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Kitabı oku: «Comment on construit une maison», sayfa 12

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CHAPITRE XX
LACUNE

Peu de jours après cette conversation, un corps assez nombreux de troupe traversa la contrée. Les Allemands manœuvraient sur les deux rives de la Loire, ils menaçaient Tours. Un officier général vint loger chez M. de Gandelau, il connaissait le grand cousin. Celui-ci souffrait impatiemment de l’inactivité à laquelle il était réduit depuis que la guerre prenait une tournure si funeste.

Il eut avec cet officier général un assez long entretien le soir, et le lendemain matin il déclara à M. de Gandelau qu’il partait avec le corps qui traversait le pays; qu’on manquait d’officiers du génie, et qu’à la rigueur il pouvait en remplir les fonctions; que le général, son ami, approuvait fort sa détermination et que, dans des circonstances aussi graves, il croyait de son devoir de ne pas hésiter à partir, puisqu’il pouvait rendre quelques services. M. de Gandelau n’essaya pas de le retenir, il comprenait trop bien les sentiments qui dominaient son hôte.

«Que ferons-nous de Paul? lui dit-il.

–Vous avez dans votre bibliothèque une édition latine de Vitruve?

–Oui.

–Eh bien, confiez-la-moi; je vais, en une heure, avant mon départ, expliquer à Paul comment il devra travailler sur ce traité: cela l’empêchera d’oublier ce qu’il sait de latin, et il en tirera profit pour les études que nous avons commencées.

–Excellente idée.

–Vous exigerez de Paul que deux fois par semaine il vous remette la traduction d’un chapitre avec figures explicatives dessinées, cela lui entretiendra la main et occupera son esprit. Je ne pense pas que cette traduction puisse faire oublier même celle de Perrault: mais n’importe, il ne perdra pas tout à fait son temps. Dès que je pourrai revenir, vous me reverrez.»

Paul était désolé du départ du grand cousin et de ne pouvoir le suivre; il aurait bien voulu continuer ses études sur l’art de bâtir par un cours d’ingénieur militaire sur le terrain, mais c’eût été un embarras pour le grand cousin, et Mme de Gandelau en serait morte d’inquiétude. Paul fut nanti de l’édition de Vitruve, et le travail auquel il devait se consacrer lui fut expliqué.

Deux heures après, le grand cousin, muni d’une petite valise se mettait en marche avec son ami le général, dont le corps se dirigeait vers Châteauroux. De part et d’autre on s’était bien promis d’écrire.

On croira sans peine que la maison de M. de Gandelau prit l’aspect le plus triste après ce départ précipité. Le maître avait, dès le début de la guerre, équipé et fait partir tous les gens valides. Il n’y avait plus dans ce logis que deux ou trois vieux serviteurs et quelques femmes qui la plupart avait leurs maris ou leurs enfants à l’armée. M. et Mme de Gandelau n’allaient plus au salon, dans lequel des lits avaient été disposés pour des blessés, en cas qu’il en vînt. La famille se réunissait dans la chambre de Mme de Gandelau et on mangeait dans une petite pièce servant habituellement d’office.

Paul, le grand cousin parti, alla faire une visite au chantier. Il était désert; la neige couvrait les tas de moellons, les pierres de taille et les charpentes éparses. Les murs montés à une certaine hauteur, protégés par du chaume, surmontés d’une crête de neige, leurs parements brunis par l’opposition de la nappe blanche qui les entourait, quelques morceaux de bois noircis par l’humidité, donnaient à ces constructions ébauchées l’aspect des débris d’un incendie.

Bien qu’à l’âge de Paul on ne soit pas facilement accessible aux sombres pensées, le pauvre garçon ne put, en face de cette solitude, retenir ses larmes. Il revoyait par la pensée ce chantier si animé un mois auparavant, les gars occupés à leur ouvrage. Tous étaient partis. L’âme de cette future maison qui représentait pour lui la joie de la famille venait de le quitter.

Malgré le froid, il s’assit sur une pierre, et, la tête dans ses mains, de tristes pensées l’assiégeaient. C’était la première douleur, le premier dur mécompte qu’il éprouvât; il lui semblait que tout était fini, qu’il n’y eût plus pour lui ni espoir, ni bonheur possible au monde.

Une main appuyée sur son épaule le fit tressaillir; il leva la tête, son père était derrière lui. Le premier mouvement de Paul fut de se jeter dans ses bras en sanglotant. «Voyons, Paul, mon enfant, calme-toi, lui dit M. de Gandelau. Nous vivons dans un temps d’épreuves; qui sait celles qui nous sont réservées? À peine si, pour nous, elles ont commencé. Pense donc combien il est en ce moment de douleurs en France! Que sont nos inquiétudes et nos chagrins auprès de ces angoisses? Réserve tes larmes, peut-être n’auras-tu que trop l’occasion d’en répandre. Il est toujours temps de se désoler. J’ai vu que tu te dirigeais de ce côté et je t’ai suivi, prévoyant ton chagrin… Mais qu’est cela? rien, ou bien peu de chose… Remets-toi courageusement au travail, seul, puisque notre ami a dû nous quitter pour remplir un devoir sacré. Il reviendra; tu as appris à l’aimer et à l’estimer davantage, montre-lui que tu es digne de l’affection qu’il t’a marquée, en lui remettant alors un travail sérieux.

«Certes, il serait touché de ton chagrin, où il entre pour une bonne part; sois assuré qu’il sera plus touché encore de voir que tu as scrupuleusement suivi ses dernières instructions, et que sa présence n’est pas le seul mobile qui te fasse aimer le travail.»

Le père et le fils regagnèrent la maison. Les conseils de M. de Gandelau, le soin qu’il mettait à faire entrevoir à Paul des temps meilleurs, avaient peu à peu rendu à celui-ci, sinon la gaieté, au moins le calme et le désir de bien faire. M. de Gandelau craignait surtout pour son fils le découragement, cette tristesse vague, inféconde, dont la jeunesse aime parfois à se nourrir et qui énerve les âmes les mieux douées.

Il entra donc dans la chambre de Paul, et prenant le Vitruve laissé sur la table, il se mit à le parcourir. M. de Gandelau savait beaucoup, quoiqu’il ne fît en aucune circonstance parade de ses connaissances. C’est un bien qu’il réservait pour lui. Familier avec les auteurs de l’antiquité, il pouvait lire, sinon expliquer en architecte dans toutes ses parties, le texte de Vitruve: «Tiens, dit-il à Paul, voilà un chapitre qui doit être intéressant et qui peut t’enseigner beaucoup de choses, c’est le chapitre VIII: de generibus structurae et earum qualitatibus, modis ac locis. Comment traduirais-tu ce titre?

Des genres de constructions, de leurs qualités suivant les usages et les localités, répondit Paul.

–Oui, c’est cela; mais en parcourant ce chapitre, je vois qu’il n’est question que de la maçonnerie; l’auteur, en se servant du mot structura, ne me paraît avoir voulu s’occuper que des constructions faites en briques ou en moellons. Il serait mieux, sans doute, de traduire ainsi: Des différents genres de maçonnerie, des propriétés de cette structure, en raison des usages et des circonstances locales.

«Eh bien, mets-toi à traduire ce huitième chapitre. Je vois que l’auteur a décrit les natures de maçonneries dont il recommande l’emploi en telle ou telle circonstance. Il faudra donc joindre des figures à ta traduction. Allons! bon courage et suppose que ton cousin est là tout prêt à rectifier tes erreurs.»

Paul se mit donc à la besogne, en essayant de rendre par des croquis chacune des descriptions de Vitruve. Il va sans dire que cela lui donnait beaucoup de peine; bien des mots lui étaient étrangers et le dictionnaire ne l’aidait que très incomplètement s’il s’agissait d’en connaître le sens exact. Cependant peu à peu ce travail l’attachait. Il cherchait, pour comprendre, à se rappeler des bâtisses qu’il avait vues; il se souvenait de quelques instructions données par le grand cousin; et, tant bien que mal, il mettait sur le papier, en regard de la traduction, des croquis passablement tracés, s’ils n’étaient pas la véritable expression de la description donnée par l’auteur.

Ainsi, pendant la fin du mois de décembre et le commencement de janvier, parvint-il à traduire une douzaine de chapitres que son père lui indiqua, en illustrant son texte. Cela lui donnait grande envie de connaître les monuments contemporains de l’auteur, et regardait-il avec attention un certain nombre de gravures de Piranesi d’après les antiquités de Rome, que son père possédait. M. de Gandelau avait conseillé à Paul d’écrire les questions que sa lecture faisait naître dans son esprit, pour les soumettre à son cousin dès son retour. Ses jours s’écoulaient ainsi rapidement; et bien que la tristesse et l’inquiétude assombrissent toutes les heures, M. de Gandelau s’occupant sans cesse au dehors à soulager des misères, à organiser la lutte contre les envahisseurs; Paul travaillant avec courage, et voyant son cahier grossir; Mme de Gandelau ayant organisé un atelier de lingerie avec les femmes du village, pour nos malheureux soldats dépourvus de tout, la nuit venue, les membres de la famille se réunissaient encore avec cette secrète joie que procure un devoir accompli. Vers les derniers jours de janvier, un journal annonça aux hôtes du château qu’un armistice était signé. Si cette nouvelle annonçait la fin de la lutte, elle présageait le commencement des humiliations les plus dures. Aussi fut-elle accueillie plutôt avec tristesse qu’avec un sentiment de soulagement.

Peu de jours après, le grand cousin revenait au château. Il n’est besoin de dire qu’il y fut accueilli à bras ouverts. Paul surtout manifestait sa joie. On parla de reprendre les travaux. Les dernières lettres de Mme Marie annonçaient qu’elle serait de retour vers la fin de l’hiver suivant. Ces lettres, toutes remplies des sentiments d’inquiétude, des angoisses éprouvées loin de la France, ne disaient pas un mot de la maison future. Si donc on la pouvait achever, la surprise serait complète. Pendant les jours de repos dont le grand cousin avait le plus grand besoin, celui-ci revit et corrigea la traduction de Paul, rectifia ses croquis. Le tout fut mis au net et on atteignit ainsi les premiers jours de mars, où il fut décidé qu’on rouvrirait le chantier.

CHAPITRE XXI
REPRISE DES TRAVAUX.—LA CHARPENTE

Vers la mi-mars, le temps étant beau, les travaux furent repris et il fallut donner les détails nécessaires à la confection des planchers et combles au charpentier, pour n’être point retardés. Paul comprenait plus vite les croquis donnés par le grand cousin, et il commençait à pouvoir se rendre utile. Puis il avait pris l’excellente habitude de demander des explications quand au premier abord il ne croyait pas pouvoir interpréter fidèlement un tracé sommaire; et le grand cousin ne marchandait pas les éclaircissements ou commentaires. Sa patience était inépuisable. Cependant chaque fois que Paul était embarrassé et ne savait résoudre une question difficile, avant de le mettre sur la voie, le grand cousin le laissait chercher pendant un temps raisonnable.

«Réfléchissez, lui disait-il, vous trouverez toujours une solution; si elle n’est pas la bonne, je viendrai à votre aide; mais il faut de vous-même trouver quelque chose. On ne saisit bien une solution donnée par celui qui sait, que quand on a tourné autour, qu’on a fait quelques efforts pour résoudre soi-même le problème posé. C’est un exercice préalable nécessaire, et qui dispose l’esprit à comprendre. Faites une coupe générale du bâtiment principal sur la salle de billard et le cabinet de votre beau-frère, c’est-à-dire une coupe transversale qui indiquera les murs, les planchers, les cheminées et les combles. Vous possédez à peu près tous les éléments nécessaires. Essayez de coordonner tout cela, afin de bien vous rendre compte de toutes les parties du bâtiment. Je ne prétends voir cette coupe que quand vous aurez terminé. Alors seulement je la corrigerai et cette correction vous profitera.»

Se servant donc des détails déjà tracés, Paul établit la coupe transversale, non sans peine; mais les charpentes du comble étaient singulièrement conçues, leur composition lui semblait difficile et compliquée. Il n’avait su comment fermer l’ouverture large réunissant la salle de billard au salon. Les lucarnes de combles lui causaient des embarras sérieux. Puis il avait beaucoup de peine à imaginer dans son esprit l’emmanchement de toutes ces parties. Quelque effort qu’il fît, il ne se représentait pas nettement la position de chaque chose. Il n’était pas satisfait; et il le dit franchement à son cousin.

«J’espère bien, répondit celui-ci, que vous n’êtes pas satisfait! Ce serait mauvais signe, car cela prouverait que vous n’avez pas beaucoup cherché. Vos murs sont bien à leur place suivant le profil que nous avons adopté. Mais les charpentes, les lucarnes!… tout cela ne pourrait tenir et manque de simplicité. Pourquoi tant de pièces de bois?… Vous êtes-vous rendu compte de leur utilité? Nous avons des murs, profitons-en. Pourquoi ne pas vous servir, pour porter en partie la charpente du comble, du mur qui sépare la salle de billard du cabinet de travail, d’autant que ce mur reçoit des tuyaux de cheminée qu’il faut nécessairement conduire au-dessus de la couverture? Vous n’avez pas songé aux cheminées; c’est une étourderie, car vous les voyez marquées sur les plans du rez-de-chaussée, du premier étage et des combles.

–J’y ai bien songé, répondit Paul, mais je n’ai su comment les faire passer.

–Alors vous ne les avez pas tracées, c’est un moyen d’éviter la difficulté; mais vous savez qu’il faut bien cependant qu’elles traversent le comble? Voilà ce que je n’admets pas; mettre de côté une question, ce n’est pas la résoudre. Allons, revoyons tout cela ensemble.»

Fig. 46.—Coupe générale de la maison.


La coupe fut bientôt rectifiée (fig. 46), et le grand cousin ne manqua pas de la meubler des détails que devaient recevoir les pièces sur lesquelles la section était faite: ce qui plut fort à Paul qui voyait ainsi la salle de billard terminée, avec son ouverture sur le salon, le cabinet de son beau-frère avec ses portes; puis, au-dessus, la chambre à coucher de celui-ci, son cabinet de toilette et les deux chambres des combles. Ce tracé lui parut charmant; il lui semblait déjà qu’il entrait dans les pièces et qu’il jouissait de la surprise de sa sœur en examinant ces intérieurs. Il voulait montrer à l’instant même toutes ces jolies choses à Mme de Gandelau; mais le grand cousin l’engagea à prendre patience.


Fig. 47.


Fig. 48.


«Tout cela, lui dit-il, ne signifie rien, ce n’est qu’une image; il faudra donner les détails de ces boiseries, de ces arrangements intérieurs, et à l’étude il y aura beaucoup à revoir. Laissez un peu ces intérieurs et examinons la charpente des combles. Établissons-la en plan (fig. 47). Les murs A B sont les pignons qui doivent porter les pannes. Nous avons en C D deux murs de refend qui forment également pignons et recevront de même les pannes. Mais les espaces E C sont trop larges pour recevoir de E en C des pannes. Entre eux, nous comptons 6m,60c; or, les pannes ne doivent pas avoir plus de 4 mètres de portée si l’on veut éviter leur flexion. Il faut donc poser des fermes intermédiaires en G H, le long des jouées des lucarnes milieux I. Ainsi les pannes de A en G n’auront que 4 mètres de longueur, et nous pourrons les soulager par des liens du côté des pignons extrêmes. De K en L nous aurons des branches de noues à la pénétration des combles. Établissons d’abord les fermes G H (fig. 48). La hauteur entre planchers de l’étage du comble devra avoir 3 mètres. Nous poserons donc les deux jambes A sur deux semelles reliées par un tirant qui passera sous le parquet. Sur ces jambes, un entrait B; puis pour relier les jambes avec l’entrait, les moises C. À l’extrémité de cet entrait porteront les pannes D. Les arbalétriers E s’assembleront sur cet entrait et viendront saisir le poinçon F. Sous les secondes pannes H, il faudra placer des moises G, formant entrait retroussé. Le faîtage I portera sur ce poinçon avec liens en écharpe. Ces pannes porteront de l’autre bout sur les pignons. Ainsi pourrons-nous poser le chevronnage qui recevra la volige et l’ardoise. Ces pièces (entraits, entraits retroussés, arbalétriers), pourront passer à travers le mur longitudinal K recevant les tuyaux de cheminée et réciproquement, la charpente étayera ce mur et celui-ci soulagera et raidera la charpente. Pour le milieu du bâtiment, ayant les deux murs C D, il nous suffira de poser le faîtage L avec les deux liens-décharges M assemblés aux extrémités d’une filière N qui arrêtera leur écartement. Nous poserons au même niveau les filières a b (voir la fig. 47) qui recevront les faîtages O des combles en pénétration. Ces filières seront de même déchargées par des liens R. C’est sur ces faîtages O que viendront s’assembler les branches de noues S rabattues en S’. Le chevronnage sera ainsi bien établi partout, et nous n’aurons, relativement à la surface du bâtiment, que peu de bois à mettre en œuvre, puisque nous nous servons autant que possible des murs intérieurs. Les pignons nous permettent d’éviter les croupes difficiles à bien établir et à couvrir, et qui demandent beaucoup de bois. Reste le comble de l’escalier. Pour vous faire comprendre la manière de le construire, je vais vous en donner le tracé perspectif. Ce comble porte sur des murs qui s’élèvent au-dessus de la corniche du bâtiment, mais il pénètre le toit de ce bâtiment principal en X (voir la fig. 47). Vous observerez, en examinant le tracé (fig. 39), que les murs de l’escalier laissent un angle sans point d’appui, sur le vestibule. Il faudra donc porter l’arêtier du comble sur ce vide. À cet effet, nous placerons une fermette sur les deux têtes du mur, laquelle recevra l’about de cet arêtier postérieur V indiqué sur la figure 47. Cette disposition est visible dans le tracé perspectif (fig. 49), qui donne la tour carrée de l’escalier principal avec sa charpente. Nous élèverons le noyau barlong A de cet escalier jusqu’au niveau de la corniche. Nous poserons sur les murs les sablières B; puis des trois angles jusqu’au noyau, les semelles C. Sur les abouts assemblés à mi-bois de ces semelles, nous élèverons les deux poinçons D et les trois arêtiers E. Le pied des deux poinçons sera réuni par les moises F. Quant à l’arêtier postérieur G, il viendra s’assembler sur la face du poinçon de la fermette, ainsi que je vous le trace en G’; et pour que cette fermette ne soit pas poussée par cet arêtier, des moises H réuniront la tête du poinçon de la fermette au poinçon du comble D’. Sur les angles des arêtiers, en I, il faudra fixer des chantignolles pour poser les abouts K des pannes qui soulageront la portée des chevrons.


Fig. 49.—Comble du grand escalier.


«En L vous voyez le pignon qui doit se joindre au comble de l’escalier, et n’oubliez pas qu’il faut incruster, le long des murs contre lesquels se tracent les couvertures en pénétration, des filets M en pierre, qui forment solins63 au-dessus de ces couvertures pour empêcher les eaux pluviales de passer entre l’ardoise et le mur. On fait le plus souvent ces solins en plâtre ou en mortier, sur la couverture même; mais celle-ci étant sujette à des mouvements, ces solins se décollent et il faut les refaire sans cesse. Incrustés dans la maçonnerie au-dessus des pentes de la couverture, ils recouvrent la jonction de l’ardoise ou de la tuile avec les murs et, étant indépendants, ils ne sont pas sujets à se dégrader par suite des mouvements de la charpente.

«Vous allez tracer ces charpentes à une échelle de 0m,02c pour mètre; je corrigerai vos dessins, et nous les donnerons au charpentier pour qu’il dispose ses bois le plus tôt possible. Nous indiquerons les grosseurs de ces bois. Ainsi, les arbalétriers devront avoir 0m,20c x 0m,18c les moises 0m,08c x 0m,18c, les poinçons 0m,18c x 0m,18c, l’entrait de même, les jambes 0m,20c x 0m,20c, les chevrons 0m,08c x 0m,10c. Les pannes 0m,20c x 0m,20c au maximum et sans aubier ni flâches.

–Qu’appelez-vous flâches?

–Ce sont les dépressions, les manques de matière qui apparaissent aux arêtes lorsqu’on équarrit des bois quelque peu tors, et qui laissent ainsi de l’aubier visible sur ces arêtes et même une concavité, ainsi que je vous le marque ici en A (fig. 50).


Fig. 50.


Vous aurez le soin de ne pas tolérer les flâches dans les bois que le charpentier devra mettre en œuvre pour les combles et solives.

«En étudiant nos planchers, je vois que pour la salle de billard, pour la salle à manger et pour le salon, nous ferons sagement de poser dans chacune de ces pièces deux poutres pour recevoir les solives, en raison de la portée et des cloisons posées au-dessus de ces planchers. Vous vous rappelez que nous avons réservé cette question et que, dans le détail (fig. 42) et dans la coupe (fig. 46), nous avons admis la présence de ces poutres. Les solives, dans ces trois pièces, au lieu de porter d’un mur latéral à l’autre, porteront des murs-pignons sur ces poutres. Mais ces poutres prises dans les meilleurs chênes, finissent toujours par fléchir, ce qui est au moins très désagréable à l’œil. Nous les ferons donc chacune de deux pièces refendues, ainsi que je vous l’ai montré pour les poitraux, et, entre les deux pièces, nous intercalerons une lame de tôle. Cela nous permettra de nous servir de ces poutres comme de lambourdes et d’assembler les solives sur leurs faces, au lieu de les poser par-dessus, et par conséquent de ne pas avoir sous les plafonds une saillie trop prononcée. Ainsi (fig. 51), ayant deux pièces A de 0m,15c x 0m,30c, nous intercalerons une lame de tôle B de 0m,003mm d’épaisseur. Nous boulonnerons le tout ensemble de distance en distance, comme il est marqué en D, et, dans les embrèvements C, nous poserons les abouts des solives E. On clouera quelques plates-bandes en fer pour réunir ces abouts les uns aux autres, et nous obtiendrons de la sorte des planchers parfaitement rigides. Des corbeaux soulageront les portées des poutres qui n’entreront dans l’épaisseur des murs que de 0m,15c. Encore un détail à préparer pour le charpentier. Vous veillerez à ce que les bouts des poutres engagés dans la maçonnerie soient imprimés au minium, et que ces bouts soient enfermés dans une boîte de zinc nº 14 pour empêcher l’humidité des murs de pénétrer le fil du bois. Voilà de la besogne taillée, mettez tout cela au net; demain, quand j’aurai revu vos tracés, nous ferons venir Jean Godard et nous irons choisir les bois dans la réserve coupée de votre père.»


Fig. 51.


En effet, le lendemain, Paul présenta ses dessins. Il fallut bien y faire d’assez nombreuses corrections, mais cependant le grand cousin le félicita. Paul se donnait de la peine, cherchait à bien comprendre, et s’il ne trouvait pas toujours les solutions les plus simples et les plus naturelles, au moins prouvait-il qu’il réfléchissait avant de rien mettre sur le papier.

Jean Godard appelé, les tracés lui furent présentés. Quelques explications lui furent données, après quoi le grand cousin lui demanda s’il n’avait pas quelques observations à faire. Jean Godard se grattait l’oreille et ne disait mot.

«Y a-t-il dans tout cela quelque chose que vous ne compreniez pas bien, ou qui vous paraisse défectueux? lui dit le grand cousin.

–Non point, monsieur l’architecte, mais voilà tout de même des planchers qui ne vont point suivant l’usance; ça sera difficile… nous n’avons pas l’habitude… et vous sentez… c’est pas de la charpenterie ordinaire.

–Ce qui veut dire qu’il faudra vous la payer plus cher que celle des planchers faits suivant votre méthode?

–Dame… vous sentez… il y a de la main-d’œuvre tout de même… tous ces bois-là, faut que ça soit lavé à la scie, raboté peut-être.

–Examinez bien, Jean. Il faut que les solives soient lavées à la scie sur deux faces seulement, les deux faces vues; or, toutes les solives ordinaires sont prises dans des sciages. Si nous vous demandions de fournir le bois, vous pourriez prétendre que vous ne trouveriez pas des solives disposées ainsi; mais il s’agit de prendre dans des bois qui sont à nous. Si ce sont des bois de brin, il suffira que vous laviez deux faces ainsi (fig. 52); il m’importe peu que vous laissiez équarries grossièrement et seulement purgées d’aubier les faces A. Si vous prenez vos solives dans de gros bois (fig. 53), vous n’aurez qu’à les fendre à la scie comme je le trace ici en B. Mais je préfère prendre des bois de brin parce qu’ils ne tirent pas à cœur comme le feront nécessairement ceux refendus en quatre; et je crois que nous aurons assez des premiers pour n’être point contraints d’employer ce dernier moyen. Nous n’aurons donc à vous payer que les sciages de deux faces comme pour les solives que vous employez habituellement. Quant aux poutres, elles ne seront de même lavées à la scie que sur deux faces, car, si nous les prenons dans un seul brin, nous mettrons les deux sciages en dehors (fig. 54), et la feuille de tôle étant interposée en D, par-dessous, nous rapporterons une planche moulurée C pour masquer la jonction et les flâches s’il y en a. Pour les embrèvements triangulaires à faire en E, ils sont moins difficiles à façonner que ne le sont des mortaises et, les solives portant en plein, n’ont pas de tenons. Il en est de même pour les lambourdes qui, le long des murs, reçoivent les abouts des solives et remplacent les corniches… Eh bien, qu’en dites-vous?


Fig. 52.


Fig. 53.


—Dame… c’est pas toujours du plancher comme partout.


Fig. 54.


—Qu’est-ce que cela fait, s’ils ne vous donnent pas plus de mal à établir? Nous tiendrons attachement du temps que vous passerez, puisque nous fournissons le bois, et, par conséquent, vous êtes assurés de ne rien perdre. Rendez-vous bien compte, et, si vous le voulez, nous pourrons faire un marché. Nous vous payerons la façon au mètre cube comme pour des planchers ordinaires, ou bien nous tiendrons attachement du temps employé en main-d’œuvre et nous vous payerons ce temps… Choisissez!»

Jean Godard tourna longtemps son chapeau, regarda les feuilles de papier dans tous les sens, se gratta derechef l’oreille droite, puis la gauche, et, après une bonne demi-heure, déclara qu’il consentait à ce qu’on lui payât la façon de ces planchers au prix des planchers ordinaires, en raison du cube mis en œuvre.—«Et vous avez raison, dit le grand cousin; car si vous dirigez bien votre travail, si vous ne faites pas de fausses manœuvres, vous gagnerez plus à ce marché que si nous vous payions en régie, par la raison que, pour établir ces sortes de planchers, à cube égal, il y a moins de main-d’œuvre que dans ceux que vous faites habituellement, surtout en ce pays-ci.» Jean Godard demanda cependant qu’il lui fût accordé une plus-value pour les lambourdes destinées à remplacer les scellements bruts dans les murs. «Soit, dit le grand cousin; nous faisons l’économie des corniches en plâtre, il est juste que nous vous en tenions compte.» Il fut donc résolu qu’on payerait à part la façon des lambourdes, c’est-à-dire leurs embrèvements et chanfreins.


Fig. 55.


Dès le lendemain, quatre lames de scies étaient en mouvement pour débiter les bois mis en réserve. Le chantier avait repris toute son activité. Restait, pour la maçonnerie, un détail de lucarne à fournir et qui fut bientôt fait (fig. 55), puis le passage des tuyaux de cheminée.

Le grand cousin, en donnant à Paul le détail des lucarnes, coupe A et face extérieure B, attira son attention sur leur construction. Montées sur un bahut de 0m,50c d’épaisseur, elles devaient se composer de deux piédroits, en trois assises chacun. Les deux premières assises conserveraient un filet C, destiné à recouvrir l’ardoise de la couverture et à former solins. Sur ces deux jambages porteraient le linteau et deux pierres faisant corbelets. Deux morceaux, sur ce linteau, recevraient les petits gâbles latéraux et composeraient les jambages de l’ouverture supérieure destinée à donner de l’air dans les greniers. Le couronnement serait fait en deux assises, avec fleuron de terminaison. La coupe indiquait comment les glacis des rampants formeraient solins sur les petits combles de ces lucarnes par derrière et mouchette sur la face, pour empêcher l’eau de pluie de couler le long des parements.

63.Solin. Bourrelet disposé au-dessus d’une couverture et suivant son inclinaison le long des maçonneries qui la surmontent, pour empêcher les eaux pluviales de s’introduire entre cette couverture et la maçonnerie.
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
298 s. 65 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain