Kitabı oku: «Le Leurre Zéro», sayfa 6
– Merci, Monsieur le Président, enchaîna le Dr Rodrigo. C’est un honneur d’être ici et que vous me consultiez sur le sujet…
– Quelle est cette arme ? » demanda Rutledge une fois encore.
Le Docteur Rodrigo ajusta sa cravate. « Eh bien, Monsieur le Président, si le dossier fourni par la Corée du Sud est exact, alors, ils ont créé un canon électromagnétique à plasma. »
Rutledge cligna des yeux. Il avait déjà entendu le terme « canon électromagnétique » et savait que la Navy avait quelque part un modèle sur lequel elle travaillait, mais cela ressemblait plus à un machin tout droit sorti d’un film de science-fiction. « Un quoi ?
– Un canon électromagnétique à plasma, pour faire court, « canon à plasma », répéta le scientifique. Pour être honnête, jusqu’à présent, ce type d’arme avait été purement théorique. En réalité, il semble difficile de croire entièrement à son existence tant que nous ne retrouverons pas le bateau porté disparu…
– Ou jusqu’à ce que l’arme soit utilisée, grommela Kressley.
– Eh bien… oui, acquiesça Rodrigo. Inutile de préciser que le canon à plasma est une arme à projectiles avec la capacité de détruire n’importe quelle cible à plusieurs centaines de miles de distance.
– Un projectile ? Comme un missile ? demanda Rutledge.
– Non, Monsieur le Président. Les missiles peuvent être détruits, abattus. Les missiles peuvent être détectés lorsqu’ils sont à l’approche. J’ai déjà examiné le schéma de l’arme coréenne ; celle-ci serait capable de tirer un projectile à plasma à une vitesse atteignant plusieurs fois la vitesse du son. Il n’y pas de défense possible contre une telle arme, à l’exception d’un obstacle placé en travers de son chemin. »
Le président Rutledge ferma les paupières, sentant venir une migraine. « Vous avez dit que la Corée du Sud avait fait des recherches pendant deux jours. Ont-ils des pistes sur l’endroit où pourrait se trouver le navire ? »
Shaw secoua la tête. « Aucune, Monsieur le Président.
– Aucune. Parfait, se moqua Rutledge. Avec tous nos satellites, comment se fait-il qu’il soit difficile de trouver un bateau au milieu de l’océan ?
– Avec tout le respect que je vous dois, dit le Docteur Rodrigo, c’est très difficile. Ce navire possède les capacités de furtivité les plus avancées que j’aie pu voir. Nous ne pouvons pas oublier que nos propres militaires partagent des informations et des ressources avec la Corée du Sud et qu’elle possède le 10e budget militaire le plus élevé au monde… »
Rutledge leva brusquement la main et le Docteur Rodrigo se tut. « Savent-ils, au moins, qui s’en est emparé ? »
Personne ne dit mot. Le directeur Shaw regardait fixement ses mains jointes. Le directeur du Renseignement National Barren ajusta un bouton de manchette. Finalement, ce fut Tabby Halpern qui prit la parole, avec un peu d’hésitation.
« En fait oui, Monsieur le Président. Un navire de l’US Navy dans la mer de Chine méridionale a repéré un bateau qui passait par là plusieurs heures avant la montée d’énergie. Personne n’y a prêté attention, mais ils ont tout de même pris quelques photos. Le logiciel Imaging a permis de relier le bateau à son port d’origine : Mogadiscio.
– Mogadiscio ? répéta Rutledge, abasourdi. Que diable faisait un bateau de Mogadiscio en mer de Chine méridionale ?
– Monsieur, précisa Tabby, les Sud-Coréens ont de bonnes raisons de suspecter que le canon à plasma a été volé par des pirates somaliens. »
Sous la table de conférence, Rutledge se pinça la jambe. Non, il n’était pas en train de rêver même s’il avait espéré que ce fût le cas.
« Juste pour récapituler ce dont il est question ici, dit lentement le président. Vous êtes en train de me dire que des pirates… ont volé un bateau invisible… avec une arme impossible… à l’un de nos plus proches alliés… qui l’a mise au point dans le plus grand secret. Et à présent ces pirates ont deux jours d’avance sur nous. Est-ce que cela résume bien la situation ?
– Oui, Monsieur le Président acquiesça Tabby. C’est ce à quoi nous avons affaire.
– Je ne peux pas gérer ça maintenant. Rutledge se frotta le visage de ses deux mains. Et je ne suis pas en train de dire que je ne suis pas capable de le faire ; je veux dire que je n’ai pas le temps, l’énergie ou la capacité mentale de le faire sachant ce qui est en jeu. Vous êtes tous dans cette pièce pour une raison et cette raison est de gérer des situations telles que celle-ci. Donc faites-le. » Il pointa le doigt sur Kressley à sa gauche. « Considérez cela comme l’entière autorisation de faire tout ce que vous avez à faire – survols de drones, surveillance satellite complète sur chaque mètre carré d’eau entre le site d’attaque et Mogadiscio. Je veux que des navires soient envoyés de Diego Marcia immédiatement et se tiennent prêts à agir à tout moment. »
Kressley opina du chef, mais Docteur Rodrigo prit de nouveau la parole. « Monsieur le Président, je ne suis pas sûr d’avoir suffisamment souligné à quel point ce navire sera indétectable… »
De nouveau, Rutledge lui intima le silence d’une main. « Docteur, vos inquiétudes ont été entendues et prises en considération ». Pourtant il savait qu’il n’avait pas d’autre choix que de s’en remettre à l’expertise du scientifique. Ils avaient besoin de quelque chose de plus que la technologie ; lui, il avait besoin d’yeux. Besoin que quelqu’un cherche ce bateau. Quelqu’un en qui il avait entièrement confiance pour mener à bien cette mission.
« Shaw, dit le président. C’est lui que je veux ! »
Le directeur Shaw se mâchonna pensivement les lèvres pendant un moment, une expression suggérant qu’il savait ce qui allait suivre. « Monsieur le Président, je ne suis pas certain que ce type d’opération relève de son expertise. »
Rutledge répondit avec agacement. « Excusez-moi si cela ressemblait à une requête, Shaw. Ce n’en était pas une.
– Si je peux me permettre, Monsieur le Président. » Enfin, l’homme assis de l’autre côté de Shaw, le plus éloigné du président, prit la parole. Il n’était pas très grand, un mètre soixante-dix tout au plus, et il aurait pu être le comptable de Shaw. Son nez et son menton étaient anguleux, presque pointus, d’une manière qui faisait penser à un rongeur. Un rat, peut-être ? Non, une belette lui correspondait plus, pensa Rutledge.
– Et vous êtes ?
– Le Directeur-Adjoint Walsh, dit l’homme en baissant révérencieusement la tête. Je dirige le groupe des Opérations Spéciales de la division des Activités Spéciales de la CIA depuis début décembre. »
Ah, pensa Rutledge. Encore un autre en provenance de la NSA, je parie. Shaw embauchait des membres de son ancienne agence ; ce Walsh n’aurait pas pu moins ressembler à un agent de la CIA, quand bien même il aurait porté un bermuda et des lunettes Groucho.
« Nous avons un nombre important d’agents hautement qualifiés et entraînés qui sont prêts à intervenir immédiatement dans ce type de situation. Dans la prochaine demi-heure, nous pouvons constituer une équipe d’anciens SEALs et Black Ops et les déployer sur les lieux de l’attaque…
– Walsh, c’est bien ça ? l’interrompit Rutledge.
– C’est cela, Monsieur le Président.
– Vous êtes le nouveau patron de Zéro ? »
Walsh se tint un peu plus droit sur sa chaise. « C’est exact, Monsieur le Président. »
Le président Rutledge se leva de son siège et fit le tour de la table pour se poster derrière, ou plus exactement au-dessus, de l’homme nettement plus petit. Puis il lui tendit la main.
Walsh jeta un coup d’œil nerveux à Shaw avant de prendre la main du président et de la serrer avec précaution.
« C’est un plaisir de vous rencontrer, dit Rutledge. Je suis le patron du patron de votre patron. Et je n’étais pas en train de vous poser une question. Appelez-le. Ou je le ferai et dans ce cas-là, à la prochaine réunion, quelqu’un d’autre sera assis à votre place. »
CHAPITRE HUIT
Zero stationna son SUV dans le parking tentaculaire du Centre de Renseignements George Bush, autrement dit le quartier général de la CIA, plus communément surnommé Langley parce qu’il était situé sur cette commune de Virginie. Comme c’était un dimanche, seul un quart du parking était utilisé, ce qui signifiait que le périmètre était visible. Le parking était entouré par de grands arbres qui dissimulaient même l’asphalte au monde extérieur. Au printemps, ces arbres étaient luxuriants et d’un vert intense, mais actuellement ils étaient squelettiques et dénués de toute feuille, donnant à Zéro l’impression d’être cerné par une forêt sinistre.
Il avait reçu le texto une demi-heure auparavant, en provenance d’un numéro inconnu évidemment, disant simplement « Langley. 30 min ». Il n’avait pas besoin de connaître le numéro pour deviner qui en était l’auteur : son nouveau patron, Walsh, un ancien directeur adjoint de la NSA qui dirigeait à présent le Groupe des Opérations Spéciales. Ou plus exactement, pensa-t-il avec ironie, un de ses laquais le faisait, le directeur adjoint étant un délégateur particulièrement zélé.
Zéro et son équipe avaient été mis à contribution avec parcimonie ces derniers mois, depuis l’affaire de l'arme à ultrasons et la quasi-fusion du réacteur de Calvert Cliffs. Non, se corrigea-t-il, pas l’équipe de Zéro. Plus maintenant. Il fut un temps, il dirigeait sa propre équipe et puis il avait quitté l’agence et pris sa retraite pendant plus d’un an. Les circonstances et la menace d’une longue peine de prison l’avaient contraint à reprendre du service, et Maria ayant quitté ses fonctions de directrice-adjointe en novembre dernier, c’était elle désormais qui dirigeait l’équipe.
Dernièrement, la mission la plus excitante qu’on leur avait confiée s’était résumée à deux jours de surveillance d’une cellule terroriste présumée en Argentine, qui s’était finalement révélée n’être qu’un camp de réfugiés politiques. Ils n’avaient fait que de simples missions de routines, des tâches fastidieuses, habituellement réservées aux nouvelles recrues. Le directeur-adjoint Walsh et son copain de longue date le directeur Shaw, n’éprouvaient pour Zéro et ses collègues que du mépris qu’ils ne tentaient même pas de dissimuler depuis les événements de novembre dernier. Zéro n’avait donc aucune raison de penser que le briefing d’aujourd’hui puisse se dérouler sous de meilleurs auspices.
Le grondement sourd d’un moteur de camion le fit sortir de ses pensées, et l’instant d’après, un pick-up familier rougeâtre stationna en face de lui. Le pick-up semblait assez vieux pour avoir vu le mouvement en faveur des droits civiques ; « rouille » était la seule couleur qui pouvait le décrire et les bruits qui s’échappaient du capot suggéraient qu’il pourrait rendre l’âme à tout moment. Mais Zéro savait que l’aspect de ce pick-up était une ruse tout comme l’était celui de son conducteur. Cette vieille guimbarde pouvait dépasser et distancer une Jensen Interceptor GT si nécessaire.
Zéro croisa les bras et fit de son mieux pour réprimer le sourire de son visage lorsqu’Alan Reidigger sortit de son véhicule, son expression amère visible même sous sa barbe broussailleuse et sa casquette de camionneur. « Bonjour. Alors, toi aussi ils t’ont convoqué sur ce coup-là ? »
– Hmm », maugréa Alan, visiblement mécontent que ce soit le cas. Il avait reçu le même ultimatum que Zéro : revenir travailler pour la CIA ou passer le reste de sa vie en prison. Non seulement Alan méprisait l’Agence, mais il avait fait sa croisade personnelle d’utiliser toutes les opportunités qui se présenteraient pour leur rendre la vie impossible. À commencer par refuser de revenir travailler comme agent à temps plein ; sur le papier il avait été étiqueté comme étant un atout pour l’agence, ce qui était une appellation fourre-tout pour l’envoyer sur des missions dont personne ne voulait, dès qu’ils en avaient besoin.
« Où est Todd ? demanda Zéro.
– Tu n’as pas su ? Il s’est cassé le bras il y a deux jours en faisant de l’escalade.
– Ouais ! Certains ont toutes les veines. » Zéro n’avait pas parlé depuis un moment à Todd Strickland, le plus jeune de leur équipe. Strickland n’avait que trente ans. C’était un ancien Ranger de l’armée à l’allure juvénile mais qui avait un corps taillé dans le marbre. S’il n’avait pas été recruté par la CIA, il aurait très bien pu jouer le rôle de Captain America. « C’est bien dommage, fit Zéro avec un sourire en coin. J’aime bien vous voir tous les deux côte à côte, c’est comme de voir des photos avant/après d’un vétéran des bérets verts.
– Ha-ha », dit platement Alan tandis qu’un coupé sportif blanc les rejoignait. Maria en sortit, les narines dilatées sous la colère, ses cheveux blonds inhabituellement plats et encore légèrement humides.
« Une demi-heure ! dit-elle le souffle court. J’ai reçu le message alors que j’étais sous la douche. Même pas eu le temps de me sécher les cheveux. » Elle claqua la portière derrière elle. « De toute façon, on sait tous que ce sera une mission bidon.
– Tu es mignonne quand tu te mets en colère. » Zéro fit un pas vers elle avec l’intention de l’embrasser, mais s’arrêta juste à temps. Il y avait des caméras, même ici dans ce parking, et moins Langley en saurait sur leur vie personnelle, mieux ce serait.
Maria lui adressa un sourire compréhensif avant de se retourner et d’ouvrir le chemin pour se diriger vers le bâtiment principal du campus de Langley, Zéro et Alan à ses côtés.
« Vous avez parlé à Todd récemment ? » demanda-t-elle tout en marchant.
« Pas dernièrement, lui répondit Zéro, mais j’ai appris qu’il s’était cassé le bras en faisant de l’escalade, c’est ça ? »
Elle laissa échapper un petit rire ironique. « Oh je t’en prie, tu ne vas tout de même pas croire ça ? Je suis sûre qu’il a trébuché sur son chat en descendant l’escalier ! »
Maria et Zéro rirent de concert, même Reidigger ricana un peu. Zéro pouvait difficilement imaginer, le vétéran, le dur à cuire, toujours prêt à aller au combat, trébucher et tomber dans les escaliers. Ils entrèrent dans le bâtiment et parcoururent le sol de marbre, leurs pas résonnant dans le vaste atrium alors qu’ils marchaient sur l'énorme emblème circulaire gravé sous leurs pieds, un bouclier et un aigle gris et blanc, entourés des mots “Central Intelligence Agency, United States of America.”
« Walsh nous a demandé de le rejoindre dans son bureau », annonça Maria par-dessus son épaule.
Zéro fronça les sourcils. C’était un lieu plutôt inhabituel pour un briefing ; généralement ils se déroulaient dans une des salles de conférence, une appellation bien anodine pour désigner une pièce qui avait été ratissée au peigne fin pour s’assurer qu’aucun dispositif d’écoute n’y avait été placé et qui avait été équipée de transmetteurs brouillant tous les signaux téléphoniques ou radiophoniques.
Quelque chose à propos de tout cela lui semblait étrange, à commencer par le fait que Reidigger avait lui aussi été convoqué à la réunion dans le bureau de Walsh. Cela laissait pressentir à Zéro que ce ne serait sans doute pas une de ces opérations banales et inintéressantes.
« Dis-moi, Alan », dit Zéro à voix basse tandis que Maria présentait son badge à l’agent de sécurité posté à l’entrée du couloir avant de traverser le détecteur de métal. « As-tu eu le temps de t’occuper de ce que je t’avais demandé ? » Il savait qu’Alan comprendrait ce dont il parlait ; il voulait savoir si son contact avait compilé les informations sur les neurochirurgiens affiliés à la CIA.
« Pas encore, dit Alan d’un ton bourru. Dans quelques jours. »
Zéro lui fit un signe de tête en avançant à travers le détecteur de métal, suivit par Alan, puis une fois qu’ils eurent récupéré leurs effets personnels, ils se dirigèrent tous trois vers le bureau de Walsh au troisième étage.
Mais, lorsqu’ils arrivèrent à sa porte, Zéro fut surpris d’apercevoir l’homme qui était leur patron depuis quelques mois seulement, sortir de son bureau et en refermer la porte derrière lui. Il tenait à la main un attaché-case et un dossier cartonné sous le coude.
« Ah, dit-il sèchement. Agents. » Sa colonne vertébrale se raidit et son torse sous sa chemise et cravate se gonfla légèrement. Zéro avait remarqué que le directeur adjoint Walsh faisait ce mouvement instinctivement presque à chacune de leurs rencontres. Walsh mesurait bien trente centimètres de moins que Zéro et semblait vouloir se grandir un peu plus chaque fois qu’il se tenait à ses côtés.
« Monsieur le Directeur Adjoint, dit Maria. Allons-nous ailleurs pour ceci ? »
Walsh fonça les sourcils. « Pour quoi exactement, agent Johansson ?
– Le briefing, monsieur.
– Non, pas besoin d’aller ailleurs. » Walsh posa sa mallette et lui remit le dossier cartonné. « Voilà.
– Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-elle sans le saisir.
– C’est une enveloppe scellée, agent.
– Je vois ça, monsieur le Directeur Adjoint, répondit Maria aussi sèchement. Mais pourquoi me le remettez-vous ?
– Parce que je souhaiterais que vous le preniez », dit Walsh, d’un ton cassant.
C’était un jeu et Zéro le savait. Il n’y avait plus aucune sympathie entre eux et le directeur Shaw. L’homme avait un dédain non dissimulé pour la manière dont ils défiaient les ordres et malgré tout obtenaient des résultats – ou plus exactement, défiaient les ordres afin d’obtenir des résultats. Shaw accordait presque autant d’importance à l’autorité qu’à la nécessité qu’on reconnaisse la sienne. Et Walsh et lui étant de vieux copains, leur nouveau patron n’appréciait pas non plus leurs méthodes. Tous deux avaient tenté de les inonder d’affectations médiocres, afin de les briser comme des chevaux sauvages, et devant le manque de résultats, ils avaient eu recours à la mesquinerie passive-agressive.
« Ceci est votre briefing, lui dit finalement Walsh, tenant toujours l’enveloppe. Vous allez le prendre puis vous rendre au service Recherche et Développement où le matériel nécessaire à cette opération vous a été alloué. Vous allez ensuite…
– Mais Bixby est parti », l’interrompit brusquement Zéro. Il n’était pas descendu au laboratoire souterrain depuis novembre lorsque Bixby avait disparu et ne savait pas qu’il était toujours en service.
Walsh fut horripilé par l’interruption. « Oui, agent Zéro. Nous sommes tout à fait au courant que notre ancien ingénieur en chef est devenu un traître et un déserteur. Mais cela ne signifie pas pour autant que nous allions simplement fermer le département qu’il dirigeait jusqu’alors. »
Zéro serra les mâchoires en tentant de garder sa langue dans sa poche. Walsh essayait de le faire sortir de ses gonds ; Bixby n’était pas un traître, et ce n’était un secret pour personne que lui et Bixby avaient été amis. S’ils savaient, ou même suspectaient, que Zéro l’avait vu récemment comme c’était effectivement le cas, il se retrouverait au fond d’un trou du centre de détention secret marocain avant le déjeuner.
« Comme je le disais, continua Walsh, vous allez prendre ceci et récupérer votre équipement. Un jet attend sur la piste du gouvernement à Dulles. Seulement après avoir décollé, vous pourrez ouvrir le dossier d’information et suivre les instructions à la lettre. Suis-je bien clair ?
– Désolé, ronchonna Reidigger, en se grattant l’oreille du petit doigt. Je n’ai pas compris le milieu de votre explication.
– Très clair, dit Maria. Elle lui arracha presque l’enveloppe des mains. Monsieur le Directeur Adjoint.
– À la lettre, Agents. » Walsh ramassa sa mallette et leur fit un signe de la tête. « Bonne chasse. » Il les dépassa pour se diriger vers l’ascenseur.
« Trou du c… », marmonna Maria.
« Chasse ? » s’étonna Zéro. Il regarda l’enveloppe que Maria tenait à la main. Ce n’était pas ainsi que les briefings se déroulaient, pas ainsi que les informations étaient transmises. Quelque chose allait de travers, et ce quelque chose se trouvait dans cette enveloppe.
« Venez. » Maria les mena vers les ascenseurs et appuya sur la flèche descendante. Une fois dans la cabine d’ascenseur, elle fit glisser son badge d’accès et saisit une séquence de chiffres. L’ascenseur émit un grondement avant d’entamer sa descente vers l’un des nombreux niveaux souterrains de Langley.
La descente se fit dans un silence complet ; tous trois savaient qu’il y avait des caméras et micros assez sensibles pour détecter un murmure. Il leur sembla que cela durait des heures, mais finalement les portes s’ouvrirent sur un couloir dont les murs en parpaings étaient peints en gris. Il n’y avait aucune fenêtre, et seules des ampoules fluorescentes éclairaient leur chemin. De part et d’autre du couloir, se dressaient à certains endroits de lourdes portes d’acier.
Ils n’avaient pas fait trois pas à l’extérieur de l’ascenseur que Maria dit : « Attendez une minute. Elle glissa son pouce dans le rabat pour ouvrir l’enveloppe. Je ne vais pas attendre bien sagement de voir dans quoi nous allons nous fourrer. Je n’ai jamais fait ça auparavant et ce n’est pas maintenant que je vais commencer. »
Zéro sourit. Cette attitude insouciante et cette tendance à se rebeller contre l’autorité étaient ce qui faisait d’elle un excellent agent et qui lui avaient fait détester le poste de directeur adjoint qu’elle avait brièvement occupé. De plus, le fait que ces traits de caractère la rendaient encore plus attirante ne gâchait rien.
Maria retira une liasse de papier blanc de l’enveloppe, de douze à quinze pages maximum, perforées par trois trous et soigneusement reliées avec des attaches en laiton. Aux yeux de Zéro cela ressemblait à un exposé, ou un devoir qu’il aurait reçu d’un de ses étudiants à l’époque où il était professeur d’histoire européenne, il y a de ça une éternité lui semblait-il.
Elle feuilleta les premières pages rapidement. « Quoi ?
– Quoi ? répéta Zéro.
– Il semblerait que la Corée du Sud ait créé une arme. Ils l’ont embarquée à bord d’un bateau et il y a deux jours ils ont perdu l’arme et le bateau. Puis elle ricana et dit d’un ton moqueur : volée par des pirates somaliens ?
– Des pirates ? » C’était la première fois que Reidigger semblait vaguement intéressé depuis leur arrivée. « Ça a l’air amusant. »
Mais Zéro avait d’autres questions en tête : « Quelle arme ?
– Un canon électromagnétique, dit-elle pensive. Un canon à plasma. »
Zéro fronça les sourcils. Il n’était pas, à proprement parler, familier de la technologie des canons à plasma, mais comme il s’intéressait un peu à la physique, il était presque certain qu’une telle chose n’était pas supposée pouvoir exister. « En es-tu certaine ? Ça ne semble pas vraiment logique. »
Maria leva ses yeux de la feuille qu’elle tenait dans les mains pour les poser sur lui. « Nous avons arrêté un groupe d’anarchistes équipé d’armes bactériologiques à base de souche de variole, qu’ils avaient prélevée d’un glacier millénaire, et tu serais prêt à remettre ça en question ?
– Tu marques un point, concéda-t-il. Y a-t-il d’autres précisions ? »
Elle feuilleta les pages suivantes, sa mine s’assombrissant à chaque nouvelle information, puis elle finit par murmurer, « Le salaud !
– Hmm ? » s’étonna Reidigger. Lui et Zéro se penchèrent tous deux par-dessus son épaule afin de voir ce qu’elle avait sous les yeux. C’était une liste ; une longue liste d’instructions rédigées en caractère gras.
« Des instructions, commenta Maria. Elle referma brusquement la liasse de papiers. Des instructions détaillant étape par étape la manière dont cette opération doit être menée. Ils veulent que nous allions en Corée du Sud. Que nous affrétions un bateau. Que nous le menions jusqu’aux coordonnées du site où a été testée l’arme et où elle a été vue pour la dernière fois, lieu qui se trouve être au beau milieu du foutu océan Pacifique…
– Il n’y aura rien à trouver, intervint Zéro. Ils ont perdu un temps précieux, des jours entiers, à chercher aux alentours pour rien et ils étaient déjà à la traîne.
– Je sais, acquiesça Maria. Car ils ne veulent pas que nous trouvions quoi que ce soit.
– Je ne suis pas sûr de comprendre », admit Alan.
Mais Zéro avait compris. « Ce n’était pas leur idée ». À en juger par le comportement de Walsh et les instructions contenues dans cette enveloppe, il supposait que la décision de les envoyer devait provenir de quelqu’un d’autre, et s’il devait parier, il miserait sur son nouveau copain, le président Jonathan Rutledge. Le président l’avait personnellement félicité de ses efforts pour stopper les attaques à l’ultrason et l’avait invité par deux fois déjà à la Maison-Blanche (bien qu’à ces deux occasions, Shaw ait soudainement confié à Zéro des missions urgentes).
« Rutledge, leur dit-il. C’est Rutledge qui leur a forcé la main.
– C’est exactement pour ça que je ne voulais pas revenir travailler pour la CIA. Alan souleva sa casquette de camionneur et passa une main dans ses cheveux emmêlés. Donc nos patrons risqueraient la sécurité nationale juste pour le plaisir de nous faire passer pour des incapables ?
– Pas nécessairement. Maria étudia le rapport encore une fois. Cette arme a été volée à des milliers de miles de là. Un bateau de cette taille n’atteindrait jamais les côtes américaines. Et s’il s’agit de Somaliens, ils vont très probablement le ramener à leur port d’attache et organiser une revente. Cette arme ne semble pas être une menace à l’encontre des États-Unis. Ils ont également des drones, des cuirassiers de la Navy, des satellites, tout le monde est attelé à la tâche pour retrouver ce machin. Donc… Ouais, ils peuvent se permettre de nous faire passer pour des incapables.
– Eh bien qu’ils aillent se faire voir, dit Alan. Allons en Corée du Sud, affrétons un bateau et allons pêcher. Considérons ça comme des mini-vacances. Laissons la Navy se débrouiller pour le trouver. Si leur intention est de nous faire passer pour des incapables, comportons-nous comme des incapables.
– Non, l’interrompit Maria. Non, nous allons le retrouver. Mais pas de la manière dont ils souhaiteraient. » Elle désigna un point sur la page. « Nous allons là. »
Zéro regarda par-dessus son épaule et vit ce qu’elle désignait. Un bateau somalien a été identifié en mer de Chine du Sud comme ayant son port d’attache à…
« Mogadiscio, acquiesça-t-il d’un bref signe de tête. Ça me paraît une bonne stratégie.
– Pas encore franchi les barrières qu’on désobéit déjà aux ordres. Reidigger replaça sa casquette tachée d’huile sur sa tête. Ça ressemble au statu quo.
– Nous aurons à convaincre le pilote, avertit Zéro. Walsh a été très clair sur le fait que le pilote qui nous attendait avait une idée précise de l’endroit où il devait nous conduire.
– Pas besoin de lui, dit Alan avec un haussement d’épaules. Je peux piloter.
– Nous verrons cela plus tard. » Maria laissa tomber l’enveloppe au sol, roula le rapport pour le glisser dans sa poche arrière. Puis elle désigna la porte d’acier qui leur permettrait d’accéder à ce qui, jusqu’alors, avait été le laboratoire de Bixby. « Pour le moment, voyons voir qui se trouve derrière la porte numéro un. »
Ücretsiz ön izlemeyi tamamladınız.