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Kitabı oku: «Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 5 - (D - E- F)», sayfa 33

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La Champagne précède les autres provinces de France, lorsqu'il s'agit d'adopter ce parti. Les bas-côtés de la nef de Saint-Urbain de Troyes, dont la construction date de la fin du XIIIe siècle, présentent entre les contre-forts cette disposition d'un fenestrage rectangulaire, très-riche, indépendant des voûtes. L'architecte de cette église si curieuse, voulant adopter un parti large dans un petit édifice, ce qu'on ne saurait trop louer, n'a divisé sa nef qu'en trois travées. Les bas-côtés sont couverts par des voûtes d'arête sur plan carré; mais comme l'espace entre les contre-forts eût été trop large pour ouvrir entre les piles une seule fenêtre, à moins de lui donner une largeur plus grande que sa hauteur, ce qui eût été d'un effet très-désagréable, ou de laisser entre les baies et les piles de larges pieds-droits, ce qu'on voulait éviter, cet architecte donc, fig. 25, a divisé chaque travée du bas-côté par une nervure A qui vient retomber sur une pile et un contre-fort B moins puissant que les contre-forts C, lesquels reçoivent les arcs-boutants. Dans les espaces laissés entre les gros et petits contre-forts il a ouvert des fenêtres en D, terminées carrément sous le chéneau, et indépendantes des formerets E des voûtes. Il a voulu cependant donner à l'extérieur comme à l'intérieur une grande richesse à ce fenestrage.



La fig. 26 présente la face extérieure d'une de ces baies, à l'échelle de 0m,02 c. pour mètre. En A est l'un des gros contre-forts, en B l'un des petits. La coupe E est faite sur la balustrade en E'. L'assise formant chéneau et reposant sur la claire-voie est en G. La section C, à 0m,04 c. pour mètre, est faite sur le meneau à la hauteur H, et celle D, sur ce même meneau, à la hauteur I. Les vitraux sont posés dans les feuillures K.



Si nous faisons une coupe sur l'axe de cette fenêtre, fig. 27, nous avons le meneau central en A, le petit contre-fort en B, et sous le formeret de la voûte, en C, une claire-voie qui n'est qu'une décoration. On voit que le chéneau G repose sur ce formeret et sur la claire-voie extérieure. Examinons cette fenêtre de l'intérieur du bas-côté, fig. 28.



En A nous avons indiqué la claire-voie vitrée, la fenêtre qui porte le chéneau G, et qui est exactement comprise entre les contre-forts; en B est tracée la claire-voie intérieure, sous le formeret C de la voûte. D'après l'appareil, qui est exactement tracé, on reconnaît que ces claires-voies sont complétement indépendantes de la structure des contre-forts, qu'elles ne sont que des dalles ajourées taillées dans un excellent liais de Tonnerre. La construction ne consiste donc qu'en des contre-forts ou piles portant les voûtes; puis, comme clôture, il n'y a que des cloisons ajourées, posées en dehors et recevant les chéneaux. Ce sont de véritables châssis que l'on peut poser après coup, changer, réparer, remplacer sans toucher à l'édifice. Il n'est pas besoin de faire ressortir les avantages qui résultent de ce système, parfaitement raisonné, qui permet les décorations les plus riches et les plus légères sans rien ôter à la bâtisse de sa solidité et de sa simplicité.

Pendant le XIVe siècle cependant, on abandonne, même en Champagne, ce système de fenestrage inscrit dans des formes rectangulaires pour les édifices religieux, et on en revient à prendre les formerets des voûtes comme archivoltes des baies; mais les meneaux deviennent de plus en plus déliés, et arrivent à des sections d'une extrême délicatesse afin de laisser aux vitraux, c'est-à-dire aux surfaces décoratives colorées, le plus de surface possible (voy. MENEAU).

FENÊTRES APPARTENANT À L'ARCHITECTURE CIVILE ET MILITAIRE.--Dans l'architecture antique grecque et romaine, c'est la structure intérieure des vaisseaux à éclairer qui commande la forme et la dimension des fenêtres. Ce même principe est appliqué avec plus de rigueur encore par les architectes du moyen âge. Si la forme cintrée convient à des baies dont les vitraux sont dormants, et qui sont inscrites par des voûtes, on conviendra que cette forme ne peut guère être appliquée à des baies qu'il faut ouvrir souvent et qui sont percées entre des planchers. Ainsi que nous l'avons dit en commençant cet article, les fenêtres des premiers siècles du moyen âge sont très-rarement garnies de vitraux dans les édifices publics; mais il fallait bien, dans les habitations privées, se garantir du froid et du vent, ne fût-ce que pendant la nuit: alors les fenêtres étaient closes par des volets de bois; quand on voulait de l'air et de la lumière, on ouvrait les volets. Les inconvénients de ce moyen primitif obligèrent bientôt les architectes à percer ces volets de quelques trous que l'on garnissait de verre ou de parchemin. Puis on en vint à faire des châssis de bois recevant les vitraux, du papier, du parchemin ou de la toile.

Quelques fenêtres d'habitations du XIe siècle, comme celles de nos anciens donjons normands, par exemple, ne laissent voir nulle trace de fermeture ancienne; il est à croire qu'elles étaient closes au moyen de nattes, de courtines de laine ou de grosse toile; on voit en effet souvent figurées dans les manuscrits carlovingiens des baies garnies de ces tentures mobiles glissant sur des tringles, et retenues par des embrasses lorsqu'on voulait faire entrer l'air et la lumière dans les intérieurs. Déjà certainement, les habitations urbaines, celles des bourgeois qui se livraient à un travail quelconque dans l'intérieur de leurs maisons, étaient percées de fenêtres vitrées ou parcheminées alors que les châteaux conservaient encore les anciens usages, car les seigneurs féodaux et leurs hommes ne se réunissaient guère que le soir dans leurs réduits pour manger et dormir; ils ne se livraient à aucun travail intérieur, et passaient presque toutes leurs journées à courir la campagne.

Dans les maisons des villes, le besoin de faire pénétrer le jour dans les intérieurs (les rues étant généralement étroites) motivait ces colonnades vitrées que nous trouvons dans presque toutes les habitations françaises à dater du XIIe siècle. L'ouvrage de MM. Verdier et Cattois sur l'architecture civile du moyen âge nous fournit un grand nombre d'exemples de ces fenestrages continus qui occupaient tout un côté de la pièce principale au premier et même au second étage, pièce qui servait de lieu de travail et de réunion pour toute la famille. Mais ces claires-voies ne peuvent être considérées, à proprement parler, comme des fenêtres; nous avons l'occasion de les décrire à l'article MAISON.

La fenêtre romane civile est ordinairement étroite, composée de deux pieds-droits terminés par un cintre appareillé ou découpé dans un linteau avec un arc de décharge par derrière, ou un second linteau présentant une assise assez forte pour recevoir les solivages du plancher. Quelquefois la fenêtre n'est autre chose qu'une baie cintrée, comme celles présentées fig. 1 et 2. Cependant ces ouvertures (à cause du cintre qui les terminait) se fermaient difficilement au moyen de volets, ceux-ci ne pouvant se développer sous les cintres; on renonça donc bientôt à employer ce mode, on élargit les baies en les divisant par un meneau, une colonnette.



La fig. 29 nous montre une fenêtre romane de la fin du XIe siècle qui, par la conservation de tous ses accessoires, fournit un exemple remarquable du système de fermeture généralement adopté à cette époque. Elle provient du château de Carcassonne 483. En A est tracé le plan. Sa largeur totale entre les pieds-droits de l'ébrasement est de 1m,20, et la profondeur de cet ébrasement est de 0,60 c., moitié de la largeur. Une colonnette en marbre blanc porte le linteau extérieur évidé en deux portions d'arcs (voir la face extérieure de la baie B). Ce linteau I est doublé intérieurement d'un second linteau K, et d'un troisième L (voir la coupe C) qui est fait d'un bloc de béton 484 et qui reçoit le solivage du plancher. Deux gonds G, encore en place (voir la face intérieure D), recevaient un volet brisé qui, ouvert, se développait dans l'ébrasement et sur le mur ainsi que l'indique le plan. Lorsqu'on voulait clore la fenêtre, on rabattait les deux feuilles du volet et on tirait la barre de bois dont la loge est indiquée sur ce plan et sur le tracé D, en F, jusqu'à ce que l'extrémité de cette barre s'engageât dans l'entaille P 485. L'allége de la fenêtre formait banc à l'intérieur de la pièce.



Nous donnons (30) la face intérieure de ce volet en O, et sa coupe sur ab en M; la barre tirée est indiquée en R. Des ajours vitrés au moyen de morceaux de verre enchâssés dans du plomb donnaient de la lumière dans la pièce lorsque les volets étaient fermés. Les pentures étaient brisées comme les volets, ainsi que l'indique notre figure. Ici la hauteur entre planchers était trop faible pour permettre l'emploi de l'arc de décharge intérieur; mais habituellement l'ébrasement des fenêtres romanes divisées par une colonnette est surmonté d'un arc de décharge plein cintre.



Voici (31) l'une des fenêtres du donjon de Falaise, dont la construction date à peu près de la même époque. Le plan A nous fait voir que la baie consiste réellement en une loge ou arcade cintrée, fermée extérieurement par une allége, une colonnette et deux tableaux. Sur le dehors (voir le tracé B) la fenêtre ne laisse pas percer le cintre de l'ébrasement, mais seulement les deux petits arcs retombant sur la colonnette. Intérieurement (voir le tracé D) on remarque que la fenêtre offre un réduit duquel, en s'avançant jusqu'à l'allége C, on peut regarder au pied du mur extérieur. Ces fenêtres ne semblent pas avoir été fermées primitivement par des volets, mais seulement, comme nous le disions tout à l'heure, par des nattes ou des tapisseries pendues sous le grand cintre. Un peu plus tard nous observons que dans ces châteaux normands on emploie les volets de bois pleins pour fermer les baies, en faisant paraître le grand cintre de l'ébrasement à l'extérieur et en ouvrant un jour dormant sous ce cintre.

C'est ainsi que sont construites quelques fenêtres du château d'Harcourt à Lillebonne (Seine-Inférieure) et de plusieurs autres châteaux normands du XIIe siècle.



La fig. 32 explique cette disposition. Le tracé A nous montre la fenêtre à l'extérieur, et celui B sa coupe. Sous le berceau plein cintre E de l'ébrasement est bandé un arc D dont les sommiers reposent sur les extrémités d'un linteau C et sur deux pieds-droits. Un meneau soulage ce linteau au milieu de sa portée. L'espace compris entre le linteau C et l'arc D était vitré à demeure, et des volets pleins, brisés, barrés, fermaient la baie derrière le meneau. Plus tard, lorsqu'on vitra les fermetures des fenêtres, on conserva encore ces châssis dormants au-dessus de la partie ouvrante. Cette tradition se conserva en France jusqu'à nos jours, puisque dans beaucoup d'habitations du dernier siècle on voit encore des fenêtres avec des jours d'impostes qui souvent étaient dormants. En effet, lorsqu'on veut regarder par une fenêtre, il est assez incommode d'ouvrir un châssis de trois ou quatre mètres de hauteur, difficile souvent à manoeuvrer, que l'humidité fait gonfler ou la sécheresse rétrécir, et qui laisse passer en hiver un volume d'air beaucoup plus considérable qu'il n'est besoin. Il faut dire aussi que les pièces destinées à l'habitation étant beaucoup plus vastes que celles de nos appartements, on ne sentait pas le besoin, comme aujourd'hui, de renouveler l'air intérieur aussi souvent. Les cheminées larges faisaient un appel suffisant de l'air extérieur en hiver, pour qu'il ne fût pas nécessaire d'ouvrir les fenêtres; et, en été, on obtenait de la fraîcheur en les tenant fermées. Ce n'était que lorsqu'on voulait regarder dans la rue qu'on entre-bâillait les châssis ouvrants d'une petite dimension, et permettant à une seule personne ou à deux, tout au plus, de se pencher sur l'appui. On renonça cependant, au XIIIe siècle, aux barres se logeant dans l'épaisseurs des murs, tirées derrière les volets, et, au lieu de volets pleins ou percés de petits ajours, on établit des châssis de bois presque entièrement vitrés.



Voici (33) une des fenêtres du commencement du XIIIe siècle, percées dans les anciens bâtiments dépendant aujourd'hui de la citadelle de Verdun. C'est encore le système roman. Le linteau, déchargé par le berceau brisé de l'ébrasement qui apparaît au dehors, est ajouré d'un quatre-feuilles vitré dormant; mais les deux claires-voies sont garnies de châssis vitrés roulant sur des gonds scellés dans les feuillures, et maintenus le long du meneau par des targettes s'enfonçant dans une gâche B en pierre, réservée à l'intérieur de ce meneau. L'esprit ingénieux des architectes laïques du XIIIe siècle allait trouver des dispositions nouvelles et très-variées pour les fenêtres des édifices civils et des habitations.



Nous voyons que dans certains cas ils conservent la tradition romane pure, c'est-à-dire qu'ils ouvrent dans un mur une arcade plein cintre, et posent un linteau sous ce cintre pour recevoir un châssis carré, comme dans une tourelle dépendant de l'évêché de Soissons (34) (commencement du XIIIe siècle); ou bien que, pour de petites pièces, ils adoptent des baies larges, relativement à leur hauteur, séparées par un élégant meneau central, couvertes extérieurement par un linteau décoré d'arcatures, et formant intérieurement un ébrasement terminé par un berceau de décharge et muni d'un banc B (35) 486.



Ici le meneau est renforcé intérieurement d'un appendice A servant d'accoudoir, et recevant les targettes de fermeture des deux châssis (voy. l'article BANC, fig. 4). Nous voyons encore que pour éclairer des pièces assez hautes entre planchers, ils disposent les fenêtres de manière à pouvoir n'ouvrir à la fois qu'une partie de leur surface; alors le meneau central est divisé par une traverse (36), la baie porte quatre châssis mobiles: ceux inférieurs s'ouvrant pour regarder dehors, et ceux supérieurs pour donner de l'air dans le haut de la pièce, toujours avec des renforts aux meneaux pour recevoir les targettes 487.



Cependant on demandait aux architectes, vers le milieu du XIIIe siècle, des fenêtres plus grandes pour éclairer les habitations ou les édifices publics; à mesure que les moeurs s'adoucissaient, on voulait des maisons ouvertes, non plus murées comme des forteresses. C'est surtout dans les villes de l'Île-de-France et de la Champagne que l'on aperçoit, sous le règne de saint Louis, une tendance vers ces besoins de la civilisation moderne.



Il existe encore à Reims une façade de maison assez complète rue du Tambour, maison dite des Musiciens (voy. MAISON), qui date de 1240 environ. Les pièces du premier étage sont éclairées par de larges et hautes fenêtres (37), dont nous donnons en A la face extérieure, en B la face intérieure et en C la coupe. La corniche D, de la maison, est immédiatement posée sur les linteaux de ces fenêtres, derrière lesquels sont bandés des arcs de décharge E qui portent la charpente du comble. Les meneaux sont combinés de façon à recevoir les châssis vitrés sans le secours d'aucune ferrure. D'abord en G est posé, sous l'arc de décharge, un linteau de chêne, percé à ses extrémités de trous correspondant aux renforts circulaires F ménagés aux deux bouts de la traverse de pierre H. Ces renforts, dont le détail perspectif est tracé en I, reçoivent les pivots K des châssis inférieurs et ceux des châssis supérieurs. D'autres renforts analogues O, pris aux dépens de l'appui P, recevaient les pivots bas de ces châssis inférieurs. Les targettes des quatre châssis entraient dans les renflements R réservés à l'intérieur du meneau central. Nous donnons au dixième de l'exécution, en L la section du meneau, en M la face latérale d'une des gâches, et en N sa face intérieure 488.

Ces exemples font ressortir le soin que les architectes de cette époque mettaient dans l'étude des menus détails de l'architecture domestique. Tout était prévu pendant la construction, et tout était prévu avec économie. Ils évitaient ces scellements de ferrures qui, après l'achèvement d'un ravalement, viennent déshonorer les façades en coupant les moulures, écornant les chambranles, mutilant les tableaux et les appuis; qui nécessitent ces raccords en plâtre bientôt détruits par le temps et accusant ainsi le peu d'harmonie qui existe, dans nos édifices, entre l'apparence et les besoins. Dans les maisons gothiques, regardées de nos jours comme des habitations étrangères à notre civilisation, les fenêtres, ainsi que les autres membres de l'architecture, ne sont point imitées de l'antique ou de la renaissance italienne; mais elles sont disposées et faites pour donner de l'air et de la lumière, elles sont proportionnées aux salles, et comprennent dans leur structure tous les accessoires indispensables à l'ouverture des châssis mobiles, comme à leur clôture. Nous pourrions donc trouver encore ici quelques bons enseignements si nous voulions nous pénétrer de ces moyens simples, de ce soin en toute chose qui n'excluent nullement les perfectionnements et leur viennent, au contraire, en aide.

Mais les exemples que nous venons de donner en dernier lieu sont tirés d'édifices privés; cependant les architectes du moyen âge élevaient de vastes salles affectées à des services civils ou qui réunissaient à la fois les caractères religieux et civils. Telles étaient les salles synodales, grands vaisseaux destinés à des réunions nombreuses, où il fallait trouver de la lumière, de l'air, de grandes dispositions; en un mot, ce qu'on demande dans nos salles de tribunaux. On voit encore, près la cathédrale de Sens, une de ces salles qui dépendait autrefois du palais archiépiscopal.

C'est vers 1245, sous le roi saint Louis, que fut bâtie la salle synodale de Sens. Sur la place publique, vers l'ouest, elle est éclairée par des fenêtres, admirables comme style d'architecture, parfaitement appropriées à leur destination et d'une construction qui montre la main d'un maître.



Nous donnons (38) l'extérieur de ces fenêtres. La salle étant voûtée, les archivoltes de la baie sont concentriques aux formerets des voûtes, et disposées conformément au système champenois. Les vitraux compris dans les claires-voies A sont dormants, comme dans les fenêtres des édifices religieux; mais les ouvertures B sont rectangulaires et garnies de châssis ouvrants, afin de permettre aux personnes placées dans la salle de donner de l'air et de regarder au dehors.



À l'intérieur, ces fenêtres présentent le tracé perspectif (39). Cette belle composition se reproduit à l'extrémité méridionale de la salle, mais avec quatre travées au lieu de deux; une immense claire-voie supérieure, d'une fermeté de style peu commune à cette époque, surmonte ces quatre ouvertures. On voit ici que les meneaux sont munis de renforts destinés à recevoir plusieurs targettes dans la hauteur des châssis ouvrants, afin d'empêcher le gauchissement de ces châssis 489. On remarquera combien l'appareil de ces claires-voies est bien disposé pour présenter une grande solidité et pour éviter les évidements. Les redents de la rose (fig. 38) sont posés en feuillure, et les linteaux des parties ouvrantes sont déchargés par les deux archivoltes puissantes qui reposent sur la forte pile du milieu. Ces fenêtres ont un caractère particulier qui n'appartient pas au style de l'architecture religieuse, bien qu'elles soient comprises sous des voûtes comme les fenêtres des églises (voy. SALLE). Les architectes des XIIIe et XIVe siècles n'employaient pas ce système de claires-voies vitrées dormantes avec châssis ouvrants dans les grandes salles seulement. Nous voyons des fenêtres de dimension médiocre ainsi disposées dans des habitations; les deux volumes sur l'Architecture civile et domestique, de MM. Verdier et Cattois 490, nous en fournissent de nombreux exemples, bien qu'ils n'aient pu les réunir tous.



Il existe au second étage de la porte Narbonaise, à Carcassonne, bâtie vers 1285, une salle médiocrement haute entre planchers, éclairée du côté de la ville par des baies qui nous présentent un diminutif des fenêtres de la grand'salle de Sens. La partie supérieure de ces baies (40) recevait des vitraux dormants. À l'intérieur, derrière le linteau A, était établi une traverse en bois B (voir la coupe C) sur laquelle venaient battre en feuillure deux châssis ouvrants. Un montant en bois, maintenu par un assemblage sous cette traverse et par un goujon sur le renfort D, posé derrière le meneau, était muni des gâches recevant les targettes des châssis ouvrants. Ces châssis ouvrants n'ayant pas de jets d'eau, et ne recouvrant pas l'appui E (voir le détail G), mais battant contre cet appui à l'intérieur en H, la pluie qui fouettait contre les vitrages devait nécessairement couler à l'intérieur. Afin d'éviter cet inconvénient, le constructeur a creusé en F de petits caniveaux munis de deux trous K, par lesquels l'eau était rejetée à l'extérieur. Les châssis ouvrants étaient ferrés dans la feuillure au moyen de gonds et de pentures. Le tracé I montre la fenêtre vers le dehors. La claire-voie supérieure est moulurée à l'intérieur comme à l'extérieur, puisque le vitrail est pris au milieu de l'épaisseur de la pierre, ainsi que l'indique notre coupe, tandis que les pieds-droits, le meneau et le linteau sont coupés carrément du côté de l'intérieur pour recevoir les bâtis et châssis en menuiserie, ainsi que l'indique notre plan.

Les formes des fenêtres ouvertes dans les édifices civils et les maisons des XIIIe et XIVe siècles sont trop variées pour que nous puissions présenter à nos lecteurs un spécimen de chacune de ces sortes de baies. C'était toujours la dimension ou la nature des salles qui commandait les dispositions, les hauteurs et les largeurs de ces baies; ce qui était raisonnable. Cette façon de procéder donnait aux architectes plus de peine qu'ils n'en prennent aujourd'hui, où la même fenêtre sert pour tout un étage d'un palais ou d'une maison, que cet étage comporte de grandes salles et de petites pièces, qu'il renferme des cages d'escaliers et des entre-sols.

Cependant, vers la fin du XIVe siècle, les moeurs des châtelains et des bourgeois s'étaient fort amollies, et on trouvait que les châssis ouvrants posés en feuillure dans la pierre même, sans dormants, laissaient passer l'air froid du dehors; on songea donc à rendre le châssis de bois indépendant du châssis de pierre, c'est-à-dire des meneaux et traverses. Le château de Pierrefonds, bâti en 1400, nous fournit de beaux exemples de fenêtres disposées avec des châssis de bois dormants encastrés dans les feuillures de pierre, et recevant des châssis mobiles vitrés et des volets intérieurs.



La fig. 41 donne en A le plan d'une de ces baies, en B sa face extérieure, et en C sa face intérieure. Sur ce dernier tracé, dans lequel nous avons indiqué la baie avec ses volets en D, avec ses châssis vitrés en E et dépouillée de sa menuiserie en F, on voit que les châssis ouvrants ainsi que les volets sont ferrés, non dans la pierre, mais sur des châssis dormants posés dans les larges feuillures des pieds-droits, du meneau et des traverses; que l'on peut ouvrir séparément chaque volet et chaque châssis vitré, ce qui, pour de grandes fenêtres, présente des avantages; que les volets sont plus ou moins découpés à jour afin de permettre à la lumière extérieure d'éclairer quelque peu les chambres lorsque ces volets sont clos; que ces baies ferment aussi bien que les nôtres, sinon mieux; qu'elles peuvent être hermétiquement calfeutrées, et qu'on pouvait, au moyen de ces châssis séparés, donner aux intérieurs plus ou moins d'air et de lumière. On a remplacé tout cela aujourd'hui par des vasistas, mais nous n'avons pas encore repris les volets s'ouvrant par petites parties. Comme toujours, lorsque les murs ont beaucoup d'épaisseur, des bancs garnissent les embrasures pour pouvoir s'asseoir près de la fenêtre et respirer à l'aise.

Les fenêtres de l'architecture civile du XVe siècle sont conformes à ces données générales, et reçoivent des châssis dormants; leurs moulures deviennent plus compliquées à l'extérieur, les meneaux et les traverses de plus en plus minces pour laisser passer plus de jour; leurs linteaux se décorent ainsi que leurs appuis, elles s'enrichissent de sculptures, et la fin du XVe siècle nous a laissé nombre de baies de croisées d'une délicatesse de travail qui dépasse de beaucoup ce que l'on faisait au XIVe siècle, et ce que l'on fit à l'époque de la Renaissance. Nous terminerons cet article en donnant l'une des fenêtres du premier étage de l'hôtel de la Trémoille à Paris 491.



Ces fenêtres (42) posent sur une balustrade pleine continue qui forme allége; leurs linteaux sont posés au niveau de la corniche du bâtiment qui reçoit le chéneau et le comble. Trouvant probablement que cette façon de terminer la baie était pauvre, l'architecte a jugé à propos d'élever au-dessus de ces linteaux une haute décoration en pierre ajourée qui forme comme le timbre de la fenêtre, et qui coupe la masse monotone du toit. Le chéneau se trouve ainsi interrompu à chaque baie, et porte une gargouille saillante en plomb au-dessus de chaque trumeau. Souvent (et cela était justifié par un besoin) ces timbres des baies posées sur la corniche ne sont autre chose que de grandes lucarnes de pierre qui éclairent l'étage du comble. C'est ainsi que se terminent les fenêtres du palais de justice de Rouen, qui sont en ce genre ce qu'il y a de plus riche en France comme combinaison, de plus surprenant comme coupe de pierre et comme main-d'oeuvre (voy. LUCARNE).

Les meneaux et les traverses persistent dans les fenêtres de l'architecture civile française jusqu'au commencement du XVIIe siècle, parce que jusqu'alors les croisées s'ouvraient par petites parties, et qu'on ne supposait pas qu'il fût commode de manoeuvrer des châssis et des volets de trois mètres de hauteur. Ducerceau nous montre encore les fenêtres du Louvre, de François Ier et de Henri II, avec des meneaux de pierre. Des meneaux garnissent également les baies du palais des Tuileries. La suppression de ces accessoires, reconnus nécessaires jusque sous le règne de Louis XIV, a changé complétement le caractère de cette architecture en lui retirant son échelle; les croisées de menuiserie n'ont pas l'aspect monumental des meneaux de pierre, sans pour cela donner plus de jour à l'intérieur des appartements (voy. MAISON, PALAIS).

FERME, s. f. Constructions rurales destinées à l'exploitation d'un domaine. Les Romains étaient fort amateurs d'établissements ruraux, et dans le voisinage de leurs villæ, quelquefois dans leur enceinte même, ils possédaient des bâtiments destinés à conserver les récoltes, à loger les colons et à renfermer des bestiaux. Les chefs francs paraissent avoir voulu prendre ces habitudes lorsqu'ils s'emparèrent du sol des Gaules; mais leur mépris pour le travail manuel et pour ceux qui s'y livraient, leur goût pour les armes et la vie d'aventures ne leur permettaient guère de s'occuper des détails de la vie des champs. S'ils faisaient approvisionner dans leurs villæ des amas de grains, de vin, de fourrages et de produits de toute sorte, c'était pour les consommer avec leurs compagnons d'armes, et pour dilapider en quelques nuits d'orgies la récolte d'une année. On comprend que ces moeurs n'étaient pas propres à encourager la culture et l'établissement de bâtiments destinés à l'exploitation méthodique.

Les monastères, vers le commencement du XIe siècle, s'occupaient déjà sérieusement de la culture en grand. Ils construisirent des granges, des celliers, des pressoirs, des étables; ils firent des travaux d'irrigation importants, et s'appliquèrent à améliorer les terres, à défricher les bois, à réunir de nombreux troupeaux. À vrai dire, même les premiers monastères bâtis par les Clunisiens ressemblaient plus à ce que nous appelons une ferme aujourd'hui qu'à toute autre chose (voy. ARCHITECTURE MONASTIQUE).

Plus tard, les moines, les seigneurs laïques, les chapitres, firent construire des fermes conformes aux dispositions adoptées de nos jours, et nous voyons qu'en 1234 un chanoine de Notre-Dame de Paris s'oblige à bâtir dans le délai d'un an une grange devant faire retour au chapitre après sa mort. «La cour ou pourpris de la grange devait avoir quarante toises de long et trente de large; le mur de clôture dix-huit pieds de haut, non compris le chaperon. Dans ce mur devait être pratiqué une porte avec une poterne, et au-dessus de la porte et de la poterne devaient être élevés des greniers vastes et solides; c'était la grange proprement dite. Elle devait avoir vingt toises au moins de longueur et neuf toises ou environ de largeur, avec une gouttière à la hauteur de douze pieds. Près de la porte un appentis de dix ou douze toises était destiné à l'habitation. Sur le pignon de derrière devait être construite une tourelle assez grande pour contenir un lit et un escalier. On devait employer à la construction de cette tourelle de bon bois de chêne, gros et fort, et de bonnes tuiles. Les angles des murs ainsi que la porte devaient être en pierre de taille. Enfin il devait être construit un grand et bon pressoir couvert d'un bon appentis en tuiles 492.» Il existe encore dans le Beauvoisis, le Soissonnais, les environs de Paris et la Touraine, un assez grand nombre de ces bâtiments de fermes des XIIe et XIIIe siècles 493, notamment de fort belles granges (voy. GRANGE), des colombiers (voy. COLOMBIER), qui ont presque toujours appartenu à des établissements religieux. Quant à la disposition générale des bâtiments de fermes, elle est subordonnée au terrain, aux besoins particuliers, à l'orientation. Ce n'est jamais qu'une agglomération de corps de bâtisses séparés les uns des autres, enclos de murs et souvent de fossés. Quelquefois même, ces fermes étaient fortifiées, les murs d'enceinte étaient garnis d'échauguettes ou de tourelles. On en voit encore quelques-unes de ce genre en Bourgogne, dans l'Auxois, dans le Lyonnais et le Poitou.

483
   Face intérieure des tours de la porte.


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484
   Voy., à l'article BÉTON, la fig. 1.


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485
   Voy. à l'article BARRE, les moyens de tirage de ces sortes de clôtures.


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486
   D'une maison de Flavigny (Côte-d'Or).


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487
   D'une maison de Flavigny (Côte-d'Or), milieu du XIIIe siècle.


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488
   Voy. l'Architecture civile de MM. Verdier et Cattois. La maison des Musiciens est donnée dans cet ouvrage avec la plupart des détails de la façade sur la rue du Tambour.


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489
   La restauration de cette salle admirable, mutilée par le temps et l'incurie des derniers siècles, a été entreprise par les soins du ministère d'État. Le gouvernement a compris toute l'importance de ce monument unique aujourd'hui en France, et qui fournit un exemple dont on peut tirer les plus utiles enseignements pour la construction de nos grandes salles modernes destinées à de nombreuses réunions. Le bâtiment, qui avait été vendu pendant la révolution, a été acheté par le ministère de l'instruction publique et des cultes. Il appartient donc aujourd'hui à l'État. La conservation de la salle synodale de Sens sera un fait d'autant plus remarquable, que l'administration avait à lutter contre certains esprits pour lesquels toute dépense qui ne présente pas un caractère d'utilité matérielle, immédiate et locale, est une dépense perdue; nous ne pouvons cependant nous borner, en France, à élever des marchés, des abattoirs, des hôpitaux et des viaducs. Il faut reconnaître qu'à Sens, comme au pont du Gard, comme à Carcassonne, la persistance éclairée de l'administration trouve chaque jour l'approbation la plus vive de la part des nombreux visiteurs qui chez nous, heureusement, pensent que les monuments du passé méritent d'être conservés et tirés de l'oubli où on les laissait autrefois.


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490
   Deux vol. in-4, 1855.


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491
   Cet hôtel a été démoli en 1841. Nous en possédons une monographie complète. (Voy. l'Architecture civile et domestique de MM. Verdier et Cattois, t. II.)


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492
   Voy. la préface au Cartulaire de l'église Notre-Dame de Paris, pub. par M. Guérard, p. ccx, et le t. II, p. 236.


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493
   Voy. Arch. civ. et domest., par MM. Verdier et Cattois.


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Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
1052 s. 371 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain