mais faisons-le sans montrer aucune alarme. Non, sans plus de crainte que si nous apprenions que l'Angleterre fût en mouvement pour une danse moresque de la Pentecôte; car, mon respectable souverain, l'Angleterre a sur son trône un si pauvre roi, son sceptre est le jouet d'un jeune homme si frivole, si extravagant, si superficiel, qu'elle n'est pas dans le cas d'inspirer la crainte.

LE CONNÉTABLE. – Ah! doucement, prince dauphin: vous vous méprenez trop sur le caractère de ce roi. Que Votre Altesse interroge les derniers ambassadeurs; sachez d'eux avec quelle grandeur il a reçu leur ambassade; de quel nombre de sages conseillers il est environné; combien il est modeste dans ses objections; mais aussi combien il est redoutable par la constance de ses projets, et vous vous convaincrez que ses folies passées n'étaient que le masque du Brutus de Rome, qui cachait la prudence sous le manteau de la folie, comme des jardiniers couvrent de fumier les plantes qui poussent les premières et sont les plus délicates.

LE DAUPHIN. – Non, connétable, il n'en est pas ainsi; mais quoique votre opinion ne soit pas la nôtre, il n'importe. Lorsqu'il est question de se défendre, le mieux est de supposer l'ennemi plus fort qu'il ne le paraît; c'est le moyen d'avoir prévu tous les moyens de défense; car, si ces moyens sont faibles et mesquins, c'est imiter l'avare qui pour épargner un peu d'étoffe gâte son vêtement.

LE ROI DE FRANCE. – Voyons dans Henri un ennemi puissant, et vous, princes, armez-vous énergiquement pour le combattre. Sa race s'est engraissée de nos dépouilles, et il est sorti de cette famille sanguinaire qui nous vint effrayer comme des fantômes jusque dans nos foyers: témoin ce jour trop mémorable de notre honte, où les champs de Crécy virent cette bataille si fatale à la France, lorsque tous nos princes furent enchaînés par le bras de ce prince au nom sinistre, de cet Édouard, dit le prince Noir, tandis que son père, sur le sommet d'une montagne, et placé à une grande élévation où les rayons dorés du soleil venaient le couronner, contemplait son héroïque fils, souriant de le voir mutiler l'ouvrage de la nature, et défigurer toute cette belle jeunesse que Dieu et les pères français avaient créée depuis vingt années. Il est un rejeton de cette tige victorieuse: craignons sa vigueur native et ses hautes destinées.

(Entre un messager.)

LE MESSAGER. – Des ambassadeurs d'Henri, roi d'Angleterre, demandent audience à Votre Majesté.

LE ROI DE FRANCE. – Nous la donnerons dans l'instant même. Allez, et introduisez-les. (Le messager sort avec une partie des seigneurs.) Vous voyez, mes amis, avec quelle ardeur cette chasse est suivie.

LE DAUPHIN. – Tournez la tête, et vous arrêterez sa course. Les chiens les plus lâches poussent leurs plus bruyants abois, lorsque la proie qu'ils ont l'air de menacer court bien loin devant eux. Mon respectable souverain, prenez les Anglais de court, et montrez-leur de quelle monarchie vous êtes le chef. Trop de confiance, mon prince, n'est pas un vice aussi bas que le mépris de soi.

(Les seigneurs rentrent avec Exeter et une suite.)

LE ROI DE FRANCE. – Venez-vous de la part de notre frère d'Angleterre?

EXETER. – De sa part; et voici le salut qu'il adresse à Votre Majesté. Il vous demande, au nom du Dieu tout-puissant, de vous dépouiller vous-même, et de déposer cet éclat et ces grandeurs empruntées qui, par le don du ciel, par la loi de la nature et des nations, lui appartiennent à lui et à ses héritiers: c'est-à-dire de lui rendre cette couronne et tous ces honneurs multipliés, que la force et la coutume attribuent à la couronne de France. Et afin que vous soyez convaincu que ce n'est pas de sa part une réclamation injuste et téméraire, tirée de parchemins vermoulus dans la nuit des siècles, et arrachés de la poussière antique de l'oubli, il vous envoie cette mémorable généalogie dont chaque branche est une preuve démonstrative. (Il remet un papier au roi.) Il vous somme de considérer ce lignage; et après que vous aurez vu qu'il descend directement du plus fameux de ses glorieux ancêtres, d'Édouard III, il vous enjoint de renoncer à votre couronne et à votre royaume, que vous ne tenez que par usurpation sur lui, qui est né le véritable et le seul propriétaire.

LE ROI DE FRANCE. – Et si on le refuse, qu'arrivera-t-il?

EXETER. – Une contrainte sanglante; car vous cacheriez sa couronne dans les derniers replis de vos coeurs, qu'il irait l'y déterrer: et c'est dans ce projet qu'il s'avance avec des tempêtes menaçantes, des foudres et des tremblements de terre comme Jupiter. Si sa requête n'est pas écoutée, il vient lui-même vous l'imposer. Il vous enjoint, au nom de l'Éternel, de lui remettre sa couronne, et de prendre en pitié toutes les malheureuses victimes que la guerre affamée s'apprête à dévorer; il rejette sur votre tête les larmes des veuves, les cris des orphelins, le sang du peuple égorgé, les gémissements des jeunes filles qui pleureront leurs pères et leurs fiancés engloutis dans cette querelle. Voilà sa réclamation, sa menace, et mon message: à moins que le dauphin ne soit présent. S'il est dans cette assemblée, je suis chargé aussi d'un message pour lui.

LE ROI DE FRANCE. – Quant à nous, nous voulons examiner plus à loisir cette réclamation. Demain vous porterez nos dernières intentions à notre frère d'Angleterre.

LE DAUPHIN. – Quant au dauphin, je répondrai pour lui. Que lui apportez-vous d'Angleterre?

EXETER. – Le dédain et le défi, le plus profond mépris, et tout ce qui peut vous l'exprimer, sans avilir sa propre grandeur: voilà l'opinion et le salut que vous adresse mon roi. Ainsi a-t-il dit, et si votre père ne répare pas, en satisfaisant sans réserve à toutes ses demandes, l'amère raillerie dont vous avez insulté sa majesté, il vous en punira si sévèrement, que les échos des cavernes et des souterrains de France résonneront de la réponse à vos outrages et des accents de ses canons.

LE DAUPHIN. – Dites-lui que si mon père lui rend une réponse gracieuse, c'est contre ma volonté; car je ne désire rien tant que de lier une partie avec le roi d'Angleterre; et c'est dans cette vue que, pour assortir le présent à sa frivolité et à sa jeunesse, je lui ai fait l'envoi de ces balles de paume de Paris.

EXETER. – Et en revanche il fera trembler jusqu'aux fondements votre Louvre de Paris, fût-il la cour souveraine de la puissante Europe. Et soyez bien sûr que vous serez grandement étonné, comme nous, ses sujets, nous l'avons été, de trouver une si grande différence entre ce qu'annonçaient les jours de sa jeunesse et ce qu'il est aujourd'hui. Aujourd'hui, il pèse le temps jusqu'au dernier grain de sable, et vos pertes vous l'apprendront s'il reste en France.

LE ROI DE FRANCE. – Demain vous serez amplement instruit de nos résolutions.

EXETER. – Expédiez-nous promptement, de crainte que notre roi ne vienne ici lui-même nous demander raison de nos délais: il est déjà descendu sur vos rivages.

LE ROI DE FRANCE. – Vous serez bientôt congédié avec des propositions avantageuses. Ce n'est pas trop d'une courte nuit pour répondre sur des objets de cette importance.

(Ils sortent.)
FIN DU DEUXIÈME ACTE

ACTE TROISIÈME

LE CHOEUR

Ainsi, d'une vitesse égale à celle de la pensée, la scène vole sur une aile imaginaire. Figurez-vous le roi dans l'appareil de la guerre, sur la jetée de Hampton 16, montant sur l'Océan, suivi de sa belle flotte, dont les pavillons de soie éventent le jeune Phébus: livrez-vous à votre imagination, qu'elle vous montre les mousses gravissant le long des cordages: écoutez le sifflet perçant qui met de l'ordre dans les sons confus: voyez les voiles, enflées par le souffle insinuant des vents invisibles, entraîner, au travers de la mer sillonnée, ces masses énormes qui offrent leurs flancs aux vagues superbes: imaginez que vous êtes debout sur le rivage; voyez une cité qui danse sur les vagues inconstantes: tel est le tableau que présente cette flotte royale, dirigeant sa course vers Harfleur. Suivez! suivez! Attachez votre pensée à la poupe des vaisseaux, et quittez votre Angleterre silencieuse comme la nuit profonde, gardée par des vieillards, des enfants et des femmes, qui tous ont passé ou n'ont pas atteint encore l'âge de la force et de la vigueur. Car quel est celui dont un léger duvet ait orné le menton qui n'aura pas voulu suivre cette brave élite de guerriers aux rives de la France? – Que votre pensée travaille et vous y montre un siége: contemplez les canons sur leurs affûts, ouvrant leurs bouches fatales sur Harfleur bloqué. – Supposez que l'ambassadeur revient de la cour des Français, et annonce à Henri que le roi lui offre sa fille Catherine, et avec elle, en dot, quelques vains et stériles duchés. – L'offre ne plaît point à Henri, et déjà l'actif canonnier touche de sa mèche le bronze infernal (bruits de combat; on entend une décharge d'artillerie), et tout se renverse devant ses foudres. Continuez d'être favorables, et que vos pensées complètent notre représentation.

(Le choeur sort.)

SCÈNE I

Harfleur assiégé. – Bruit de combat
Entrent LE ROI HENRI, EXETER, BEDFORD, GLOCESTER, et des soldats avec des échelles de siége

LE ROI. – Allons, encore une fois à la brèche, chers amis, encore une fois: emportez-la d'assaut, ou comblez-la de morts. Dans la paix, rien ne sied tant à un homme que la modeste douceur et l'humilité; mais lorsque la tempête de la guerre souffle à nos oreilles, alors imitez l'active fureur du tigre: roidissez vos muscles, réveillez tout votre sang, défigurez vos traits naturels sous ceux d'une rage farouche, prêtez à votre oeil un aspect terrible; qu'il sorte de son orbite, comme le canon d'airain; que votre sourcil l'ombrage et inspire autant d'effroi qu'un rocher ruiné, qui semble rejeter sa base minée par le sauvage et pernicieux Océan; montrez les dents, ouvrez de larges narines, contenez votre haleine, et tendez tous vos esprits jusqu'à leur dernier effort. – Courage! courage! nobles Anglais, dont le sang découle d'aïeux à l'épreuve de la guerre, d'ancêtres qui, comme autant d'Alexandres, ont, dans ces contrées, combattu depuis le soleil naissant jusqu'à son coucher, et n'ont reposé leurs épées que lorsque les ennemis leur ont manqué. Ne déshonorez pas vos mères: prouvez aujourd'hui que ceux à qui vous donnez le nom de pères vous ont réellement engendrés; servez de modèle aux hommes d'un sang moins noble, et enseignez-leur à combattre. Et vous, braves milices, dont les membres ont été formés dans l'Angleterre, montrez-nous ici la vigueur du sol qui vous a nourris: faites-nous jurer que vous êtes dignes de votre race. Et je n'en doute point; car il n'en est aucun de vous, quelle que soit la bassesse obscure de sa condition, dont je ne voie les yeux briller d'un noble feu. – Je vous vois tous ardents comme le chien à la laisse, qui n'attend que le signal pour s'élancer. Eh bien, la chasse est ouverte: suivez l'ardeur qui vous emporte, et, dans l'assaut, criez: Dieu pour Henri! Angleterre et Saint-George!

(Le roi sort avec sa suite.)
(Bruit de combat; on entend une décharge d'artillerie.)

SCÈNE II

Les troupes défilent
Entrent NYM, BARDOLPH ET LE PAGE

BARDOLPH. – Allons, avance, avance; à la brèche, à la brèche.

NYM. – Caporal, je t'en prie, ne nous presse pas si fort, il fait un peu chaud. Quant à moi, je n'ai pas un magasin de vies. La plaisanterie n'en vaut rien; voilà le fin mot de l'histoire.

PISTOL. – Ce mot est des plus justes; car les mauvaises plaisanteries abondent ici, «les coups pleuvent de droite et de gauche, les pauvres vassaux du bon Dieu tombent et meurent par milliers, et l'épée et le bouclier s'acquièrent d'immortels honneurs dans des champs de sang.»

LE PAGE. – Pour moi, je voudrais être dans une taverne à Londres; je donnerais bien toute ma gloire à venir pour un pot de bière et ma sûreté.

PISTOL. – Et moi, «s'il ne tenait qu'à faire des souhaits, je ne resterais pas ici non plus, et je ne serais pas dix minutes à t'y rejoindre 17

LE PAGE. – Voilà qui est aussi bien, mais non pas aussi vrai que le chant d'un oiseau sur la branche.

(Arrive Fluellen.)

FLUELLEN, les poussant.-A la brèche, vous chiens, avancez, canaille!

PISTOL. – Doucement, doucement, grand duc; ne soyez pas si dur pour des hommes d'argile; calmez cette rage, ralentissez cette fougue; allons, de la douceur, mon poulet.

NYM, à Pistol.-Voilà ce qu'on appelle de la belle humeur, (à Fluellen) et Votre Seigneurie n'en a que de la mauvaise.

(Nym, Pistol et Bardolph sortent suivis de Fluellen.)

LE PAGE. – Tout jeune que je suis, j'ai bien observé ces trois ferrailleurs. Je ne suis certainement qu'un enfant auprès d'eux trois; mais tels qu'ils sont, s'ils voulaient me servir, il n'y en a pas un d'eux qui fût mon fait; car, par ma foi, ces trois originaux ne font pas ensemble la valeur d'un homme. Ce Bardolph, par exemple, il a le sang blanc et la figure rouge; il a du front, mais il ne se bat pas. – Et ce Pistol: il a une langue à tout tuer et une épée pacifique; ce qui fait qu'il estropie des mots tant qu'on veut, mais il n'entame pas une lance. – Quant à Nym, il a entendu dire que ceux qui parlent le moins sont les plus braves; voilà pourquoi il dédaigne de dire même ses prières, de peur de passer pour un lâche: mais s'il ne parle guère, il agit encore moins; car il n'a jamais cassé d'autre tête que la sienne, et encore était-ce contre une borne, un jour qu'il était ivre. Ces gens sont capables de voler tout ce qu'ils trouvent sous leurs mains; et le vol, ils l'appellent une acquisition. Bardolph a volé l'autre jour un étui de luth, l'a porté pendant douze lieues, et puis l'a vendu pour trois demi-sous. Ah! pour Nym et Bardolph, ce sont, ma foi! les deux doigts de la main en fait de filouterie. A Calais, je les ai vus voler une pelle à feu: ce qui m'a fait penser que ces gens-là avaient envie de devenir un jour porteurs de charbon 18. Si je les avais crus, ils avaient bonne envie de me rendre aussi familier avec les poches des autres, que le sont les gants et le mouchoir, mais il n'est pas du tout dans mon caractère d'ôter de la bourse d'autrui pour mettre dans la mienne; car c'est le moyen d'empocher des affronts… Ma foi, il faut que je les plante là et que je cherche quelque meilleure condition. Leur lâcheté me soulève le coeur; oui, il faut que je les plante là.

(Il s'en va.)
(Rentre Fluellen suivi de Gower.)

GOWER. – Capitaine Fluellen, il faut vous rendre à l'instant aux mines: le duc de Glocester veut vous parler.

FLUELLEN. – Aux mines? Allez-vous-en dire au duc qu'il n'est pas bon d'aller aux mines; car, voyez-vous, ces mines ne sont pas suivant la discipline de la guerre. Les concavités ne sont pas suffisantes; car, voyez-vous, l'adversaire (vous pouvez dire ça au duc, voyez-vous) a creusé lui-même douze pieds plus bas que les contre-mines 19. Par Jésus, j'ai peur qu'il ne nous fasse tous sauter, si l'on ne donne pas de meilleurs ordres.

GOWER. – Le duc de Glocester, qui a la conduite du siége, est dirigé par un Irlandais qui est ma foi un brave homme.

FLUELLEN. – Oh! c'est le capitaine Macmorris, n'est-ce pas?

GOWER. – Oui, je crois.

FLUELLEN. – Par Jésus, c'est un âne, s'il y en a un dans le monde; et je le prouverai à sa barbe. Il ne connaît pas plus les vraies disciplines des guerres, voyez-vous, les disciplines des Romains, qu'un petit chien.

(Entrent Macmorris et le capitaine Jamy.)

GOWER. – Le voilà qui vient, accompagné du capitaine écossais, le capitaine Jamy.

FLUELLEN. – Le capitaine Jamy est un bien merveilleux et valeureux capitaine: ça n'est pas douteux, et un homme de grande expédition et connaissances dans les anciennes guerres, d'après la science particulière que j'ai moi-même de ses règles. Par Jésus! il soutiendra sa thèse aussi bien qu'aucun militaire dans le monde, sur les disciplines des anciennes guerres des Romains.

JAMY. – Je vous donne le bonjour, capitaine Fluellen.

FLUELLEN. – Bonjour à Votre Seigneurie, bon capitaine Jamy.

GOWER. – Oh çà! capitaine Macmorris, venez-vous des mines? Les pionniers ont-ils fini?

MACMORRIS. – Par Jésus, ça ne vaut pas le diable. L'ouvrage est abandonné, la trompette sonnant la retraite; par ma main que voilà, et par l'âme de mon père, je jure que l'ouvrage ne vaut rien. On y a renoncé, sans quoi j'aurais fait sauter la ville, Dieu me pardonne! en moins d'une heure. Oh! c'est fort mal fait, c'est fort mal fait: par ce bras! c'est mal fait.

FLUELLEN. – Capitaine Macmorris, je vous en prie, voudriez-vous bien m'accorder, voyez-vous, quelques petits colloques avec vous, comme qui dirait, pour ainsi dire, touchant, ou comme à l'égard des disciplines de la guerre, les guerres des Romains, par manière de conversation, voyez-vous, et de pure communication d'amitié; et comme qui dirait, pour ainsi dire, pour la satisfaction de mon esprit. Pour à l'égard de ce qui concerne les règles de la discipline militaire, voilà le point…

JAMY. – De bonne foi ce sera la meilleure chose du monde, mes bons capitaines, et je m'en vais profiter de cette occasion pour prendre congé de vous, avec votre permission.

MACMORRIS. – Ce n'est pas ici le temps de discourir, Dieu me pardonne! Le jour est chaud, et le temps, et la guerre, et le roi, et les ducs: ce n'est pas là le temps de discourir: la ville est assiégée, et la trompette nous appelle à la brèche, et nous voilà à causer. Et par le Christ, nous ne faisons rien; c'est honteux à nous tous tant que nous sommes: Dieu me pardonne! C'est une honte de rester tranquilles, c'est une honte, je le jure; et il y a tant de gorges à couper et d'ouvrages à faire; et il n'y a rien de fait, le Christ me pardonne!

JAMY. – Par la sainte messe, avant que ces yeux-là que vous voyez soient assoupis, je ferai de la bonne ouvrage, ou je serai sur le carreau: oui, et je travaillerai aussi courageusement que je pourrai; c'est bien sûr cela, en deux paroles comme en quatre. Cependant, sur ma foi, je serai bien aise d'entendre quelques questions entre vous deux.

FLUELLEN. – Capitaine Macmorris, je pense, voyez-vous, sauf votre correction, qu'il n'y en pas beaucoup de votre nation…

MACMORRIS. – De ma nation? Qu'est-ce que c'est que ma nation? Est-ce une nation de lâches, de bâtards, de gredins? Qu'est-ce que c'est que ma nation? Qui parle de ma nation?

FLUELLEN. – Voyez-vous, si vous prenez les choses autrement qu'on ne les dit, capitaine Macmorris, par aventure je pourrais bien penser que vous ne me traitiez pas avec cette affabilité, comme en toute discrétion vous devez me traiter, voyez-vous, d'autant que je suis autant que vous, tant dans la discipline de la guerre, que par mon lignage et en tout autre genre.

MACMORRIS. – Je ne vous reconnais pas autant de bravoure qu'à moi, et le Christ me pardonne! Je vous couperai la tête.

GOWER. – Amis, amis! allons, vous vous trompez tous les deux: c'est faute de vous entendre.

JAMY. – Oh! voilà une vilaine sottise.

(On sonne un pourparler.)

GOWER. – La ville demande à parlementer.

FLUELLEN. – Capitaine Macmorris, quand il se trouvera une meilleure occasion, voyez-vous, je prendrai la liberté de vous dire que je connais les disciplines de la guerre; et voilà tout.

(Ils partent.)
12.Le docteur Mead cite une opinion de son temps, et semble croire lui-même qu'on ne mourait jamais qu'à la descente de la marée. Du temps de Johnson, c'était encore une opinion de bonne femme.
13.C'est madame de Staël qui dit quelque part que Shakspeare avait décrit en médecin les maladies morales. Voici un passage qui prouve son exactitude dans l'histoire des symptômes qui précèdent la mort dans certaines maladies: Manus ante faciem attollere, muscas quasi venari manus operâ; flocos carpere de vestibus, vel pariete. (Von Swieten.)
14.Caveto, prends garde, de la prudence.
15.Quelques commentateurs disent: «Va essuyer les verres de ton hôtellerie.»
16.«La plaine où campa Henri V est aujourd'hui couverte en entier par la mer.» (Warton.)
17.Les mots entre guillemets sont en vers dans le texte.
18.Il paraît que porter des charbons était, du temps de Shakspeare, une expression proverbiale pour dire supporter un affront.
19.Fluellen veut dire que l'ennemi a contre-miné douze pieds plus bas que la mine.
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
28 eylül 2017
Hacim:
130 s. 1 illüstrasyon
Tercüman:
Telif hakkı:
Public Domain