Kitabı oku: «Œuvres complètes de lord Byron, Tome 10», sayfa 20
LETTRE CLXXI
À M. MOORE
12 mars 1814.
«Voyez toujours l'avenir en noir et vous vous tromperez rarement. Je ne vous en dirai pas davantage à présent, et pourtant peut-être… mais n'importe. J'espère que nous serons réunis un jour, et quelque nombre d'années qui s'écoulent avant ou après ce jour-là, je le marquerai d'une pierre blanche, dans mon calendrier. Je ne suis pas sûr de ne me pas retrouver dans votre voisinage. Si cela arrive, et que je sois célibataire alors, comme il y a gros à parier, je fondrai chez vous, je vous enlèverai chez moi, et m'efforcerai de vous faire excuser la mauvaise chère que vous y trouverez, par le bon visage que je vous y ferai. Mettant toujours le sexe à part, je ne connais personne que je serais plus aise de revoir.
»Je n'ai rien du genre que vous désirez, si ce n'est les vers sur les larmes, s'il vous convient de les insérer dans votre Post-Bag; pour moi je désire leur donner toute la publication possible. Ceux sur le caveau 106 sont tout-à-fait de nature à être attaqués devant les tribunaux, et les imprimer, ce serait mettre l'éditeur dans un danger réel. Mais je crois que les larmes ont tous les droits du monde d'entrer dans votre recueil, et l'éditeur, quel qu'il soit, pourrait y joindre ou non une note facétieuse, selon qu'il lui plairait.
Note 106: (retour) Les vers pleins de force et d'amertume qu'il avait écrits sur l'ouverture du caveau qui renfermait les restes d'Henri VIII et de Charles Ier.(Note de Moore.)
»Je ne sais comment les vers sur le caveau ont ainsi circulé; cela est par trop farouche, mais la vérité c'est que ma satire n'est jamais à l'eau de roses. J'ai dans ma tête le plan d'une épître à lui et sur lui 107, que je pourrais bien exécuter, s'ils ne me laissent pas tranquille. Je n'aurais rien, ou peu de chose à dire de moi-même. Quant à la gaîté et au plaisant, ce n'a jamais été mon fait, mais je suis assez en fonds d'amertume et de mépris, et, avec mon Juvénal devant moi, je lui ferai peut-être un sermon tel qu'il n'en a jamais entendu à la cour. D'après certaines particularités qui sont venues à ma connaissance, pour ainsi dire par hasard, je sais mon homme par cœur, et je pourrais lui dire quel il est.
Note 107: (retour) Le prince régent.(N. du Tr.)
»Je voulais, mon cher Moore, vous écrire une longue lettre, le tems ne me le permet pas.
»P. S. Réfléchissez-y encore une fois avant de vous décider à retarder la publication de votre poème. Voici venir un jeune poète, plus âgé que moi, par parenthèse, mais plus nouveau dans le métier, M. G. Knight, avec un volume de contes orientaux, écrits depuis son retour, car il est allé dans le pays. Il me fit consulter l'été dernier, et je lui conseillai d'en écrire un dans chaque mesure, n'ayant, à cette époque, aucune intention de faire précisément la même chose. Depuis, par l'habitude où je suis de composer toujours dans un accès de fièvre, je l'ai devancé du mètre, mais sans aucune intention. Quant à ses histoires, je ne les connais pas, ne les ayant jamais vues 108; mais il a aussi, comme dans le Giaour, une femme dans un sac, à ce qu'il m'a dit à cette époque.
Note 108: (retour) Il ne savait pas encore, à ce qu'il paraît, que le manuscrit anonyme que M. Murray lui avait soumis, fût celui de M. Knight.(Note de Moore.)
»La meilleure manière de forcer le public à m'oublier, c'est de l'occuper de vous. Vous ne pouvez supposer que je voulusse vous demander ou vous conseiller de rien publier, si je pensais que vous dussiez ne pas réussir. En vérité, je n'ai point de jalousie en littérature; et je ne crois pas qu'un ami ait jamais souhaité le succès de son ami, plus vivement que je souhaite le vôtre. C'est la maladie des vieillards de ne pouvoir supporter de frère près du trône; nous ne vivrons, j'espère, pas assez long-tems pour connaître jamais cette faiblesse-là. Je voudrais que vous parussiez avant qu'on n'offrît au public d'autres sujets orientaux.»
LETTRE CLXXII
À M. MURRAY
12 mars 1814.
«Je n'ai pas le tems de lire tout l'ouvrage 109; mais ce que j'en ai vu, vers et prose, me semble fort bien écrit; il est vrai que je ne saurais être juge, au moins un juge désintéressé dans la question. Je n'y ai rien vu qui doive vous faire hésiter à le publier à cause de moi. Si l'auteur n'est pas le docteur Busby lui-même, je ne vois pas pourquoi le dédier à ses souscripteurs; je ne comprends pas en effet ce que le docteur peut avoir à faire là-dedans, si ce n'est peut-être comme traducteur des doctrines de Lucrèce, dont, à coup sûr, il n'est pas responsable. Je vous le dis ouvertement et franchement, si cet ouvrage doit être publié, je ne vois aucune raison au monde qui empêche que ce ne soit par vous; vous ne sauriez, au contraire, me faire un compliment plus flatteur sur la bonté et la loyauté de mon caractère, qu'en publiant cet ouvrage et tout autre où je serai honorablement attaqué sans intention haineuse; et certes, pour ce que j'ai lu, du moins, je ne saurais en accuser cet auteur.
Note 109: (retour) Le manuscrit d'une longue et lourde satire, intitulée l'Anti-Byron, que Murray lui avait envoyée, lui demandant, je ne saurais croire que ce fût sérieusement, s'il lui conseillait de l'imprimer.(Note de Moore.)
»Il se trompe en un point: je ne suis pas athée; mais s'il croit que j'aie publié des principes qui sentent l'athéisme, il a parfaitement le droit de les réfuter. Je vous en prie, imprimez; je ne me pardonnerais jamais de vous en avoir empêché.
»Faites mes complimens à l'auteur; dites-lui que je lui souhaite du succès, ses vers en méritent; et je serai la dernière personne à mettre en doute la bonté de son intention.
»P. S. Si vous ne les publiez pas, il faudra toujours que quelqu'autre le fasse; et vous ne me croyez pas, j'espère, l'esprit assez étroit pour reculer devant la discussion. Je vous répète, encore une fois, que je le regarde, autant que j'en puis juger par ce que j'ai lu, comme un bon ouvrage; et c'est tout ce que vous devez considérer. Il est étrange que huit vers en aient fait naître au moins huit mille, y compris tout ce qui a été dit, et qui le sera encore sur ce sujet.»
LETTRE CLXXIII
À M. MURRAY
9 avril 1814.
«Toutes les nouvelles sont fort belles; mais, néanmoins, j'ai besoin de mes livres: si vous pouvez me les trouver, ou faire en sorte que quelqu'un me les trouve, ne fût-ce que pour les prêter à Napoléon, dans sa solitude de l'île d'Elbe. Je désirerais encore, si cela ne vous dérangeait pas, et que vous n'ayez pas de société, vous parler ce soir quelques minutes; j'ai reçu une lettre de M. Moore, et je voudrais vous demander, comme au meilleur juge, quel serait le meilleur tems pour lui de publier un ouvrage qu'il a composé. Je n'ai pas besoin de vous dire que j'ai grandement à cœur ses succès, non-seulement parce qu'il est mon ami, mais ce qui est plus fort, parce que c'est un homme de grand talent, ce dont il est moins persuadé qu'aucun même de ses ennemis. Si donc vous pouvez avoir l'obligeance de venir jusqu'ici, faites-le; si vous ne le pouvez pas, n'en parlons plus; j'irai vous trouver, chez vous, dans le courant de la semaine prochaine.
»P. S. Je vois qu'on annonce les tragédies de Sotheby. La Mort de Darnley est un sujet très-heureux, et, je crois, éminemment dramatique. Faites m'en tenir un exemplaire, dès que vous le pourrez.
»Mrs. Leigh a été très-contente de ses livres; elle me charge de vous remercier, et se dispose, je crois, à vous en écrire elle-même.»
LETTRE CLXXIV
À M. MOORE
№ 2, Albany, 9 avril 1814.
«Le vicomte d'Althorpe va se marier, et j'ai pris son bel appartement de garçon dans Albany, où vous m'adresserez bientôt, je l'espère, votre réponse à la présente.
»Je suis de retour à Londres, d'où vous pouvez conclure que je l'avais quitté. Pendant tout le mois dernier, j'ai boxé tous les jours avec Jackson, pour faire de l'exercice. J'ai bu pas mal aussi; une fois, entre autres, je suis resté à table avec trois amis, au Cacaotier, depuis six heures du soir jusqu'à quatre et cinq heures du matin. Nous avons pris du Bordeaux et du Champagne jusqu'à deux heures. Alors, nous avons soupé et terminé la séance par une sorte de punch au régent, composé de Madère, d'eau-de-vie et de thé vert, car l'eau en nature n'y était point admise. Voilà une soirée qui vous aurait convenu! Sans quitter la table, si ce n'est pour me rendre chez moi, à pied, dédaignant un fiacre et mon propre vis-à-vis, moyens de transport dont on avait cru nécessaire de se précautionner. En somme, je m'en trouve très-bien, quoiqu'on prétende que cela altère ma constitution.
»J'ai aussi enfreint plus ou moins quelques-uns de mes commandemens favoris; mais je suis décidé à m'amender et à me marier, si quelqu'un veut bien m'accepter. En attendant, je me suis à moitié tué l'autre soir avec un morceau de porc dont j'ai soupé, et qui m'a donné une fort longue et fort pénible indigestion. Toute cette gourmandise était en l'honneur du carême: la viande m'est défendue pendant tout le reste de l'année; mais elle m'est sévèrement ordonnée pendant votre abstinence solennelle. J'ai été de plus assez suffisamment amoureux; mais nous en reparlerons quand nous pourrons.
»Mon cher Moore, dites ce que vous voudrez dans votre préface, attaquez tout et tout le monde, moi le premier. Fi! me croyez-vous de la vieille école? Si l'on ne peut rire de ses amis, de qui donc rirait-on? Vous n'avez rien à craindre de ***, que je n'ai pas vu cependant, parce que j'étais à la campagne quand il s'est présenté chez moi. Il sera correct, coulant; mais je doute qu'il y mette autre chose que ce que l'art peut donner. Qu'importe après tout? ne vous déferez-vous jamais de cette insupportable modestie? Quant à Jeffrey, c'est quelque chose de beau à lui de dire du bien d'un vieil antagoniste; voilà ce dont un esprit ordinaire ne serait pas capable. Tout le monde peut rétracter des louanges; mais si ce n'était en partie mon cas à moi-même, je dirais qu'il n'y a qu'un esprit au-dessus du vulgaire qui sache démentir ses premières censures et les faire suivre par des éloges.
»Que pensez-vous de la Revue de Lewis? Cela est bien plus insultant que votre Post-Bag et mes huit vers; la cour en est furieuse, comme je l'ai su de bonne part. Avez-vous eu des nouvelles de…
»Plus de rimes pour moi ou plutôt de moi. J'ai quitté le théâtre; je ne monterai pas davantage sur les planches: j'ai eu mon tems et c'est fini; tout ce que je puis attendre ou même désirer, c'est qu'on dise de moi, dans la Biographie Britannique, que j'aurais pu devenir poète si j'avais continué et que je me fusse amendé. Ma grande consolation c'est que la célébrité éphémère dont j'ai joui a été obtenue en dépit de toutes les opinions et de tous les préjugés du monde. Je n'ai flatté aucune des puissances, et je n'ai jamais eu une pensée que j'aie cru utile d'exprimer. On ne pourra dire de moi que j'aie été le poète des circonstances, que j'aie profité des sujets populaires, comme Johnson, ou je ne sais qui, l'a dit de Cléveland. Ce que j'ai acquis de renommée l'a été au prix d'autant de faveur personnelle qu'il était possible; car je ne crois pas qu'il ait jamais existé un poète plus impopulaire que moi, quoad homo. Maintenant j'ai fini, ludite nunc alios. Chacun est libre de se damner s'il en a l'envie, et de gagner sa part des feux éternels de l'autre monde.
»Oh! oh! j'oubliais, voici venir un long poème, l'Anti-Byron, pour prouver que j'ai formé une conspiration pour renverser, à l'aide de la rime, la religion et le gouvernement, et que j'ai déjà fait de grands progrès vers ce double but. Cette satire n'est pas trop personnelle, mais sérieuse et métaphysique. Je ne m'étais jamais cru un personnage, jusqu'à ce moment où je me vois un petit Voltaire, pour avoir nécessité une telle réfutation. Murray ne voulait pas l'imprimer: ce serait une sottise et je le lui ai dit; car à coup sûr quelqu'un s'en chargera. En voilà au moins assez sur ce sujet.
»Votre projet de voyage en France est bon; mais que ne le changez-vous en un voyage en Italie? tous les Anglais vont affluer à Paris. Choisissez Rome, Milan, Naples, Florence, Turin, Venise ou la Suisse, et par dieu, comme dit Bayes, je me marierai et j'irai avec vous; puis, dans ce Paradis, nous composerons ensemble un nouvel Inferno. Réfléchissez-y, et, en vérité, j'achète une femme, un anneau, je dis le fameux oui, et je m'installe avec vous dans quelque maison de plaisance sur les bords de l'Arno, du Pô ou de l'Adriatique.
»Ah! ma pauvre petite idole! Napoléon est tombé de son piédestal. On dit qu'il a abdiqué; il y a de quoi tirer des larmes de bronze fondu des yeux de Satan:
«Quoi! baiser la terre devant les pieds du jeune Malcolm, et puis s'exposer aux insultes de cette populace 110!
Note 110: (retour) Shakspeare. -Macbeth.(N. du Tr.)
Je ne puis supporter une si humiliante catastrophe. Il faut que je reporte mon amour sur Sylla: tous mes favoris modernes ne valent rien; leurs abdications sont d'un autre genre. Joie et santé, mon cher Moore. Excusez la longueur de cette épître.
»Toujours tout à vous, etc.
»P. S. Le Quarterly-Review vous cite souvent dans un article sur l'Amérique, et toutes mes connaissances s'informent sans cesse de vous et de vos ouvrages. Quand voulez-vous leur répondre en personne?»
Lord Byron ne persévéra pas long-tems dans sa résolution de ne plus écrire, comme on le verra par les billets suivans à son éditeur.
À M. MURRAY
10 avril 1814.
«J'ai écrit une Ode sur la chute de Napoléon, que je copierai et dont je vous ferai présent, si cela peut vous convenir. M. Merivale en a vu une partie et l'approuve. Vous pouvez la montrer à M. Gifford et l'imprimer ou non, comme il vous plaira; je n'y attache aucune importance. Elle ne contient rien en sa faveur, et pas la moindre allusion aux Bourbons ou à notre gouvernement.
»Tout à vous, etc.
»P. S. Elle contient dix strophes, en tout quatre-vingt-dix vers, et est écrite dans le même mètre que mes stances à la fin de Childe-Harold, qui ont été si goûtées. Et tu es mort, etc., etc.»
À M. MURRAY
11 avril 1814.
«Vous trouverez ci-joint une petite lettre de Mrs. Leigh.
»Il vaudra mieux ne pas mettre mon nom à notre ode; mais vous pouvez dire ouvertement, et tant que vous voudrez, qu'elle est de moi; je puis en outre écrire sur un exemplaire: À M. Hobhouse, de la part de l'auteur, ce qui sera l'avouer suffisamment. Après la résolution que j'ai affichée de ne plus rien publier, encore que cette pièce ait peu d'étendue et moins d'importance, il vaut mieux encore garder l'anonyme; mais vous pourrez la joindre au premier volume de mes œuvres que vous aurez le tems ou la volonté de publier.
»Je suis toujours votre, etc., etc.
BYRON.
»P. S. J'espère que vous avez reçu un billet de variantes que je vous ai envoyé ce matin?
«2° P. S. Ô mes livres! mes livres! ne me trouverez-vous jamais mes livres?»
À M. MURRAY
12 avril 1814.
«Je vous envoie quelques notes et quelques changemens de peu d'importance, plus une nouvelle épigraphe de Gibbon, et qui convient admirablement ici. Un de mes bons amis m'avertit qu'il y a dans l'Anti-Jacobin Review une attaque très-virulente contre nous, et que vous n'avez pas vue. Envoyez-la-moi, car je suis dans un tel état de langueur qu'une occasion de me mettre en colère ne saurait manquer de me faire du bien.
»Toujours tout à vous, etc.»
LETTRE CLXXV
À M. MOORE
Albany, 20 avril 1814.
«Je suis charmé d'apprendre que vous vous disposez à quitter Mayfield sitôt, et la première partie de votre lettre m'a fait grand plaisir; mais peut-être vous y moquez-vous de moi comme dans l'autre 111. Je ne vous parle pas de l'effet de votre ironie, vous vous doutez bien que cela ne m'a pas mis de mauvaise humeur; je sais supporter la critique, je suis homme à en croire un ami sur parole, et, s'il le dit, à ne pas douter un moment que j'aie écrit d'infernales absurdités. Il y avait une restriction mentale dans mon engagement avec le public, en faveur des ouvrages anonymes; et même, quand cette restriction n'y eût pas été, l'occasion était telle qu'il m'était physiquement impossible de passer sous silence cette détestable époque de lâcheté triomphante. C'est une vilaine affaire, et après tout je ferai un peu plus de cas de la rime et de la raison, et bien peu de votre peuple de héros, jusqu'à ce que l'île d'Elbe devienne un volcan et le lance de nouveau sur le monde. Je ne puis croire que tout soit fini.
Note 111: (retour) Je lui avais écrit qu'on lui attribuait l'Ode sur la chute de Napoléon; mais que je ne pouvais croire qu'elle fût de lui, après l'engagement qu'il avait pris de ne plus rien publier. Je lui en demandais en riant son avis, etc., etc.(Note de Moore.)
»Mon départ pour le continent est subordonné à quelque chose de très-incontinent. J'ai reçu deux invitations à la campagne, et ne sais que répondre et que décider. En attendant, j'ai acheté un papegaud et un autre perroquet; j'ai mis mes livres en ordre, je fais des armes, je boxe tous les jours et sors très-peu.
»Au moment où j'écris ces lignes, Louis le goutteux se fait rouler dans Piccadilly, dans toute la pompe et avec tout le cortége de canaille qu'exige la royauté. On m'avait offert des places pour les voir passer; mais comme j'ai vu le sultan aller à la mosquée, que je l'ai vu recevoir un ambassadeur, sa majesté très-chrétienne n'a pas beaucoup d'attrait pour moi. Toutefois, dans quelque année à venir de l'hégire, je ne serais pas fâché, peu après la seconde révolution, de voir les lieux où il aura heureusement régné pendant deux mois, dont les dernières six semaines auront été en proie à la guerre civile.
»Écrivez-moi, je vous prie, et croyez-moi toujours, etc.»
LETTRE CLXXVI
A M. MURRAY
21 avril 1814.
«Mille remerciemens pour les lettres que je vous renvoie. Vous savez que je suis jacobin; je n'ai pu me décider à arborer le blanc, et à voir l'installation de Louis le goutteux.
»Voilà une mauvaise nouvelle bien pénible pour ceux qui souffrent en tout tems, mais particulièrement en ceux-ci; je veux parler de la sortie de Bayonne.
»Vous devriez presser Moore de paraître.
»P. S. J'ai besoin d'acheter Moréri à tout prix; j'ai Bayle, mais je veux aussi Moréri.
»2e P. S. Perry me fait un compliment ce matin dans le Morning-Post; je crois qu'il aurait aussi bien fait de ne pas me désigner par mon nom. N'importe, ils ne peuvent que répéter leur vieux reproche d'inconséquence avec moi-même; je m'en moque, c'est-à-dire quant à ce qui regarde la publication de nouveaux ouvrages. Toutefois, maintenant je veux tenir ma parole. Il n'y avait qu'une occasion aussi irrésistible qui pût m'y faire manquer; et puis je considérais l'anonyme comme toutà-fait excepté de mon engagement avec le public. C'est du reste la seule chose que j'aie publiée depuis, et je n'y reviendrai pas.»
LETTRE CLXXVII
A M. MURRAY
25 avril 1814.
«Remettez la lettre à M. Gifford, et qu'il la rende à son loisir. Je la lui aurais offerte si j'avais cru qu'il s'occupât de choses semblables.
»Avez-vous besoin de la dernière page immédiatement? Je doute que ces vers valent la peine d'être imprimés: dans tous les cas, il faut que je les revoie, et que j'y change quelques passages avant de les lancer dans l'océan de la circulation. Voilà une phrase sonore, sans qu'il y paraisse; canal de la circulation ira peut-être mieux.
»Je ne suis pas en veine, autrement il ne m'eût pas été difficile de forger deux ou trois strophes qui eussent mieux cadré avec le reste de l'ode. Dans tous les cas, je le répète, il faut que je revoie ces vers, car il y en a deux que j'ai déjà changés dans ma tête. Quelqu'un les a-t-il vus et jugés? Voilà la pierre de touche dont j'ai besoin pour me régler; seulement dites-moi la vérité, et ne me déguisez pas les critiques qu'on peut en avoir faites: si je les trouve justes, je composerai quelques autres stances.
»Toujours tout à vous, etc.
»J'ai besoin d'un Moréri et d'un Athénée.»
Il faut, pour l'intelligence de la lettre précédente, savoir que M. Murray l'avait prié de faire quelques additions à son ode, afin d'éviter le droit de timbre sur toutes les brochures qui ne dépassent pas une feuille. Les vers qu'il lui envoya en conséquence sont, je crois, ceux qui commencent par: Nous ne te maudissons pas, Waterloo, etc., etc. Il ajouta ensuite de lui-même, pendant les réimpressions successives, cinq ou six stances à son ode, qui n'en avait d'abord que onze. Il en avait aussi composé trois de plus, qui n'ont jamais été imprimées, mais qui méritent d'être conservées, à cause du juste tribut qu'il y paie à la mémoire de Washington.
17. Il fut un jour, il fut une heure, quand le monde était soumis à la France, et la France à toi, où l'abdication de cet immense pouvoir t'eût valu une renommée plus pure que la journée de Marengo n'en a attaché à ton nom. Cette journée de Marengo dont l'éclat s'est cependant reflété sur tout le reste de ta carrière, quoiqu'obscurci comme par des nuages, par tes crimes passagers.
18. Mais il fallait absolument que tu fusses roi, que tu vêtisses la pourpre, comme si cette robe ridicule pouvait ôter, en la couvrant, les souvenirs de ta poitrine. Qu'est devenu ce vêtement fané? Où sont toutes ces brillantes babioles dont tu aimais à te parer: l'étoile, le cordon, la couronne? Enfant vain et fantasque de l'empire, dis-moi, t'a-t-on donc enlevé tous ces joujoux!
19. Où, parmi les grands hommes, l'œil fatigué peut-il s'arrêter, sans voir la gloire ternie par le crime et achetée par le mépris? Oui, il est un tel homme, le seul, le premier, le plus grand, le Cincinnatus de l'ouest, que l'envie n'a jamais osé haïr; Washington! Il a légué son nom à la nature humaine pour la faire rougir de n'en avoir produit qu'un.