Читайте только на Литрес

Kitap dosya olarak indirilemez ancak uygulamamız üzerinden veya online olarak web sitemizden okunabilir.

Kitabı oku: «Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P)», sayfa 13

Yazı tipi:

Il faut observer ici que dès le XVe siècle, entre les solives des planchers, on faisait souvent des entrevous en plâtre enduits sur bardeaux, posés sur tasseaux cloués aux deux tiers de l'épaisseur de la solive, tant pour empêcher la poussière de tamiser entre les languettes des planches de recouvrement que pour éviter la sonorité des planchers entièrement en bois. Ces entrevous étaient peints et même quelquefois décorés de reliefs en plâtre. On voit quelques plafonds de ce genre dans de vieilles maisons d'Orléans. Au-dessus des entrevous, on laissait un isolement, puis on posait des bardeaux sur les solives, et l'on formait des augets, également en plâtre, dans lesquels on tassait le cran, la marne ou même la terre destinés à recevoir le carrelage.

PLATE-BANDE, s. f. On appelle ainsi un linteau appareillé en claveaux. La plate-bande, ou réunion de pierres horizontalement posées sur deux pieds-droits, étant en principe de construction un appareil vicieux, les architectes du moyen âge ne l'ont guère plus employée que les Grecs. Les Grecs n'admettaient pas l'arc, et s'ils avaient à franchir un espace entre deux piliers, deux pieds-droits ou deux colonnes, ils posaient sur les points d'appui verticaux un monolithe horizontal. Les Romains procédèrent de même dans la plupart des cas, bien qu'ils eussent déjà appareillé des linteaux et qu'ils en aient fait ainsi de véritables plates-bandes. Les architectes du moyen âge, sauf de très-rares exceptions mentionnées dans l'article CONSTRUCTION et FENÊTRE, ont toujours repoussé le linteau composé de claveaux. S'ils craignaient une rupture, ils bandaient au-dessus un arc de décharge. Nous sommes moins scrupuleux, et nous posons dans nos édifices publics ou privés autant de plates-bandes qu'il y a de baies ou de travées fermées horizontalement; seulement nous avons le soin de soutenir cet appareil vicieux au moyen de fortes barres de fer.

Alors pourquoi ne pas employer des monolithes? N'omettons pas de mentionner ici, encore une fois, les plates-bandes de nos grands monuments, comme la colonnade du Louvre; le Garde-Meuble, la Madeleine, le Panthéon, dont les claveaux sont enfilés dans des barres de fer suspendues par des tirants à des arcs supérieurs. Les architectes du moyen âge, on le comprend, ne pouvaient s'astreindre à mentir de cette sorte aux principes les plus vrais et les plus naturels de la construction, et c'est pour cela que plusieurs les considérèrent comme des gens naïfs.

PLÂTRE, s. m. Gypse cuit au four, broyé et se combinant rapidement avec l'eau de manière à former un corps solide, léger, assez dur, et très-mauvais conducteur du calorique.

C'est un préjugé de croire que les constructeurs du moyen âge n'ont pas employé le plâtre. Cette matière, au contraire, était admise non-seulement dans les constructions privées, mais aussi dans les édifices publics. C'est qu'en effet le plâtre est une excellente matière, la question est de l'employer à propos.

Le plâtre pur, mélangé avec la quantité d'eau convenable, dès qu'il commence à durcir (ce qui a lieu presque immédiatement après le mélange), gonfle et prend un volume plus considérable que celui qu'il avait à l'état liquide. À mesure que l'eau s'évapore et lorsqu'il se dessèche, il perd au contraire de son volume. Ce retrait, on le comprend, peut être dangereux dans nombre de cas, il produit des tassements. Aussi les constructeurs du moyen âge n'ont-ils jamais employé le plâtre dans la grosse maçonnerie, dans ce que nous appelons la limousinerie, ni (sauf des cas très-rares) pour remplir les lits ou joints des pierres. Ils posaient toujours leurs assises de pierres à bain de mortier, et pour leurs blocages entre les parements, ils n'employaient jamais que le mortier avec du gros sable. Il arrivait cependant parfois qu'il n'était pas possible de poser des claveaux, par exemple, à bain de mortier, lorsque les cintres avaient une très-grande portée et que les arcs étaient très-épais; alors on coulait, dans les joints, du bon plâtre. C'est ainsi qu'avaient été bandés primitivement les claveaux des arcs de la rose occidentale de la cathédrale de Paris; et il faut dire que le plâtre employé était excellent, car les lames de coulis s'enlevaient comme de minces tablettes d'un centimètre d'épaisseur, sans se briser.

C'était principalement dans les intérieurs que les architectes du moyen âge employaient le plâtre, pour faire des entrevous et des aires sur les planchers, pour hourder des pans de bois, des cloisons, pour faire des enduits. La plupart des pans de bois de refend des maisons des XIVe et XVe siècles sont hourdés en plâtre. Nous avons vu même parfois des baies, donnant d'une pièce dans l'autre, découpées dans du plâtre. Dans l'archevêché de Narbonne, sous le passage de la porte d'entrée, il existe une petite rose du XIVe siècle, en plâtre, moulurée sur des fentons de fer et donnant dans la grande salle voisine. On faisait aussi à cette époque des manteaux de cheminée en plâtre mouluré et sculpté (voy. CHEMINÉE), des corniches d'appartements, des clotets 147, des doubles baies que l'on fermait d'étoffes. Très-anciennement, pendant l'époque mérovingienne et carlovingienne primitive, on avait fait des cercueils en plâtre, et dans les fouilles de vieux cimetières on en retrouve de nombreux débris. On employait aussi le plâtre tamisé très-fin pour faire des enduits sur la pierre et même sur le bois, afin de pouvoir y appliquer des peintures. Le moine Théophile parle de nombreux ouvrages de bois dans lesquels le plâtre joue un rôle important. Le plâtre pur non falsifié acquiert une grande dureté, il est brillant dans la cassure, très-blanc et résistant. Or, les gens du moyen âge, naïfs comme chacun sait, n'avaient pas découvert tous les procédés modernes à l'aide desquels on falsifie cette excellente matière, et leurs enduits de plâtre sont d'une beauté remarquable. Toutefois le plâtre, même bon, ne résiste pas aux agents atmosphériques, et il ne peut et ne doit être employé qu'à l'intérieur ou dans des lieux bien abrités.

PLOMBERIE, s. f. Ouvrages en plomb battu ou fondu, destinés à couvrir les édifices, à conduire les eaux, à revêtir des charpentes exposées à l'air. La plomberie remplit un rôle important dans l'architecture du moyen âge; c'était d'ailleurs une tradition antique, et l'on ne peut fouiller un édifice gallo-romain sans découvrir, dans les décombres quelques débris des lames de plomb employées pour le revêtement des chéneaux et même des combles. Sous les rois mérovingiens, on couvrait des édifices entiers, églises ou palais, en plomb. Saint Éloi passe pour avoir fait couvrir l'église de Saint-Paul des Champs de lames de plomb artistement travaillées. Eginhard 148 écrit, dans une de ses lettres, qu'il s'occupe de la couverture de la basilique des martyrs Marcellin et Pierre: «Un achat de plomb, dit-il, moyennant une somme de cinquante livres, fut alors convenu entre nous. Quoique les travaux de l'édifice, ajoute-t-il, ne soient pas encore assez avancés pour que je doive m'occuper de la couverture, cependant la durée incertaine de cette vie semble nous faire un devoir de toujours nous hâter, afin de terminer, avec l'aide de Dieu, ce que nous avons pu entreprendre d'utile. Je m'adresse donc à votre bienveillance dans l'espoir que vous voudrez bien me donner des renseignements sur cet achat de plomb...» Frodoard, dans son histoire de l'église de Reims 149, rapporte que l'archevêque Hincmar fit couvrir de plomb le toit de l'église Notre-Dame. Plus tard, à la fin du XIIe siècle, l'évêque de Paris, Maurice de Sully, laisse par testament cinq mille livres pour couvrir de plomb le comble du choeur de l'église cathédrale actuelle. L'industrie du plombier remonte donc aux premiers siècles du moyen âge et se perpétua jusques à l'époque de la renaissance, sans déchoir. Cette industrie cependant présente dans l'exécution certaines difficultés sérieuses dont nous devons entretenir nos lecteurs avant de faire connaître les divers moyens qui ont été employés pour les résoudre. Le plomb, comme chacun sait, est un métal très-lourd, très-malléable, doux, se prêtant parfaitement au martelage; mais par cela même qu'il est malléable et lourd, il est disposé toujours à s'affaisser ou à déchirer les attaches qui le retiennent à la forme de bois qu'il est destiné à couvrir. Le travail du plombier doit donc tendre à maintenir les lames de plomb qu'il emploie d'une façon assez complète pour résister à l'affaissement causé par la pesanteur. À ce point de vue, les anciennes couvertures sont très-judicieusement combinées. De plus, la chaleur fait singulièrement dilater ce métal, de même que l'action du froid le rétrécit. S'il n'est pas laissé libre, s'il est attaché d'une manière fixe, il se boursoufle au soleil et arrache les attaches pendant les grands froids. Il faut donc: 1 qu'en raison de son poids, il soit maintenu énergiquement pour ne pas s'affaisser; 2º qu'il soit libre de se dilater ou de se resserrer, suivant les changements de température. D'autres difficultés se présentent lors de l'emploi du plomb dans les couvertures. Autrefois on n'employait que le plomb coulé sur sable en tables plus ou moins épaisses; ce procédé a l'avantage de laisser au métal toute sa pureté et de ne point dissimuler les défauts qui peuvent se manifester, mais il a l'inconvénient de donner aux tables des épaisseurs qui ne sont pas parfaitement égales, de sorte que la dilatation agit inégalement ou que les pesanteurs ne sont pas partout les mêmes. Le plomb laminé que l'on emploie assez généralement aujourd'hui est d'une épaisseur uniforme, mais le laminage dissimulé des brisures ou des défauts qui se manifestent bientôt sous l'action de l'air, et qui occasionnent des infiltrations. De plus, le plomb laminé est sujet à se piquer, qui n'arrive pas habituellement au plomb coulé. Ces piqûres sont faites par des insectes qui perforent le plomb de part en part et forment ainsi autant de trous d'un millimètre environ de diamètre, à travers lesquels l'eau de pluie se fait jour. Nous n'avons jamais eu à signaler de ces sortes de perforations dans des vieux plombs coulés, tandis qu'elles sont très-fréquentes dans les plombs laminés. Nous laissons aux savants le soin de découvrir la cause de ce phénomène singulier. Un autre phénomène se produit avec l'emploi du plomb pour revêtir du bois. Autrefois les bois employés dans la charpente et le voligeage avaient longtemps séjourné dans l'eau et étaient parfaitement purgés de leur séve; aujourd'hui, ces bois (de chêne) sont souvent mal purgés ou ne le sont pas du tout 150, il en résulte qu'ils contiennent une quantié considérable d'acide pyroligneux (particulièrement le bois de Bourgogne), qui forme avec le plomb un oxyde, de la céruse, dès que le métal est en contact avec lui. L'oxydation du plomb est si rapide dans ce cas, que, quelques semaines après que le métal a été posé sur le bois, il est réduit à l'état de blanc de céruse, et est bientôt percé. Nous avons vu des couvertures, faites dans ces conditions, qu'il a fallu refaire plusieurs fois en peu de temps, jusqu'à ce que le plomb eût absorbé tout l'acide contenu dans les fibres du bois. Des couches de peinture ou de brai interposées entre le bois et le métal ne suffisent même pas pour empêcher cette oxydation, tant le plomb est avide de l'acide contenu dans le chêne. Les constructeurs du moyen âge n'avaient pas été à même de signaler ce phénomène chimique, puisque leurs bois n'étaient jamais mis en oeuvre que purgés complétement de leur séve, et leurs couvertures ne présentent point trace de blanc de céruse lorsqu'on en soulève les tables.

Il en est de la couverture en plomb comme de beaucoup d'autres parties de la construction des bâtiments; nous sommes un peu trop portés à croire à la perfection de nos procédés modernes, et trop peu soucieux de nous enquérir de l'expérience acquise par nos devanciers. La plomberie est d'ailleurs si intimement liée à l'art de la charpenterie, que si l'on veut couvrir en planches, il est nécessaire, avant tout, de s'enquérir de la qualité et de la provenance du bois à employer. Les gens du moyen âge, peut-être par suite des traditions de l'antiquité, apportaient un soin minutieux dans l'approvisionnement et la mise en oeuvre du bois; ils n'éprouvaient pas, par conséquent, les désappointements que nous éprouvons aujourd'hui en mettant au levage des bois verts et qui n'ont jamais été baignés dans l'eau courante. On reconnaîtra du moins que cette expérience, raisonnée ou non, est bonne et qu'il faut en tenir compte.

Les plombs employés pendant le moyen âge contiennent une assez notable quantité d'argent et d'arsenic; les nôtres, parfaitement épurés, n'ont pas la qualité que leur donnait cet alliage naturel, et sont peut-être ainsi plus sujets à se piquer et à s'oxyder. Nous avons encore vu en place, en 1835, avant l'incendie des combles de la cathédrale de Chartres, les plombs qui en formaient la couverture datant du XIIIe siècle. Ces plombs étaient parfaitement sains, coulés en tables d'une épaisseur de 0m,004 environ, revêtus extérieurement par le temps d'une patine brune, dure, rugueuse, brillante au soleil. Ces plombs étaient posés sur volige de chêne, et les tables n'avaient pas plus de 0m,60 de largeur. Elles étaient d'une longueur de 2m,50 environ, clouées à leur tête sur la volige avec des clous de fer étamé, à très-larges têtes; les bords latéraux de chacune de ces tables s'enroulaient avec ceux des tables voisines, de façon à former des bourrelets de plus de 0m,04 de diamètre; leur bord inférieur était maintenu par deux agrafes de fer, afin d'empêcher le vent de le retrousser. Voici (fig. 1) un tracé de cette plomberie.


Ainsi les tables étaient fixées invariablement à la tête en A; leurs bords, relevés perpendiculairement au plan, ainsi qu'on le voit en B, étaient enroulés l'un avec l'autre et très-solidement maintenus latéralement par les bourrelets C. Ces bourrelets enroulés n'étaient pas tellement serrés, qu'ils empêchassent la dilatation ou le retrait de chaque feuille. Le bord inférieur des tables était arrêté par les agrafes G, dont la queue était clouée sur la volige. Au droit de chaque recouvrement de feuilles, l'ourlet était doublé, bien entendu, et formait un renflement I. En D, nous donnons, au quart de l'exécution, la section d'un bourrelet. C'est suivant ce principe que le comble de l'église Notre-Dame de Châlons-sur-Marne est couvert, et cette couverture date, dans ses parties anciennes, de la fin du XIIIe siècle. Ici les feuilles de plomb étaient gravées de traits remplis d'une matière noire formant des dessins de figures et d'ornements; on voit encore quelques traces de cette décoration. Des peintures et des dorures rehaussaient les parties plates entre ces traits noirs; car il faut observer que presque toutes les plomberies du moyen âge étaient décorées de peintures appliquées sur le métal, au moyen d'un mordant très-énergique.



Les chéneaux de plomb du moyen âge sont également posés à dilatation libre, sans soudures et à ressauts. Leur bord extérieur n'est pas toujours maintenu, comme cela se pratique de nos jours, par des madriers de chêne, mais il s'appuie sur des tringles horizontales de fer rond, portées à distances assez rapprochées par des équerres-à-tiges forgées. Voici (fig. 2) en A, le profil d'une de ces armatures, et, en B, sa face vue sur la corniche de couronnement. Les équerres C sont scellées dans la tablette de corniche sous la sablière S du comble; les tigettes sont rivées sur la tringle. La feuille de plomb du chéneau fixée en a suit le contour a'a'', et vient s'enrouler en b, laissant voir extérieurement les équerres qui lui servent de soutien.

Ces feuilles de plomb de chéneau sont d'une forte épaisseur, d'une longueur qui n'excède guère 1m,30 (4 pieds), et sont réunies par des ourlets, ainsi que le fait voir le tracé perspectif G. À chaque ourlet, au fond du chéneau, est un ressaut, afin d'empêcher les eaux de passer entre les joints des feuilles, ou d'être arrêtées par les saillies des ourlets. D'ailleurs, les gargouilles d'écoulement sont toujours très-rapprochées; de deux en deux feuilles, par exemple. Les constructeurs du moyen âge avaient probablement observé que le bois entièrement enfermé dans des lames de plomb, sans air, ne tarde pas à s'échauffer et à se réduire en poussière. S'ils faisaient, dans des habitations, des chéneaux de bois, ils laissaient apparents la face extérieure du chéneau en la recouvrant seulement d'un fort relief, ainsi que l'indique la figure 3, pour la préserver de l'action directe de la pluie. Les faces des chéneaux de bois étaient habituellement moulurées, quelquefois même sculptées et couvertes de peinture 151.



Si les plombiers du moyen âge apportaient une attention scrupuleuse dans la façon des couvertures, ils excellaient à revêtir les bois d'ouvrages de plomberie, à repousser les plombs au marteau, et faisaient de cette industrie une des décorations principales des couronnements d'édifices. Les articles ÉPI et CRÊTE donnent quelques exemples de ces ouvrages de plomberie repoussée, qui rappellent les meilleurs modèles d'orfévrerie de l'époque. Il est facile de voir, par l'irrégularité même de ces sortes d'ouvrages, qu'ils étaient exécutés sans modèles; on les composait en découpant les ornements dans des tables de plomb d'une bonne épaisseur, et en donnant un modelé à ces découpures plates, au moyen de petits marteaux de bois de différentes formes. Des ornements anciens, que nous avons examinés avec le plus grand soin, nous ont mis sur les traces de cette fabrication très-simple, mais qui exige le goût d'un artiste et la connaissance des développements de surfaces.



Voulant, par exemple, exécuter en plomb repoussé un ornement de fleuron ou d'épi, tel que celui qui est présenté achevé, en A, dans la figure 4, il fallait se rendre compte du développement de ces surfaces sur plan droit, tracer leur contour sur une feuille de plomb, le découper, ainsi que le montre la figure 4 bis, et donner peu à peu à cette surface découpée, plane, le modelé convenable.



Ces feuilles (voy. la fig. 4) se rapportaient agrafées et soudées sur une âme de plomb, indiquée dans la section B faite sur ab. Des boucles de plomb, soudées à l'intérieur de la tige (voy. le détail C), entraient dans des goujons doubles D soudés à l'âme et placés en d. Des tigettes de fer rond e, soudées en dehors dans le canal formé par le modelé des tiges des feuilles, donnaient à celles-ci de la solidité et se terminaient en fleurette de plomb, comme on le voit en E. L'épi présenté ici ayant une section triangulaire, le développement de chacune des trois feuilles devait se renfermer dans l'angle BGH. Dès lors les trois feuilles étant présentées agrafées et soudées à la base de leur tige de g en h, on écartait les feuilles K, de manière qu'elles se touchassent par le bout, et on les réunissait par un point de soudure, ce qui donnait de la solidité et du roide à la partie supérieure. Il fallait une grande habitude des développements de surfaces et des effets que l'on pouvait obtenir par le modelé d'un objet plan, pour découper ces feuilles à coup sûr et sans gâcher du plomb. Mais jamais gens de bâtiment ne se sont mieux rendu compte des développements que les artisans du moyen âge. Ces travaux, qui nous semblent si difficiles à nous qui n'avons acquis à aucune école l'habitude de ces effets, étaient un jeu pour eux et un jeu attrayant, car ils cherchaient sans cesse de nouvelles difficultés à vaincre 152. Epargnant les soudures dans ces sortes de travaux, ils modelaient la feuille de métal avec un goût charmant, comme on modèlerait de l'argile, et lui laissaient l'apparence qui convient à cette matière, sans prétendre simuler de la pierre ou du bois sculpté.



Avaient-ils, par exemple, un chapiteau à faire, ils formaient la corbeille A (fig. 5), puis la revêtaient de crochets, de feuillages modelés à part, soudés et agrafés au corps principal, ainsi qu'on le voit dans la section B. Mais tout cela, léger, vif, détaché, comme il convient à du métal. La corbeille était alors déprimée à sa partie moyenne, et présentait un diamètre moindre que celui de la colonne, afin que les tiges rapportées, par leur épaisseur sur l'âme n'excédassent pas le diamètre du fût. Souvent ces ornements n'étaient qu'agrafés, ce qui évitait toute brisure et facilitait les réparations. De petites tiges de fer soudées à l'intérieur des feuilles, ou crochets, leur donnaient du roide et les empêchaient de s'affaisser.

Dans tous les ouvrages de plomberie, il est nécessaire de prévoir les cas de réparation, et de disposer les attaches, les agrafes, les ourlets, de telle façon qu'il soit toujours possible d'enlever facilement une partie détériorée et de la remplacer. La dilatation du plomb, un défaut dans une feuille, les coups de bec des corneilles, qui parfois s'acharnent à percer une table, peuvent nécessiter le remplacement d'un morceau de plomb. Les plombiers du moyen âge avaient prévu ces accidents, car tous leurs plombs sont disposés de telle façon qu'on les peut enlever par lames ou par fragments, comme on enlève des tuiles, des faîtières ou des arêtiers d'une couverture en terre cuite, sans attaquer les portions en bon état. Si les plombs revêtent immédiatement des bois façonnés, comme ceux d'une lucarne, d'une flèche, les lames ne sont jamais réunies par des soudures; mais par des ourlets adroitement placés, par des recouvrements et des agrafes.



Une colonne, par exemple, sera revêtue ainsi que l'indique, en A, la figure 6; des profils seront garnis ainsi qu'on le voit en B B'. Le plomb, suivant les contours, prendra du roide par suite de ces retours fréquents; il sera attaché à la tête seulement en b, recouvert par les feuilles supérieures, avec agrafures, et recouvrant de la même façon les feuilles inférieures. Si des ornements doivent être adaptés à ces moulures, ils seront attachés par-dessus la feuille, comme on le voit en B', c'est-à-dire par des agrafes c et par des points de soudure d.

S'il s'agit de poser des feuilles sur des plans verticaux, comme des jouées de lucarnes, des souches de flèches, etc., afin que leur poids n'arrache pas les clous de tête, ces feuilles s'agraferont obliquement les unes avec les autres, ainsi qu'on le voit en D. Des agrafes de fer ou de cuivre G maintiendront la table à sa partie inférieure et l'empêcheront de se soulever. Des agrafures de plomb, clouées sur le bois, seront prises par les ourlets et empêcheront les tables de flotter. Des grands poinçons décorés se composeront d'une suite de cylindres ou de prismes, qui se recouvriront les uns les autres sans soudures. Ainsi ces poinçons pourront être démontés et remontés sans difficulté. Une barre de fer emmanchée à fourchette sur le poinçon de charpente maintiendra verticalement les divers membres. Dans les plombs repoussés formant décoration, la soudure ne sera employée que pour réunir des ornements formés de deux coquilles, comme des bagues, des fleurs ronde-bosse, ou pour attacher des feuilles, des tigettes, des fleurons.

Vers la fin du XVe siècle, on remplaça quelquefois les ornements de plomb repoussé par des ornements de plomb coulé dans des moules de pierre ou de plâtre 153. Mais ces ornements coulés sont très-petits d'échelle et sont loin d'avoir l'aspect décoratif des plombs repoussés. Les repousseurs de plomb faisaient des statues de toutes dimensions; on en voit encore sur les combles des cathédrales à Amiens et de Rouen, qui datent du commencement du XVIe siècle. Ces figures étaient presque toujours embouties, c'est-à-dire frappées sur un modèle de bois ou de métal par parties, puis soudées. On avait le soin alors de tenir le modèle très-maigre et sec, pour que l'épaisseur de la feuille du plomb lui rendît le gras qui lui manquait.

Ce qui donne à la plomberie du moyen âge un charme particulier, c'est que les moyens de fabrication qu'elle emploie, les formes qu'elle adopte, sont exactement appropriés à la matière. Comme la charpente, comme la menuiserie, la plomberie est un art à part, qui n'emprunte ni à la pierre, ni au bois, les apparences qu'il revêt. La plomberie du moyen âge est traitée comme une orfévrerie colossale, et nous avons trouvé des rapports frappants entre ces deux arts, sinon quant aux moyens d'attache, du moins quant aux formes admises. L'or et les couleurs appliquées remplaçaient les émaux. On a fait encore de belle plomberie pendant le XVIe siècle, bien que les moyens d'attache, de recouvrement, fussent alors moins étudiés et soignés que pendant les siècles précédents. La flèche de la cathédrale d'Amiens, en partie recouverte en plomb au commencement du XVIe siècle, en partie réparée au XVIIe, permet d'apprécier la décadence de cet art pendant l'espace d'un siècle.

Les plomberies du château de Versailles et du dôme des Invalides se recommandent plutôt par le poids que par le soin apporté dans l'exécution; tandis que les plomberies, malheureusement rares, qui nous restent des XIIIe, XIVe et XVe siècles, sont remarquables par leur légèreté relative et par une exécution très-soignée. Il suffit, pour s'en convaincre, de voir les anciennes plomberies de l'église de Notre-Dame de Châlons-sur-Marne, de la cathédrale de Reims, de celle d'Amiens, de l'hôtel de Jacques Coeur, de l'Hôtel-Dieu de Beaune, de la cathédrale de Rouen, de celle d'Évreux 154, les nombreux fragments épars sur plusieurs monuments ou hôtels. Il existait encore avant la fin du dernier siècle beaucoup d'édifices du moyen âge qui avaient conservé leurs couvertures de plomb. Ces plomberies ont été enlevées par mesure générale. Il ne faut donc pas s'étonner si nous n'en trouvons aujourd'hui qu'un petit nombre d'exemples. Constatons toutefois que c'est grâce aux études, si fort attaquées, des arts du moyen âge, qu'on a pu de nos jours faire revivre une des plus belles industries du bâtiment.

POINÇON, s. m. Pièce de charpente verticale qui reçoit les extrémités supérieures des arbalétriers d'une ferme ou les arêtiers d'un pavillon et d'une flèche. (Voy. CHARPENTE, FLÈCHE.)

POITRAIL, s. m. Pièce de bois d'un fort équarrissage posée horizontalement sur des piles ou des poteaux, et portant une façade de maison. (Voy. MAISON, BOUTIQUE, PAN DE BOIS.)

PONT, s. m. (punz, ponz). Nous diviserons cet article en plusieurs parties: il y a les ponts de pierre ou de bois fixes, les ponts torneïs (mobiles), les ponts levis et les ponts de bateaux, flottants, de charrettes.

Les Romains ont été grands constructeurs de ponts, soit de pierre, soit de charpenterie, et dans les Gaules on se servit longtemps des ponts qu'ils avaient établis sur les rivières.

Grégoire de Tours rapporte que le roi Gontran «envoya une ambassade à Childebert, son neveu, pour lui demander la paix, et le prier de venir le voir. Childebert vint le trouver avec ses grands, et tous deux, s'étant réunis près du pont appelé le Pont de pierre, se saluèrent et s'embrassèrent 155.» Ce pont était un pont bâti par les Romains. Toutefois ceux-ci, en raison de l'abondance des bois dans les Gaules, durent établir un grand nombre de ponts de charpente qui subsistaient encore pendant les premiers siècles du moyen âge, car les ponts de pierre bâtis par les Romains, encore apparents, sont rares; s'ils eussent été nombreux, on en trouverait les traces sur nos rivières.

Les Romains établissaient presque toujours des arcs ou portes monumentales, soit aux extrémités des ponts, soit au milieu de leur longueur. Ces arcs étaient devenus, pendant les siècles de paix qui suivirent la conquête définitive du sol des Gaules, plutôt des motifs de décoration que des défenses. Mais dès les premières invasions, ces portes furent munies de crénelages, et peuvent être considérées comme le point de départ de ces châtelets ou forteresses qui garnissaient toujours les ponts du moyen âge, qu'ils fussent de pierre ou de bois.

Il ne nous reste pas de ponts de pierre du moyen âge antérieurs au XIIe siècle 156; mais à cette époque on en construisit un assez grand nombre et dans des conditions extrêmement difficiles. Un des plus beaux et des plus considérables est le pont de Saint-Bénezet, à Avignon. La légende prétend qu'un jeune berger, nommé Petit Benoît, né en 1165 dans le Vivarais, inspiré d'en haut, s'en vint à Avignon, en 1178, et fut l'instigateur et l'architecte du pont qui traversait le Rhône à la hauteur du rocher des Doms. De ce pont, il reste encore quatre arches et quelques piles d'une très-remarquable structure. Commencé en 1178, il était achevé en 1188; sa longueur est de 900 mètres, et la largeur de son tablier de 4 mètres 90 centimètres, compris l'épaisseur des parapets. Pour résister au courant du Rhône et aux débâcles des glaces, les piles ont 30 mètres d'une extrémité à l'autre, et se terminent en amont comme en aval par un éperon très-aigu. Il faut observer que sur ce point le Rhône est très-rapide et se divise en deux bras: l'un beaucoup plus large que l'autre; le plus étroit, qui côtoie le rocher des Doms, est d'une assez grande profondeur. Les difficultés d'établissement de ce pont étaient donc considérables, d'autant qu'au moins une fois l'an, les crues du Rhône atteignent en moyenne 5 mètres au-dessus de l'étiage. Sans discuter sur le plus ou moins de réalité de la légende relative au berger Petit Benoît, il paraît certain que ce personnage fut le chef de la confrérie des Hospitaliers pontifes qui entreprit la construction du pont d'Avignon. Cette confrérie, au XIIe siècle, était instituée pour bâtir des ponts, établir des bacs, et donner assistance aux voyageurs sur les bords des rivières 157. Quoi qu'il en soit, le pont de Saint-Bénezet, savamment construit, existerait encore, n'étaient les guerres et l'incurie des gens d'Avignon.

147
   Le clotet était une séparation établie à demeure ou provisoirement dans une grande salle. Beaucoup de grandes salles de châteaux avaient ainsi des clotets qui formaient autant de cabinets où l'on pouvait se retirer. Ces clotets n'avaient guère que 2 mètres de hauteur, sans plafonds. On les remplaça plus tard par des paravents, empruntés aux divisions que les Chinois établissent instantanément dans leurs logis.


[Закрыть]
148
   Einhardi epistolæ XLVI, ad abbatem.


[Закрыть]
149
   Cap. V.


[Закрыть]
150
   Autrefois tous les bois, outre leur séjour dans l'eau, n'arrivaient sur les chantiers qu'après avoir flotté; aujourd'hui, les transports par chemins de fer nous amènent des bois qui n'ont pas séjourné du tout dans l'eau et qui contiennent toute leur séve. De là des inconvénients très-graves.


[Закрыть]
151
   Nous avons vu des restes de chéneaux de ce genre dans des maisons de Rouen, d'Orléans, de Bourges.


[Закрыть]
152
   Sans trop de vanité, nous pouvons dire que nous avons été des premiers, dès 1847, à essayer de faire revivre cette industrie, complétement abandonnée depuis le XVIe siècle, car les plomberies de Versailles, par exemple, sont fondues. Nous avons été secondé par un homme intelligent et, chose plus rare, disposé à laisser de côté les routines, M. Durand, mort depuis, après avoir le premier rendu à cette belle industrie une partie de sa splendeur.


[Закрыть]
153
   Il existe encore plusieurs de ces moules; on en voyait quelques-uns dans l'Hôtel-Dieu de Beaune, qui avaient servi à couler les ornements des épis des combles.


[Закрыть]
154
   Les plomberies de la flèche de la cathédrale d'Évreux ont été très-maladroitement restaurées à diverses époques; on ne découvre au milieu de ces reprises que des fragments, exécutés d'ailleurs avec finesse.


[Закрыть]
155
   Lib. V, cap. XVIII. Pont-pierre, aujourd'hui Pompierre, est un village sur le Mouzon, près de la Meuse (Vosges).


[Закрыть]
156
   Dans son ouvrage sur les Droits et usages, M. A. Champollion Figeac cite un pont gothique du XIe siècle, dépendant du château des comtes de Champagne, à Troyes; mais ce pont, comme le château dont il dépendait, est démoli depuis bien des années, et la reproduction qui en est donnée dans le Voyage archéologique de M. Arnaud est due à l'imagination de cet auteur.


[Закрыть]
157
   La confrérie religieuse des Frères hospitaliers pontifes prit naissance et s'établit d'abord à Maupas, au diocèse de Cavaillon, dès l'année 1164, d'après les Recherches historiques de l'abbé Grégoire. Petit Benoît, ou saint Bénezet, fut le chef de cette institution, et aurait commencé ses travaux à Maupas; ce serait après cette première oeuvre qu'il aurait entrepris la construction du pont d'Avignon.


[Закрыть]
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
866 s. 327 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain