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L’imprimé théâtral dans les provinces méridionales au XVIIᵉ siècle
Bénédicte LOUVAT
Université Toulouse – Jean Jaurès
Rapporté à son étendue géographique – il est borné à l’est par Aix-en-Provence et Marseille, à l’ouest par Bordeaux, au nord par Limoges et au sud par Montpellier –, le nombre d’ouvrages de théâtre imprimés au XVIIe siècle sur le territoire méridional et plus spécifiquement occitanophone est singulièrement limité.
La production en français
Qu’on en juge, pour commencer, par les chiffres donnés par Alain Riffaud dans la rubrique « Les libraires du théâtre français 1630-1660 » de son Répertoire du théâtre français imprimé, 1630-1660 et son complément électronique, qui couvre les décennies antérieures et postérieures1. La rubrique est subdivisée en deux grandes sections où sont recensés d’une part les « principaux libraires parisiens du théâtre » (notamment Augustin Courbé, Guillaume de Luyne, son beau-père Toussaint Quinet, Antoine de Sommaville et François Targa), d’autre part les « autres libraires du théâtre ». Au sein de cette seconde catégorie sont à leur tour distingués les libraires parisiens qui n’ont à leur catalogue qu’entre un et une dizaine de titre(s), les libraires rouennais (23 pour les décennies 1630-1660), les libraires lyonnais (au nombre de 24) et les « autres libraires », dont le nombre s’élève à 40. Sur ces 40 libraires, neuf, soit près d’un quart –mais encore une fois, le territoire est vaste – appartiennent à la zone géographique que nous avons isolée et se répartissent entre cinq villes : Toulouse, Avignon, Bordeaux, Montpellier et Béziers. Pendant les 30 années étudiées par A. Riffaud dans son ouvrage – à peine un tiers du siècle, mais une période particulièrement riche pour le théâtre français –, 10 œuvres ont été éditées par ces libraires, 4 à Avignon, 2 à Bordeaux, 2 à Toulouse, 1 à Montpellier et 1 à Béziers. Si l’on complète cette première liste à partir des informations recueillies sur le site hébergé par l’université de Fribourg et que l’on étend la période étudiée à l’ensemble du siècle, on obtient les données suivantes :
Avignon
Théophile de Viau, Les Amours tragiques de Pyrame et Thisbé, dans Les Œuvres du Sieur Theophile, Jacques Bramereau, 1633.
Sieur Corbassier, La Dorise, Jacques Bramereau, 1636.
Arnaud, Agamemnon, Jacques Bramereau, 1642.
Desfontaines, Les Galantes vertueuses. Histoire veritable & arrivée de ce temps pendant le Siege de Thurin, Jean Piot, 1642.
Calotin, Amsterdam hydropique. Comédie burlesque à trois actes. Par M. P. A., Pierre Offray, 1672 puis réédition chez Antoine Duperier, 1673.
Toulouse
Jean Galaut, Phalante Tragédie, Vve Jacques Colomiez et R. Colomiez, 1611.
D.L.T., Josaphat ou le triomphe de la foy sur les Chaldéens, François Boude, 1646.
Desfontaines, Le Martyre de saint Eustache, Jean Brocour, Arnaud Colomiez et Bernard Fouchac, 1652.
La Calprenède, La Mort des enfants d’Hérode, ou suite de la Mariane, Arnauld Colomiez et Jean Brocour, 1652.
Scudéry, La Mort de César, Bernard Fouchac ou Arnaud Colomiez, 1652.
Tristan L’Hermite, La Mariane, Bernard Fouchac ou A. Colomiez et J. Brocour, 1652.
Tristan L’Hermite, La Mort de Chrispe, Bernard Fouchac ou A. Colomiez et J. Brocour, 1652.
Molière, Les Œuvres de Monsieur de Molière, Jean Dupuy, Dominique Desclassan et Jean-François Caranove, 1697.
Père Dumoret, Le Sacrifice d’Abraham. Tragédie. Par le P. Dumoret de la Doctrine Chrétienne, Professeur des Humanitez dans le premier Colège de Toulouse, Claude-Gilles Le Camus, 1699.
Bordeaux
Elie Garel, Sophonisbe, Arnauld du Brel, 1607.
Antoine Verdié, Le Procès de Carnaval, ou les masques en insurrection ; comédie-folie en un acte et en vers, Vve JB Cavazza, 1617.
Goefroy de Gay, La Simonie, Guillaume Millanges, 1636.
Noguères, La Mort de Manlie, Guillaume Millanges, 1660.
De La Poujade, Faramond, ou le triomphe des héros. Tragicomédie, Simon Boé, 1672.
[anonyme] La Bourgeoise madame, comédie nouvelle, Matthieu Chappuis, 1685.
Montpellier
La Selve, Les Amours infortunées de Léandre et d’Héron, Jean Puech, 1633.
Béziers
Saint-André d’Ambrun, Histoire pastoriale, sur la naissance de nostre seigneur Jesus-Christ, Pierre Claverie, 1644.
Aix-en-Provence
Sérizanis de Cavaillon, Teofile ou la victoire de l’Amour divin sur le profane, tragédie sacrée, Vve de C. David et A. David, 1695.
Les ouvrages imprimés relèvent de deux catégories distinctes : d’une part les rééditions de pièces parisiennes, d’autre part les éditions originales. La première catégorie est constituée de sept titres et concentrée essentiellement entre les mains de trois libraires toulousains, Arnaud Colomiez, Bernard Fouchac et Jean Brocour, qui publient la même année 1652 cinq pièces parisiennes des années 1630-1640 ayant connu des fortunes éditoriales diverses : si La Mariane a donné lieu à douze rééditions entre 1637 et 1678, dont deux lyonnaises, on ne compte que deux rééditions de La Mort de Chrispe et quatre de La Mort des enfants d’Hérode (dont les rééditions toulousaines) et c’est sans doute en pariant sur l’effet d’entraînement de La Mariane que les libraires les ont publiées en même temps que la pièce à succès de Tristan L’Hermite, La Mort de Chrispe, ayant le même auteur et La Mort des enfants d’Hérode étant conçue comme une suite de La Mariane. C’est à cette première catégorie qu’appartiennent également la réédition avignonnaise des Amours tragiques de Pyrame et Thisbé de Théophile de Viau, qui donne lieu à une quarantaine de réimpressions tout au long du siècle, seule ou au sein des Œuvres de Théophile, en province (outre Avignon, Rouen, Lyon et Grenoble) autant qu’à Paris, et la réédition toulousaine, à la fin du siècle, des Œuvres posthumes de Molière. Il conviendrait d’adjoindre à cette première catégorie la cinquantaine de contrefaçons avignonnaises recensée par A. Riffaud et qui émane des ateliers des imprimeurs Jacques Bramereau et Jean Piot, actifs entre 1600 et 1658 pour le premier, 1625 et 1675 pour le second. A. Riffaud considère que celui-ci est « le second contrefacteur du théâtre français », derrière Jacques et Eléazar Mangeant installés à Caen, dont la « production est surtout vouée au colportage à travers tout le royaume de France2 ». Les ateliers de Bramereau et Piot imitent les motifs parisiens et les imprimeurs parviennent régulièrement à publier la même année que l’édition originale des contrefaçons qu’ils écoulent d’autant plus facilement que la vallée du Rhône est un axe de circulation important et qu’Avignon est une ville papale3.
La seconde catégorie regroupe seize ouvrages et se subdivise elle-même en deux groupes : l’un n’est, jusqu’à plus ample informé, représenté que par un seul ouvrage, Les Galantes Vertueuses de Desfontaines, soit une œuvre composée par un comédien-poète qui n’est pas originaire du Midi, mais se trouve à Lyon en février 1640 et en février 16434, avec la troupe de Charles Dufresne. La proximité géographique des villes de Lyon et d’Avignon et le fait que Jean Piot soit alors l’un des imprimeurs spécialisés dans l’édition théâtrale les plus actifs de la région peuvent expliquer que Desfontaines lui ait confié sa tragi-comédie. Quelle que soit l’origine de ce choix – l’auteur n’en dit mot dans l’appareil paratextuel des Galantes Vertueuses –, il s’agit là d’une publication conjoncturelle, bien distincte des circuits de production et de publication que l’on peut supposer à l’œuvre pour les quinze autres pièces de notre corpus, soit la production théâtrale véritablement locale.
L’empan chronologique (1607-1699) et la diversité de ces pièces rend difficile, sinon impossible, une présentation unifiée. On peut d’ailleurs relever au préalable le caractère étique de l’ensemble : 16 pièces publiées en près d’un siècle dans un espace qui occupe près de la moitié du territoire national, voilà qui est fort peu. Mais comme l’observe encore A. Riffaud, la production théâtrale provinciale en général n’excède pas « quelques unités par an au maximum, et certaines années aucune ne voit le jour », les libraires parisiens devenant, à partir des années 1630, « quasiment les seuls à publier les pièces nouvelles qui sont créées à Paris avant d’enrichir la programmation des troupes de campagne5 ». Et si l’on peut noter quelques exceptions à partir des années 1660, les dramaturges Gilbert, Rosimond, Brécourt, Hauteroche, Abeille, Chappuzeau, Dancourt ou Campistron publiant parfois leurs nouvelles pièces ailleurs qu’à Paris, ce phénomène ne touche pas le territoire méridional, mais les villes de Rouen, Grenoble, Lille et Lyon, et plus encore La Haye. Même le marché de la contrefaçon se déplace à partir des années 1660 et Avignon cède la place à Lyon et Grenoble6. Mais la poignée de pièces publiées dans quelques villes méridionales atteste de la permanence d’une activité théâtrale modeste mais réelle, qui se caractérise d’abord par sa variété : aux côtés de comédies (Le Procès de Carnaval, Amsterdam hydropique et La Bourgeoise madame) se trouvent des tragi-comédies et tragédies, et parmi ces dernières, des pièces à sujet mythologique (Léandre et Héron, Agamemnon), historique (Sophonisbe, La Mort de Manlius), biblique (Josaphat, Le Sacrifice d’Abraham), chrétien (Histoire pastoriale, sur la naissance de nostre seigneur Jesus-Christ, Teofile ou la victoire de l’Amour divin sur le profane, La Simonie) ou romanesque (Phalante, tirée de l’Arcadia de Sidney, Faramond du roman éponyme de La Calprenède). Certaines de ces pièces répondent à des occasions spécifiques : actualité nationale et même internationale pour Amsterdam hydropique, composée dans les premiers mois du conflit qui oppose la France à la Hollande, célébration de la Nativité pour l’Histoire pastoriale.
Les pages de titre ou les paratextes fournissent parfois des informations sur leurs auteurs : comme sur le reste du territoire, on compte parmi eux des avocats (Galaut et La Selve l’indiquent explicitement), des hommes d’Église et des professeurs (Sérizanis de Cavaillon et le Père Dumoret). Les autres sont assurément aussi des notables, qui indiquent parfois leur origine provinciale7, généralement pour s’en excuser, et sont inscrits dans des réseaux ou aspirent à s’y inscrire, comme l’attestent les épîtres dédicatoires qui précèdent presque systématiquement le texte des pièces. Elles ont pour destinataires des représentants majeurs des institutions locales : archevêque de Bordeaux (Agamemnon d’Arnaud), archevêque d’Embrun (Histoire pastoriale de Saint-André d’Embrun) et surtout gouverneurs du Languedoc (Les Amours infortunées de Leandre et d’Heron de La Selve, dédiées au maréchal de Schomberg, duc d’Halluin) et de Guyenne (La Mort de Manlie de Noguères et Josaphat de D.L.T., dédiées au duc d’Épernon, Faramond de Lapoujade à son successeur, le maréchal d’Albret).
Les caractéristiques dramaturgiques et stylistiques de ces œuvres sont extrêmement diverses. Comme l’a montré Alan Howe dans l’édition qu’il a donnée de la Phalante de Galaut8, l’une des toutes premières œuvres françaises inspirées d’un roman anglais, l’esthétique de cette tragédie probablement créée à la fin du siècle précédent mêle, comme celle des contemporains de Galaut et particulièrement de Hardy, des éléments hérités de la tragédie humaniste et des constituants modernes, la pièce toulousaine ne se distinguant en rien des pièces composées par Hardy et publiées à Rouen ou à Paris à la même période. On note cependant, dans les tragédies profanes produites à partir des années 1640, une influence assez massive du modèle cornélien, et de certaines des formes-sens de la tragédie cornélienne telles que le monologue délibératif, voire le plus célèbre d’entre eux, les stances de Rodrigue. Rien ne permet, cependant, de les taxer globalement d’« archaïques » : tout d’abord, le phénomène est alors national, et nombre de pièces parisiennes font place à une telle imitation ; surtout, comme l’a montré Pierre Pasquier9, le théâtre composé et publié en province est infiniment moins tributaire des modes et reprend aisément un procédé, un modèle rhétorique ou un motif qui a prouvé son efficacité.
Ces pièces ont-elles été représentées, et leur publication vient-elle prolonger un succès à la scène ? En l’état actuel de nos connaissances, il est extrêmement difficile de le dire. Noguères évoque une représentation de sa Mort de Manlie10 ; Jean-Claude Brunon, éditeur scientifique de la pièce de La Serre, fournit un certain nombre d’éléments qui plaident pour une représentation de cette tragi-comédie dans un contexte culturel alors très actif et encouragé par les goûts personnels du duc d’Halluin11. On peut en outre gager que des pièces composées par des enseignants ou destinées à célébrer la naissance du Christ aient été au moins destinées à la représentation.
La production en occitan
À ce premier groupe d’ouvrages, il faut maintenant ajouter celui des œuvres théâtrales en occitan, puisque les limites de notre territoire d’étude sont celles du très vaste domaine occitanophone. L’occitan constitue la langue maternelle d’une majorité de la population, et même de ses notables. Au début des années 1640, le médecin montpelliérain François Ranchin écrit ainsi : « partout les gens de lettres, les nobles et ceux de condition tant soit peu honneste, parlent français : à quoi ceux de Languedoc et de Provence s’accoutument plus difficilement et ne peuvent perdre leur mauvais accent, de même que les Gascons et ceux de la Guyenne1 ». La production imprimée, tous types d’œuvres confondus, y est-elle, dès lors, plus importante en occitan qu’en français ? Il n’en est rien, comme l’a montré en 1984 Henri Michel dans une étude consacrée à la production imprimée des villes du Bas-Languedoc au XVIIe siècle2 : sur les 540 livres publiés en 1601 et 1700 sur ce territoire, une dizaine seulement peut être considérée comme des œuvres occitanes, contre plus de cent quarante rédigées en latin et le reste (390) en français : « au cours du XVIIe siècle, les imprimeurs éditent donc, en moyenne dans la région, un livre en occitan quand ils en produisent autour de quatorze en latin et trente-huit au moins en français3 ». Mais il se trouve que cette production imprimée est, en Bas-Languedoc, presque exclusivement constituée d’œuvres théâtrales, en l’occurrence Les Folies du sieur le Sage d’Isaac Despuech dit le Sage de Montpellier, dont la première édition paraît à Montpellier en 1636 et la seconde, augmentée, en 1650, et le corpus du Théâtre de Béziers ou théâtre des Caritats, soit 24 pièces publiées à Béziers sous la forme de trois recueils collectifs (en 1628, 1644 et 1657) ainsi que d’éditions séparées.
Que l’imprimé occitan soit, à Montpellier et Béziers, essentiellement de nature théâtrale, ne signifie pas que, réciproquement, tout le théâtre d’expression occitane s’imprime sur ce territoire. La cartographie des autres lieux de composition, de représentation et d’édition du théâtre d’expression occitane a été considérablement facilitée par la parution, en 2003, du Repertòri deu teatre occitan (1550-1800) réalisé par Jean Eygun4. Au foyer bas-languedocien, il faut ainsi ajouter le foyer provençal, et même plus spécifiquement aixois, ainsi que des publications sporadiques à Toulouse, Agen et Paris notamment. À partir de l’ensemble des données recueillies dans le répertoire de J. Eygun, on peut dresser la typologie suivante, qui regroupe les œuvres par ville d’édition et selon un ordre décroissant faisant apparaître les principaux foyers de l’édition théâtrale occitane :
Béziers
L’Antiquité du triomphe de Besiers, au jour de l’Ascension. Contenant les plus rares histoires qui ont esté representées au susdit jour ses dernieres Années, Jean Martel, 1628, contenant : François Bonnet, Histoire de Pepesuc, Le Jugement de Paris, Histoire de la rejouissance des chambrières de Beziers, [anonyme], Les Amours de la Guimbarde, Histoire de Dono Peirotouno, Plaintes d’un païsan […], Pastorale de Coridon & Clerice, Histoire du valet Guillaume, et de la Chambriere Antoine.
Pastorale du berger Celidor et de Florimonde sa bergere, Jean Martel, 1629.
Histoire du mauvais traitement fait par ceux de Villeneufve […], Jean Martel, 1632.
Histoire pastoriale […], Jean Martel, 1633.
La fausse magie descouverte […], Jean Martel, 1635.
Historio de las Caritats de Besiés, Jean Martel, 1635.
Seconde partie du triomphe de Beziers […], Béziers, J. Martel, 1644, contenant : La colère, ou furieuse indignation de Pepesuc, Histoire memorable sur le duel d’Isabels et Cloris, Las aventuros de Gazetto, dans Seconde partie du triomphe de Beziers, Boutade sur le coquinage et la pauvreté, Boutade de la mode, Las amours d’un sergent avec une villageoise.
Michalhe, Les Mariages rabillez, J. Martel et P. Claverie, 1647.
Michalhe, Pastorale del bergé Silvestre ambé la bergeyro Esquibo, J. Martel, 1650.
Las amours de Damon et de Lucresso, Béziers, J. Martel, 1657.
Aix-en-Provence
Claude Brueys, Lou jardin deys musos provensalos, Estienne David, 1628, 2 parties, contenant : Comedie a onze personnagis ; Comedie a sept personnagis (I) ; Comedie a sept personnagis (II) ; Rencontre de Chambrieros ; Ordonansos de Caramantran a quatre personnagis ; Per un ballet de cridaires d’Aïgo ardent ; Per un ballet de Maquarellos ; Per un balet de fouols).
Lou jardin deys musos provensalos, Estienne David, 1665, contenant Comedie de l’interez, ou de la ressemblanço. A huech persounagis et La farço de Juan dou Grau, à sieis persounagis. Ou l’assemblado dei paures mandians de Marseillo, per empacha de bastir la Charité.
Lou Coucho-Lagno Prouvençau per esconjurar las melancouliés de ley gens. A Ays, aquo de Jean Roise, à la plaço deys Prescheurs, 1654, contenant Leys amours de Jobi, et de Madameysello Jano, Lou couguou voulountari a sa moüiller et Leys hounours de Couguëlon bagné dou Poüent-rout et de Tranliasso la bugadiero.
Gaspard Zerbin, La Perlo dey musos et coumedies prouvensalos, Jean Roize, 1655, contenant : Coumedié prouvençalo a sieys persounagis (I), Coumedié prouvençalo a sept persounagis, Coumedié prouvençalo a cinq persounagis, Coumedié prouvençalo a sieys persounagis (II), Coumedié prouvençalo a sieys persounagis (III), Coumedié prouvençalo a huech persounagis.
Montpellier
Isaac Despuech-Sage, Les folies du sieur Le Sage, Montpellier, Jean Pech, 1636 et Las foulies dau Sage de Mounpelie, 1650, contenant Dialogue d’un fol et d’un sage, La preso d’au couguieu au bresc, La mort de l’Esperounat, Dialoguo de dos paysandos sur l’intrado de Madamo de Montmorancy, Dialogue des nimphes. Representé devant Monseigneur le Marechal de Schomberg, à son entrée à Montpelier.
Toulouse
Garros, Jean de, Pastourade gascoue sur la mort deu magnific e pouderous Anric quart deu nom rey de France e de Navarre, Jean Boude, 1611.
Clarac, Arlequin gascou, ou Grapignan, Jean Boudo, 1685.
Agen
Cortète de Prades, François, Ramounet, T. Gayau, 1684.
Cortète de Prades, François, La Miramondo, T. Gayau, 1685.
Sarlat
Rousset, Grizoulet, lou joloux otropat, et los omours de Floridor et Olimpo, J. Coulombet, 1694.
Paris
Rempnoux, François, Les amours de Colin et Alyson, 1641.
Dialogué de trei bargié Perigourdi, nomna Françey, Guillaumé & Frontou […],Le Mercure galant, 1682, p. 54-63.
Si l’on comptait un peu moins de vingt-cinq titres pour l’édition théâtrale en français, le chiffre s’élève à plus de cinquante pour la production en occitan. Et c’est sans compter la part, très importante, de pièces restées manuscrites. Car le théâtre occitan n’accède pas systématiquement à l’imprimé, et lorsqu’il est publié, il ne l’est pas toujours du vivant de ses auteurs. C’est ainsi que le théâtre de l’agenais Cortète de Prades, composé dans les années 1630-1650, ne paraît que vingt ans après sa mort5, et en partie seulement, puisque sa troisième pièce, Sancho Pança al palais dels Ducs est demeurée manuscrite. Plus surprenant, certains auteurs qui bâtissent une véritable œuvre théâtrale, ne publient aucune de leurs pièces. C’est le cas notamment du « bourgeois de Tarascon » Seguin, auteur de six comédies dont l’une est datée de 1646, du montpelliérain Roudil, contemporain de Despuech-Sage et auteur d’une œuvre comparable, par les genres pratiqués autant que par la période où elle a été composée, à celle de son compatriote, ou encore de l’auteur aixois Jean de Cabanes, actif à l’extrême fin du siècle, considéré par ses contemporains comme l’un des plus importants auteurs d’expression occitane, et qui ne publie ni ses textes narratifs ni ses cinq textes dramatiques. Mais, comme le rappelle encore Henri Michel, « il faut des conditions exceptionnelles pour que des œuvres en occitan soient imprimées en Bas-Languedoc à cette époque : celles nées des encouragements d’un milieu, soit convaincu de la qualité de l’un des leurs, soit conscient de la nécessité de défendre des créations anciennes menacées6 ». Ce constat peut assurément être élargi à l’ensemble du territoire. Il est particulièrement remarquable, en effet, qu’une majorité des œuvres s’inscrivent dans des ensembles, attachés à un nom d’auteur (Claude Brueys, dont les œuvres sont réunies à Aix en 1628 dans un recueil intitulé Jardin dey musos provençalos ou Gaspard Zerbin, dont La Perlo dey musos e coumedies prouvensalos, paraît également à Aix 1654) et/ou à une tradition théâtrale ou festive ancienne et très ancrée localement, ce que sont tout à la fois la tradition carnavalesque aixoise dont relèvent les deux œuvres précédentes et les fêtes des Caritats, cadre dans lequel sont représentées, le jeudi de l’Ascension, les pièces du Théâtre de Béziers. Les publications aixoises, et surtout la première d’entre elles, le recueil de Brueys, ont sans doute un effet d’entraînement, qui explique la parution, également chez l’éditeur Estienne David, d’autres pièces sous le titre du Jardin deys musos, mais aussi celle d’un recueil de pièces rassemblées par Jean Roize sous le titre évocateur du Coucho-lagno [Chasse-chagrin] Prouvençau per esconjurar las melancouliés de ley gens. Dans le cas de Brueys ainsi que du Théâtre de Béziers, ce sont, assurément, « les encouragements d’un milieu » ainsi que la volonté d’un imprimeur-libraire de « défendre des créations anciennes menacées » autant que de faire un coup éditorial et de se faire une place dans le champ qui expliquent l’accès à l’imprimé. Dans l’avis « Au Lecteur » du Jardin deys musos provensalos, Brueys explique : « La prière de quelques-uns de mes amis a tiré cet ouvrage de la poussière, où il était depuis vingt-cinq ou trente ans, que la fougue de la jeunesse me donnait du temps, et l’humeur pour m’y appliquer7 ». Dans le premier recueil du Théâtre de Béziers, le texte des huit pièces est précédé d’un important paratexte où l’imprimeur-libraire Jean Martel justifie son projet éditorial par le désir de rendre éternel le nom de la ville de Béziers et de sauver de l’oubli ses traditions, geste qu’il reproduira en 1644 en tête du second recueil collectif.
Quels sont, dès lors, les traits caractéristiques de ce théâtre imprimé ? En partie anonyme (sur les vingt-quatre pièces du Théâtre de Béziers, cinq seulement sont pourvues de noms d’auteurs et deux des recueils aixois rassemblent des œuvres anonymes), ce théâtre est très souvent lié à des circonstances particulières, lesquelles se regroupent en deux grandes catégories qui peuvent communiquer : la production carnavalesque et plus généralement festive, représentée essentiellement par les recueils aixois, qui font apparaître le personnage emblématique de Caramentrant, et le Théâtre de Béziers, joué pendant les Caritats et dans lequel s’invitent, ponctuellement, les figures tutélaires de Pepesuc et du Camel (chameau) ; les vers de ballets ou les pièces composées à l’occasion de l’entrée de grands, telle que celle du maréchal de Schomberg à Montpellier en 1632, pour laquelle Isaac Despuech-Sage compose un dialogue bilingue, sur le modèle de celui, trilingue, de Du Bartas, composé en 1579 pour l’entrée de Marguerite de Navarre à Nérac. Bien sûr, une partie de la production occitane échappe à cette typologie et semble émaner de gestes plus individuels, sans liens avec des sollicitations ou cadres extérieurs.