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Kitabı oku: «Comment on construit une maison», sayfa 13

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CHAPITRE XXII
LA FUMISTERIE

«Pourquoi, demanda Paul au grand cousin, les cheminées fument-elles?

–Vous voulez me demander plutôt, répondit celui-ci, pourquoi certaines cheminées fument? Beaucoup de causes contribuent à faire fumer les cheminées, tandis qu’il n’est qu’une condition pour qu’elles ne fument pas. C’est donc à remplir cette condition qu’il faut s’attacher. Or, voici cette condition: tuyau de fumée proportionné au foyer et alimentation de celui-ci par une quantité d’air proportionnée à la combustion. Si le tuyau est trop étroit pour la quantité de fumée que donne la combustion, cette fumée ne s’élève pas assez facilement, sa marche ascensionnelle est ralentie par le frottement et, le débit étant insuffisant pour la production, il y a débordement de fumée en dehors de la cheminée. On active la combustion et, par suite, l’élévation de la fumée par un courant d’air extérieur qui vient frapper le bois ou le charbon. Le feu bien allumé chauffe la colonne d’air qui remplit la cheminée, et plus cette colonne est échauffée, plus l’air est léger et plus il tend à monter.

«C’est ce qui fait que dans certaines cheminées mal établies, il faut un certain temps pour que la fumée prenne son cours, c’est-à-dire qu’il faut que la colonne d’air soit échauffée. Et, en attendant qu’elle le soit, la fumée passe non dans le tuyau, mais dans la pièce: alors on ouvre une fenêtre pour alimenter d’air le foyer, celui-ci s’allume, chauffe le tuyau et la fumée prend son cours. C’est pourquoi aussi toutes les cheminées neuves fument. Les tuyaux en maçonnerie sont humides, froids, l’air qu’ils contiennent est lourd; il faut un certain temps pour l’alléger, le pénétrer de calorique.

«Au lieu d’ouvrir une fenêtre pour activer le feu (ce qui est un moyen passablement primitif), on établit pour chaque foyer une ventouse, c’est-à-dire qu’on lui donne un canal par lequel l’air extérieur vient frapper le combustible dès que se développe la moindre chaleur, comme celle, par exemple, d’un morceau de papier allumé. Aussitôt cet air extérieur est appelé pour remplir le vide que produit le commencement de combustion, et il active le feu en apportant son oxygène. Plus le feu s’anime, plus le courant d’air est rapide; plus cet air arrive rapidement, plus le bois ou le charbon brûle vivement. La ventouse est pour une cheminée ce qu’est pour un feu de forge le soufflet. Mais il n’en faut pas moins que la ventouse, aussi bien que le tuyau de fumée, soient en rapport avec le foyer. Si le tuyau de fumée est trop étroit, il y a engorgement de fumée; celle-ci déborde. S’il est trop large, il ne s’échauffe pas bien également; puis les courants d’air extérieurs, les vents exercent une pression à son orifice supérieur qui neutralise l’action de tirage; la fumée rabat. Si la ventouse est trop étroite pour l’étendue du foyer, elle n’amène pas la quantité d’air nécessaire à la combustion; le feu est languissant, il chauffe incomplètement, et la fumée tiède ne monte pas assez vite. Si cette ventouse est trop large, ou elle amène un volume d’air trop considérable dont l’oxygène n’est employé qu’incomplètement: alors une partie de l’air froid passe dans le tuyau de fumée et n’active pas le tirage; ou, s’il y a des changements de température, la ventouse attire l’air de la cheminée au lieu d’apporter celui du dehors. Il y a renversement, et la cheminée fume horriblement.»

C’était le soir, après dîner, devant l’âtre que le grand cousin développait cette théorie. «Cela me paraît simple, dit Mme de Gandelau; mais alors pourquoi donc la cheminée de ma chambre, que j’ai maintes fois fait retoucher, fume-t-elle à certains jours?

–Parce que votre chambre, madame, est située dans l’aile neuve de la maison dont les combles sont plus bas que ceux du vieux corps de logis. On n’a pu monter le tuyau de fumée assez haut pour qu’il dépassât les faîtages des combles de l’ancien bâtiment, car cette cheminée isolée n’eût pas résisté aux bourrasques. Quand le vent vient de votre côté, il trouve l’obstacle que lui oppose la bâtisse plus élevée, il rebondit: il y a remous et, en tourbillonnant sur lui-même, il s’engouffre dans le tuyau de votre cheminée, ou tout au moins fait obstacle, par moments, au passage de la fumée. Dans ce cas il faut bifurquer les tuyaux; la pression du vent ne s’exerçant jamais également sur les deux orifices, l’air en s’engouffrant dans l’un, fait passer violemment la fumée par l’autre. Je ne connais pas d’autre moyen; je vous l’ai déjà proposé, mais vous avez trouvé, non sans raison, que ces tuyaux qui semblent lever deux bras désespérés vers le ciel, seraient forts laids, et vous vous êtes résignée à être enfumée quand souffle une forte bourrasque de l’ouest.

–Le fumiste a cependant posé un tuyau de tôle avec un chapeau tournant… ce qu’il appelle, je crois, une gueule de loup; il m’avait assuré que cela marcherait à merveille, mais c’était pire qu’avant.

–Sans doute, quand il y a remous de vent, tourbillons, par suite d’un obstacle, comme ici, cette gueule de loup s’affole, tourne en tous sens et, dans ses mouvements brusques, elle présente parfois, ne fût-ce qu’une seconde, sa bouche à la bourrasque. Cette bouche remplit alors l’office d’un entonnoir, et l’air, se précipitant dans le tuyau, renvoie la fumée par bouffées jusqu’au milieu de la chambre.

–C’est bien cela; vous croyez donc qu’il faudra accepter ces deux affreux tuyaux?

–Assurément. Il y a des villes, voisines de montagnes, dont toutes les maisons, si hautes qu’elles soient, se trouvent dans ces conditions. Genève par exemple, bâtie entre le Salève et le Jura, est dominée, bien qu’à grande distance, par ces montagnes. Les vents violents qui régnent parfois sur le lac s’engouffrent entre ces deux chaînes, tourbillonnent, ressautent, poussent des rafales en tous sens, si bien que les Genevois sont obligés de couronner leurs cheminées par ces tuyaux doubles, qui de loin présentent l’aspect d’une forêt d’anciens télégraphes.

–J’espère bien que vous établirez les cheminées dans la nouvelle maison, de façon qu’elles ne fument pas. Vous savez que Marie prendrait fort mal la chose.

–Nous ferons en sorte; d’abord les conditions locales sont bonnes; nous ne sommes pas dominés, nous n’avons pas à craindre les remous du vent; le long du plateau sur lequel nous bâtissons, les brises sont régulières; puis nous n’avons que des couvertures simples, hautes, et tous les tuyaux dépassent le faîtage. Nous établirons ces tuyaux en briques avec de bonnes sections. Rien ne nous force à les dévier sensiblement; ils s’élèvent verticalement ou peu s’en faut. Puis enfin, nous aurons un système de ventouses établi depuis le sous-sol, au frais; car il faut encore faire attention à ceci; quand des ventouses sont, par exemple, ouvertes au midi, il arrive que l’air qu’elles reçoivent du dehors, même pendant l’hiver, est plus chaud que celui de la pièce où on allume du feu; alors la ventouse attire la fumée, qui rabat dans la pièce. Tout au moins ne peut-on allumer le feu. Le bois noircit et ne brûle pas.

«On emploie beaucoup à Paris maintenant le tuyau unique de fumée pour plusieurs foyers placés l’un sur l’autre et, parallèlement, un tuyau de ventilation qui dirige un embranchement sur chacun de ces foyers. Cela est bon surtout dans les maisons où l’on pose jusqu’à cinq foyers les uns au-dessus des autres, en ce qu’on évite ainsi d’affaiblir considérablement les murs par la quantité de tuyaux juxtaposés. Les foyers s’attirent réciproquement et ce système ne donne pas de fumée dans les pièces. Faut-il que ces tuyaux aient une section proportionnée à tous les foyers, c’est-à-dire qu’ils aient environ, pour cinq cheminées ordinaires superposées, une section de 0m,16c superficiels, soit un carré de 0m,40c de côtés. Mais ici, où nous n’avons que trois étages et de la place, je préfère adapter les tuyaux particuliers à chaque cheminée; d’autant qu’avec le système à tuyau unique il est nécessaire que toutes les cheminées soient allumées: ce qui a toujours lieu dans une grande ville. Faute de ce, il arrive, dans les changements brusques de température, que la fumée passe dans un foyer supérieur ou inférieur au lieu de suivre la colonne verticale. On remédie à cet inconvénient, qui n’est d’ailleurs qu’accidentel, par des trappes bien établies.

–Mais, dit Paul, est-ce que cet air froid des ventouses ne refroidit pas les pièces?

–Cet air froid arrive dans le foyer même, non dans la pièce; il est évident que si l’on ne fait pas de feu, cette ventouse donne de l’air froid qui contribue à abaisser la température d’une pièce; on peut la fermer par une trappe. Mais retenez bien ceci: pour faire du feu, pour brûler du bois ou du charbon ou quoi que ce soit, il faut de l’oxygène, vous avez appris cela dans vos cours de chimie et de physique; donc il faut de l’air; sans air, pas de feu. Autrefois on ne se donnait pas la peine d’établir des ventouses pour les foyers, parce que l’air arrivait dans les pièces par les dessous de portes, par des fenêtres mal fermées, et aussi parce que les pièces, étant très vastes, contenaient un cube d’air assez considérable pour alimenter longtemps un foyer. Puis, disons-le, les cheminées de nos aïeux fumaient passablement. Aujourd’hui nous sommes plus délicats, nous voulons des pièces peu étendues, bien fermées, nous redoutons les courants d’air; c’est bien, mais la cheminée en exige un, courant d’air, sans quoi son combustible ne brûle pas et ne vous chauffe pas. Il est évident que cette colonne d’air froid que vous appelez pour activer la combustion entraîne, en s’élevant dans le tuyau de fumée, une quantité notable de chaleur. Aussi a-t-on inventé plusieurs systèmes pour faire que cet air chauffé ne s’en aille pas rapidement. On le fait tourner dans des tuyaux, on le force à séjourner le plus longtemps possible, ou du moins à laisser, sur les parois des couloirs nombreux qu’il parcourt, une partie du calorique qu’il a absorbé. Ces couloirs chauffent à leur tour une cavité, une chambre qui les enveloppe et qui est aussi alimentée d’air. Cet air, dilaté par la chaleur, tend à s’extravaser. On lui ouvre des issues, qui sont les bouches de chaleur.

«C’est là le principe des calorifères.

–À propos de calorifère, dit Mme de Gandelau, vous comptez en établir un dans la nouvelle maison?

–Certainement; sa place est marquée dans le plan des caves au-dessous du vestibule et son tuyau de fumée passe dans l’angle intérieur du grand escalier. Un calorifère est indispensable dans une maison de campagne, surtout lorsqu’on n’y habite pas tout l’hiver. C’est le moyen d’éviter de nombreuses détériorations. Il suffit, pendant la saison humide et froide, de chauffer une ou deux fois par semaine pour entretenir les intérieurs bien secs.

–Est-ce que vous ne pensez pas que la chaleur des calorifères est malsaine?

–L’air chaud émis par les calorifères est malsain parce qu’en se chauffant, il a perdu une partie de son oxygène, et que l’oxygène nous est aussi nécessaire pour vivre qu’il est nécessaire aux matières combustibles pour brûler. On évite une partie des accidents causés sur l’économie animale par l’air désoxygéné en le faisant passer, au sortir du récipient de chauffe, sur des bassins remplis d’eau, mais ce moyen est un palliatif et on perd ainsi une partie de la chaleur. On peut aussi adopter les calorifères à la vapeur qui n’ont pas les inconvénients que je vous signale. Mais leur établissement est plus dispendieux.

«Je ne considère les calorifères à air chaud bons que pour chauffer des pièces où on ne séjourne pas, des vestibules, des escaliers, des galeries; mais si l’on établit des bouches dans les salons, les salles à manger et les chambres à coucher, il faut se garder de les ouvrir pendant l’habitation. Ne les ouvrez que pour sécher les intérieurs lorsque vous vous absentez; après quoi, ouvrez les fenêtres et fermez les bouches de chaleur en même temps que vous fermerez les fenêtres.

–Et les bains, comment les chaufferez-vous?

–Au moyen d’une chaudière disposée près du calorifère, avec colonne d’ascension jusqu’aux cabinets de bain du premier étage qui sont presque au-dessus du foyer.

–Vous avez aussi des bains pour les gens?

–Oui, au-dessous du fournil et de la buanderie, en sous-sol.

–Je vois que vous avez tout prévu… Voilà une conversation, à propos de fumisterie, que tu feras bien de résumer dans tes notes, Paul!

–Ainsi ferai-je, mère.»

CHAPITRE XXIII
CANTINE

Malgré les derniers désastres, la vie semblait revenir comme par enchantement dans les villes et campagnes. Partout chacun se remettait au travail pour réparer le temps perdu. Si l’on conservait le souvenir ineffaçable des malheurs qui avaient failli tarir toutes les sources de richesses en France, un instinct patriotique faisait redoubler d’efforts pour réparer tant de ruines sans se livrer à de vaines récriminations. Tous ceux qui parcoururent la France pendant ces mois de février et de mars 1871 pouvaient comparer le pays à l’une de ces fourmilières qu’un maladroit a bouleversées du pied. Ces merveilleux insectes n’emploient pas leur temps alors à se lamenter; ils se mettent aussitôt à l’œuvre, et si vous repassez le lendemain, les traces du cataclysme qui a failli détruire la colonie ont disparu.

Mais dans les derniers jours de mars, les journaux apportèrent au château les nouvelles désastreuses de Paris. M. de Gandelau avait songé à renvoyer son fils au lycée. Bien qu’il lui fût démontré que Paul ne perdait pas son temps, il lui semblait fâcheux d’interrompre pendant plus longtemps ses études classiques. Les dernières nouvelles ne permettaient pas à M. de Gandelau d’hésiter. Paul continuerait à travailler avec son cousin qui, de son côté, se décidait à séjourner au château en attendant les événements.

M. de Gandelau, aimé et respecté dans tout le voisinage, n’avait, en ce qui le concernait, aucune inquiétude. Quelques mauvaises figures s’étaient présentées dans les villages des environs, mais, pour ces émissaires, il n’y avait rien à faire; aussi disparurent-ils bientôt. Le père Branchu et Jean Godard étaient venus au château déclarer à M. de Gandelau, que les ouvriers le suppliaient de ne pas suspendre les travaux, et qu’ils consentiraient, si l’argent manquait, à attendre de meilleurs jours. Ils ne demandaient, pour l’instant, que la soupe et du pain. En effet, M. de Gandelau, ayant fait de grands sacrifices pendant la guerre, ne disposait pas en ce moment de sommes assez rondes pour pouvoir faire des payes régulières en raison de l’activité donnée aux travaux. Il pouvait tout au plus faire face aux dépenses des fournitures. Il fut donc décidé qu’on établirait une cantine près du chantier, que M. de Gandelau fournirait la farine, le bois, de la viande deux fois par semaine, des légumes, du lard, et que chaque ouvrier recevrait autant de portions que sa famille et lui en exigeraient pour vivre. Chaque portion fut évaluée au prix coûtant, et le surplus serait payé en argent plus tard d’après les rôles bien établis et contrôlés. Une demi-douzaine d’ouvriers qui n’étaient pas de la contrée n’acceptèrent pas cet arrangement et quittèrent le chantier. Les autres, ayant pleine confiance en la loyauté de M. de Gandelau, souscrivirent à ce marché, d’autant plus qu’ils voyaient ainsi en perspective les résultats d’économies forcées: une épargne. Paul fut chargé de ce nouveau détail, et de cumuler les fonctions d’inspecteur avec celles de pourvoyeur. Son cousin le mit au courant de la comptabilité qu’il devait tenir, afin que tous les intérêts fussent sauvegardés.

Fier de ce nouvel emploi, il s’en acquittait bien. Levé à cinq heures du matin, monté sur son poney, on le voyait courir du château au moulin, du moulin au village voisin, du village au chantier; chaque soir il rendait compte à son père des livraisons du jour et à son cousin des attachements pris sur le tas.

Cette existence fortifiait son corps; la responsabilité dont il se voyait chargé mûrissait son esprit. Vers la fin de mai on aurait eu de la peine à reconnaître en ce jeune homme robuste, sérieux, attentif, le petit collégien désœuvré du mois d’août précédent.

Un matin, le grand cousin lui dit: «Il vous faudra aller à Châteauroux, car nous n’avons pas ici de menuisiers capables d’exécuter nos travaux. Je vous donnerai un mot pour un bon entrepreneur de menuiserie résidant en cette ville, vous vous entendrez avec lui, mais il faut d’abord que nos détails soient prêts.»

CHAPITRE XXIV
LA MENUISERIE

«Tous les détails de la menuiserie, continua le grand cousin, devraient être donnés avant de commencer la construction d’une maison, car la première condition d’une œuvre de menuiserie est de choisir les bois et de n’employer que ceux qui sont bien secs et débités depuis plusieurs années. Nous sommes pris de court et nous n’avons pu nous occuper de cette partie importante de notre construction. Heureusement je connais à Châteauroux un menuisier qui possède des bois en magasin, qui en est avare et ne les emploie qu’à bon escient; j’obtiendrai de lui de nous les fournir. Votre père lui a rendu quelques services; il ne fera donc pas, je pense, de difficultés pour prendre dans ses magasins les bois secs et de bonne qualité qu’il réserve avec un soin jaloux pour les bonnes occasions.

«Mais s’il est nécessaire de n’employer, dans les œuvres de menuiserie, que des bois sans défauts et bien secs, il ne l’est pas moins de combiner ces sortes d’ouvrages en raison de la nature des matériaux et de ne pas sortir des conditions qu’ils imposent. Les bois sont débités suivant certaines dimensions données par l’usage et la grosseur des arbres. Ainsi, par exemple, une planche n’a en largeur que de 0m,20c à 0m,25c (8 pouces anciens), parce que les arbres propres à la menuiserie n’ont guère plus que ce diamètre, aubier déduit; donc, si l’on fait des panneaux, il est sage de ne leur pas donner plus de 0m,20c à 0m,25c de largeur, afin de les prendre dans une planche. Si, pour faire un panneau, on assemble deux ou plusieurs planches, celles-ci, en séchant, se disjoindront et laisseront voir entre elles un intervalle; tandis qu’en donnant seulement à chaque panneau la largeur d’une planche, en admettant que celle-ci subisse un retrait, ce retrait se produit dans la languette et il n’y a pas disjonction. Faut-il toutefois que ces languettes soient assez larges pour qu’elles puissent subir le retrait sans sortir de la feuillure. Vous allez mieux comprendre tout à l’heure.

«Dans le dernier siècle, on a fait beaucoup de portes à grands cadres, c’est-à-dire dont les panneaux, encadrés par des moulures, ont une largeur de 0m,40c à 0m,50c; c’était la mode. Mais on n’employait alors que des bois très secs, coupés et débités depuis un grand nombre d’années, et ces panneaux, faits de deux planches assemblées ou simplement jointives, ne subissaient pas de retraits. Vous voyez des portes ainsi faites dans le salon de votre père, et il n’en est qu’une dont le panneau se soit ouvert. Aujourd’hui, pour or ou argent, on ne trouve plus de ces bois; il faut donc en prendre son parti et renoncer à ces larges panneaux. Ou, si on veut absolument en faire, faut-il les prendre dans du bois blanc, dans du grisard qui est une sorte de peuplier, parce que ce bois sèche vite, ne se fend pas, ne coffine pas, ce qui veut dire qu’il ne se courbe pas en travers du fil. Mais le grisard est un bois tendre qui se pique des vers assez facilement, surtout à la campagne. Tenons-nous-en donc au chêne et combinons nos portes de telle sorte que les panneaux n’aient que 0m,20c environ de largeur. Nous avons des portes à deux battants et des portes à un battant. Celles à deux battants ont 1m,20c de largeur; celles à un battant 0m,80c à 1m,00. Leur hauteur varie entre 2m,10c et 2m,20c; car il est fort inutile de leur donner plus, puisqu’on ne se promène pas dans les appartements avec des croix et bannières et que la taille humaine ne dépasse guère 1m,80c. Les trop hautes portes ont bien des inconvénients; elles sont sujettes à voiler, elles se ferment difficilement, et, s’il fait froid, chaque fois qu’on les ouvre, elles laissent pénétrer dans les intérieurs un cube considérable d’air humide et glacial qui refroidit d’autant les pièces habitées.

Fig. 56.


«Commençons donc par tracer une porte à deux battants. Nous ferons les bâtis et traverses de cette porte en bois de 0m,04c d’épaisseur (ancien 2 pouces). On appelle bâtis (fig. 56), les pièces d’encadrement, battements64 ou battants, les pièces A; traverses, les pièces horizontales intermédiaires; chaque montant aura 0m,11c de largeur, les petits montants intermédiaires, 0m,05c. Chaque vantail, en déduisant 0m,015mm pour la feuillure milieu, aura donc 0m,595mm puisque la porte doit avoir en largeur 1m,20c; déduisant 0m,11c + 0m,05c + 0m,095mm pour les trois montants, total: 0m,255mm, il reste pour les deux panneaux 0m,34c, et pour chacun d’eux 0m,17c. Il faut poser la traverse de façon que son axe soit à 1m,00 au-dessus du sol; car c’est sur cette traverse que se pose la serrure, et il est nécessaire de donner à cette traverse 0m,15c de large, afin que, déduction faite des moulures, soit 0m,05c, il reste encore 0m,10c pour la place de cette serrure dont la boîte a généralement 0m,08c à 0m,10c de largeur. Ces sortes de portes sont dites: à panneaux de glaces; tous les assemblages étant faits d’équerre, sans onglets, les panneaux étant étroits, ces portes ne jouent pas et se maintiennent parfaitement.


Fig. 57.


Voici le détail de ces assemblages (fig. 57): soit A le jambage en maçonnerie de la baie; on pose un dormant B scellé à l’aide de pattes à ce jambage. C’est sur lui que sont fixées à l’aide de vis les paumelles C sur lesquelles roulent les vantaux. D est le bâti; EE les battants; F le montant intermédiaire; G les panneaux avec leurs languettes embrevées. Les chambranles H forment feuillure autour du bâti. On rapporte le long de la feuillure des battants les moulures I destinées à donner à cette feuillure plus de résistance et à présenter un arrondi qui n’écorche pas les mains ou n’éraille pas les vêtements. En K, je vous indique la traverse haute avec son tenon L entrant dans une mortaise en M qui doit traverser le battant. Au droit de l’assemblage du montant intermédiaire N, la moulure O est coupée d’équerre pour laisser passer la tête de ce montant, dont le tenon P entre dans une mortaise R. En S, vous voyez les feuillures dans lesquelles viennent s’embrever les languettes T des panneaux, lesquels sont renforcés à une certaine distance de ces languettes, comme vous le voyez en V, de telle sorte que leur épaisseur soit de 0m,022mm. Vous observerez que les chanfreins X des montants s’arrêtent au-dessous des assemblages pour laisser au bois toute sa force au droit de ceux-ci. Pour des portes de cette dimension, il nous faudra trois paumelles par vantail.

«Cet aperçu vous donne la clef de toute la menuiserie de bâtiment ordinaire et bonne. La règle est simple, ne jamais affaiblir les bois au droit des assemblages, faire toujours ceux-ci d’équerre et ne pas dépasser les dimensions données par les bois débites.


Fig. 58.


«Nos portes à un vantail seront établies d’après ce système. Il nous reste à nous occuper des croisées. Nous suivrons le même principe, c’est-à-dire que nous éviterons les assemblages défectueux d’onglet, que tous ces assemblages seront d’équerre. Voici (fig. 58) une de ces croisées qui se composent d’un dormant A scellé dans la feuillure de maçonnerie B et d’un châssis à deux battants. L’épaisseur des bois de ce châssis sera de 0m,04c et les montants de battements se réuniront à gueule de loup. Pour éviter la pose de verres d’une trop grande dimension, ou la nécessité de poser des glaces, nous diviserons les battants par un petit bois C. Les détails de ces châssis de croisée vous seront nécessaires; je vous les présente tracés par la figure 59.


Fig. 59.


«En A, j’ai marqué la feuillure du tableau de la fenêtre; en B, le dormant; en C, l’un des montants qui entre par une languette dans le dormant pour arrêter le passage de l’air; en D, le montant du battement de droite avec sa gueule de loup et le battement E de gauche. C’est sur le renfort interne F que l’on pose la crémone. Le détail G vous donne le profil de la traverse d’appui du dormant et celui de H de la traverse basse des châssis de croisée avec son jet-d’eau65 destiné à empêcher l’eau de pluie ou de neige de pénétrer dans l’intérieur. Mais comme il arrive que, malgré cette précaution, la pluie violemment poussée par le vent atteint la feuillure et est chassée à l’intérieur, il faut ménager dans cette feuillure un petit canal a avec deux exutoires, pour que l’eau ne puisse se répandre sur la paroi interne de l’allége I. Afin de masquer la jonction de la traverse d’appui de bois avec l’appui de pierre, nous rapporterons la cymaise K. En L, je vous marque l’assemblage de la traverse basse du châssis avec le montant, et en M, celui de petit bois avec ce même montant. Vous remarquerez en O les feuillures externes pour recevoir le verre et les chanfreins P avec arrêts à l’intérieur pour laisser aux assemblages toute leur force. Outre les trois paumelles nécessaires à chaque vantail, il faut compter des équerres entaillées hautes et basses pour empêcher les châssis de donner du nez, c’est-à-dire de fatiguer les assemblages et de peser sur le milieu de la croisée, car le verre ne peut remplir l’office des panneaux de porte qui raidissent les bâtis. Au contraire, par son poids, le verre tend à déformer ces châssis.

«Vous allez donc, mon cher Paul, vous mettre à ces détails, je rectifierai vos tracés; puis, muni de ces dessins, vous irez à Châteauroux et vous soumettrez tout cela à l’entrepreneur de menuiserie qui fera ses prix. Vous compléterez les dessins par des explications en retenant bien ce que je vous ai dit et vous rapporterez les propositions de votre entrepreneur. Je vous adresserai d’ailleurs à Châteauroux à un ingénieur de mes amis chez lequel vous serez reçu comme un parent et qui pourra compléter les renseignements qui vous manquent.»

Mme de Gandelau eut quelque peine à consentir au voyage de Paul; mais, sur les assurances que l’ami du grand cousin serait prévenu et qu’il serait à la gare pour recevoir le futur architecte, que celui-ci séjournerait au milieu d’une famille heureuse de le recevoir, la permission fut accordée. D’ailleurs le voyage ne serait que de trois ou quatre jours et Châteauroux est à quatre-vingts kilomètres de la propriété de M. de Gandelau.

64.Battement. Montant vertical d’une porte ou d’une croisée du côté de la fermeture.
65.Jet-d’eau. Moulure saillante ajoutée à la traverse basse des croisées et à la barre d’appui et disposée pour éloigner les eaux pluviales de la feuillure et de la jonction de la barre d’appui avec la tablette.
Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
30 haziran 2018
Hacim:
298 s. 65 illüstrasyon
Telif hakkı:
Public Domain