Kitabı oku: «Recherches nouvelles sur l'histoire ancienne, tome II», sayfa 17
Le premier de ces travaux relativement aux Égyptiens de Memphis, fut la fondation de leur ville, qui dut avoir deux versions à raison de l’équivoque de l’ancienne et de la nouvelle ville: l’ancienne dut naturellement être attribuée au rois Menès, plutôt dieu qu’homme, que nous verrons aussi premier roi à Thèbes, et qui paraît n’avoir été qu’un synonyme d’Osiris. La seconde, qui fut la nouvelle Memphis, nous est déclarée par Diodore avoir été l’ouvrage d’un roi puissant nommé Uchoreus, dont les listes nous présentent un synonyme dans le roi Achoris,250 successeur de Tethmos. Il appartint à un tel prince de déplacer un fleuve, tel que le Nil, pour élever une ville entière sur son lit comblé. L’expérience, qui avait fait connaître la faiblesse de l’ancienne Memphis, suggéra l’idée de cette nouvelle création, où de puissants moyens défensifs furent réunis à la commodité. Diodore nous apprend que bientôt le «séjour de Memphis la neuve parut si délicieux aux rois, qu’ils abannèrent celui de Thèbes, dont la splendeur ne fit plus que décliner.» Voilà donc Thèbes devenue vassale sans secousse, sans révolution, et le silence de l’histoire est expliqué sur la confusion souvent faite des rois des deux métropoles.
Après la création de Memphis par Uchoreus, le premier ouvrage, grand et digne d’admiration, fut, selon Hérodote, le lac de Mœris, ce roi dont le règne précéda de peu celui de Sésostris. Si ce dernier se place vers les années 1360 à 1365, comme nous l’avons dit, Mœris ne doit pas être éloigné; et si nous n’apercevons pas son nom entre Uchoreus et Sésostris, c’est par la raison que beaucoup de ces princes ont eu divers noms. Nous en connaissons au moins 4 à Sésostris. Dans ce nouvel ouvrage nous voyons une marche croissante de la puissance: les conquêtes de Sésostris ne sont qu’un autre genre du développement, une autre conséquence de l’accumulation progressive des moyens depuis le règne de Tethmos. La guerre contre les pasteurs avait forcé ce prince de lever un grand état militaire; il put le réduire, mais non l’annuler. Ses successeurs, selon le penchant de tous ceux qui gouvernent, durent trouver commode et utile d’entretenir cette forte armée, tant pour résister au dehors que pour maintenir l’obéissance au dedans; les habitudes guerrières étaient contractées, on les conserva. La tactique fût cultivée, et ce fut de cette source que Sésostris tira les instruments de conquête que son génie mit en action. Ainsi c’est du règne des pasteurs que nous voyons dériver, comme conséquences naturelles, tous les événements postérieurs.
Si après Sésostris, son troisième successeur, Rhampsinit, nous montre la plus grande masse d’or et d’argent que l’on eût encore vue, c’est qu’elle provint des conquêtes de Sésostris et des tributs de toute l’Asie251; si après Rhampsinit, les tyrans Cheops et Chephren bâtissent leurs extravagantes pyramides, c’est parce que le despotisme ignorant ne sait comment employer ses trésors accumulés, etc., etc.
Mais c’en est assez sur ce sujet: nous avons à répondre à deux questions que déjà se sera faites le lecteur.
En quel temps précis arriva l’invasion des pasteurs, et quelle fut cette race d’étrangers?
Ici le défaut de documents positifs nous réduit à des calculs de probabilités que nous tâcherons de rendre raisonnables.
Aucune des listes ne s’accorde sur la date de l’invasion des pasteurs: l’ancienne Chronique donne l’an 1851; l’Eusèbe du Syncelle, 1830; l’Eusèbe du Chronicon, 1807; Josèphe, dégagé de ses erreurs, se rapproche infiniment de ce dernier; car, en plaçant le règne de Sethos-is, qui est Sésostris, vers 1360 ou 1365, nous trouvons dans les rois qui remontent jusqu’à Tmos-is, fils de Mefragmutos, c’est-à-dire jusqu’au véritable expulseur, une somme de 191 années, qui nous porte à l’an 1556. De là, jusqu’à l’entrée des pasteurs sous Salatis, Josèphe compte 239, ce qui la place en 1795, différence, 12 ans de 1807, et il nous appartient 4 ou 5 années sur le règne de Tmos. D’autre part, si nous prenons les 128 ans que nous donne sa liste depuis Tmosis jusqu’au chef de la dynastie (Amosis, qu’il nomme Tethmosis), et que nous y joignions les 103 ans qu’Eusèbe et l’ancienne Chronique donnent aux pasteurs, nous avons 331 ans; plus, 4 ou 3 ans du règne de Tmosis. Nous sommes bien voisins des 239 de Josèphe. L’analogie de ces deux produits, et leur ressemblance avec les 1807 d’Eusèbe, nous font donc regarder comme la plus probable des dates, celle de 1800 à 1810 pour l’arrivée des pasteurs.—Maintenant quelle race d’hommes furent-ils? Voici nos conjectures.
Manéthon nous a dit que, selon quelques auteurs, ils furent des Arabes; son copiste Africanus les appelle Phéniciens, et cela présente peu de différence, parce que les Phéniciens sont reconnus pour être d’origine arabe. Maintenant pesons toutes les circonstances de Manéthon. Il nous dit que cette horde, en quittant l’Égypte, comptait 240,000 hommes armés: on doit croire que pendant une résidence de deux siècles, cette population, nourrie dans l’abondance, s’était beaucoup multipliée, et qu’en arrivant elle peut n’avoir pas eu plus de 100,000 combattants; c’était assez pour vaincre. Cela suppose 400,000 têtes au moins: c’est beaucoup de monde pour les Arabes. Cette multitude entre par l’isthme de Suez: des Arabes seulement peuvent entrer par-là. Elle n’a point de roi suprême: elle est donc divisée en tribus comme les Arabes, ayant chacune son chef ou ses chefs, égaux entre eux, sauf la prépondérance du plus fort. Cette multitude ne marche pas droit sur Memphis; Africanus indique qu’elle s’arrête dans la Basse-Égypte (pays de pâturages pour ses troupeaux), et qu’elle y bâtit une ville, c’est-à-dire un camp retranché: ces hommes-là veulent mettre en sûreté leurs familles et leurs biens.252 Ce n’est qu’ensuite qu’ils attaquent les Égyptiens doux, timides, et qu’ils s’emparent de Memphis: toutes ces circonstances n’annoncent pas une invasion préméditée, ni un peuple armé pour conquérir; elles indiquent, au contraire, un peuple chassé de son pays, cherchant refuge ailleurs: qui fut ce peuple à cette époque? En méditant cette question, nous nous sommes rappelé que dans les monuments arabes de l’ancien Iémen il est fait mention d’une grande révolution arrivée dans toute la presqu’île à une époque très-reculée. Nous avons vu (tome 1er des Recherches nouvelles, pages 278 et 498) que Masèoudi, Hamza, Aboulfeda et Noueïri nous ont dit «que les plus anciens peuples de l’Arabie furent quatre tribus appelées Aâd, Tarnoud, Tasm et Djodaï; qu’ Aâd habita le Hadramaut; Tamoud, le Hedjâz et le rivage oriental de la mer Rouge (le Tehama) etc.; que ces Arabes furent attaqués par une autre confédération d’origine différente, composée de 10 tribus; qu’il y eut entre elles des guerres violentes qui se terminèrent par la défaite et l’expulsion des quatre tribus, etc.»
Dans notre opinion ce seraient les débris de ces quatre tribus qui se seraient écoulés vers l’Égypte, et nous en trouverions les restes dans les Thamudeni et dans les Madianites et les Amalekites leurs parents: quant à la date de cet événement, ce que les auteurs musulmans nous indiquent ne laisse pas que de se rapprocher. «Le prince qui vainquit ces Arabes, ajoutent-ils, s’appelait Abdel-Chems; il prit le surnom de Saba (le victorieux); son fils (ou descendant) Homeir, fut l’auteur du nom de Hemiarites ou Homérites, donné aux tribus victorieuses. Celui-ci chassa les Arabes Tamoud de l’Iémen dans le Hedjâz. Son 15e dèscendant fut Haret-el-Raïes» (que nous avons prouvé être contemporain de Ninus et associé à ses conquêtes).
Or Ninus ayant régné en 1230, les 15 générations, si on les évaluait à la manière égyptienne, nous porteraient au-delà de 1700 ans avant J.-C. Mais de plus, il est constant que dans cette antiquité, et même assez généralement dans des temps moins reculés, les Arabes omettent ou suppriment des degrés de filiation; que par le nom de fils ils entendent très-souvent un simple descendant, en sorte qu’il n’est pas du tout prouvé que Homeir ait été le fils immédiat de Saba: d’autre part, l’historien Nouéïri ajoute que Homeir fut contemporain d’Ismael, fils d’Abraham: ce qui veut dire que Nouéïri comparant les calculs arabes aux calculs juifs, a trouvé l’analogie citée. Or dans les calculs des Juifs, Abraham se place entre 1900 et 2000, et cela cadre singulièrement avec nos données. Ce n’est donc pas sans quelque vraisemblance que nous regardons les pasteurs de Manéthon comme étant les anciens Arabes chassés par Saba et Homeir, et que nous plaçons l’époque de cet événement vers les années 1800 à 1810.
Nous trouvons d’autres probabilités dans le caractère hardi et féroce de ces expulsés, aigris par leurs malheurs, dans les idées militaires qu’ils montrent et que leur avaient enseignées des guerres longues et sanglantes; enfin même dans la persécution religieuse qu’ils exercent, attendu qu’étant élevés dans le culte simple du soleil et des astres, ils durent prendre en haine les idoles bizarres des Égyptiens dont ils ne conçurent point le sens allégorique. Ces pasteurs étant de la branche des Arabes noirs, ils furent, en style oriental, des enfants de Kush, en style grec, des Éthiopiens; à ce titre ils étaient parents des Phéniciens, dont Africanus leur applique le nom. Ce nom de Kush serait-il la base de celui d’Y-ks-os que leur donnèrent les Égyptiens? Cela n’est pas impossible; mais ce qui est presque certain, c’est que sous le nom d’Éthiopiens, leurs rois sont du nombre des 18 de ce sang, qu’Hérodote dit avoir régné en Égypte. Il serait étonnant que les prêtres eussent omis cette dynastie qui posséda la Basse-Égypte pendant plus de 200 ans; elle dut même y laisser quelques traces de son langage: malheureusement nous n’avons presque rien de l’ancien égyptien253. Peut-être la pratique de l’Arabe en cette contrée fut-elle un des moyens qui en ouvrit aux Phéniciens le commerce, et leur procura la connaissance des idées théologiques et scientifiques de l’Égypte, qu’ils répandirent dans la Grèce plus de 1600 ans avant notre ère; enfin les pasteurs chassés se perdirent dans le désert sans laisser de trace sensible, et il semble qu’il n’y a que des Arabes qui puissent paraître, vivre, et disparaître ainsi.
Un dernier moyen de nous éclairer pourra se trouver dans les monuments pittoresques apportés d’Égypte par les savants français: nous y voyons des scènes de combats qui représentent, d’une part, des Égyptiens reconnaissables à leur physionomie et à leurs costumes; d’autre part, des étrangers dont la tête est ornée de couronnes de plumes en forme de diadèmes. Il s’agit de savoir si ces physionomies, très-bien exprimées, trouvent leur ressemblance sur quelques médailles ou autres monuments phéniciens ou arabes. Le vainqueur ayant été roi de Thèbes, il serait naturel que le tableau de son triomphe eût été gravé sur les murs de son palais en cette ville. Les savants descripteurs de ces tableaux ont voulu y voir des Indiens; cela ne réfuterait pas notre conjecture, puisque les habitants de l’Arabie, et surtout de l’Iémen, ont été, comme ceux de l’Éthiopie, désignés en plusieurs occasions par les Grecs et par les Latins, sous le nom d’Indi; voilà tout ce que nous pouvons dire sur ce sujet. Il nous reste un mot à joindre sur les Juifs, d’après les idées de Manéthon et de quelques autres anciens historiens.
§ III.
Époque de l’entrée et de la sortie des Juifs, selon Manéthon
Nous avons prouvé dans le tome Ier de cet ouvrage, ch. 2, 3 et 4, que les livres juifs ne nous donnent aucune idée claire et précise du temps où se fit la sortie d’Égypte, et cela parce que la période anarchique des Juges présente un vide absolu d’archives et d’annales régulières. Il semble que l’historien Josèphe, muni de celles des Phéniciens et des Égyptiens, publiées par Ménandre l’Éphésien, par Manéthon, Lysimaque, Cheremon et d’autres auteurs, eût pu éclaircir cette difficulté; mais ce prêtre juif, fortement imbu de ses préjugés religieux, s’est plutôt occupé de disputer que d’instruire, et ce sont moins des résultats qu’on obtient de lui, que des matériaux. Voyons quel parti l’on peut tirer de ce qu’il nous dit être l’opinion de Manéthon dans la question dont il s’agit. 254 Selon Manéthon, «les ancêtres du peuple juif furent un mélange d’hommes de diverses castes, même de celles des prêtres égyptiens qui, pour cause d’impuretés, de souillures canoniques, et spécialement pour la lèpre, furent, sur l’ordre d’un oracle, expulsés d’Égypte par un roi nommé Aménoph.....» Les livres juifs ne s’éloignent pas de ce récit, lorsqu’ils disent (dans l’Exode) que beaucoup de menu peuple et d’étrangers suivirent la maison d’Israël255; les ordonnances répétées du Lévitique contre la lèpre prouvent que toutes ces maladies furent dominantes. Un autre reproche d’impureté de la part d’un Égyptien, est la vie pastorale; et les juifs conviennent qu’ils furent pasteurs. Manéthon évalue leur nombre à 80,000, lesquels des environs de Peluse se rendirent en Judée à Hiérusalem. Nous avons démontré256 l’impossibilité physique des 600,000 hommes armés de l’Exode, lesquels supposeraient une masse totale de 2,400,000 âmes; et nous avons tiré des livres juifs eux-mêmes des indices qui se rapprochent beaucoup de Manéthon: il n’a point été aussi ignorant en tout ceci que veut le dire Josèphe..... Celui-ci lui reproche d’introduire un faux Aménoph sans date connue; mais puisque cet Aménoph est dit père de Séthos, qui (lors de la guerre de 13 ans occasionée par les lépreux) était âgé de 5 ans, Manéthon a suffisamment désigné l’homme et le temps: il y ajoute un nouvel indice, lorsqu’il nomme en sa liste un roi Ramessés, père d’Aménoph; car ce Ramessés qui effectivement précède Aménoph dans la 18e dynastie, correspond très-bien à celui par l’ordre duquel les Juifs bâtirent la ville de Ramessés. En tout ceci Josèphe est le plus répréhensible de ne nous avoir pas donné la date du règne de Séthos-Sésostris, prise sur l’échelle chronologique des Juifs..... Ce règne est, comme nous l’avons dit plus haut, le point de départ d’où tout dépend: selon l’ancienne chronique il aurait commencé en l’an 1400 avec la dynastie 19e, dont Séthos fait l’ouverture: selon Africanus c’eût été en 1394: ces deux dates se ressemblent, et elles justifieraient nos calculs dans l’article des Juifs257, lorsque nous y avons dit que la sortie d’Égypte sous Moïse dut arriver avant l’an 1420: cela cadre singulièrement avec le récit de Manéthon, qui nous représente Séthos âgé de 13 ans à l’époque de la guerre pour l’expulsion des lépreux.
D’autre part, selon l’Eusèbe du Syncelle, le règne de Séthos ne daterait que de l’an 1376, et selon l’Eusèbe de Scaliger, il se retarderait jusqu’à l’an 1356. La 1re de ces dates, en raisonnant toujours d’après Manéthon, placerait la sortie vers 1390; ce qui s’accorde avec notre calcul généalogique des grands-prêtres cités par Josèphe..... La 2e réclame en sa faveur l’autorité d’Hérodote; mais elle nous laisse contre elle le soupçon d’avoir été dressée par Eusèbe dans cette expresse intention: en résultat, il paraît certain que la sortie d’Égypte n’a pu précéder les années 1410 à 1420, ni se retarder au-dessous de 1390 avant J.-C. Posons pour terme moyen 1400, et disons que si Séthos-Sésostris, dans le début de sa grande expédition, n’attaqua point les Hébreux, ce fut par suite de l’aversion et du mépris que lui inspirait leur récente origine.
Maintenant combien dura réellement le séjour des Juifs en Égypte? Leurs livres ne sont pas d’accord..... Le texte samaritain dit 215 ans; l’hébreu et le grec disent 430.
Si nous appliquons ces 215 au calcul d’Hérodote et d’Eusèbe (1355), l’entrée aura eu lieu vers 1570.258 Si nous les appliquons au calcul d’Africanus et de la Chronique, elle aura eu lieu vers 1610. Dans l’un et l’autre cas, elle tombe dans la période de nos pasteurs, expulsés en 1556.
Si au contraire nous employons les 430 ans du texte hébreu, l’entrée remontera vers les années 1790 ou 1820, et ici elle coïncide presque à l’entrée des rois pasteurs.
Pourquoi cette différence si forte d’un texte à l’autre? Ne pourrait-on pas dire que l’un représente l’opinion du rédacteur du Pentateuque, le grand-prêtre Helqiah, tandis que l’autre serait l’opinion des docteurs d’Alexandrie, qui, au temps de la traduction, ayant eu connaissance des livres égyptiens, auraient voulu, comme le fit Josèphe, que les pasteurs rois fussent les pasteurs hébreux. L’autre hypothèse ne laisse pas que d’avoir plusieurs convenances. Par exemple, la Genèse parle des relations orales de la famille d’Abraham et de Jacob avec les Égyptiens, comme d’une chose simple et naturelle; cependant nous savons que la langue de ce peuple différait essentiellement de l’hébreu; et dans ces siècles barbares une langue n’était pas connue hors de son territoire: si donc nous supposons que ces relations aient eu lieu avec les rois pasteurs, il n’y a plus de difficulté, parce que leur langue fut un dialecte arabique comme l’est l’hébreu.
D’autre part, les Égyptiens haïssaient les pâtres comme gens impurs devant la loi: et les rois et prêtres d’Égypte n’eussent pas dû accueillir si bien les Hébreux; les rois pasteurs l’ont pu; leur prêtre Putiphar a pu même recevoir Joseph en sa maison, et une femme de cette race recueillir Moïse flottant sur les eaux.
Selon les livres chaldéens cités par Bérose, et selon les livres égyptiens cités par le Persan Artapanus,259 Abraham enseigna l’astrologie ou astronomie aux Égyptiens; comment croire que les Égyptiens, inventeurs du zodiaque, et de tout temps célèbres par leur science astronomique, aient reçu des leçons d’un étranger vagabond; mais cela peut se croire des pasteurs arabes d’Égypte qui arrivèrent et purent rester ignorants en cette science. Artapanus ajoute que Joseph établit le mesurage des terres et autres institutions utiles, lesquelles n’ont pu être ignorées que des pasteurs qui avaient tout bouleversé.—Quant à l’accaparement de toutes les terres dont parle la Genèse, comme conseillé par Joseph en temps de famine, cela convient encore à l’esprit des rois pasteurs, spoliateurs et tyrans: ce livre d’Artapanus, qui sous quelque rapport diffère des récits de la Genèse et de Manéthon, a, sous d’autres rapports, des analogies marquées… Il fait élever Moïse par la fille du roi de Memphis, en disant qu’il y avait en ce temps-là un autre roi dans le pays au-dessus et divers rois en Égypte. Il fait de Moïse un ministre et un général du roi qui l’aime d’abord, puis qui redoute son grand crédit et veut le faire périr dans une guerre d’Éthiopie. Moïse part pour ce pays, s’arrête en chemin pendant 10 ans, et avec les seuls bras de sa famille ou de ses nationaux, il bâtit une ville appelée Hermopolis… Tout cela pêche par invraisemblance; mais si l’on se rappelle que l’Éthiopie des Grecs est le pays de Kush des Orientaux; que le pays de Madian, où se retira Moïse, était une dépendance, une terre de Kush, comme nous l’avons prouvé,260 et que près de ce pays, sur la frontière d’Égypte, est la ville d’Héroopolis, tout près de celle de Phitom (Patumos d’Hérodote), bâtie par les Hébreux, on sera porté à croire qu’Artapanus ou ses copistes ont commis l’altération d’Héroopolis en Hermopolis. Du reste, Artapanus parle des miracles opérés par Moïse et de la sortie de son peuple, presque comme l’Exode, excepté qu’il les répartit sur une durée de temps plus ou moins longue, pendant laquelle Moïse se serait prévalu des accidents et phénomènes naturels. On veut aujourd’hui traiter Artapanus de romancier; mais Josephe et Alexandre Polyhistor l’ont regardé comme un homme savant, nourri de la lecture des livres égyptiens. De tout ce mélange de variantes261, d’analogies, d’invraisemblances, que conclure, sinon qu’il a réellement existé des faits qui ont été la base de l’histoire, mais qui, vu leur antiquité, vu la négligence des écrivains à les recueillir près de leur source, ont été altérés par les récits populaires d’une génération à l’autre, et se sont présentés sous cette forme aux historiens tardifs? Il est probable que la nation juive doit son origine à un premier noyau de peuple d’origine chaldéenne, puisque l’idiome chaldéen est resté sa langue. Il est probable encore qu’il y a quelque chose de vrai dans ce que Manéthon dit de sa sortie, puisque les livres hébreux, et Artapanus, et Tacite même262, citent des circonstances très-ressemblantes.
Quant aux dates fixes, puisque les Juifs même n’ont pu nous les donner, qu’ils se montrent au contraire tout-à-fait ignorants sur la période entière du séjour et sur l’état de l’Égypte lors de la sortie, il faut nous contenter de celles qu’indique le raisonnement; mais n’omettons pas de remarquer, en finissant cet article, qu’il sera toujours étrange de voir l’auteur quelconque de la Genèse se prétendre si bien instruit de tant de détails minutieux sur Abraham, Jacob et Joseph, quand il l’est si peu de tout ce qui concerne le séjour en Égypte, et la sortie sous Moïse, et la vie errante du désert jusqu’au moment de passer le Jourdain. Cela est contre tout état probable de monuments; et cela nous confirme dans l’opinion émise ailleurs, savoir que les matériaux de la Genèse sont totalement étrangers aux Juifs, et qu’ils sont un composé artificiel de légendes chaldéennes dans lesquelles l’esprit allégorique des Arabes a représenté l’histoire des personnages astronomiques du calendrier sous les formes anthropomorphiques. Mais rentrons dans notre domaine chronologique, et voyons quels secours ajoute Diodore de Sicile aux cadres tronqués de Manéthon et d’Hérodote.