Kitabı oku: «Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P)», sayfa 12
Le XVIe siècle composa encore d'assez beaux pinacles, mais qu'on ne peut comparer à ceux du XVe comme hardiesse, ni comme entente de l'harmonie des détails avec l'ensemble et des proportions. Les pinacles du XVIe siècle sont habituellement mal soudés à la partie qu'ils couronnent, ils ne s'y lient pas avec cette merveilleuse adresse que nous admirons, par exemple, dans la composition de ceux du tour du choeur de Notre-Dame de Paris. Ce sont des hors-d'oeuvre qui ne tiennent plus à l'architecture, des édicules plantés sur des contre-forts, sans liaison avec la bâtisse. Ils ne remplissent plus d'ailleurs leur fonction essentielle, qui est d'assurer la stabilité d'un point d'appui par un poids agissant verticalement; ce sont des appendices décoratifs, les restes d'une tradition dont on ne saisit plus le motif.
PISCINE, s. f. Cuvettes pratiquées ordinairement à la gauche de l'autel (côté de l'épître), dans lesquelles le célébrant faisait ses ablutions après la communion. Le docteur Grancolas 131 s'exprime ainsi au sujet des piscines: «Il y a deux sortes d'ablutions après la communion, la première est du calice et la seconde est des mains ou des doigts du célébrant. C'étoit le diacre qui faisoit celle du calice, comme il paroist par plusieurs anciens missels; et le prestre lavoit ses mains, et c'étoit pour la troisième fois qu'il le faisoit, avant que de venir à l'autel, après l'offrande, et en suite de la communion, comme le dit Ratolde, lotis manibus tertiò... Dans l'Ordre romain de Gaïet, il y a que le prestre n'avaloit pas le vin avec lequel il lavoit ses doigts, mais on le jetoit dans la piscine.--Yves de Chartres rapporte que le prestre lavoit ses mains après la communion... Jean d'Avranches ordonne qu'il y ait un vase particulier dans lequel le prestre lave ses doigts après la communion... Dans les usages de Cîteaux, on mettoit du vin dans le calice pour le purifier, et le prestre alloit laver ses doigts dans la piscine, puis il avaloit le vin qui étoit dans le calice et en prenoit une seconde fois pour purifier encore le calice...
«J'ajouteray que Léon IV, dans une oraison synodale aux curez, ordonne qu'il y ait deux piscines dans chaque église, ou dans les sacristies, ou proche des autels: «Locus in secretario aut juxta altare sit præparatus, ubi aqua effundi possit quando vasa sacra abluuntur, et ibi linteum nitidum cum aqua dependeat; ut ibi sacerdos manus lavet post communionem.» C'étoit pour laver les mains après la communion. Ratherius, évêque de Ravenne, dans ses instructions, ordonne la même chose. Saint Uldaric (ou Udalric), dans les anciennes coutumes de Cluny, parle de deux piscines: dans l'une on purifioit le calice, et dans l'autre on lavoit les mains après le sacrifice...; le diacre et le soudiacre lavoient aussi leurs mains...» Lebrun des Marettes, dans ses Voyages liturgiques 132, à propos de ce qui se pratiquait à la cathédrale de Rouen après la communion, dit: «Le prêtre, après la communion, ne prenoit aucune ablution; mais seulement pendant que les ministres de l'autel communioient du calice, un acolyte apportoit un autre vase pour laver les mains du prêtre, comme on fait encore aujourd'hui à Lyon, à Chartres et chez les Chartreux, et comme on faisoit encore à Rouen avant le dernier siècle, afin qu'il ne fût pas obligé de prendre la rinçure de ses doigts 133.» Et plus loin 134: «La dernière ablution avec l'eau et le vin ne s'y faisoit point alors (au XVIIe siècle), et on n'obligeoit point le prêtre de boire la rinçure de ses doigts. Il alloit laver ses mains à la piscine ou lavoir qui étoit proche de l'autel, sacerdos vadat ad lavatorium. La même chose est marquée dans le missel des Carmes de l'an 1574. Et le rituel de Rouen veut qu'il y en ait proche de tous les autels...» Guillaume Durand 135 dit qu'auprès des autels on doit placer une piscine ou un bassin dans lequel on se lave les mains. M. l'abbé Crosnier, dans une notice publiée dans le Bulletin monumental 136, pose ces diverses questions qu'il cherche à résoudre: «1º Le prêtre a-t-il toujours pris les ablutions à la fin de la messe? 2º La discipline de l'Église sur ce point a-t-elle été uniforme jusqu'au XIIIe siècle? 3º A-t-elle été modifiée à cette époque, et qui est l'auteur de cette modification? 4º Quelle est l'origine de la double piscine qu'on remarque dans presque toutes les églises du XIIIe siècle? 5º L'usage de prendre les ablutions a-t-il été universel et sans exceptions depuis le XIIIe siècle?» Jusqu'au XIIe siècle le prêtre lavait ses mains, à la fin des saints mystères, dans la piscine. Nous venons de voir que, d'après un ancien ordinaire de Rouen, le prêtre ne prenait aucune ablution; celle-ci était versée dans la piscine pendant que les ministres communiaient sous l'espèce du vin.
Yves de Chartres s'exprime ainsi au sujet des ablutions: «Après avoir touché et pris les espèces sacramentelles, le prêtre, avant de se retourner vers le peuple, doit se laver les mains et l'eau est jetée dans un lieu sacré destiné à cet usage.» «Cependant, dit M. l'abbé Crosnier 137, par respect pour les Saintes Espèces, déjà avant le XIIIe siècle, on trouve dans les ordres religieux l'usage de prendre les ablutions; il paraissait inconvenant de verser dans la même piscine l'eau qui avait servi à laver les mains avant la préface, et le liquide employé pour la purification du calice et des doigts après les Saints Mystères; aussi on trouve dans les anciennes coutumes de Cluny trois ablutions prises par le prêtre après la communion, une pour le calice et deux pour les mains...»
Le pape Innocent III ayant décidé que les ablutions devaient être prises par le prêtre, «on a voulu, ajoute M. l'abbé Crosnier, tout à la fois conserver les anciens usages et tenir compte, sinon de la décision du pape, du moins des motifs qui l'avaient suscitée. On établit deux piscines, l'une réservée aux ablutions proprement dites, et l'autre destinée à recevoir les eaux ordinaires...»
C'est en effet à dater de la fin du XIIe siècle, que l'on voit les piscines géminées adoptées dans les chapelles des églises cathédrales et conventuelles, plus rarement dans les églises paroissiales. Les piscines géminées ou simples disparaissent vers le XVe siècle, alors que l'usage de prendre les ablutions est admis dans toutes les églises.
Peut-être avant le XIIe siècle avait-on des piscines transportables, des bassins de métal que l'on plaçait auprès de l'autel, car ce n'est qu'à dater de cette époque que l'on voit la piscine faire partie de l'édifice, qu'elle est prévue dans la construction; encore les premières piscines paraissent-elles être des hors-d'oeuvre, des appendices qui ne s'accordent pas avec l'architecture, tandis qu'au XIIIe siècle la piscine est étudiée en vue de concourir à l'ensemble de la structure.
Les chapelles absidales de l'église abbatiale de Saint-Denis, qui datent de Suger, possèdent des piscines simples en forme de cuvette accolée à l'un des piliers. À la fin du XIIe siècle, dans les chapelles de l'église abbatiale de Vézelay, nous voyons des piscines conçues d'après ce même principe et qui font un hors-d'oeuvre.


Voici (fig. 1) l'une d'elles, qui se compose d'une cuvette lobée avec un orifice au centre. La cuvette porte sur un faisceau de colonnettes percé verticalement, de manière à perdre les eaux dans les fondations. C'était un usage établi généralement, lors de l'établissement des premières piscines, de perdre les eaux sous le sol même de l'église. Plus tard, les piscines furent munies de gargouilles rejetant les eaux à l'extérieur, sur la terre sacrée qui environnait les églises. Cette piscine de Vézelay pose sur le banc qui fait le tour de la chapelle et reçoit l'arcature; sa cuvette est alternativement ornée à l'extérieur de cannelures creuses et godronnées; la base, le faisceau des quatre colonnettes et la cuvette sont taillés dans un seul morceau de pierre. Dans l'église de Montréale (Yonne), qui date de la même époque, derrière le maître autel et dans le banc même qui reçoit l'arcature, est creusée une cuvette de piscine (fig. 2) de forme carrée.

Le banc servait ainsi de crédence pour déposer les vases nécessaires aux ablutions. Plus tard, les piscines prirent une certaine importance et furent faites en forme de niches pratiquées dans les parois des choeurs ou des chapelles. L'usage de la piscine était désormais consacré, de plus la cuvette simple était remplacée par deux cuvettes jumelles. On retrouve beaucoup de piscines de ce genre dès la fin du XIIe siècle. Elles affectent la forme de niches doubles séparées par un petit pilier, et dans la tablette desquelles sont creusées deux cuvettes de forme carrée, ou plus habituellement circulaires, avec un orifice au centre pénétrant dans la fondation.

Beaucoup d'églises abbatiales de cette époque, des ordres de Cluny et de Cîteaux, conservent dans leurs chapelles des piscines ainsi disposées. Celle que nous donnons (fig. 3) provient de l'abbaye de Saint-Jean les Bons-Hommes. Une pilette isolée reçoit un sommier portant deux arcs plein cintre. On voit en A une entaille pratiquée pour poser une tablette de bois; en C, est une entaille terminée à son extrémité droite par un orifice. Peut-être cette entaille était-elle destinée à recevoir le chalumeau. En effet, Lebrun des Marettes, dans ses Voyages liturgiques 138, rapporte que de son temps encore il y avait, dans l'église abbatiale de Cluny, un petit autel au côté gauche du grand autel; que le petit autel servait à la communion sous les deux espèces, qui s'y pratiquait les fêtes et dimanches à l'égard de quelques ministres de l'autel. «Après que le célébrant, ajoute-t-il, a pris la sainte hostie et une partie du sang, et qu'il a communié de l'hostie les ministres de l'autel, ils vont au petit autel à côté; et le diacre ayant porté le calice, accompagné de deux chandeliers, tient le chalumeau d'argent par le milieu, l'extrémité étant au fond du calice; et les ministres de l'autel, ayant un genou sur un petit banc tapissé, tirent et boivent le précieux sang par ce chalumeau. La même chose se pratique à Saint-Denys en France, les jours solennels et les dimanches. Ce petit autel s'appelle la prothèse.»
Après la communion, dit Boquillot, on renfermait le chalumeau dans l'armoire avec le calice: or, des traces de scellements, visibles dans notre figure 3 en B, indiqueraient qu'une fermeture était disposée de façon à clore cette piscine, qui devenait ainsi une véritable armoire; le calice eût pu être déposé sur la tablette dont l'entaille se voit en A. Un peu plus tard, près de la piscine, on pratiqua souvent une armoire (voyez ce mot). Dès lors il ne fut plus nécessaire de fermer les piscines; aussi voyons-nous que dès le commencement du XIIIe siècle, celles-ci sont disposées pour être ouvertes, bien qu'elles soient le plus souvent ménagées dans des niches jumelles.

La jolie église de Villeneuve-le-Comte (Seine-et-Marne) conserve dans la chapelle méridionale une piscine de ce genre très-délicatement composée. Elle consiste en une niche séparée en deux par une pilette taillée, ainsi que chacun des deux jambages, dans un seul morceau de pierre (fig. 4). L'arcature jumelle est évidée dans deux dalles de pierre, la construction venant se bloquer à l'entour. Les cuvettes sont circulaires (voy. le plan), et nulle trace n'indique que cette piscine ait jamais été close. Les colonnettes évidées n'ont pas plus de 4 centimètres de diamètre. On voit par cet exemple déjà, que les architectes du XIIIe siècle, une fois le programme de la piscine admis, en faisaient un motif de décoration; c'est qu'en effet ils n'admettaient pas qu'une nécessité, qu'un besoin ne devînt l'objet d'une étude spéciale, et par suite un moyen d'orner l'édifice. Nous chercherions aujourd'hui, pour ne pas contrarier les lignes de la belle architecture, à dissimuler cet appendice; nos devanciers, au contraire, le faisaient franchement paraître, bien qu'il ne fût jamais dans un axe, et le décoraient avec recherche. Les chapelles de la cathédrale d'Amiens, élevées vers 1240, possèdent de belles piscines prises entre l'arcature formant le soubassement; traitées avec un soin particulier, ces piscines sont placées à la gauche de l'autel (côté de l'épître), suivant l'usage. De l'autre côté, en regard, est pratiquée une armoire.

Nous donnons (fig. 5) un ensemble perspectif de l'une de ces piscines, avec l'arcature qui l'accompagne et lui sert d'entourage. La figure 5 bis en donne le plan. Les colonnettes de l'arcature sont, comme on le voit par ce plan, indépendantes de la piscine, qui est prise aux dépens de l'épaisseur du mur du soubassement. Les orifices des deux cuvettes se perdent dans les fondations, ces piscines n'ayant pas de gargouilles extérieures.

La Sainte-Chapelle du Palais, à Paris, présente également à la gauche du maître-autel une fort belle piscine à double cuvette, avec crédence au-dessus divisée en quatre compartiments. Cette piscine est gravée dans la monographie de la Sainte-Chapelle, publiée par M. Caillat 139; se combine, comme celle que nous venons de donner, avec l'arcature qui forme la décoration du soubassement de la chapelle. En regard, à la droite de l'autel, est une armoire double.

Quelquefois, mais fort rarement, dans les églises du XIIIe siècle, les piscines sont faites en forme de cuvettes posées sur un socle, comme celles de Vézelay. Nous citerons celles des chapelles du choeur de la cathédrale de Séez (fin du XIIIe siècle), dont nous donnons (fig. 6) un croquis. Ici les deux cuvettes n'ont pas la même forme, l'une est à pans, l'autre circulaire; elles reposent sur un faisceau de branchages feuillus, et sont placées dans les travées de l'arcature. Les faisceaux de branchages prennent naissance sur le banc continu servant de soubassement à cette arcature 140.
Les piscines des chapelles des XIIIe et XIVe siècles de la cathédrale de Paris sont d'une grande simplicité, et ne consistent guère qu'en une petite niche lobée portée sur deux colonnettes engagées, ou tombant par un chanfrein sur la tablette. Toutes ces piscines possèdent des gargouilles à l'extérieur. Les piscines des chapelles du choeur de la cathédrale de Reims étaient fermées par des volets de bois et servaient en même temps d'armoires.
Le XIVe siècle fit des piscines très-délicates et riches de sculpture. Nous citerons parmi les plus remarquables celle du choeur de l'église de Saint-Urbain de Troyes 141. Elle contient deux cuvettes partagées par une pilette centrale et terminées par deux gâbles décorés d'un couronnement de la sainte Vierge et de deux figurines des deux donateurs, le pape Urbain IV et le cardinal Aucher. Quatre dais refouillés avec art couronnent ces figurines et sont surmontés de merlons entre lesquels apparaissent des archers paraissant défendre l'édicule. Cette piscine est très-bien gravée dans les Annales archéologiques 142, d'après un dessin de M. Boeswilwald, et nous croyons n'avoir mieux à faire que de renvoyer nos lecteurs à cette reproduction et à la notice de M. Didron qui l'accompagne. La piscine de Saint-Urbain n'est pas la seule qui soit couronnée par un crénelage; nous citerons aussi celles des chapelles absidales de l'église de Semur en Auxois, qui, bien qu'antérieures de soixante ans à celle de Saint-Urbain, sont de même crénelées à leur sommet 143. Les piscines deviennent rares au XVe siècle, probablement parce que l'usage de prendre les ablutions était généralement admis. Cependant nous en trouvons quelques exemples, mais les cuvettes doubles ne sont plus pratiquées. Dans l'une des chapelles latérales de l'église de Semur en Auxois il existe une jolie piscine du XVe siècle que nous donnons ici (fig. 7).

La cuvette est portée sur une colonnette, et dans la niche pratiquée au-dessus est une petite crédence pour poser les vases. Un dais très-riche surmonte le tout. En A nous donnons la section de cette piscine sur ab; en B, sur cd. On voit d'ailleurs dans les églises françaises des XIIIe et XIVe siècles un nombre prodigieux de piscines toutes variées de forme et d'une composition charmante. C'est dans ces accessoires que l'on peut observer la fertilité singulière des architectes de cette époque. Bien rarement ils reproduisent un exemple même remarquable; avec la collection des piscines, on ferait un ouvrage entier fournissant des compositions variées à l'infini d'un même objet.
PLAFOND, s. m. (lambris). Ce que nous appelons plafond aujourd'hui dans nos constructions, c'est-à-dire ce solivage de niveau latté et enduit par-dessous, de manière à présenter une surface plane, n'existait pas, par la raison que le plafond n'était que l'apparence de la construction vraie du plancher, qui se composait de poutres et de solives apparentes, plus ou moins richement moulurées et même sculptées. Ces plafonds figuraient ainsi des parties saillantes et d'autres renfoncées, formant quelquefois des caissons ou augets que l'on décorait de profils et de peintures. Il ne nous reste pas en France de plafonds antérieurs au XIVe siècle, bien que nous sachions parfaitement qu'il en existait avant cette époque, puisqu'on faisait des planchers que l'on se gardait d'enduire par-dessous. Les enduits posés sur lattis sous les planchers ont, en effet, l'inconvénient grave de priver les bois de l'air qui est nécessaire à leur conservation, de les échauffer et de provoquer leur pourriture. Des bois laissés à l'air sec peuvent se conserver pendant des siècles; enfermés dans une couche de plâtre, surtout s'ils ne sont pas d'une entière sécheresse, ils travaillent, fermentent et se réduisent en poussière. Nous ne croyons pas nécessaire d'insister sur ce fait bien connu des praticiens 144.
Le plafond n'était donc, pendant le moyen âge, que le plancher; c'était la construction du plancher qui donnait la forme et l'apparence du plafond; il ne venait jamais à l'idée des maîtres de cette époque de revêtir le dessous d'un plancher de voussures, de compartiments et caissons en bois ou en plâtre, n'ayant aucun rapport avec la combinaison donnée par la construction vraie. Il serait donc difficile de traiter des plafonds du moyen âge sans traiter également des planchers, puisque les uns ne sont qu'une conséquence des autres; aussi nous confondrons ces deux articles en un seul.
Si les pièces étaient étroites, si entre les murs il n'existait qu'un espace de deux ou trois mètres, on se contentait d'un simple solivage dont les extrémités portaient sur une saillie de pierre, ou dans des trous, ou sur des lambourdes; mais si la pièce était large, on posait d'abord des poutres d'une force capable de résister au poids du plancher, puis sur ces poutres un solivage. Cette méthode était admise dans l'antiquité romaine et elle fut suivie jusqu'au XVIe siècle. Lorsque les poutres avaient de très-grandes portées, les constructeurs ne se faisaient pas faute de les armer pour leur donner du roide et les empêcher de fléchir sous le poids des solivages. Il est clair que ces sortes de planchers prenaient beaucoup de hauteur; mais nos devanciers ne craignaient pas les saillies produites par les poutres, et les considéraient même comme un moyen décoratif.

Les poutres (fig. 1) avaient en général peu de portée dans les murs, mais étaient soulagées par des corbeaux de pierre plus ou moins saillants. Si ces poutres étaient ornées de profils sur leurs arêtes, ceux-ci n'apparaissaient qu'au delà de la portée sur les corbeaux. Dans les planchers les plus anciens, les solives posent d'un bout seulement sur ces poutres, ainsi qu'il est figuré en B; de l'autre, dans une rainure pratiquée dans la muraille, dans des trous ou sur une lambourde C, comme on le voit en D, laquelle lambourde est posée elle-même sur des corbelets ou un profil continu. Comme il arrivait fréquemment que ces solives se contournaient, n'étant maintenues ni par des tenons ni par des chevilles, on posait alors entre leurs portées, sur les poutres et les lambourdes, des entretoises E formant clefs et chevillées obliquement. Ce moyen roidissait beaucoup les solivages et les poutres. Les entrevous des solives posées anciennement tant pleins que vides, ou étaient enduits sur bardeaux, ou bien garnis de merrains G posés transversalement. Les joints de ces merrains étaient masqués par des couvre-joints H, qui formaient entre les solives comme autant de petits caissons. Sur ces merrains on étendait une aire de plâtre ou de mortier I, puis le carrelage K. Les bois de ces plafonds restaient rarement apparents; ils étaient habituellement couverts de peinture en détrempe que l'on pouvait renouveler facilement. On voit encore bon nombre de ces plafonds des XIIIe et XIVe siècles sous des lattis plus modernes, dans d'anciennes maisons. Quelquefois les poutres et les solives elles-mêmes sont très-délicatement moulurées.
Ce système de planchers employait une grande quantité de bois et exigeait des solives d'un assez fort équarrissage: car, nous l'avons dit déjà, on posait ces solivages tant pleins que vides; il se prêtait parfaitement à couvrir des pièces longues, de grandes salles, des galeries; mais pour des chambres, des pièces à peu près carrées, il n'offrait pas la rigidité que l'on cherche dans des pièces très-habitées et garnies de meubles lourds. On essaya donc au XIVe siècle de remplacer ce système si simple par un autre d'un effet plus agréable et présentant plus de rigidité.

Ainsi (fig. 2), une salle étant donnée, dont le quart est tracé en ABCD, deux poutres principales E étaient posées. Quatre cours de poutrelles F, formant entretoises, venaient s'assembler à repos dans ces poutres et des cours de solives G s'assemblaient de même dans les poutrelles. En H nous donnons la coupe de ce plancher faite sur ab. Les poutrelles reposaient le long des murs sur des corbeaux I, et des lambourdes K engagées dans une rainure, remplissaient les intervalles entre les poutrelles et recevaient les abouts des solives. Les assemblages des pièces de ce plafond sont tracés en L. La poutre est profilée en P, avec les repos des poutrelles en M. Celles-ci, N, possèdent un tenon à queue-d'aronde qui s'embrève dans le repos M, et des repos R qui reçoivent les tenons S des solives également taillés à queue-d'aronde. Des planches d'un pouce et demi étaient posées en long sur les solives et maintenues par les languettes T. Ce système d'embrévements à queue-d'aronde donnait beaucoup de rigidité au plancher, empêchait l'écartement et le chantournement des bois. Les pièces moulurées formaient une suite de caissons d'une apparence très-riche et très-agréable. Nous avons vu des plafonds ainsi construits dans des maisons des petites villes de Saint-Antonin et de Cordes, qui n'avaient souffert aucune altération. Ces plafonds, en beau chêne ou même en sapin, n'avaient jamais été décorés de peintures et présentaient un lambris d'une belle couleur. Non contents de les décorer de moulures, les architectes les enrichirent encore de sculpture. Il existe dans une maison de la rue du Marc, nº 1, à Reims, un magnifique plafond en bois sculpté du XVe siècle, conçu suivant ce principe, et qui est autant une oeuvre de menuiserie que de charpenterie 145. Il recouvre une salle de 15 mètres de longueur sur 6m,50 de largeur, et se divise en cinq travées séparées par six poutres, les deux d'extrémités formant lambourdes.

La figure 3 donne une partie d'une de ces travées, l'ensemble du plafond étant tracé en A. Entre les poutres P sont posées les solives S avec tenons à leurs extrémités. Les solives sont roidies par des entretoises E. Des panneaux B remplissent les intervalles. Ces panneaux sont décorés de parchemins pliés. Les poutres sont sculptées latéralement et sous leur parement; des culs-de-lampe sont rapportés sous les abouts des solives.

Des détails sont nécessaires pour expliquer l'assemblage et la décoration de ce plafond; nous les donnons dans la figure 4. En A est tracée la moitié du profil des poutres; la ligne ponctuée a indique la portée de la solive B. Les culs-de-lampe C ont leur tailloir pincé en b sous cette portée. Les entretoises D sont arrêtées sur les solives, ainsi que l'indique le tracé perspectif D'; un épaulement E, légèrement incliné, reçoit leur about. En G nous donnons une coupe sur les solives, avec l'about de la poutre près de sa portée. En supposant le solivage enlevé, la poutre présente le tracé H. On voit ainsi que les culs-de-lampe sont indépendants et laissent passer derrière leur extrémité inférieure les moulures sculptées sur les poutres. Ce détail explique assez combien ce plafond, partie charpenterie, partie menuiserie, présente de roideur; son aspect est agréable sans trop préoccuper le regard, ce qui est important, car les architectes du moyen âge et même ceux de la renaissance ne pensaient pas encore à ces compositions, majestueuses aux yeux des uns, grotesques aux yeux de beaucoup d'autres, dont on a couvert les plafonds depuis le XVIIe siècle, compositions qui, à tout prendre, ne sont que des plâtrages peints et dorés sur des lattis, accrochés avec des crampons de fer, des apparences masquant une grande pauvreté de moyens sous une couverte de moulages rapportés, simulant des marbres et des bronzes, voire quelquefois des tentures!
Dans la construction de leurs planchers, et par conséquent de leurs plafonds, les maîtres du moyen âge étaient toujours vrais; ils montraient et paraient la structure. Il y avait plus de mérite à cela, pensons-nous, qu'à mentir sans vergogne aux principes élémentaires de la construction. On se préoccupait d'abord des combinaisons des pièces de charpente, puis on cherchait à les décorer en raison même de cette combinaison.
Dans les provinces méridionales de la France, on employait aussi les plafonds rapportés et cloués sur les solives; c'est-à-dire que sous le solivage on clouait des planches, et sur ces planches des moulures formant des compartiments décorés de peintures. Ces sortes de plafonds étaient d'une grande richesse, et en même temps présentaient la légèreté que l'oeil aime à trouver dans les parties supérieures d'une pièce. Ce procédé a été encore employé pendant la renaissance, et le plafond de la galerie de François 1er, à Fontainebleau, en donne un charmant exemple 146.

Notre siècle, qui est un peu trop pénétré de la conviction qu'il invente chaque jour, ne doute pas que les plafonds composés de voutains en brique posés sur des solivages en bois ou fer sont une innovation; or, voici (fig. 5, en A) un plafond posé dans une maison de la fin du XVe siècle, à Chartres, rue Saint-Père, qui nous donne une combinaison de ce genre. Les solives B sont posées sur l'angle et scellées dans les murs; sur leurs plats b sont hourdés des voutains en brique posés en épi. Ces briques ont 3 centimètres d'épaisseur sur 10 centimètres de côté. Les reins C sont remplis de maçonnerie sur laquelle pose le carrelage D. Les solives ont 32 centimètres de côté (un pied) et placées sur la diagonale, elles offrent une grande roideur. Ce plafond, d'une portée assez faible, produit un très-bon effet, et peut facilement être décoré et maintenu propre. À Troyes, dans l'hôtel de l'Aigle, dit de Mauroy, rue de la Trinité, il existe un plafond du XVe siècle, entièrement en bois (voir le tracé G) qui présente des solives refendues E suivant leur diagonale, et posées comme le fait voir la figure 5. Dans l'angle rentrant formé par la juxtaposition de ces solives sont clouées des chanlattes I, puis sur le tout des madriers K, en travers. Ces solives s'assemblent dans des poutres, dont nous donnons la demi-section en L. Quelquefois les angles saillants de ces solives refendues sont chanfreinés, ce qui donne au plafond une apparence de légèreté peu commune. La mode du majestueux (car le majestueux est une des modes les plus durables en ce pays, qui en change si volontiers) a détruit ou recouvert de lattis beaucoup de ces plafonds du moyen âge ou de la renaissance. Il faut être à la piste des démolitions de nos plus vieux hôtels pour découvrir sous des plâtrages des combinaisons souvent très-ingénieuses. C'est ainsi, par exemple, que lors de la démolition de l'hôtel de la Trémoille, à Paris, nous avons vu sous des lattis recouverts de moulures de plâtre, des solivages très-délicatement travaillés, posés sur des poutres et formant une suite de gracieux caissons carrés. C'était une combinaison analogue à celle donnée dans la figure 3, si ce n'est que les entretoises étaient assemblées à tiers de bois avec les solives et laissaient des intervalles parfaitement carrés. Chacun de ces intervalles était rempli par un panneau sculpté d'arabesques; le tout avait été peint et doré. L'Angleterre, plus conservatrice que nous de ses vieux édifices (ce qui ne l'empêche pas d'être à la tête des idées de progrès), possède encore de beaux plafonds des XVe et XVIe siècles, en bois mouluré et sculpté. Si les portées des poutres étaient très-longues, celles-ci étaient souvent armées, c'est-à-dire composées de deux moises pinçant deux pièces inclinées formant arbalétriers ou surmontées de deux véritables arbalétriers noyés dans l'épaisseur du solivage et du carrelage. Des étriers en fer forgé et orné suspendaient la poutre aux deux arbalétriers; ces étriers contribuaient à la décoration de la poutre, et les moulures entaillées sur ses arêtes-vues s'arrêtaient au droit des ferrures. On voit fréquemment des plafonds figurés ainsi dans des vignettes de manuscrits du XVe siècle.
Comme on se fatigue de tout, même des choses qui ne sont justifiées ni par la raison ni par le goût, nous pouvons espérer voir abandonner un jour les lourds plafonds à voussures et à gros caissons, à figures ronde bosse et à draperies entremêlées de guirlandes et de pots, si fort en vogue depuis le règne de Louis XIV, et revenir aux plafonds dont la forme serait indiquée par la structure, qu'elle soit en bois ou en fer.
Les anciennes liturgies. Paris, 1697, t. I, p. 692.
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Voyages liturgiques, par le sieur de Mauléon (Lebrun des Marettes). Paris, 1718.
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Cette rinçure était probablement jetée dans la piscine.
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Page 315.
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Rational des divins offices, liv. I, chap. XXXIX.
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1849, tome V de la 2e série, p. 55.
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Loc. cit.
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Voyages liturgiques, par le sieur de Mauléon (1718), p. 149.
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Bance, Paris, 1858.
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Il y a toujours un banc devant les piscines.
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Cette piscine date des dernières années du XIIIe siècle, mais appartient, par son ornementation, au XIVe siècle. Nous avons eu, plusieurs fois, l'occasion d'observer que l'église Saint-Urbain de Troyes est en avance de vingt-cinq ans au moins sur l'architecture de l'Île-de-France.
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Tome VII, p. 36.
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L'une de ces piscines a été gravée dans les Annales archéologiques, t. IV, p. 87. Ces piscines sont à une seule cuvette. On voit aussi, dans la chapelle latérale de l'église de Saint-Thibaut (Côte-d'Or), une piscine du XIVe siècle, à cuvette unique, couronnée par un dais crénelé.
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L'usage des planchers en fer justifie au contraire l'adoption des sous-surfaces planes et enduites.
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M. Thiérot, architecte à Reims, a bien voulu relever pour nous ce plafond avec le plus grand soin.
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Ce plafond a été malheureusement remanié. Nous parlons de celui qui existait avant 1843. À Venise, on voit encore de beaux plafonds exécutés d'après ce système. On en trouve aussi en Espagne et notamment à Tolède. Les hôtels de Toulouse en présentaient encore quelques-uns il y a peu d'années.
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