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Kitabı oku: «Aventures de Monsieur Pickwick, Vol. II», sayfa 13

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Très-satisfait d'avoir vu si soudainement rabaisser le ton et abattre la valeur du jeune homme, M. Pickwick tira la sonnette, et fut conduit, sur sa requête, dans une chambre particulière, garnie d'un tapis, d'une table, de plusieurs chaises, d'un buffet, d'un sofa, et ornée d'une glace et de plusieurs vieilles gravures. Là, tandis que son déjeuner s'apprêtait, il eut l'avantage d'entendre Mme Namby toucher au piano, au-dessus de sa tête, et quand le déjeuner arriva, M. Perker arriva aussi.

«Ah! ah! mon cher monsieur, dit le petit avoué; coffré à la fin, eh? Allons, allons! je n'en suis pas très-fâché, parce que vous allez voir l'absurdité de cette conduite. J'ai noté le montant des frais taxés et des dommages, et nous ferons bien de régler cela, sans perdre de temps. Namby doit-être revenu à l'heure qu'il est. Qu'en dites-vous, mon cher monsieur? Voulez-vous écrire un mandat, ou bien aimez-vous mieux m'en charger?» En disant ceci, Perker se frottait les mains, avec une gaieté affectée; mais, ayant observé la contenance de M. Pickwick, il ne put s'empêcher de jeter vers Sam un regard découragé.

«Perker, dit M. Pickwick, je vous prie de ne plus me parler de cela. Je ne vois aucun avantage à rester ici; ainsi j'irai à la prison ce soir.

– Vous ne pouvez pas aller à Whitecross, mon cher monsieur, s'écria le petit homme; impossible! Il y a soixante lits par dortoir, et les grilles sont fermées seize heures sur vingt-quatre.

– J'aimerais mieux aller dans quelque autre prison, si je le puis, répondit M. Pickwick. Si non, je m'arrangerai le mieux que je pourrai de celle-là.

– Vous pouvez aller à la prison de Fleet-Street, mon cher monsieur; si vous êtes déterminé à aller quelque part.

– C'est cela. J'irai aussitôt que j'aurai fini mon déjeuner.

– Doucement, doucement, mon cher monsieur, dit le brave homme de petit avoué. Il n'est pas besoin d'aller si vite dans un endroit dont tous les autres hommes sont si empressés de sortir. Il faut d'abord que nous ayons un habeas corpus. Il n'y aura pas de juges aux chambres avant quatre heures de l'après-midi; il faudra que vous attendiez jusque-là.

– Très-bien, dit M. Pickwick, avec une patience inébranlable. Alors nous mangerons une côtelette ici, à deux heures. Occupez-vous-en, Sam, et dites qu'on soit ponctuel.»

M. Pickwick demeurant immuable, malgré les remontrances et les arguments de Perker, les côtelettes parurent, et disparurent en temps utile. Ensuite on attendit pendant une heure ou deux M. Namby, qui avait des personnes distinguées à dîner, et ne pouvait se déranger, sous aucun prétexte. Enfin notre philosophe monta avec lui et M. Perker dans une voiture qui les transporta à Chancery-lane.

Il y avait deux juges de service à Serjeants' Inn, l'un du banc du roi, l'autre des common pleas; et s'il fallait en croire la foule de clercs qui allaient et venaient avec des paquets de papiers, il devait passer par leurs mains une immense quantité d'affaires. Lorsque M. Pickwick et ses acolytes eurent atteint la basse arcade qui forme l'entrée de Serjeants' Inn, Perker fut retenu, pendant quelques moments, pour parlementer avec le cocher, concernant le prix de la course et la monnaie, et M. Pickwick, se mettant de côté pour être hors du courant d'individus qui entraient, regarda autour de lui avec curiosité.

Les personnages qui attiraient le plus son attention, étaient trois ou quatre hommes d'une tournure à la fois prétentieuse et misérable. Ils touchaient leur chapeau devant la plupart des avoués qui passaient, et semblaient être là pour quelque affaire, dont M. Pickwick ne pouvait deviner la nature. C'étaient des individus fort curieux à observer. L'un était grand et boiteux, avec un habit noir râpé et une cravate blanche; un autre était un gros courtaud, également vêtu de noir, mais dont la cravate, jadis noire, avait une teinte rougeâtre; un troisième était un drôle de corps, à la tournure avinée, à la face bourgeonnée. Ils se promenaient aux alentours, les mains derrière le dos, et quelquefois, d'un air empressé, ils murmuraient deux ou trois mots à l'oreille des personnes qui passaient auprès d'eux avec des paquets de papiers. M. Pickwick se souvint de les avoir souvent remarqués sous l'arcade, lorsqu'il se promenait par-là, et il éprouva une vive curiosité de savoir à quelle branche de la chicane appartenaient ces flâneurs peu distingués.

Il allait le demander à Namby, qui était resté auprès de lui, et qui s'occupait à sucer un large anneau d'or, dont son petit doigt était décoré, lorsque Perker revint avec empressement leur dire qu'il n'y avait pas de temps à perdre, et se dirigea vers l'intérieur de la maison. M. Pickwick se disposait à le suivre, lorsque le boiteux s'approcha de lui, toucha poliment son chapeau, et lui tendit une carte écrite à la main. Notre excellent ami, ne voulant pas contrister cet inconnu par un refus, accepta gracieusement sa carte, et la déposa dans la poche de son gilet.

«Nous y voilà, dit Perker, en se retournant, pour voir si ses compagnons étaient auprès de lui, avant d'entrer dans les bureaux. Par ici, mon cher monsieur. Eh! qu'est-ce que vous voulez?»

Cette dernière question était adressée au boiteux, qui s'était joint à leur société, sans que M. Pickwick l'eût remarqué. Pour toute réponse le boiteux toucha de nouveau son chapeau, avec la plus grande politesse, et montra le philosophe.

«Non, non, dit Perker avec un sourire; nous n'avons pas besoin de vous, mon cher ami.

– Je vous demande pardon, monsieur, dit le boiteux. Le gentleman a pris ma carte. J'espère que vous m'emploierez, monsieur. Le gentleman m'a fait un signe. Je consens à être jugé par le gentleman lui-même. Vous m'avez fait un signe, monsieur.

– Bah, bah! folie. Vous n'avez fait de signe à personne, Pickwick? C'est une erreur, c'est une erreur.

– Ce monsieur m'a tendu sa carte, répliqua M. Pickwick, en la sortant de la poche de son gilet. Je l'ai acceptée, comme il paraissait le désirer. Au fait j'avais quelque curiosité de la regarder quand j'en aurais le loisir. Je…»

Le petit avoué éclata de rire, et rendant la carte au boiteux l'informa que c'était une erreur. Ensuite, pendant que cet homme s'en allait, de mauvaise humeur, il dit à demi-voix à M. Pickwick que c'était simplement une caution.

«Une quoi? s'écria M. Pickwick.

– Une caution.

– Une caution!

– Oui, mon cher monsieur, il y en à une demi-douzaine ici. Ils vous servent de caution, n'importe pour quelle somme, et ne prennent pour cela qu'une demi-couronne. Un curieux métier, hein? dit Perker, en se régalant d'une prise de tabac.

– Quoi! s'écria M. Pickwick, renversé par cette découverte, dois-je entendre que ces hommes se font un revenu en se parjurant devant les juges du pays, au taux d'une demi-couronne par crime!

– Hé! hé! Quant au parjure, je n'en sais trop rien, mon cher monsieur; c'est un mot sévère, mon cher monsieur; très-sévère. Il y a là une notion légale, rien de plus.»

Ayant dit ceci, l'avoué sourit, haussa les épaules, prit une seconde pincée de tabac, et entra dans le bureau du clerc du juge.

C'était une chambre d'une apparence essentiellement malpropre, dont le plafond était bas et les murs couverts de vieilles boiseries. Elle était si mal éclairée que, quoiqu'il fît grand jour au dehors, des chandelles de suif brûlaient sur les bureaux. À l'une des extrémités ouvrait une porte qui conduisait dans le cabinet du juge, et autour de laquelle se trouvaient réunis une nuée d'avoués et de clercs, qui y étaient introduits par ordre. Chaque fois que cette porte s'ouvrait pour laisser sortir un groupe, un autre groupe se précipitait pour entrer. Et comme ceux qui avaient vu le juge mêlaient des discussions assez intimes aux bruyants dialogues de ceux qui ne l'avaient point encore vu, il en résultait un tapage aussi immense qu'il est possible de l'imaginer dans un espace aussi rétréci.

Cependant ces conversations n'étaient point le seul bruit qui fatiguât les oreilles. Debout sur une boîte, derrière une barre de bois, à l'autre bout de la chambre, était un clerc armé de lunettes, qui recevait les attestations; et de temps en temps un autre clerc en emportait de gros paquets dans le cabinet du juge, pour les lui faire signer. Il y avait un très-grand nombre de clercs d'avoués qui devaient prêter serment; et, comme il était moralement impossible de le leur faire prêter à tous en même temps, les efforts de ces gentlemen pour se rapprocher du clerc aux lunettes étaient semblables à ceux de la foule qui assiége la porte du parterre d'un théâtre, lorsque sa très-gracieuse Majesté l'honore de sa présence. Un autre fonctionnaire exerçait de temps en temps la force de ses poumons à appeler le nom de ceux qui avaient prêté serment, afin de leur rendre leurs attestations lorsque celles-ci avaient été signées par le juge, ce qui occasionnait de nouvelles luttes; et, toutes ces choses, se passant en même temps, donnaient naissance à autant de hourvari qu'en puisse désirer la personne la plus active. Il y avait encore une autre classe d'individus qui n'étaient pas moins bruyants, c'étaient ceux qui venaient pour assister à des conférences demandées par leurs patrons. L'avoué de la partie adverse pouvait ou non s'y rendre, à son choix; et les clercs en question n'avaient pas d'autre affaire que de crier de temps en temps le nom de l'avoué adverse, afin de s'assurer qu'il ne se trouvait pas là.

Par exemple, tout auprès du siége où s'était assis M. Pickwick, se tenaient appuyés contre la muraille deux clercs, dont l'un avait une voix de basse-taille, tandis que l'autre en avait une de ténor.

Un clerc entra avec un paquet de papiers et se mit à regarder tout autour de lui.

«Sniggle et Blink, miaula le ténor.

– Porkin et Snob, mugit la basse.

– Stumpy et Deacon, hurla le nouveau venu.»

Personne ne répondit, et le premier individu qui entra après cela fut salué par tous les trois à la fois, et à son tour cria d'autres noms. Puis un nouveau personnage en vociféra d'autres encore, et ainsi de suite.

Pendant tout ce temps, l'homme aux lunettes travaillait sans répit à faire jurer les clercs. Leur serment était toujours administré sans aucune espèce de ponctuation, et ordinairement dans les termes suivants:

«Prenez le livre dans votre main droite ceci est votre nom et votre écriture au nom de Dieu vous jurez que le contenu de votre présente attestation est véritable un shilling il faut vous procurer de la monnaie je n'en ai pas.»

«Eh bien! Sam, dit M. Pickwick, je suppose qu'on prépare l'Habeas corpus?

– Oui, répondit Sam, je voudrais bien qu'ils l'amènent leur ayez sa carcasse. C'est pas délicat de nous faire attendre comme ça. Dans ce temps-là moi j'aurais arrangé une douzaine d'ayez sa carcasse tout emballés et tout ficelés.»

Sam paraissait s'imaginer qu'un habeas corpus est une espèce de machine encombrante; mais nous ne saurions dire au juste de quelle sorte, car en ce moment M. Perker revint et emmena M. Pickwick.

Les formalités ordinaires ayant été accomplies, le corpus de Samuel Pickwick fut confié à la garde d'un huissier, pour être, par lui, conduit au gouverneur de la prison de la Flotte, et pour être là détenu jusqu'à ce que le montant des dommages et des frais résultant de l'action de Bardell contre Pickwick fût entièrement payé et soldé.

«Et ce ne sera pas de sitôt, dit M. Pickwick en riant. Sam – appelez une autre voiture. Perker, mon cher ami, adieu.

– Je vais aller avec vous pour vous voir établi en sûreté.

– En vérité, je préférerais être seul avec Sam. Aussitôt que je serai organisé, je vous écrirai pour vous le dire, et je vous attendrai immédiatement. Jusque-là, adieu.»

Cela dit, M. Pickwick monta dans la voiture qui venait d'arriver; l'huissier le suivit et Sam se plaça sur le siége.

«Voilà un homme comme il n'y en a guère! dit Perker en s'arrêtant pour mettre ses gants.

– Quel banqueroutier il aurait fait, monsieur! suggéra Lowten, qui se trouvait auprès de lui. Comme il aurait fait aller les commissaires! S'ils avaient parlé de le coffrer, il les aurait mis au défi, monsieur.»

L'avoué ne fut apparemment pas fort touché de la manière toute professionnelle dont son clerc estimait le caractère de M. Pickwick, car il s'éloigna sans daigner lui répondre.

La voiture de M. Pickwick se traîna en cahotant le long de Fleet-Street, comme les voitures de place ont coutume de le faire. Les chevaux allaient mieux, dit le cocher, quand ils avaient une autre voiture devant eux (il fallait qu'ils allassent à un pas bien extraordinaire quand ils n'en avaient pas); en conséquence, il les avait mis derrière une charrette. Quand la charrette s'arrêtait, la voiture s'arrêtait, et quand la charrette repartait, la voiture repartait aussi. M. Pickwick était assis en face de l'huissier, et l'huissier était assis avec son chapeau entre ses genoux, sifflant un air et regardant par la portière.

Le temps fait des miracles, et avec l'aide de ce puissant vieillard, une voiture de place elle-même peut accomplir un mille de distance. Celle-ci arriva enfin, et M. Pickwick descendit à la porte de la prison.

L'huissier, regardant par-dessus son épaule pour voir si M. Pickwick le suivait, précéda le philosophe dans le bâtiment. Tournant immédiatement à gauche, ils entrèrent par une porte ouverte sous un vestibule, de l'autre côté duquel était une autre porte qui conduisait dans l'intérieur de la prison: celle-ci était gardée par un vigoureux guichetier tenant des clefs dans sa main.

Le trio s'arrêta sous ce vestibule pendant que l'huissier délivrait ses papiers, et M. Pickwick apprit qu'il devait y rester jusqu'à ce qu'il eût subi la cérémonie connue des initiés sous le nom de poser pour son portrait.

«Poser pour mon portrait! s'écria M. Pickwick.

– Pour prendre votre ressemblance, monsieur, dit le vigoureux guichetier. Nous sommes très-forts sur les ressemblances ici. Nous les prenons en un rien de temps et toujours exactes. Entrez, monsieur, et mettez-vous à votre aise.»

M. Pickwick se rendit à l'invitation du guichetier; et, lorsqu'il se fut assis, Sam s'appuya sur le dos de sa chaise et lui dit tout bas que, poser pour son portrait, voulait tout bonnement dire subir une inspection des différents geôliers, afin qu'ils pussent distinguer les prisonniers de ceux qui venaient les visiter.

«Eh bien! alors, Sam, dit M. Pickwick, je désire que les artistes arrivent promptement. Ceci est un endroit un peu trop public pour mon goût.

– Ils ne seront pas longs, monsieur, soyez tranquille. Voilà une horloge à poids, monsieur.

– Je la vois.

– Et une cage d'oiseaux, une prison dans une prison, monsieur. C'est-il pas vrai?»

Pendant que Sam donnait cours à ces réflexions philosophiques, M. Pickwick s'apercevait que la séance était commencée. Le vigoureux guichetier s'était assis non loin de notre héros et le regardait négligemment de temps en temps, tandis qu'un grand homme mince, planté vis-à-vis de lui, avec ses mains sous les pans de son habit, l'examinait longuement. Un troisième gentleman, qui avait l'air de mauvaise humeur et qui venait sans doute d'être dérangé de son thé, car il mangeait encore un reste de tartine de beurre, s'était placé près du philosophe, et, appuyant ses mains sur ses hanches, l'inspectait minutieusement; enfin deux autres individus groupés ensemble étudiaient ses traits avec des visages pensifs et pleins d'attention. M. Pickwick tressaillit plusieurs fois pendant cette opération, durant laquelle il semblait fort mal à l'aise sur son siége; mais il ne fit de remarque à personne, pas même à Sam, qui, incliné sur le dos de sa chaise, réfléchissait partie sur la situation de son maître et partie sur la satisfaction qu'il aurait éprouvée à attaquer, l'un après l'autre, tous les geôliers présents, si cela avait été légal et conforme à la paix publique.

Quand le portrait fut terminé, on informa M. Pickwick qu'il pouvait entrer dans la prison.

«Où coucherai-je cette nuit? demanda-t-il.

– Ma foi, répondit le vigoureux guichetier, je ne sais pas trop, pour cette nuit. Demain matin, vous serez accouplé avec quelqu'un, et alors vous serez tout à l'aise et confortable. La première nuit, on est ordinairement un peu en l'air; mais tout s'arrange le lendemain.»

Après quelques discussions, on découvrit qu'un des geôliers avait un lit à louer pour la nuit, et M. Pickwick s'en accommoda avec empressement.

«Si vous voulez venir avec moi, je vais vous le montrer sur-le-champ, dit l'homme. Il n'est pas bien grand, mais on y dort comme une douzaine de marmottes. Par ici, monsieur.»

Ils traversèrent la porte intérieure et descendirent un court escalier; la serrure fut refermée derrière eux, et M. Pickwick se trouva, pour la première fois de sa vie, dans une prison pour dettes.

CHAPITRE XII

Ce qui arriva à M. Pickwick dans la prison pour dettes; quelle espèce de débiteurs il y vit, et comment il passa la nuit

Le gentleman qui accompagnait notre philosophe et qui avait nom Tom Roker, tourna à droite au bas de l'escalier, traversa une grille qui était ouverte, et, remontant quelques marches, entra dans une galerie longue et étroite, basse et malpropre, pavée de pierres et très-mal éclairée par deux fenêtres placées à ses deux extrémités.

«Ceci, dit le gentleman en fourrant ses mains dans ses poches et en regardant négligemment M. Pickwick par-dessus son épaule, ceci est l'escalier de la salle.

– Oh! répliqua M. Pickwick en abaissant les yeux pour regarder un escalier sombre et humide, qui semblait mener à une rangée de voûtes de pierres au-dessous du niveau de la terre. Là, je suppose, sont les caveaux où les prisonniers tiennent leur petite provision de charbon de terre? Ce sont de vilains endroits quand il faut y descendre, mais je parie qu'ils sont fort commodes.

– Oui, je crois bien qu'ils sont commodes, vu qu'il y a quelques personnes qui s'arrangent pour y vivre et joliment bien!

– Mon ami, reprit M. Pickwick, vous ne voulez pas dire que des êtres humains vivent réellement dans ces misérables cachots?

– Je ne veux pas dire! s'écria M. Roker avec un étonnement plein d'indignation, et pourquoi pas?

– Qui vivent! qui vivent là?

– Qui vivent là, oui, et qui meurent là aussi fort souvent. Et pourquoi pas? Qu'est-ce qui a quelque chose à dire là contre? Qui vivent là! oui, certainement. Est-ce que ce n'est pas une très-bonne place pour y vivre?»

Comme M. Roker, en disant cela, se tourna vers M. Pickwick d'une manière assez farouche, et murmura en outre, d'un air excité, certaines expressions mal sonnantes, notre philosophe jugea convenable de ne point poursuivre davantage ce discours. M. Roker commença alors à monter un autre escalier aussi malpropre que le précédent, et fut suivi, dans cette ascension, par M. Pickwick et par Sam.

Quand ils eurent atteint une autre galerie de la même dimension que celle du bas, M. Roker s'arrêta pour respirer, et dit à M. Pickwick: «Voici l'étage du café; celui d'au-dessus est le troisième, et celui d'au-dessus est le grenier: la chambre où vous allez coucher cette nuit s'appelle la salle du gardien, et voilà le chemin, venez.»

Lorsqu'il eut débité tout cela d'une haleine, M. Roker monta un autre escalier, M. Pickwick et Sam le suivant toujours sur ses talons.

Cet escalier recevait la lumière par plusieurs petites fenêtres, placées à peu de distance du plancher et ouvrant sur une cour sablée, bornée par un grand mur de briques, au sommet duquel régnaient dans toute la longueur des chevaux de frise en fer. Cette cour, d'après le témoignage de M. Roker, était le jeu de paume; et il paraissait, en outre, toujours d'après la même autorité, qu'il y avait une autre cour plus petite, du côté de Farringdon-Street, laquelle était appelée la cour peinte, parce que ses murs avaient été autrefois décorés de certaines représentations de vaisseaux de guerre, voguant à toutes voiles, et de divers autres sujets artistiques, exécutés jadis aux heures de loisir de quelque dessinateur emprisonné.

Ayant communiqué cette information, plus en apparence pour décharger sa conscience d'un fait important que dans le dessein particulier d'instruire M. Pickwick, le guide entra dans une autre galerie, pénétra dans un petit corridor qui se trouvait à l'extrémité, ouvrit une porte, et découvrit aux yeux des nouveaux venus une chambre d'un aspect fort peu engageant, qui contenait huit ou neuf lits en fer.

«Voilà, dit M. Roker en tenant la porte ouverte et en regardant M. Pickwick d'un air triomphant, voilà une chambre.»

Cependant la physionomie de M. Pickwick exprimait une si légère dose de satisfaction à l'apparence de son logement, que M. Roker reporta ses regards vers Samuel Weller, qui jusqu'alors avait gardé un silence plein de dignité, espérant apparemment trouver plus de sympathie sur son visage.

«Voilà une chambre! jeune homme, répéta-t-il.

– Oui, je la vois, répondit Sam, avec un signe de tête pacifique.

– Vous ne vous attendiez pas à trouver une chambre comme ça dans l'hôtel de Farringdon, hein?» dit M. Roker avec un sourire plein de complaisance.

Sam répondit à ceci en fermant d'une manière aisée et naturelle un de ses yeux, ce qui pouvait signifier ou qu'il l'aurait pensé, ou qu'il n'y avait jamais pensé du tout, au gré de l'imagination de l'observateur. Ayant exécuté ce tour de force, Sam rouvrit son œil et demanda à M. Roker quel était le lit particulier qu'il avait désigné d'une façon si flatteuse en disant qu'on y dormait comme une douzaine de marmottes.

«Le voilà, dit M. Roker en montrant dans un coin un vieux lit de fer rouillé. Ça ferait dormir quelqu'un, qu'il le veuille ou non.

– Ça me fait c't effet-là, répondit Sam en examinant le meuble en question avec un air de dégoût excessif. J'imagine que l'eau d'ânon n'est rien auprès.

– Rien du tout, fit M. Roker.

– Et je suppose, poursuivit Sam, en regardant son maître du coin de l'œil, dans l'espérance de découvrir sur son visage quelque symptôme que sa résolution était ébranlée par tout ce qui s'était passé, je suppose que les autres gentlemen qui dorment ici sont de vrais gentlemen?

– Rien que de ça. I'y en a un qui pompe ses douze pintes d'ale par jour, et qui n'arrête pas de fumer, même à ses repas.

– Ce doit être un fier homme, fit observer Sam.

– Numéro 1!» répliqua M. Roker.

Nullement dompté par cet éloge, M. Pickwick annonça, en souriant, qu'il était déterminé à essayer pour cette nuit le pouvoir du lit narcotique. M. Roker l'informa qu'il pouvait se retirer pour dormir à l'heure qui lui conviendrait, sans autre formalité, et le laissa ensuite avec Sam dans la galerie.

Il commençait à faire sombre; c'est-à-dire que, dans cet endroit où il ne faisait jamais clair, on venait d'allumer quelques becs de gaz en manière de compliment pour la nuit qui s'avançait au dehors. Comme il faisait assez chaud, quelques-uns des habitants des nombreuses petites chambres qui ouvraient à droite et à gauche sur la galerie avaient entre-baillé leurs portes. M. Pickwick y jetait un coup d'œil, en passant, avec beaucoup d'intérêt et de curiosité. Ici, quatre ou cinq grands lourdauds, qu'on apercevait à peine à travers un nuage de fumée de tabac, criaient et se disputaient, au milieu de verres de bière à moitié vides, ou jouaient à l'impériale avec des cartes remarquablement grasses. Là, un pauvre vieillard solitaire, courbé sur des papiers jaunis et déchirés, écrivait à la lueur d'une faible chandelle, et pour la cinquième fois, peut-être, le long récit de ses griefs, dans l'espoir de le faire parvenir à quelque grand personnage dont ces papiers ne devaient jamais arrêter les yeux, ni toucher le cœur. Dans une troisième chambre, on pouvait voir un homme occupé avec sa femme à arranger par terre un mauvais grabat, pour y coucher le plus jeune de ses nombreux enfants. Enfin, dans une quatrième et dans une cinquième, et dans une sixième et dans une septième, le bruit et la bière et les cartes et la fumée de tabac reparaissaient de plus en plus fort.

Dans la galerie même, et principalement dans les escaliers, flânaient un grand nombre de gens qui venaient là, les uns parce que leur chambre était vide et solitaire, les autres parce que la leur était pleine et étouffante; le plus grand nombre parce qu'ils étaient inquiets, mal à leur aise, et ne savaient que faire d'eux-mêmes.

Il y avait là toutes sortes de gens, depuis l'ouvrier avec sa veste de gros drap jusqu'à l'élégant prodigue, en robe de chambre de cachemire fort convenablement percée au coude. Mais ils se ressemblaient tous en un point, ils avaient tous un certain air négligent, inquiet, effaré, de gibier de prison; une physionomie impudente et fanfaronne, qu'il est impossible de décrire par des paroles, mais que chacun peut connaître quand il le désirera, car il suffit pour cela de mettre le pied dans la prison pour dettes la plus voisine, et de contempler le premier groupe de prisonniers qui se présentera, avec le même intérêt que révélait la figure intelligente de M. Pickwick.

«Ce qui me frappe, Sam, dit le philosophe, en s'appuyant sur la rampe de fer de l'escalier, ce qui me frappe, c'est que l'emprisonnement pour dettes est à peine une punition.

– Vous croyez, monsieur?

– Vous voyez comme ces gaillards là boivent, fument et braillent. Il n'est pas possible que la prison les affecte beaucoup.

– Ah! voilà justement la chose, monsieur. Ils ne s'affectent pas, ceux-là. C'est tous les jours fête pour eux, tout porter et jeux de quilles. C'est les autres qui s'affectent de ça: les pauvres diables qui ont le cœur tendre, et qui ne peuvent pas pomper la bière, ni jouer aux quilles; ceux qui prieraient, s'ils pouvaient, et qui se rongent le cœur quand ils sont enfermés. Je vais vous dire ce qui en est, monsieur; ceux qui sont toujours à flâner dans les tavernes, ça ne les punit pas du tout; et ceux qui sont toujours à travailler quand ils peuvent, ça les abîme trop. C'est inégal, comme disait mon père quand il n'y avait pas une bonne moitié d'eau-de-vie dans son grog; c'est inégal, et voilà pourquoi ça ne vaut rien.

– Je crois que vous avez raison, Sam, dit M. Pickwick, après quelques moments de réflexion; tout à fait raison.

– Peut-être qu'il y a par-ci par-là quelques honnêtes gens qui s'y plaisent, poursuivit Sam, en ruminant; mais je ne peux pas m'en rappeler beaucoup, excepté le petit homme crasseux, en habit brun, et c'était la force de l'habitude.

– Qui était-ce donc?

– Voilà précisément ce que personne n'a jamais su.

– Mais qu'est-ce qu'il faisait?

– Ah! il avait fait comme beaucoup d'autres qui sont bien plus connus. Il avait trop de crédit sur la place et il s'en était servi.

– En d'autres termes, il avait des dettes, je suppose.

– Juste la chose, monsieur; et, au bout d'un certain temps, il est venu ici, en conséquence. Ce n'était pas pour beaucoup: exécution pour neuf livres sterling, multipliées par cinq, pour les frais. Mais c'est égal, il est resté ici, sans en bouger, pendant dix-sept ans. S'il avait gagné quelques rides sur la face, elles étaient effacées par la crasse, car son visage malpropre et son habit brun étaient juste les mêmes à la fin du temps qu'ils étaient au commencement. C'était une petite créature paisible et inoffensive, courant toujours pour celui-ci ou celui-là, ou jouant à la paume et ne gagnant jamais; si bien qu'à la fin les geôliers étaient devenus tout à fait amoureux de lui, et il était dans la loge tous les soirs à bavarder avec eux, et à leur compter des histoires et tout ça. Un soir qu'il était, comme d'habitude, tout seul avec un de ses vieux amis, qui était de garde, il dit tout d'un coup: «Je n'ai pourtant pas vu le marché, Bill, qu'il dit (le marché de Fleet-Street était encore là à cette époque); je n'ai pourtant pas vu le marché depuis dix-sept ans. – Je sais ça, dit le geôlier en fumant sa pipe. – J'aimerais bien à le voir une minute, Bill, qu'il dit. – Je n'en doute pas, dit le geôlier en fumant sa pipe fort et ferme, pour ne pas avoir l'air d'entendre ce que parler voulait dire. – Bill, dit le petit homme brun brusquement, c'est une fantaisie que j'ai mis dans ma tête. Laissez-moi voir la rue encore une fois avant que je meure, et, si je ne suis pas frappé d'apoplexie, je serai revenu dans cinq minutes, à l'horloge. – Et qu'est-ce que je deviendrais, moi, si vous êtes frappé d'apoplexie, dit le geôlier. – Eh bien! dit la petite créature, ceux-là qui me trouveront me ramèneront à la maison, car j'ai ma carte dans ma poche: nº 20, escalier du café, dit-il. – Et c'était vrai, car, quand il avait envie de faire connaissance avec quelque nouveau voisin, il avait l'habitude de tirer de sa poche un petit morceau de carte chiffonnée avec ces mots-là dessus, et pas autre chose; en considération de quoi on l'appelait toujours Numéro Vingt. Le geôlier le regarda fisquement, puis à la fin, il dit d'un air solennel: Numéro Vingt, qu'il dit, je me fie à vous. Vous ne voudriez pas mettre un vieil ami dans l'embarras? – Non, mon garçon; j'espère que j'ai quelque chose de meilleur là-dessous,» dit le petit homme en cognant de toutes ses forces sur son gilet, et en laissant dégringoler une larme de chaque œil, ce qui était fort extraordinaire, car jamais auparavant une goutte d'eau n'avait touché son visage. Il secoua la main du geôlier et le voilà parti.

– Et il n'est jamais revenu, dit M. Pickwick.

– Enfoncé pour cette fois-ci, monsieur! car il revint deux minutes avant le temps, tout bouillant de rage, et disant qu'il avait manqué d'être écrasé par une voiture de place, qu'il n'y était plus habitué, et qu'il voulait être pendu, s'il n'en écrivait pas au lord maire. À la fin, on finit par le pacifier, et pendant cinq ans après ça, il ne mit pas seulement le nez à la grille.

– À l'expiration de ce temps, il mourut, je suppose, dit M. Pickwick.

– Non, monsieur; il lui vint la fantaisie de goûter la bière, dans une nouvelle taverne, tout à côté de la prison, et il y avait un si joli parloir, qu'il se mit dans la tête d'y aller tous les soirs, et il n'y manqua pas, monsieur, pendant longtemps, revenant toujours régulièrement, un quart d'heure avant la fermeture des grilles. Ça allait bien et confortablement; mais fin finale, il commença à se mettre si joliment en train, qu'il oubliait que le temps marchait, ou qu'il ne s'en souciait pas, et il arrivait de plus en plus tard, jusqu'à ce qu'une nuit son vieil ami allait justement fermer la porte. Il avait déjà tourné la clef quand l'autre rentra. «Un moment, Bill, qu'il dit. – Comment, Numéro Vingt, dit le guichetier, vous n'étiez pas encore rentré? – Non, fit le petit homme avec un sourire. – Eh bien! alors, je vous dirai ce qui en est, mon ami, dit le guichetier en ouvrant la porte lentement et d'un air bourru. C'est mon opinion que vous avez fait de mauvaises connaissances dernièrement, et que vous vous dérangez; j'en suis très-fâché. Voyez-vous, je ne veux pas vous désobliger, qu'il dit; mais si vous ne vous bornez pas à voir des gens comme il faut, et si vous ne revenez pas à des heures régulières, aussi sûr comme vous êtes là, je vous laisserai à la porte tout à fait.» Le petit homme fut saisi d'un tremblement, et jamais il n'a mis le pied hors de la prison depuis.»

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
27 eylül 2017
Hacim:
560 s. 1 illüstrasyon
Tercüman:
Telif hakkı:
Public Domain
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