Kitabı oku: «Œuvres complètes de lord Byron, Tome 10», sayfa 19
LETTRE CLXI
À M. HODGSON
28 février 1814.
«Un de mes amis, jeune homme de beaucoup d'espérance, M. Reynolds, vient de publier un poème intitulé Safie, imprimé par Cawthorne. Il a grand'peur de ce qu'en diront les Revues, et non sans motif; et comme nous savons, vous et moi, par expérience, l'effet des premières critiques sur un jeune homme, je vous serais obligé de vous charger de sa production et de la disséquer avec le plus de ménagemens possible. Je ne le saurais faire moi-même, parce que l'ouvrage m'est dédié; mais ce n'est pas la seule raison qui me fait désirer de le voir traiter avec indulgence; la plus forte est que je sais trop par expérience l'impression que font sur un jeune esprit des critiques trop sévères sur un premier essai.
»Maintenant, parlons de moi-même. Mes remerciemens, je vous prie, à votre cousin; la chose est absolument comme je la désirais, peut-être un autre la trouverait-il trop forte. J'espère que vous vous portez à merveille et que tout vous réussit, du moins je le désire. Que la paix soit avec vous. Toujours tout à vous, mon cher ami.»
LETTRE CLXII
À M. MOORE
10 février 1814.
«Je suis arrivé hier soir à Londres après trois semaines d'absence, que j'ai passées tranquillement et agréablement dans le Nottinghamshire. Vous n'avez pas idée du bruit qu'occasione la réimpression des huit vers sur les larmes d'une jeune princesse, publiés déjà en 1812. Le régent, qui les avait toujours cru de vous, sachant maintenant qu'ils sont de moi, s'avise, Dieu sait pourquoi, d'en être peiné plutôt qu'irrité. Depuis ce moment, le Morning-Post, le Sun, l'Herald, le Courrier, tous sont déchaînés contre moi. Murray est effrayé; il voulait gauchir. Il est certain que les injures pleuvent sur moi de tous côtés; quelques-unes sont dites avec talent, toutes le sont de grand cœur. Je sens un peu de componction de savoir le régent peiné, j'aimerais mieux qu'il fût irrité; mais, après tout, je ne le crains pas.
»Vous avez probablement vu quelques-unes de ces attaques contre moi. Ma personne matérielle elle-même, excellent sujet par parenthèse, est décrite en vers qui offrent avec elle d'autant plus d'analogie, qu'ils sont pour la plupart boiteux. Puis, dans un autre, je suis un athée, un rebelle, et enfin le diable (boiteux, je suppose). Il paraît que c'est une femme qui m'a démonisé; s'il en est ainsi, je pourrais peut-être lui prouver que je ne suis qu'un simple mortel, si l'on s'en rapporte aux paroles d'une reine des Amazones qui dit: Αρισλον χολος οιφει. Je cite de mémoire, mon grec est probablement fautif; mais ce passage veut dire…
»Sérieusement, je suis dans ce que les gens instruits nomment un dilemme, et le vulgaire un bourbier; mes amis me conseillent de ne pas prendre la chose trop à cœur, comme sir Fretful 101, je leur réponds que je suis entièrement calme, tandis que je n'en suis pas moins en furie.
Note 101: (retour) Nom figuré, fretful signifiant chagrin, irrité, furieux.(N. du Tr.)
»Quand j'en étais là, est arrivé un ami, avec lequel j'ai ri et bavardé si bien, que j'ai perdu le fil de mes idées, et comme je ne veux pas vous les envoyer décousues, je vous souhaite le bonjour.
»Croyez-moi toujours, etc.
»P. S. Pendant mon absence, Murray a omis les larmes dans plusieurs exemplaires; je l'ai forcé à les remettre et suis bien ennuyé de tous ses scrupules. Puisque le vin est versé, il faut le boire jusqu'à la lie.»
A M. MURRAY
10 février 1814.
«Je suis beaucoup mieux, ou même je suis tout-à-fait bien ce matin. J'ai reçu deux Anas; je présume qu'il y en a d'autres, et quelque chose encore avant, à quoi s'adressait la réponse du Morning-Chronicle. Vous avez aussi parlé d'une parodie sur le crâne: je désire voir tout cela; il pourrait s'y trouver des choses auxquelles il fallût répondre de la plume ou autrement.
»Tout à vous, etc.
»P. S. Ne vous donnez pas la peine de me répondre, seulement envoyez-moi tout cela dès que vous le pourrez.»
A M. MURRAY
12 février 1814.
«Si vous avez quelques exemplaires des Lettres Interceptées, lady Holland en désirerait un, et quand vous aurez servi tous les autres, vous aurez la bonté de songer à votre serviteur.
»Vous m'avez joué un tour infâme par cette suppression peu judicieuse opérée contre ma volonté expresse. Quelques-uns des journaux ont déjà commencé à dire ce qu'on devait s'attendre qu'ils diraient. Or, puisque je ne tremble pas, je ne veux pas que vous m'en donniez l'air: non, quand même ma personne et tout ce qui m'appartient devrait périr avec ma mémoire.
»Tout à vous, etc.
BYRON.
»P. S. Faites attention, je vous prie, à ce que je vous ai dit hier sur les choses techniques.»
LETTRE CLXIII
À M. MURRAY
Lundi, 14 février 1814.
«Hier, avant de quitter Londres, je vous ai écrit un billet; j'espère que vous l'avez reçu. J'ai entendu tant de récits différens de vos procédés, ou plutôt de ceux des autres envers vous, en conséquence de la publication de ces vers immortels, que je suis impatient de recevoir de vous un compte détaillé et positif de toute cette affaire. Certes, ce n'est pas sur vous que doivent retomber la responsabilité, le blâme et les effets quelconques de cette publication. Je ne m'oppose pas du tout à ce que vous disiez aussi publiquement et aussi distinctement que vous le voudrez, quelle a été votre répugnance à publier les vers en question, et comment vous y avez été forcé par mon opiniâtreté. Adoptez telle mesure que vous croirez propre à vous disculper; mais laissez-moi me défendre comme je l'entendrai, et, je vous le répète, ne me compromettez par rien qui ressemble à de la peur de mon côté; mais pour vous, encore une fois, justifiez-vous par tous les moyens que vous voudrez.
»Tout à vous, etc.»
BYRON.
LETTRE CLXIV
À M. ROGERS
16 février 1814.
Mon Cher Rogers,
«J'ai écrit brièvement, mais clairement, j'espère, à lord Holland sur ce qui a fait depuis peu le sujet de toutes mes conversations avec vous et avec lui 102. A la tournure que prennent les choses, je crois que ma résolution doit être maintenant inébranlable.
Note 102: (retour) Il s'agit ici du rapprochement que ces messieurs voulaient amener entre lui et lord Carlisle.(Note de Moore.)
»Je vous le déclare dans la sincérité de mon ame, il n'y a pas un homme vivant de l'estime duquel je fasse plus de cas que de celle de lord Holland, et, s'il s'agissait de lui seul, je descendrais jusqu'à des humiliations, sans songer aucunement à l'avenir, et seulement pour lui marquer combien je suis touché de sa conduite à mon égard pour le passé. Quant au reste, il me semble que j'ai fait tout ce qui était en mon pouvoir en supprimant la satire. Si cela ne leur suffit pas, ils feront comme ils voudront. Mais je n'enseignerai pas ma langue à dire des bassesses. Vous serez probablement chez le marquis de Lansdowne ce soir; j'y suis invité, mais je ne sais si j'irai. Hobhouse y sera; je crois que vous l'aimeriez si vous le connaissiez bien.
»Croyez-moi toujours votre très-affectionné,»
BYRON.
LETTRE CLXV
À M. ROGERS
16 février 1814.
«Si lord Holland est satisfait, en ce qui touche lui et sa femme, comme il le déclare par sa lettre, c'est tout ce que je puis désirer.
»Quant à l'impression que produira sur le public la résurrection des vers contre lord Carlisle, elle sera toute à son avantage, et contre moi.
»Tous les mots, toutes les actions du monde ne m'arracheront pas une autre parole de paix à l'égard de qui que ce soit. Je supporterai tout ce qui sera supportable, et ce que je pourrai endurer, j'y résisterai. Le pis qu'ils pourraient me faire serait de m'exclure de la société. Je ne l'ai jamais recherchée; j'ajouterai même, dans le sens général du mot, je n'en ai jamais joui, et puis il y a un autre monde ailleurs.
»Ce qui deviendrait par trop injurieux, j'ai les mêmes moyens que les autres de m'en venger, et avec intérêt si les circonstances l'exigent.
»Il n'y a que la nécessité de suivre mon régime qui m'empêche de dîner avec vous demain.
»Toujours tout à vous,»
BYRON.
LETTRE CLXVI
À M. MOORE
16 février 1814.
«Soyez sûr que les seuls piquans dont le royal porc-épic soit armé contre moi sont ceux qui n'ont d'autres propriétés que celles de la torpille, et dont tout l'effet sera d'engourdir quelques-uns de mes amis. Pour moi, je me tiens tranquille et garde le silence. La fréquente répétition des attaques a affaibli leur effet sur moi, si tant il y a qu'elles en aient jamais eu aucun, car pour peu qu'elles en eussent eu, je n'aurais pu retenir ni mes doigts ni ma langue. C'est quelque chose de nouveau d'attaquer un homme parce qu'il renonce à ses ressentimens. Je savais bien qu'il y a quelque chose de bas à injurier ceux qu'on a loués auparavant, mais je ne savais pas qu'il fût honteux de me forcer à rendre justice à ceux qui n'ont point attendu que j'aie fait amende honorable des folies et des préjugés de ma jeunesse pour m'admettre dans leur amitié, quand ils avaient encore tant de droits de me traiter en ennemi.
»Vous voyez bien que, comme sir Francis Wronghead 103, il faut que j'aie fait ma fortune intentionnellement. Il vaudrait mieux qu'il y eût plus de mérite dans mon indépendance, mais aujourd'hui c'est quelque chose que d'être indépendant pour quelque cause que ce soit; et moins on est tenté de ne l'être pas, plus la chose est rare dans ces tems de servilité paradoxale. Je crois que jusqu'ici nos haines et nos affections ont été généralement les mêmes: à dater de ce moment il faut qu'elles le soient sans exception. Maintenant, aux armes! la plume suffira pour commencer, en attendant qu'on en prenne de plus tranchantes.
Note 103: (retour) Nom figuré, wronghead, tête qui a tort, tête renversée, tête à l'évent, etc.(N. du Tr.)
»Vous ne vous faites pas idée de la solennité risible avec laquelle ces deux stances ont été traitées. Le Morning-Post parle d'une motion dans la chambre des lords à ce sujet, et Dieu sait quelles autres mesures après, et tout cela, comme disent les Mille et Une Nuits, pour avoir fait une tarte à la crème sans poivre. Je crois que la destruction de la douane a un peu suspendu la mienne; ajoutez à cela que la dernière bataille de Buonaparte à usurpé la colonne qui m'était ordinairement réservée.
»J'extrais ci-joint, du Morning-Post d'aujourd'hui, ce qui a paru de mieux contre cette insolente rapsodie, comme l'appelle le Courrier. Il y avait dans la même feuille, il y a quelques jours, un article sur mon régime étant enfant, un article qui n'était pas mauvais du tout; mais le reste ne vaut absolument rien.
»Je réfléchirai au conseil que vous me donnez quant à la tribune publique; je ne m'y suis jamais sérieusement destiné, et je suis devenu aussi ennuyé que Salomon de tout et surtout de moi-même. C'est ce que les gens comme il faut appellent devenir philosophe, et les gens du peuple devenir hébété. Je suis toujours charmé d'une bénédiction 104: répétez bientôt la vôtre, ou du moins votre lettre; je sous-entendrai la bénédiction, ou plutôt je la trouverai dans le fait même de la lettre.
»Toujours tout à vous, etc.»
Note 104: (retour) J'avais terminé ma lettre en disant: Dieu vous bénisse, et j'avais ajouté, si toutefois cela ne vous fait pas de peine.(Note de Moore.)
Cette formule de salutation qui ne s'emploie en français que dans le style badin, est très-fréquente et très-affectueuse en anglais. (N. du Tr.)
LETTRE CLXVII
À M. DALLAS
17 février 1814.
«Le Courrier de ce soir m'accuse d'avoir tiré de mes ouvrages de grandes sommes, et de les avoir mises en poche. Je n'ai encore reçu un sou pour aucun d'eux et j'espère ne jamais rien recevoir. M. Murray m'a offert 1,000 livres sterling du Giaour et de la Fiancée, j'ai dit que c'était trop, et que si après six mois il croyait encore pouvoir donner cette somme, je lui indiquerais quel emploi il en devrait faire. Mais, ni à cette époque, ni à aucune autre, je n'ai appliqué à mon propre usage le bénéfice d'un seul des ouvrages que j'aie écrits. J'ai refusé 400 livres sterling de la réimpression de la satire, et jamais je n'ai tiré un sou des éditions précédentes. Je ne désire pas vous voir faire rien qui puisse vous être désagréable, je n'ai jamais prétendu mettre aucune condition aux légers services que je puis avoir eu le bonheur de vous rendre, et je ne vois rien pour vous d'humiliant dans l'action de les avoir acceptés. C'était un simple don offert à un homme infiniment respectable par un autre qui l'est beaucoup moins.
»M. Murray va contredire ce que le Courrier et les autres journaux ont avancé à cet égard, mais votre nom ne sera pas cité; de votre côté, vous êtes libre et ferez absolument ce qu'il vous conviendra. J'espère seulement que vous resterez convaincu que je n'ai pas la plus légère idée d'abuser du bonheur que j'ai eu en saisissant l'occasion de vous être utile.
»Toujours tout à vous, etc.»
En conséquence de cette lettre, M. Dallas en adressa une aux journaux, dont voici un extrait, le reste n'offrant qu'une justification assez maladroite de son noble bienfaiteur au sujet des stances attaquées.
À L'ÉDITEUR DU MORNING-POST
Monsieur,
«J'ai lu dans un journal du soir le paragraphe où Lord Byron est accusé d'avoir retiré de ses ouvrages de grandes sommes d'argent et de les avoir exigées. Je ne me figure pas qu'aucun de ceux qui le connaissent l'en puisse un moment soupçonner, mais puisque l'assertion à été publique, je crois devoir à Lord Byron de la démentir publiquement. Tel est mon but en vous adressant la présente, et je suis charmé de profiter de cette occasion pour rappeler un fait que j'avais depuis long-tems envie de publier; envie à laquelle je n'ai résisté que dans la crainte qu'on ne me crût poussé à cette démarche par sa seigneurie.
»Je prends sur moi d'affirmer que jamais Lord Byron n'a reçu un shilling de ses ouvrages. Il est à ma connaissance certaine qu'il a laissé à l'éditeur tout le profit de sa Satire. Dans mon épître dédicatoire de la nouvelle édition de mes contes, j'ai publiquement reconnu le don de la propriété de Childe-Harold, j'ai maintenant à y ajouter, l'expression de ma reconnaissance, non-seulement pour le don de celle du Corsaire, mais encore pour la manière délicate et affectueuse dont il m'a été fait avant même qu'il ne fût livré à l'impression. Quant aux deux autres poèmes, le Giaour et la Fiancée, M. Murray peut attester que Lord Byron n'a pas touché un sou de leur prix, et que pas un sou n'en a été approprié à son usage. Après avoir ainsi rétabli la vérité des faits, je ne puis m'empêcher de m'étonner qu'on ait jamais songé à lui faire un sujet de reproche, d'avoir touché l'argent provenant de ses ouvrages. Ni le rang ni la fortune ne rendent de semblables produits indignes d'un homme honorable; quelle différence y a-t-il pour l'honneur ou la délicatesse d'employer le produit d'un livre à faire du bien, ou d'en abandonner la propriété, dans la même intention, à un autre? Je diffère d'opinion sur ce point et sur quelques autres avec Lord Byron; et il a toujours dans ses paroles et ses actes montré la plus grande répugnance à recevoir l'argent de ses ouvrages.»
LETTRE CLXVIII
À M. MOORE
26 février 1814.
«Dallas eût peut-être mieux fait de garder le silence; mais comme c'était essentiellement son affaire, que les faits qu'il avance sont exacts, que son motif est honorable, je lui souhaite de bien s'en tirer. Quant à son interprétation des fameux vers, libre à lui et à qui que ce soit de les entendre comme bon leur semblera. J'ai gardé le silence jusqu'ici et je continuerai à le garder à moins que quelque circonstance tout-à-fait particulière ne me force à le rompre. Vous, ne dites pas un mot, je vous prie. Si quelqu'un doit parler, c'est celui qui y est le plus intéressé. Ce qui m'amuse singulièrement, c'est que chacun me désigne, comme l'auteur de l'injure qui m'est faite, la personne qu'il hait personnellement le plus! Quelques-uns disent que c'est C…r, d'autres C…e, d'autres F…d, etc., etc. Pour moi, je ne sais encore qui, j'en suis encore aux conjectures. Si je le découvre et que ce soit un malheureux gagiste, je le laisserai gagner son salaire; mais si c'est ce qu'on appelle un honnête homme, il faudra dégaîner.
»J'avais quelqu'envie de demander directement à C…r s'il s'en reconnaissait l'auteur, mais H… qui, j'en suis sûr, ne m'en voudrait pas dissuader, s'il croyait que cela convînt, m'a dit absolument de n'en rien faire, que je n'avais pas ce droit sur un simple soupçon, etc., etc. Si H… a raison ou non, je l'ignore, mais je sais qu'il ne voudrait jamais m'empêcher de faire ce qu'il regarderait comme le devoir d'un preux chevalier. Dans des affaires de cette nature, au moins dans ce pays-ci, il faut suivre les usages reçus. En m'occupant de celle-ci, je le fais comme si elle n'était pas la mienne. Tout homme, si la nécessité le veut, est, et doit être, prêt à se battre. Dans le cas présent je n'y apporterais pas beaucoup de ressentiment, à moins qu'on ne vienne à y mêler le nom d'une femme que j'aime; car il y a plusieurs années que je ne me suis mis sérieusement en colère. Mais si je découvre mon homme, et qu'il en vaille la peine, je ferai indubitablement mon devoir.
»… était fort irrité, mais il essayait de le dissimuler. Vous n'êtes point du tout appelé à reconnaître le Twopenny; vous leur rendriez service en le faisant, et voilà tout. Ne voyez-vous pas que le but de tout cet éclat est de nous mettre, lui, vous et moi et tous les autres, aux prises (surtout ceux qui sont dans une bonne position), et qu'ils y ont presque réussi. Lord Holland voulait que je fisse des concessions à lord Carlisle… Au diable plutôt qu'à cet homme qui m'a si mal traité. Je lui ai répondu que je ne ferai ni concession, ni rétractation; je garderai le silence, à moins qu'il ne se présente occasion de dire encore quelque chose d'honnête pour lui, lord Holland ou pour sa femme, qui, depuis, se sont toujours montrés mes amis. La chose en est restée là; le moment était mal choisi pour des concessions à lord Carlisle.
»J'ai été interrompu, mais je vous récrirai bientôt. Croyez-moi toujours, mon cher Moore, etc.»
Un autre de ses amis ayant exprimé l'intention d'entreprendre volontairement sa défense publique, il ne perdit point de tems, pour l'en empêcher, par l'excellente lettre qui suit.
LETTRE CLXIX
À W… W… ESQUIRE
28 février 1814.
Mon Cher W…,
«Je n'ai que peu de tems pour vous écrire. Le silence est la seule réponse aux choses dont vous parlez, et je ne regarderais pas comme mon ami celui qui dirait un mot de plus à ce sujet. Je me soucie peu des attaques, mais je ne veux pas me soumettre à des défenses. J'espère et je suis sûr que vous n'avez jamais songé sérieusement à vous engager dans une controverse si ridicule. La lettre de Dallas lui fait honneur, il n'a fait qu'établir des faits dont il avait bien droit de parler. Je n'ai jamais fait publiquement, et je ne permettrai à personne de faire la moindre attention à toutes ces accusations. Si je découvre le calomniateur, peut-être agirai-je autrement; mais alors je ne me contenterai pas d'écrire.
»Une expression de votre lettre m'a porté à vous écrire cette lettre et à vous supplier de ne vous mêler en aucune sorte de cette affaire; il n'en est déjà presque plus question, et, croyez-moi, ils sont plus vexés de mon silence qu'ils ne le sauraient être de la meilleure défense du monde. Je ne connais rien qui me contrarierait autant qu'une nouvelle réplique là-dessus.
»Tout à vous, etc.»
BYRON
LETTRE CLXX
À M. MOORE
3 mars 1814.
Mon Cher Ami,
«J'ai grande envie de vous écrire que je suis tout-à-fait indisposé; ne fût-ce que pour vous faire venir à Londres; il n'y a personne que je serais plus désireux d'y voir, personne auprès de qui je chercherais plus volontiers des consolations dans mes momens de tristes vapeurs. La vérité est que je ne manque pas de tristes sujets de réflexions, mais cela vient d'autres causes. Quand nous serons tous deux de vieilles gens, je vous dirai un conte des tems passés et des tems actuels; et ce n'est pas manque de confiance si je ne vous le dis aujourd'hui, mais… mais… toujours un mais à la fin du chapitre.
»Il n'y a rien ici à aimer ou à haïr; mais certainement j'ai des sujets pour tous les deux à peu de distance, outre que je suis embarrassé en ce moment, entre trois femmes que je connais, et une que je ne connais pas, ou du moins dont le nom m'est inconnu. Tout cela irait encore bien si je n'avais pas un cœur; mais, malheureusement j'en ai encore un, quoique en assez mauvais état, et il a conservé l'habitude de s'attacher à une seule, que je le veuille ou non. Je commence à penser que l'axiome divide et impera n'est bon qu'en politique.
»Si je rencontre le crapaud, comme vous l'appelez, je lui marcherai sur la tête, et je mettrai des clous à mes souliers, pour qu'il le sente mieux. Je ne m'informe guère de l'effet de toutes ces belles choses, et elles n'en ont guère non plus sur moi. Je crois qu'elles ont fait plus d'impression sur *** que sur aucun de nous. Les gens sont assez polis; je n'ai pas manqué d'invitation, mais je n'en ai accepté aucune. Je suis très-peu allé dans le monde l'année passée, et j'ai dessein d'y aller encore moins celle-ci. Je n'ai pas de goût pour les assemblées, et j'ai long-tems regretté de m'être livré à ce que l'on appelle la vie de Londres, ce qui, de toutes les vies que j'ai vues (et j'en ai vu presque autant qu'il y en a dans Plutarque), me semble laisser le moins de tems pour songer au passé ou à l'avenir.
»Où en est votre poème? ne le négligez pas, et je ne crains rien pour lui. Je n'ai pas besoin de vous dire que votre réputation m'est chère: en vérité, je pourrais dire plus chère que la mienne; car depuis quelque tems, je commence à penser que mes ouvrages ont été loués bien au-delà de leur valeur: dans tous les cas, j'ai cessé pour jamais d'écrire. Je puis vous dire à vous ce que je ne dirais pas à tout le monde; mes deux derniers poèmes ont été écrits, l'un en quatre jours, et l'autre en dix 105. Je trouve que c'est là un aveu humiliant; il prouve mon manque de sens de publier, et celui du public de lire des choses qui ne sauraient avoir assez de mérite pour demeurer.
Note 105: (retour) Quand il dit qu'il n'a donné que quatre jours à la composition de la Fiancée, il faut entendre qu'il parle du premier jet, car les additions successives qu'il y a faites lui ont coûté bien plus de tems. Le Corsaire, au contraire, fut fait d'un seul coup: il n'y eut après que fort peu de changemens et d'additions; et la rapidité avec laquelle il fut composé, près de deux cents vers par jour, paraîtrait presqu'incroyable, si nous n'avions son propre témoignage et celui de son libraire pour nous empêcher d'en douter. Si l'on tient compte de la beauté surprenante de cet ouvrage, une telle promptitude d'exécution est presque sans exemple dans l'histoire du génie, et montre qu'écrire de passion, comme le dit Rousseau, est peut-être une route plus sûre pour arriver à la perfection que toutes celles que l'art a tracées.
»Je n'ai pas peur que vous ne vous pressiez trop, j'en ai moins encore que vous puissiez ne pas réussir. Mais je crois qu'un an est un terme assez long pour une composition qui ne doit pas être épique. Il faut même que le nonum prematur d'Horace ait été inventé pour les millénaires ou quelque génération qui devait vivre plus long-tems que la nôtre. Je ne sais même ce que nous aurions aujourd'hui de lui, s'il avait suivi sa propre règle à la lettre. Que la paix soit avec vous! Rappelez-vous que je suis toujours, etc.
»P. S. Je n'ai jamais eu connaissance du bruit dont vous parlez, ni probablement de bien d'autres; mais, naturellement, vous avez comme les autres hommes d'excellens amis, que le diable puisse emporter, qui font leur devoir à l'ordinaire. Une chose qui vous fera rire.»