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Kitabı oku: «Victor Hugo», sayfa 4

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XII
REPRISE D'HERNANI

8 novembre 1847.

L'on a repris Hernani, cette œuvre hardie, touffue et luxuriante de la jeunesse d'un grand poète. Maintenant, les orages soulevés par la haine, l'envie et la médiocrité, se sont apaisés. L'on apporte à cette belle pièce, cousine germaine du Cid, l'admiration sereine et tranquille qu'inspire la contemplation des chefs-d'œuvre classiques; ces nobles alexandrins à l'allure cornélienne, ces sentiments chevaleresques, cette folie du point d'honneur, si profondément espagnole, cette poésie nerveuse et colorée dont l'auteur semble avoir dérobé le secret aux auteurs inconnus du Romancero, sont écoutés avec une attention respectueuse. Qu'ils sont loin les jours de bataille où chaque hémistiche était pris et repris par les écoles rivales, au milieu du vacarme le plus étourdissant. Quels cris! quels tumultes! lorsque Don Carlos, au lieu de demander, selon le style alors généralement employé:

 
En quel point de l'émail pose le pied de l'heure?
 

dit, avec une crudité féroce, une barbarie sanglante:

 
Quelle heure est-il?
 

Et que Ricard lui répond tout sauvagement:

 
Minuit!
 

et non pas, comme il en avait le droit:

 
Dans sa fuite, il atteint la douzième demeure.
 

Quelle étrange chose, que les destinées littéraires! Le principal reproche que l'on faisait en ce temps-là à Victor Hugo, c'était de ne pas savoir le français: on le traitait de Goth, d'Ostrogoth, de Visigoth, de Huron, de Malgache et d'Uscoque, et maintenant il est reconnu non seulement pour un grand poète, mais encore pour un grammairien de première force, un linguiste consommé, un lexicographe profond. L'Académie le consulte pour son Dictionnaire, dans les cas embarrassants.

Nous ne trouvons pas que les acteurs jouent cette pièce avec le sentiment poétique qu'y apportèrent les créateurs des rôles principaux, Firmin, Joanny et Michelot surtout. Le retour de la tragédie a peut-être un peu gâté les caractères français d'aujourd'hui. Ils négligent les nuances délicates pour la sonorité des vers. Ils mènent les alexandrins de Victor Hugo deux par deux, comme si c'étaient «des vers classiques ou des bœufs». Il faut beaucoup d'oreille pour comprendre l'harmonie des vers à enjambement ou à césure déplacée. Nous voudrions qu'on fit un cours de prosodie pour les acteurs, et qu'on leur apprît même à faire des Vers français. On nous dira que plusieurs d'entre eux savent en faire… Aussi, parlons-nous surtout pour ceux-là.

XIII
A PROPOS D'HERNANI AU THÉÂTRE-ITALIEN

5 décembre 1854.

Le nom d'Hernani réveille en nous un de nos plus vils souvenirs de jeunesse. Munis du billet rouge timbré de la symbolique devise «Hierro», nous avions pris notre place, dans la salle, dès trois heures, prêts à soutenir la grande lutte contre les classiques et les bourgeois, et nous montâmes à l'assaut du succès avec les jeunes bandes romantiques, enfants perdus de la sainte cause de l'Art. Encore aujourd'hui, nous réciterions des tirades entières de la pièce, et, malgré nous, sous les chants de Verdi, nous murmurons les vers de Victor Hugo; ce qui est un double plaisir, partagé sans doute par beaucoup de personnes.

XIV
LA REPRISE D'HERNANI

21 juin 1867.

Il y a trente-sept ans que, grâce au carré de papier rouge égratigné de la griffe Hierro, nous entrions au Théâtre-Français bien avant l'heure de la représentation, en compagnie de jeunes poètes, de jeunes peintres, de jeunes sculpteurs, – tout le monde était jeune alors! – enthousiastes, pleins de foi et résolus à vaincre ou mourir dans la grande bataille littéraire qui allait se livrer. C'était le 25 février 1830, le jour d'Hernani une date qu'aucun romantique n'a oubliée, et dont les classiques se souviennent peut-être, car la lutte fut acharnée de part et d'autre. Beaux temps où les choses de l'intelligence passionnaient à ce point la foule!

Notre émotion n'a pas été moindre jeudi dernier. Trente-sept ans! c'est plus de deux fois ce que Tacite appelle «un grand espace de la vie humaine». Hélas! des anciennes phalanges romantiques, il ne reste que bien peu de combattants; mais tous ceux qui ont survécu étaient là, et nous les reconnaissions dans leur stalle ou dans leur loge avec un plaisir mélancolique en songeant aux bons compagnons disparus à tout jamais. Du reste, Hernani n'a plus besoin de sa vieille bande, personne ne songe à l'attaquer. Le public a fait comme don Carlos, il a pardonné au rebelle, et lui a rendu tous ses titres. Hernani est maintenant Jean d'Aragon, grand maître d'Avis, duc de Segorbe et duc de Cardona, marquis de Monroy, comte Albatera, et les bras de doña Sol se rejoignent autour de son cou sur l'ordre de la Toison d'or. Sans le pacte imprudent conclu avec Ruy Gomez, il serait parfaitement heureux.

Autrefois ce n'était pas ainsi, et chaque soir Hernani était obligé de sonner du cor pour rassembler ses éperviers de montagne, qui parfois emportaient dans leurs serres quelque bonne perruque classique en signe de triomphe. Certains vers étaient pris et repris comme des redoutes disputées par chaque armée avec une opiniâtreté égale. Un jour les romantiques enlevaient une tirade que l'ennemi reprenait le lendemain, et dont il fallait le déloger. Quel vacarme! quels cris! quelles huées! quels sifflets! quels ouragans de bravos! quels tonnerres d'applaudissements! Les chefs de parti s'injuriaient comme les héros d'Homère avant d'en venir aux mains, et quelquefois, il faut le dire, ils n'étaient guère plus polis qu'Achille et qu'Agamemnon. Mais les paroles ailées s'envolaient au cintre, et l'attention revenait bien vite à la scène.

On sortait de là brisé, haletant, joyeux quand la soirée avait été bonne, invectivant les philistins quand elle avait été mauvaise; et les échos nocturnes, jusqu'à ce que chacun fût rentré chez soi, répétaient des fragments du monologue d'Hernani ou de don Carlos, car nous savions tous la pièce par cœur, et aujourd'hui nous-même la soufflerions au besoin.

Pour cette génération, Hernani a été ce que fut le Cid pour les contemporains de Corneille. Tout ce qui était jeune, vaillant, amoureux, poétique en reçut le souffle. Ces belles exagérations héroïques et castillanes, cette superbe emphase espagnole, ce langage si fier et si hautain dans sa familiarité, ces images d'une étrangeté éblouissante, nous jetaient comme en extase et nous enivraient de leur poésie capiteuse. Le charme dure encore pour ceux qui furent alors captivés. Certes l'auteur d'Hernani a fait des pièces aussi belles, plus complètes et plus dramatiques que celle-là peut-être, mais nulle n'exerça sur nous une pareille fascination.

Dix ans plus lard, nous venions d'entrer en Espagne, le pays où nous avons nos châteaux; nous parcourions la route entre Irun et Tolosa, lorsqu'à un relai de poste un nom magique pour nous fit vibrer jusqu'au fond de notre cœur notre fibre romantique. Le bourg où l'on s'arrêtait s'appelait «Hernani». C'était une surprise pareille à celle qu'on éprouverait en entendant donner à un lieu réel un nom des pièces de Shakespeare. Le bourg était d'ailleurs bien digne du titre célèbre qu'il portait. Ses maisons de pierre grise, aux portes étoilées de gros clous, aux fenêtres grillées de serrureries touffues, aux toits fortement projetés, historiées de grands blasons sculptés, à lambrequins énormes et à supports bizarres qu'accompagnaient de graves légendes castillanes où parlaient en quelques mots l'honneur, la foi et la fierté, convenaient admirablement, chose rare, au souvenir évoqué. A chaque instant nous nous attendions à voir déboucher par une ruelle Hernani eu personne avec sa cuirasse de cuir, son ceinturon à boucle de cuivre, son pantalon gris, ses alpargatas, sou manteau brun, son chapeau à larges bords, armé de son épée et de sa dague, et portant à une ganse verte son cor aussi connu que celui de Roland. Sans doute le poète, dont l'enfance s'est passée au collège noble de Madrid, a traversé ce bourg, et, ce nom sonore et bien fait lui étant resté dans quelque recoin de sa mémoire, il en a baptisé plus tard le héros de son drame.

Mais nous voilà comme Nestor, le bon chevalier de Gerennia, dont nous n'avons cependant pas encore l'âge, occupé à raconter des histoires et à dire aux hommes d'aujourd'hui ce qu'étaient les hommes d'autrefois. Laissons, comme il convient, le passé pour le présent, et revenons à la représentation de jeudi. La salle n'était pas moins remplie ni moins animée que le 25 février 1830; mais il n'y avait plus d'antagonisme classique et romantique. Les deux camps s'étaient fondus en un seul, battant des mains avec un ensemble que ne troublait plus aucune discordance. Les passages qui jadis provoquaient des luttes étaient, nuance délicate, particulièrement applaudis, comme si l'on voulait dédommager le poète d'une antique injustice. Les années se sont écoulées, et l'éducation du public s'est faite insensiblement; ce qui le révoltait naguère lui semble tout simple. Les prétendus défauts se transforment en beautés, et tel s'étonne de pleurer là où il riait, et de s'enthousiasmer à l'endroit qu'il sifflait. Le prophète n'est pas allé à la montagne, mais la montagne est allée au prophète, contrairement à la légende de l'Islam.

L'œuvre elle-même a gagné avec le temps une magnifique patine; comme sous un vernis d'or qui adoucit et qui réchauffe en même temps, les couleurs violentes se sont calmées, les âpretés de touche, les férocités d'empâtement ont disparu; le tableau a la richesse grave, l'autorité et la largeur de pinceau d'un de ces portraits où Titien, le peintre de Charles-Quint, représentait quelque haut personnage avec son blason dans le coin de la toile.

Dans la préface de sa pièce, l'auteur disait en parlant de lui-même: «Il n'ose se flatter que tout le monde ait compris du premier coup ce drame dont le Romancero general est la véritable clef. Il prierait volontiers les personnes que cet ouvrage a pu choquer, de relire Le Cid, Don Sanche, Nicomède, ou plutôt tout Corneille et tout Molière, ces grands et admirables poètes. Cette lecture, si pourtant elles veulent bien faire d'abord la part de l'immense infériorité de l'auteur d'Hernani, les rendra peut-être moins sévères pour certaines choses qui ont pu les blesser dans le fond ou la forme de ce drame».

Dans ces quelques lignes se trouve le secret du style romantique qui procède de Corneille, de Molière et de Saint-Simon, en y ajoutant pour les images quelques nuances de Shakespeare. Racine seul paraît classique aux délicats qui, au fond, n'aiment guère les mâles poètes et le vigoureux prosateur que nous venons de citer. C'est cette veine de langage qui leur déplaît dans les poètes modernes, en général, et chez Hugo en particulier.

C'est un bien vif plaisir de voir, après tant de mélodrames et de vaudevilles, cette œuvre de génie avec ses personnages plus grands que nature, ses passions gigantesques, son lyrisme effréné et son action qui semble une légende du Romancero mise au théâtre comme l'a été celle du Cid Campéador, et surtout d'entendre ces beaux vers colorés, si poétiques, si fermes et si souples à la fois, se prêtant à la rapidité familière du dialogue où les répliques s'entrecroisent comme des lames et semblent jeter des étincelles, et planant avec des ailes d'aigle ou de colombe aux moments de rêverie et d'amour.

Dans le grand monologue de don Carlos devant le tombeau de Charlemagne, il nous semblait monter par un escalier dont chaque marche était un vers, au sommet d'une flèche de cathédrale, d'où le monde nous apparaissait comme dans la gravure sur bois d'une cosmographie gothique, avec des clochers pointus, des tours crénelées, des toits à découpure, des palais, des enceintes de jardins, des remparts eu zigzag, des bombardes sur leurs affûts, des tire-bouchons de fumée, et tout au fond un immense fourmillement de peuple. Le poète excelle dans ces vues prises de haut sur les idées, la configuration ou la politique d'un temps.

La pièce qui portait ce sous-titre: Hernani ou L'Honneur castillan, a pour fatalité el pundonor, cette anankê de tant de comédies espagnoles; Jean d'Aragon y obéit, mais ce n'est pas sans regret; la vie lui est si douce quand sonne le rappel du serment oublié, et il suit Doña Sol dans la mort, plutôt qu'il ne tient sa promesse. Mais voilà que l'habitude de l'analyse nous emporte, et que nous racontons Hernani.

On nous demandera sans doute si d'origine l'exécution de la pièce était supérieure à celle d'aujourd'hui; à l'exception du vieux Joanny, les acteurs qui créèrent les rôles étaient peu sympathiques au nouveau genre, et jouaient loyalement à coup sûr, mais sans grande conviction; Firmin donnait à Hernani cette trépidation fiévreuse qui, chez lui, simulait la chaleur; Michelot était un don Carlos assez médiocre, dont les coupes du vers moderne embarrassaient la diction; Mademoiselle Mars ne pouvait prêter à la fière et passionnée doña Sol qu'un talent sobre et fin, préoccupé des convenances, plus fait d'ailleurs pour la comédie que pour le drame. Seul Joanny réalisait l'idéal de Ruy Gomez de Silva. Il était enchanté de son rôle et il y croyait absolument. Sa main mutilée à la guerre lui donnait l'air d'un héros en retraite, et il disait superbement ce vers:

 
Essaye à soixante ans ton harnais de bataille.
 

Delaunay a joué Hernani avec une rare intelligence et il est difficile de lutter plus habilement contre une physionomie qui est naturellement charmante et qui, pendant quatre actes du drame, doit être sinistre, orageuse et fatale. Mais au dénouement, quand le bandit redevenu grand seigneur a dépouillé ses guenilles de salteador, Delaunay, rentré dans son milieu de grâce et d'élégance, joue admirablement la scène d'amour et d'agonie. Ruy Gomez, «le vieillard stupide», est représenté par Maubant avec une dignité, une mélancolie et un sentiment de la vie féodale qu'on ne saurait trop louer; il a dit de la façon la plus noble, la plus paternelle et la plus louchante, la déclaration d'amour du bon vieux duc. Dressant a derrière les portraits historiques de Charles-Quint retrouvé un Don Carlos jeune, brave et galant avec une légère barbe dorée admirablement réussie. Il a bien dit le grand monologue. Quant à Mademoiselle Favart, elle est la véritable doña Sol: hautaine et soumise à la fois, faisant plier sa fierté devant l'amour et se révoltant contre la galanterie; aventureuse et fidèle comme une héroïne de Shakespeare, elle a, au dernier acte, une agonie digne de Rachel.

XV
LETTRE À SAINTE-BEUVE

«MON CHER MAITRE,

«Je n'appartiens pas au parapluie élégant égaré dans votre charmant ermitage. J'ai gardé de mes jeunes années de romantisme une horreur sacrée pour ce meuble bourgeois.

«Hernani n'avait pas de parapluie, puisque Doña Sol lui dit:

… Jésus! Votre manteau ruisselle!

«Et je me suis toujours conformé aux opinions du héros castillan, en matière de riflard.

«Agréez l'expression bien sincère de ma respectueuse et cordiale sympathie.

«THÉOPHILE GAUTIER.»

Écrit à propos de la représentation sur le théâtre du comte de Castellane, les 4 et 5 avril 1837, d'une comédie de Madame Sophie Gay: La Veuve du Tanneur:

«Parmi les illustrations littéraires on remarquait M. Alexandre Duval, ce bon vieillard qui offrit si naïvement à Victor Hugo de lui faire la charpente de ses pièces, et qui a cause de son grand âge jouit du privilège d'être assis avec les femmes.»

XVI
PROSPECTUS POUR NOTRE-DAME DE PARIS

Août-septembre 1835.

Notre Dame de Paris est un livre qui n'a plus besoin d'éloges; ses nombreuses éditions le louent mieux que nous ne pourrions le faire; elles se sont succédé avec une prodigieuse rapidité, et n'ont pas suffi à l'empressement du public. C'est à coup sûr le roman le plus populaire de l'époque: son succès a été complet. Artistes et gens du monde se sont réunis dans la même admiration; les critiques les plus hostiles eux-mêmes n'ont pu s'empêcher de joindre leurs applaudissements à l'applaudissement général; et s'il était permis de donner une limite à un génie dans toute sa force et de tant d'avenir, on pourrait croire que Notre-Dame de Paris est et demeurera le plus bel ouvrage du poète.

C'est une vraie Iliade, que ce roman. Variété de physionomies, exactitude de costume, miraculeux artifices de description, haute et sublime éloquence, comique vrai et irrésistible, grandes vues historiques, intrigue souple et forte, sentiment profond de l'art, science de bénédictin, verve de poète, tout se trouve dans cette épopée en prose qui, si M. Victor Hugo n'eût pas été déjà vingt fois célèbre, eût rendu à elle seule son nom à tout jamais illustre.

Byron, celui de tous les poètes qui a créé les plus charmantes idéalités féminines, n'a rien à opposer à la divine Esmeralda; Gulnare, Medora, Haydée sont aussi belles, mais pas plus, et elles sont moins touchantes.

Maturin n'eût pas dessiné avec moins d'énergie la sombre figure de Claude Frollo, dévoré par sa soif de science qui se change en soif d'amour.

Le Phœbus de Châteaupers a aussi bonne grâce sous son harnais que ces beaux jeunes gens souriants et basanés, tout habillés de velours, qui se pavanent dans les toiles de Paul Véronèse avec un oiseau sur le poing ou un lévrier en laisse. Sa bonhomie insouciante et brutale est peinte de main de maître. C'est la vie et la vérité mêmes.

Qui n'a ri de tout son cœur aux angoisses du péripatéticien Gringoire, avec son pourpoint qui montre les dents, ses souliers, qui tirent la langue et sa faim toujours inassouvie? Les poètes à jeun de Régnier ne sont pas dessinés d'un crayon plus franc et plus vif.

Et Quasimodo, ce monstrueux escargot dont Noire-Dame est la coquille! Qui n'a admiré son dévouement de chien et ses vertus d'ange dans un corps de diable? Qui n'en a pas voulu un peu à la Esmeralda de ne pas l'aimer malgré sa double bosse, son œil crevé, sa jambe cagneuse et sa défense de sanglier? Qui n'a pas pleuré sur la pauvre Chantefleurie? Sur quel fond magnifique se détachent ces figures devenues des types! Tout le vieux Paris: églises, palais, bastilles, le retrait de Louis XI et la Cour des Miracles; une ville morte déterrée et ressuscitée; un Pompéi gothique retiré des fouilles; deux mille in-folio compulsés, une érudition à effrayer un Allemand du moyen âge, acquise tout exprès! Et sur tout cela un style éclatant et splendide de granit et de bronze, aussi indestructible que la cathédrale qu'il célèbre.

Notre-Dame de Paris est dès aujourd'hui un livre classique.

C'est à de tels livres que doit être réservé le luxe des illustrations, la beauté du papier et des caractères, et non à d'autres.

Celle édition, en trois volumes in-octavo, tirée à onze mille exemplaires et publiée par livraisons de cinquante centimes, tous les samedis, sera illustrée de douze vignettes des meilleurs artistes anglais et français, et le burin de Finden y luttera de vigueur et de grâce avec le pinceau des Boulanger, des Johannot, des Raffet, etc. Les vignettes vaudront les pages auxquelles elles correspondent, et ce n'est pas peu dire.

XVII
UN DRAME TIRÉ «DE NOTRE-DAME DE PARIS»

Avril 1850.

Notre-Dame de Paris est dans l'œuvre de Victor Hugo comme la cathédrale elle-même dans la ville: un monument haut et sombre que l'on aperçoit de tous les points de l'horizon. Autour se pressent les constructions les plus variées: palais, maisons, tourelles de style différent et de mérite égal, qu'on visite et qu'on admire; mais toujours, au bord de quelque perspective subite, se dressent les deux grandes tours s'élevant vers le ciel comme les deux bras d'un géant de pierre.

Nous ne reviendrons pas sur cette merveilleuse épopée; œuvre immense et touffue, et qui, bonheur singulier, a pu devenir populaire en restant dans les conditions de l'art le plus fantasque, le plus capricieux et le plus exigeant; jamais livre n'eut un succès pareil: aux éditions épuisées succèdent les nouvelles éditions de tous formats et de tous prix.

M. Paul Fouché a extrait le drame que contient le roman avec cette habitude de la scène qu'il possède, les acteurs sont entrés dans la peau et le costume des personnages, les décorateurs ont traduit les descriptions aussi littéralement qu'une brosse peut interpréter la plume d'un grand poète; les chapitres ont fait les tableaux, et tout le côté pittoresque du livre a été transporté au théâtre avec un art merveilleux. La dernière décoration que représente «Paris à vol d'oiseau», est la meilleure illustration qu'on puisse faire des magnifiques pages qu'il retrace. Saint-Ernest, qui représente le pauvre Quasimodo, est arrivé à une puissance de laideur inimaginable; il a tout à fait l'air «d'un cauchemar à cheval sur une cloche», Phœbus de Châteaupers ne désavouerait pas la grâce soldatesque et la haute mine de Fechter, Arnauld a donné à Claude Frollo l'aspect sombre, ardent et ravagé du prêtre alchimiste oubliant toutes les sciences pour l'amour. Chilley est un Gringoire excellent, et Madame Naptal-Arnault a joué le rôle de l'Esmeralda avec une grâce et une sensibilité exquises.

N'oublions pas de mentionner une ronde de truands, mise en musique par M. Artus et qui a beaucoup d'entrain et de caractère.

Quasimodo jettera deux cents fois de suite Claude Frollo du haut des tours Notre-Dame, devant un public émerveillé et nombreux.

Yaş sınırı:
12+
Litres'teki yayın tarihi:
22 ekim 2017
Hacim:
190 s. 1 illüstrasyon
Telif hakkı:
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