Kitabı oku: «Œuvres complètes de lord Byron, Tome 10», sayfa 21
LETTRE CLXXVIII
A M. MURRAY
26 avril 1814.
«Je pense qu'il vaudrait autant ne plus publier l'ode séparément, mais l'incorporer avec quelqu'un de mes ouvrages précédens, et y joindre l'autre petit poème, qu'il faudrait toutefois que je revisse auparavant. Sur mon honneur, je ne saurais y ajouter un vers qui en vaille la peine: ma veine est tout-à-fait passée; mes occupations actuellement sont toutes de gymnastique, boxer ou faire des armes, et mes principales conversations avec Bayle ou mon singe. J'ai besoin de Moréri et j'ai besoin d'Athénée.
»P. S. J'espère que vous avez envoyé à son adresse le paquet poétique que je vous ai fait tenir dimanche; si vous ne l'avez pas fait, faites-le, je vous prie, ou je vais avoir l'auteur jetant les hauts cris pour son poème épique.»
LETTRE CLXXIX
A. M. MURRAY
26 avril 1814.
«Je ne me doute pas même quel peut être votre auteur; mais le poème 112 est excellent, cela vaut un millier d'odes de qui que ce soit. Je puis, je suppose, garder cet exemplaire: maintenant que je l'ai lu, je regrette bien sincèrement d'avoir rien écrit sur le même sujet; je vous le dis sincèrement, encore que mon défaut ne soit pas en général une excessive modestie.
Note 112: (retour) Il s'agit d'un poème plein d'esprit et de force de M. Straffort Canning, intitulé: Buonaparte. Dans un billet subséquent à M. Murray, Lord Byron dit: «Ma haute opinion du poème sur Buonaparte n'est pas diminuée depuis que j'en connais l'auteur. Je savais bien que c'est un homme de talent; mais je ne le soupçonnais pas de réunir dans une telle perfection tous les talens de la famille.(Note de Moore.)
»Je n'aime pas du tout les stances additionnelles, il vaudrait mieux les omettre tout-à-fait. Le fait est qu'avec la meilleure volonté du monde je ne puis rien faire de bon, quand l'ouvrage m'est commandé, et qu'au bout d'une semaine je ne saurais prendre intérêt à une composition. Cela vous expliquera comment je ne vous ai rien donné de meilleur pour éviter les droits du timbre.
»L'article S. R. est très-poli; mais que veulent-ils dire quand ils avancent que Childe-Harold ressemble à Marmion, et que le Giaour et la Fiancée ne ressemblent pas à Scott? Certainement je n'ai jamais songé à le copier, mais si copie il y avait, ce devrait être dans les deux poèmes où j'ai adopté le même mètre. Cependant ils conviennent que le Corsaire ne ressemble à rien; je m'étonne que le Corsaire s'en soit tiré.
»Si j'ai jamais rien fait d'original, c'est le Childe-Harold, que je préfère à toutes mes autres compositions, la première semaine passée. J'ai relu les Poètes anglais; excepté la méchanceté, c'est ce que j'ai fait de mieux.
»Toujours tout à vous, etc., etc.»
Il prit à cette époque, et tout-à-coup, une résolution dont nous ne pouvons trouver la raison que dans l'état où se trouvait alors son esprit. Depuis deux mois il fournissait au public de nouveaux sujets d'admiration avec une rapidité et un bonheur qui semblaient inépuisables: en effet, dans ce court espace de tems il avait accumulé des matériaux de gloire pour une longue existence. Mais l'admiration est une sorte d'impôt dont la plupart des hommes ne demandent pas mieux que de se décharger. L'œil se fatigue de contempler toujours le même objet, et commence à échanger le plaisir d'admirer son élévation, pour le désir moins généreux d'attendre et de prédire sa chute. La réputation de Lord Byron éprouvait déjà les mauvais effets de sa propre splendeur prolongée et constamment renouvelée. Plusieurs de ses plus grands admirateurs, de ceux même qui étaient le moins disposés à lui trouver des fautes, n'étaient pas fâchés de se reposer des éloges qu'ils lui avaient donnés sans interruption; tandis que ceux qui ne lui en avaient accordé qu'à regret prenaient avantage de ces symptômes apparens de satiété pour hasarder des expressions de blâme 113.
Note 113: (retour) C'était la crainte de cette sorte de courant rétrograde auquel la rapidité de ses succès ne donnait que trop de probabilité, qui faisait que quelques-uns même de ses plus chauds admirateurs, ignorant encore l'immensité des ressources de son génie, ne pouvaient s'empêcher de trembler un peu en le voyant se présenter si souvent devant le public. Je trouve dans une de mes lettres ces appréhensions exprimées dans les termes suivans: «Si vous n'écriviez pas si bien, je dirais que vous écrivez trop, ou du moins que vous ne mettez pas assez d'intervalle entre vos productions. Vous savez que les pythagoriciens pensaient que si nous n'entendions pas l'harmonie des corps célestes, ou si nous n'avions pas conscience de cette audition, c'est parce qu'ils résonnent sans cesse à nos oreilles; et je crains, moi, que l'effet de votre poésie ne soit diminué pour être offerte constamment aux oreilles hébétées du public.»
Cependant cette opinion doit se taire devant celle que sir Walter-Scott, l'un des plus grands écrivains, et aussi l'un des plus fertiles de nos jours, avait la sagacité et la générosité d'exprimer à cet égard, au moment où Lord Byron était à l'apogée de sa gloire et dans le feu de ses plus admirables compositions: «Mais ceux-là entendent mal les intérêts du public, et donnent un assez mauvais conseil au poète; qui, le supposant doué des plus heureuses qualités de son art, ne lui conseillent pas de travailler tandis que sa couronne de lauriers est encore dans toute sa fraîcheur. Des esquisses de Lord Byron valent mieux que des tableaux achevés de tous les autres; et qui nous dit qu'un second travail n'effacerait pas, au lieu de les perfectionner, ces traits d'une originalité si forte et si belle, que présentent ses compositions au moment où elles s'échappent de la main d'un grand maître.» – (Mémoires biographiques, par sir Walter-Scott.)
La bruyante clameur soulevée au commencement de cette année, par les vers à la princesse Charlotte, avait donné occasion de s'écouler à tout ce venin caché jusque-là, et le ton dédaigneux dont quelques-uns des assaillans affectèrent alors de parler de ses talens poétiques, tout absurde et méprisable qu'il fût en lui-même; était précisément cette sorte d'attaque la plus propre à blesser son esprit à la fois orgueilleux et méfiant de ses forces. Tant qu'ils se contentèrent de dénigrer son caractère et ses mœurs, ces libelles, loin de l'offenser, flattaient la singulière manie qu'il avait de paraître et de se peindre lui-même plus noir qu'il n'était. Mais quand ils s'avisèrent de rabaisser ses talens, secondés par ce mécontentement de soi qui est le propre des hommes d'un vrai génie, ils l'affligèrent et le découragèrent. Ces sons de mauvais augure, les premiers qu'il eût entendus dans le cours de sa carrière triomphante, l'alarmèrent, comme nous l'avons vu, et le firent hésiter sérieusement s'il devait s'arrêter ou continuer sa route.
S'il s'était trouvé occupé alors de quelque nouvelle tâche, la conscience de ses propres forces, qu'il ne sentait réellement bien qu'en les exerçant, lui eût fait oublier ces humiliations passagères, dans le feu et l'excitement de succès anticipés. Mais il venait de prendre vis-à-vis du public l'engagement de renoncer à la poésie, il avait scellé la seule fontaine où il eût puisé jusque-là du rafraîchissement et des forces; ainsi il demeurait sans autre occupation que de ruminer sans cesse sur les insultes journalières de ses ennemis. Sans pouvoir pour s'en venger, quand ils s'attaquaient à la personne, et naturellement disposé à les en croire quand c'était son génie qu'ils désignaient: «Je crains, dit-il dans une de ses lettres à propos de ces attaques, que ce que vous appelez bagatelles ne soient des choses très-fortes et de plus pleines de raison, et, pour dire la vérité, voici quelque tems que je me surprends à en penser comme eux.»
Avec une telle facilité à se laisser toucher des attaques de ses ennemis et à désespérer de lui-même, dispositions qu'il déguisait mal sous une apparence de gaîté et de philosophie dédaigneuse, il est peu étonnant qu'il en soit venu tout d'un coup à prendre la résolution, non-seulement de persévérer dans son idée de ne plus rien écrire à l'avenir, mais encore de racheter la propriété de tous ses ouvrages et de n'en pas laisser subsister une seule page, une seule ligne. Quand il en écrivit la première fois à M. Murray, celui-ci crut naturellement qu'il ne parlait pas sérieusement; mais tous ces doutes à cet égard furent levés, quand il reçut, avec la lettre suivante, une lettre-de-change équivalente aux diverses sommes qu'il lui avait comptées pour la propriété de ses ouvrages.
LETTRE CLXXX
À M. MURRAY
№ 2, Albany, 29 avril 1814.
Mon Cher Monsieur,
«Vous trouverez ci-joint une lettre-de-change; quand elle aura été acquittée, renvoyez-moi les titres de cession de mes ouvrages. Je vous décharge des 1,000 livres sterling convenues pour le Giaour et la Fiancée, et c'est une affaire finie.
»Si je viens à mourir, vous ferez alors ce qu'il vous plaira; mais, à l'exception d'un double exemplaire de chaque, j'entends et je vous prie que tous les ouvrages soient détruits, les avertissemens retirés, et je me ferai un plaisir de payer toutes les dépenses que cela pourra vous occasioner.
»Peut-être serait-il juste de vous donner quelque raison de tout ceci: je n'en ai pas d'autre que mon caprice, et je ne crois pas que la chose soit assez importante pour mériter une explication.
»Je n'ai pas besoin de vous dire que mes poésies ne seront jamais, avec mon consentement direct ou indirect, imprimées par quelque autre personne que ce soit, que je suis parfaitement satisfait de votre conduite et de vos procédés avec moi, comme mon éditeur.
»Ce me sera un grand plaisir de cultiver votre connaissance, et de vous considérer comme mon ami. Croyez-moi toujours,
»Votre très-obligé et très-obéissant serviteur.
BYRON.
»P. S. Je ne pense pas avoir trop tiré sur Hammersley; si cela était, je pourrais tirer pour l'excédant sur Goares. La lettre-de-change est de 5 livres sterling trop faible; je vous en tiendrai compte. Quand vous aurez été payé, renvoyez-moi les titres de propriété, mais non pas avant.»
Dans cette circonstance, M. Murray pensa que ce qu'il avait de mieux à faire était d'en appeler à la générosité et à l'honnêteté de son caractère; il le fit, et la réponse suivante que Byron lui envoya immédiatement prouve qu'il ne s'était pas trompé.
LETTRE CLXXXI
À M. MURRAY
1er mai 1814.
Mon Cher Monsieur,
«Si le billet que je reçois en ce moment de vous est sérieux, et que la chose doive réellement vous être préjudiciable, n'en parlons plus, voilà qui est fini, déchirez ma lettre-de-change, continuez à l'ordinaire, et d'après nos anciennes conventions. J'étais bien véritablement résolu à supprimer tout ce que j'avais publié, mais je ne veux pas nuire aux intérêts de qui que ce soit, et surtout aux vôtres. Quelque jour je vous dirai les raisons qui m'avaient fait prendre ce parti, en apparence si bizarre. Qu'il me suffise pour le moment de vous déclarer que j'y renonce d'après vos observations, et que je me hâte de le faire, puisque cela vous avait contrarié.
»Toujours tout à vous, etc.»
BYRON.
Pendant mon séjour à Londres, cette année, nous vécûmes presque toujours ensemble; et, je ne le dis pas par esprit de flatterie pour les morts, mais plus je connus son caractère et ses manières, plus je pris d'intérêt à lui et à tout ce qui le concernait. Ce n'est pas que, dans les nombreuses occasions que j'eus alors de l'observer, je n'aie remarqué en lui bien des imperfections fâcheuses et déplorables; mais à côté de ses plus grands défauts il y avait toujours quelque bonne qualité qui leur servait comme de contre-poids, et qui, mise doucement et adroitement en jeu, ne manquait jamais d'en neutraliser l'effet. La franchise même avec laquelle il avouait ses erreurs semblait impliquer qu'il se sentait capable de les racheter, et qu'il lui était permis de les confesser avec sincérité. Cette absence complète de réserve était d'ailleurs une garantie contre les vices qu'on ne découvrait pas subitement en lui, et la même qualité qui mettait en évidence les petites taches de son caractère, en assurait en même tems l'honnêteté. «La pureté, la bonté d'un cœur ne se montre jamais mieux que quand ce cœur découvre ses propres défauts à la première vue: car un ruisseau qui laisse voir d'abord la boue de son lit, offre en même tems la transparence de ses eaux.»
Le théâtre était le lieu où il passait alors le plus généralement ses soirées. Nous avons vu avec quel enthousiasme il exprimait son admiration pour le jeu de M. Kean; j'ai eu souvent le bonheur, pendant cette saison, de l'aller voir avec lui, et plus d'une fois nous nous plaçâmes à l'orchestre pour ne rien perdre du jeu de sa physionomie. Lors du bénéfice de cet acteur célèbre, le 25 mai, lady J*** avait réuni une nombreuse compagnie, et nous en faisions partie, mais Lord Byron avait aussi loué une loge entière, et il était si jaloux de jouir du spectacle sans être interrompu, que, par un arrangement peu social, nous l'occupâmes seuls à nous deux, tandis que toutes les autres étaient pleines à y étouffer. Nous ne rejoignîmes le reste de la société qu'au souper. Toutefois M. Kean n'eut pas à se plaindre de cette séparation comme d'un manque d'hommage à son talent, car lord J*** lui fit présent de 100 livres sterling en une action du théâtre, tandis que Lord Byron lui envoya le lendemain 50 guinées, et peu de tems après l'ayant vu jouer dans l'un de ses rôles favoris, il lui fit présent d'une superbe tabatière et d'un sabre turc de grand prix.
Tel était l'effet qu'avait sur lui le jeu passionné de M. Kean, qu'un jour il fut saisi d'une sorte de convulsion nerveuse en le voyant dans le rôle de sir Giles Overreach. Nous le verrons quelques années après, en Italie, éprouver le même accident à la représentation de la tragédie de Mirra d'Alfieri, comparer ces deux sensations, et dire que ce sont les deux seules fois où des choses sans réalité avaient eu sur lui tant de pouvoir.
Voici quelques-uns des billets que je reçus de lui pendant le tems de mon séjour à Londres, cette fois.
À M. MOORE
4 mai 1814.
.................. «Je voudrais bien que les gens n'écourtassent pas leurs diners; n'était-ce pas un dîner dont il avait été question? ne nous donner que d'infernales sandwiches aux anchois 114!
Note 114: (retour) Lord R*** nous avait invités à dîner après le spectacle, ce qui avait plu infiniment à Lord Byron à cause de la nouveauté. Toutefois ce dîner prétendu dégénéra en un simple souper; et ce changement fut pour Lord Byron, pendant long-tems, le sujet d'une petite colère très-comique.
»Votre diable de voix m'a fait tourner au sentiment et devenir presque amoureux d'une fille qui, pendant que vous chantiez, se recommandait par sa haine pour la musique. On donne Othello demain et samedi. Quel jour irons-nous? quand vous verrai-je? Si vous venez chez moi, que ce soit après trois heures, et aussi près de quatre qu'il vous plaira.
»Toujours tout à vous, etc.»
À M. MOORE
4 mai 1814.
Mon Cher Tom,
«Vous m'avez demandé une chanson; je vous envoie ci-joint un essai qui m'a coûté plus que de la peine, et qui vraisemblablement et pour cela même ne mérite pas que vous preniez celle de le mettre en musique. Si donc vous le trouvez mauvais, jetez-le au feu sans phrases 115.
»Toujours tout à vous, etc.
BYRON.
Note 115: (retour) Je vote pour la mort sans phrases. – Procès de Louis XVI.(N. du Tr.)
»1. Je ne dis pas, je n'écris pas, je ne prononce pas ton nom: le son m'en serait pénible; je serais coupable de le divulguer. Mais cette larme qui brûle ma joue décèle les pensées profondes qui assiégent mon cœur silencieux.
»2. Ces heures se sont écoulées trop courtes pour notre passion, trop longues pour notre repos! Leur joie et leur amertume ne sauraient cesser! Nous nous repentons, nous abjurons notre amour, nous voulons rompre notre chaîne, nous voulons nous séparer, nous voulons nous fuir… pour nous unir de nouveau.
»3. Oh! que le bonheur te reste, que la faute ne soit qu'à moi! Pardonne-moi, femme adorée! oublie-moi, si tu le veux. Ce cœur qui t'appartient ne s'abaissera jamais, pas même à la mort; et jamais un homme ne le brisera, quoique, toi, tu en aies le pouvoir.
»4. Mon ame, qu'ils disent si noire, si méchante, sera toujours fière avec les superbes, mais humble avec toi. Quand tu es à mes côtés, les jours passent plus rapidement; et tous les momens me paraissent plus doux que si des mondes étaient à nos pieds.
»5. Un soupir de ta douleur, un regard de ton amour, fixera, changera mon sort, sera ma récompense ou mon châtiment. Ceux qui n'ont point d'ame s'étonneront de tout ce que j'abandonne pour toi; tes lèvres répondront, non à eux, mais aux miennes.»
À M. MOORE
«Voulez-vous, vous et Rogers, venir dans ma loge à Covent-Garden? j'y serai et personne autre, ou bien encore, je n'y serai pas, si vous préférez y aller tous deux sans moi. Vous ne pourriez trouver une meilleure place dans toute la salle, même en vous mettant à la merci des portiers et des revendeurs de coupons. Voulez-vous m'obliger et venir tous deux, ou seulement l'un de vous? ou enfin, ne venez ni l'un ni l'autre, comme vous voudrez.
»P. S. Si vous acceptez, je viendrai vous prendre à six heures et demie, ou à toute autre heure qu'il vous plaira fixer.»
À M. MOORE
«J'ai une loge pour Othello ce soir; je vous envoie le billet pour vos amis les R…fes. Je vous recommande sérieusement de leur recommander d'y aller, ne fût-ce qu'une demi-heure, pour voir le troisième acte; ils ne retrouveront peut-être pas aisément semblable occasion. Nous n'y allons pas, ou plutôt moi, je n'y vais pas; ainsi personne ne les gênera. Voulez-vous vous charger de leur donner ou de leur envoyer ce billet? il aura meilleure grâce à venir de vous que de moi.
»Je ne suis pas bien disposé; cependant j'irai, si je puis, dîner avec vous chez ***. Il y a de la musique à Covent-Garden. Dans tous les cas, voulez-vous venir après dans ma loge, pour voir le début d'une jeune actrice de seize ans 116, dans l'Enfant de la Nature?»
Note 116: (retour) Le premier début de miss Foote, auquel nous assistâmes ensemble.(Note de Moore.)
À M. MOORE
Dimanche matin.
«L'Iago de Kean n'était-il pas parfait, surtout la dernière scène? J'étais tout près de lui à l'orchestre, et je n'ai jamais vu une figure anglaise moitié si expressive. Je ne connais point de sensations immatérielles aussi délicieuses que celles que nous font éprouver de bonnes pièces bien jouées; mais il faudrait qu'outre celles de Shakspeare, on en donnât de nouvelles de tems en tems. Je voudrais que vous ou Campbell en écrivissiez une: nous autres nouveaux venus au Parnasse, nous n'avons pas assez de force et de courage pour une telle entreprise.
»Vous avez été mal mené dans le Champion, n'est-ce pas? C'est mon tour aujourd'hui, au point que l'éditeur même en rougit. L'auteur de l'article écrit bien, et, comme le serpent d'Aaron a dévoré chez moi tous les autres, et que la poésie n'est plus ce qui m'occupe le plus aujourd'hui, j'ai pris cette critique assez tranquillement. Nous allons ensemble chez M. ***. Peut-être vous verrai-je d'ici là; je crains seulement de vous importuner.
»Je suis toujours, avec autant de vérité que d'affection, votre, etc.»
À M. MOORE
5 mai 1814.
«Allez-vous ce soir chez lady Cahir? Dans ce cas, et toutes les fois que nous prendrons part aux mêmes folies, embarquons-nous dans le même vaisseau de fous. Je suis resté debout jusqu'à cinq heures du matin; j'étais debout de nouveau à neuf. Je me sens tout appesanti de n'avoir fait au plus que sommeiller les trois ou quatre dernières nuits.
»J'ai perdu ma place et tout le plaisir de la soirée, en essayant au souper de me tenir loin de ***. J'aurais quitté la maison même, si je n'avais craint que cela ne parût une affectation pire que la première. Naturellement, vous êtes invité à dîner, ou bien nous pourrions aller tranquillement dans ma loge à Covent-Garden, et de là à cette assemblée. Pourquoi vous êtes-vous retiré si tôt?
»Toujours tout à vous, etc.
»P. S. Le souper de R*** n'aurait-il pas dû être un dîner? Voici M. Jackson: il faut que je me fatigue pour me remettre en train.»
À M. MOORE
18 mai 1814.
«Remerciemens et ponctualité. Il faudra bien qu'on me fasse connaître ce qui s'est passé chez ***, puisque j'ai été en partie le sujet de la conférence. Je suis fâché que votre affaire doive vous retenir si tard; toutefois, je suppose que vous viendrez chez lady Jersey. Pour moi, j'irai de bonne heure avec Hobhouse. Vous vous rappelez que demain nous soupons et allons voir Kean ensemble.
»P. S. Le pugilisme est pour demain, deux heures.».
Le souper dont il parle ici eut lieu chez Watier; il était devenu, depuis peu, membre du club de ce nom. Comme ce repas peut donner idée du régime irrégulier qu'il suivait, et expliquer les fréquens dérangemens de sa santé, je vais essayer d'en tracer de mémoire les détails. Lord R***, qui devait souper avec nous, n'étant pas venu, je me trouvais seul avec Byron. Je m'étais chargé d'ordonner le repas; et sachant qu'il n'avait, depuis deux jours, rien pris que quelques biscuits, et que même, pour amuser son appétit, il s'était réduit à mâcher du mastic, je désirai qu'on nous donnât une quantité suffisante de poisson, au moins de deux espèces. Cependant mon compagnon se contenta des homards, et il en mangea entièrement à lu seul deux ou trois, s'arrêtant de tems en tems pour boire un petit verre d'eau-de-vie blanche, extrêmement forte, puis un grand verre d'eau chaude. Il but ainsi alternativement six verres au moins d'eau-de-vie et six grands verres d'eau chaude, persuadé que le homard, pour passer, avait besoin d'être ainsi arrosé. Nous bûmes ensuite deux bouteilles de Bordeaux, et nous nous séparâmes à quatre heures du matin.
Pope a jugé ses soirées de homard dignes de passer à la postérité: on me pardonnera d'avoir entretenu le public d'une partie du même genre, puisque Lord Byron en est le héros.
Parmi les autres parties de cette espèce où j'eus l'avantage de me trouver avec lui, je me rappelle qu'un soir, revenant fort tard de quelqu'assemblée, nous vîmes de la lumière dans Bond-Street, chez Stevens, dont il était une ancienne pratique, et nous résolûmes d'y entrer souper. Nous y trouvâmes un de ses vieux amis, sir G*** W***, qui consentit à se joindre à nous. Aussitôt nous mîmes en réquisition les homards, l'eau-de-vie et l'eau chaude; et, comme à l'ordinaire, il était grand jour quand nous nous séparâmes.