SACHA
Parmi les pas, nous finirons notre entretien
Sur des larmes idéales… Ne disputez
Pas! Non!.. Mais comme la sensibilité
Est le sujet le plus grave, je veux bien
Vous persuader si vous n’êtes pas d’accord…
Il y a dans le “Werther” un demi-chapitre encore…
Rjevski disparaît dans la foule.
Mon lieutenant! C’est peu poli de me quitter
(Elle rit aux éclats.)
Comme ça au bal… Ma comédie est bien jouée.
Dans une minute, je vais me déguiser
Pour reconstruire notre amitié!
(Elle s’en va.)
Les invités passent par paires. On entend des exclamations:
– Quel bal! Un vrai bal de gala!..
– Aimez-vous les pistaches, Michelle?..
– Le gouverneur? Il n’est pas là?
– Mais ces allures n’y sont pas belles…
– Mon pauvre cœur est tout en feu.
Eteignez-le par un baiser!
– Qui est ce hussard malheureux?
– Armide, vous m’avez enlevé
Pour toute la vie!..
– Allons valser!..
– Ma chère, sois ma destinée!..
– Les frasques d’Amour sont si cruelles…
– Où est Sacha, Zizie, ma belle?..
– Monsieur Toussaint nous enseignait…
– La valse commence, viens!..
– Avancez!
La valse commence. Les invités qui ne dansent pas, se pressent près de la porte qui s’ouvre sur la salle. Rjevski arrive. Sacha, dégisée en uniforme de cornette, vient à sa rencontre. Elle
porte un loup noir.
RJEVSKI
Cornette, vous êtes venu! Où êtes-vous fourré?..
Je vous cherchais… Que je m’ennuie, mon Dieu!
SACHA
Je suis tout prêt à votre service, monsieur…
Pourtant, au bal, peut-on s’ennuyer?
Il me faut reprocher à ma cousine
Qu’elle vous a si mal amusé.
RJEVSKI
Oh, j’ai déjà souffert d’elle, c’est assez!
Je n’oublierai pas ce jour… sa grise mine,
Sa voix minaudière et ses sottes idées!..
SACHA
Alors, vous ne voulez plus vous marier?
RJEVSKI
Si j’avais pu! Mais cette parole, je l’ai donnée
À l’oncle. C’est mon devoir et je dois le faire.
SACHA
Monsieur, vous ne devez pas vous décourager
Au bal. Allons danser!..
RJEVSKI
Non, je prendrais un verre,
Avec toi, de fraternité … Du bon Clicquot
Est là…
SACHA
Votre offre m’est si flatteuse, même trop,
Mais nos grades se diffèrent…
RJEVSKI
Allons donc! Quelles sornettes!
L’égalité règne avec les éperons, cornette!
Sacha et Rjevski vont au buffet. Le bal bat son plein. Azarov et Nourine passent.
AZAROV
…Elle est enfant encore, je pense…
Je l’ai élevée dès son enfance.
Maintenant je voudrais la marier…
NOURINE
Pourquoi le choix est si bizarre?
Un homme plus noble l’épouserait.
Et vous seriez plus content, car
Ce gentilhomme est si grossier
Qu’il ait failli me déchirer!
AZAROV
Mais j’ai été hussard, mon cher,
De Souvorov… De toute façon,
L’humeur est faite par les éperons…
Ils seront un beau couple, j’espère.
Croyez-moi…
NOURINE
Je voudrais toujours…
C’est un petit malade, l’amour.
Rjevski et Sacha reviennent du buffet. Rjevski est entre deux vins. On entend les sons de la mazurka.
RJEVSKI
Tu bois très peu, pas comme un vrai hussard…
À Tsarskoïe, tiens, j’ai eu une histoire:
Au régiment, je parie boire un seau…
Tu ne crois pas?..
SACHA
Par contre! Si, c’est beau:
Je me délecte de vos paroles… eh bien?
RJEVSKI
Ah! Tu as oublié! On se tutoie!..
SACHA
Pardonne-moi…
RJEVSKI
Sous ces vapeurs de vin
Je dois voir les gardes et je n’y manque pas.
Je marche, chancelle et c'est déjà la nuit,
Soudain, je vois devant moi… mais c’est qui?
Tu imagines?…
SACHA
J’ai peine à deviner…
L’empereur…
RJEVSKI
Non!..
SACHA
Belzébuth, si tu préfères?
RJEVSKI, il rit aux éclats.
La paire qu’ils font! Vraiment, sans en parler…
Mille diables! Une grande peur m’envahit, me serre
La vis. Mais moi, je ne suis pas brebis,
Tu dois me croire, cornette!..
SACHA
Mon Dieu! Mais qui?
RJEVSKI
Je suis si pétrifié, saisi d’effroi…
Celui que j’y rencontre, c’est bien moi!
SACHA
Est-ce vrai?!..
RJEVSKI
Ma foi! La veste déboutonnée,
La chemise en taches de vin! Tout est crotté!
Rouge comme une bette, sur la tête, un toupet!
L’odeur d’alcool va à cent mètres se répandre…
Je ne supporte pas une telle saleté,
Je l’arrête et l’amène au corps de garde.
Après je vois les gardes et je reviens là où
On a bu… La maison est sens dessus dessous,
Vraiment, je ne me souviens plus de rien.
Mais le matin, je me réveille, c’est où?..
Au corps de gardes! Et je ne suis pas fou
Tellement de l’inventer pour ma gloire, tiens!
SACHA
Je vous crois…
RJEVSKI
Te crois, tu as oublié…
Maintenant, c’est la fin de ma destinée!
Tu lui en as parlé de plus, peut-être?
SACHA
À qui?..
RJEVSKI
À ta cousine, parbleu!
Si j’y pense, j’ai mal à la tête!
SACHA
Oui… Comme un serpent astucieux,
J’arrache l’impression, coûte que coûte,
Qu’elle a eue du futur fiancé.
RJEVSKI
Elle est très amoureuse, à perdre la tête, sans doute!
Des minauderies et de petits rires étouffés!
SACHA
Du tout! Vous n’avez pas réussi à lui plaire.
Une pause.
RJEVSKI
Quoi?..
SACHA
Elle a dit que vous aviez eu beau lui faire
Des compliments, ils étaient superflus…
RJEVSKI
J’ai … beau?..
SACHA
Elle a dit qu’elle n’avait pas vu
Un homme plus insolent pendant sa vie,
Que vos moustaches ressemblaient à la tille,
Je vous demande pardon…
RJEVSKI
Comment a-t-elle osé?
Mais moi! Moi…
SACHA
Que des façons de vous comporter,
On voyait l’habitude aux chevaux…
RJEVSKI
Mais je ne rends
Pas une seule jument pour cent telles demoiselles…
SACHA
Et que parmi les personnes qu’elle connaît bien, elle
N’avait pas vu, pardon, un mufle plus dégoûtant…
RJEVSKI
Quoi? Trois mille diables!..
(Soulagé brusquement.)
Alors, donc, c’est mieux, ça, peut-être.
Pas de mariage, si elle est si indifférente.
SACHA
Du tout… Encore, elle a dit qu’à son maître,
Son oncle, elle est toujours obéissante
Que s’il ordonne, elle épousera une bête, que faire?
Que même des ours peuvent être bien dressés…
RJEVSKI
Assez!
(Il marche en rage. Ensuite, il s’approche de Sacha.)
Je te crois, tu es pour moi comme un frère
Tu m’es l’ami parmi les gens, donc, le premier.
Comment puis-je me sauver la vie, dis?
SACHA
Vous devez
Lui dire tout franchement. Vous voulez que je l’appelle?
RJEVSKI
Aux tempes, de la rage, mes veines sont gonflées,
J’ai peur de décharger ma rage sur elle …
(Il marche en rage.)
SACHA, à part.
Je me déguise vite pour finir la facétie.
(à Rjevski.)
Appeler?
RJEVSKI
Je ne sais pas. Attends, non, je t’en prie…
(Il embrasse Sacha.)
Tu m’es devenu cher, comme un frère, cornette.
Prenons du vin, bien que tu n’en boives guère…
Il y a du bruit près de l’entrée. Les invités se pressent à la porte. On entend des exclamations.
–
Le gouverneur est venu à la fête
Avec une grave nouvelle!..
– Est-ce vrai, la guerre?
– On ne crois pas le malheur, il est là.
– On a vu à Moscou en hiver une comète.
Le gouverneur apparaît à la porte. Une pause.
LE GOUVERNEUR
Messieurs! Faites attention, écoutez-moi!
Vers le soir, j’ai reçu une estafette
De notre armée… Le treize juin, les armées
Françaises ont fait le forçage du Niémen
L’heure de l’épreuve s’est approchée…
La Patrie est en danger… Le ciel nous amène
Vers la délivrance par le chemin glorieux,
Les Russes rencontreront les ennemis odieux…
AZAROV
Contre l’ennemi, on se met en défense.
La Russie est riche en courage et en vaillance,
Tirons le glaive, c’est l’heure, on n’attend pas…
Vive la Patrie…
TOUS
Hourra! Hourra!!!
LE GOUVERNEUR
J’espère qu’on accomplit le devoir honnêtement,
Je prie les officiers d’aller aux régiments…
RJEVSKI
Parfait!
LE GOUVERNEUR
Nous rencontrerons dignement l’heure austère.
Et arrêtez le bal! Je vous en prie…
(à Azarov.)
Pardon, mon cher ami…
AZAROV
Oui, rien à faire!
RJEVSKI, il tire son sabre.
On est prêt à mourir pour la Patrie!
Il n’y a pas de sort plus heureux que ça:
C’est la mort pour notre Patrie!
(à Sacha.)
N’est-ce pas?
SACHA
Oui… Donc… Oui!
Les invités quittent la maison. Rjevski s’approche d’Azarov. Sacha le surveille, cachée dans
un coin derrière les colonnes où les autres invités ne la remarquent pas.
Il partira sans savoir!,,
LES EXCLAMATIONS DES INVITÉS
–
Quel
incident
!..
–
Mais c’est plus tard,
Monsieur le comte, qu’à Paris, vous
Irez…
–
Que peut-on en penser?
Ils vont nous faire un pied de nez!
– La guerre! Mais c’est la peste partout…
– Ma chère, je le sentais toujours, …
– Ils n’aurons pas Moscou tout court…
– On rentre au village mercredi…
RJEVSKI
J’irai au régiment cette nuit,
Je me retire, hélas! J’ai håte…
AZAROV
Le sort n’a pas voulu… Écris!
Rjevski et Azarov s’embrassent. Puis Rjevski s’approche de Sacha.
RJEVSKI
Cornette, on se retrouvera si,
Avant que la victoire n’éclate,
On ne nous tue pas à la guerre…
SACHA
À ma cousine, voulez-vous faire
Vos adieux?.. Je vais l’appeler… Oui?
(À part.)
Je ne veux pas qu’il quitte ainsi
Notre maison…
RJEVSKI
Non, ne l’appelle
Pas, car je ne suis pas digne d’elle.
Dis que je voudrais la saluer…
Tu me permets de t’embrasser…
Il embrasse Sacha avant qu’elle n’ait le temps de se raviser, et il s’en va en faisant son sabre cliqueter. Sacha le suit du regard d’un air impuissant après avoir ôté son masque. Puis elle
sort de son abri derrière les colonnes et se heurte à Nourine.
NOURINE
Pardon!
(Il la reconnaît, ravi de son déguisement.)
Sacha est entourée d’invités qui ne sont pas encore partis, ses cousines parmi eux.
Parfaite, votre tenue!
Et dans l’esprit du temps!
ZIZIE
Bien…
PAULINE
Tu
Es belle!
NADINE
Tu es jolie! C’est beau!
MIMI
Mais où t’es-tu cachée?
SACHA
En haut,
J’y ai été…
ZIZIE
Que je regrette…
NADINE
Tu es très lasse après cette fête?
Les cousines chuchotent ayant entouré Sacha. Les autres invités se pressent autour de
Nourine.
LE SECOND INVITÉ
Les voies sont déjà occupées
De charrois…
NOURINE
Je me retire!
LE PREMIER INVITÉ
Eh,
Monsieur le comte, soyez prudent:
Votre français…
LE SECOND INVITÉ
Pour le moment:
On fait alors la guerre, donc, non?
NOURINE
Peut-être, on fera d’autre façon:
On signera un nouveau traité…
LE PREMIER INVITÉ
De Tilsit13? C’est bête d’en parler!
LE SECOND INVITÉ
Comment pourrons-nous résister!..
NOURINE
On va voir…
(Il s’en va.)
Les autres invités le suivent. Les cousines disent au revoir à Sacha.
NADINE
On a décidé,
Sacha, de faire de la charpie…
ZIZIE
Demain…
MIMI
Pour les infirmeries!
La salle est vide. Le petit laquais vêtu en cosaque éteint le lustre et les bougies. Dehors, il fait une nuit étouffant de juillet. Sacha est assise dans un grand fauteuil.
SACHA
Comment dit-il? “Il n’y a pas de sort plus heureux
Que la mort pour notre Patrie”… Comme ça?
(Une pause.)
Si tout était comme je le veux,
Je voudrais mourir au combat,
Serrant dans la main la poignée
Du sabre ou la lance du drapeau…
(Une pause.)
Facile pour lui de le dire! Il me faut,
À moi… seulement rêver et regretter
De ne pas être homme… Oh, si je l’étais!..
Ivan entre, une bougie à la main. .
IVAN
Pouah!.. Qui s’est endormi là? C’est…
Un officier!.. Des invités… Monsieur, je dis…
Il a trop bu… Il faut qu’il se réveille…
Réveillez-vous… Le fauteuil n’est pas lit…
(Il s’approche et reconnaît Sacha.)
Mademoiselle! Voilà une belle merveille!
Un vrai hussard! Et la tenue parfaite!
Avec un cheval, un sabre au clair, vous êtes
Gaillard!.. Directement au défilé,
Vous partiriez et je vous suivrais,
Bien que, dans ma jeunesse, j’aie trop servi.
(Il remet les meubles en ordre.)
Allez dormir! Tous sont déjà partis!
SACHA
Attends, attends! Vas-tu servir encore,
Si je suis homme et je te le propose?
IVAN
Bien que je sois déjà vieux, je suis fort.
Et comme j’avais vu dresser cette grave cause
De protéger la Patrie en danger,
J’ai décidé de demander au maître
La permission de partir pour l’armée.
Soyez sûre que je ne pourrai pas être
Le dernier au combat…
SACHA
Et moi?
(Une pause.)
Je suis hussard! Je ne ris pas…
Tu me regardes? De quoi suis-je pire?
Je tire bien, tu me l’as appris …
Tu dis qu’avec un cheval je suis
Hussard! Va, selle-le! Rien à dire?
J’ai décidé… Je ne change pas…
IVAN
Ah… vous vous êtes moquée de moi?
SACHA
Du tout… Mais si tu ne veux pas
M’aider et puis m’accompagner,
Dans deux jours, je vais m’évader.
C’est ça…
IVAN
Au maître, je n’oserais pas…
C’est une polisonnerie! Mon Dieu!.
Je tremble… Qu’une demoiselle… Je veux
Lui dire tout… Qu’il vous garde bien…
SACHA
Aucun discours ne me retient!
La porte fermée, je m’échapperai!..
Quand les Russes ont une seule idée –
Comment sauver notre Patrie…
Comme mes poupées, je reste ici…
Je veux me connaître au combat!…
Si l’on me tue, ça sera toi
Qui es coupable, comme tu ne veux
Pas me suivre à cheval – tu es vieux
De me défendre comme toujours
De froid, chaleur, de maux des tours
De la campagne…
IVAN
A-t-on jamais vu ça?..
Si l’on vous reconnaît…
SACHA
Mon vieux, personne
Ne sait… Donc, suis-je seule qui vous abandonne
Et parte?
IVAN
Dieu aide les courageux! Ça va!
Mais votre oncle? Il perdra la tête, si l’on
Ne vous trouve pas demain matin ici!
Une fille à la guerre! Au lieu d’un mari!
SACHA
Après, je vais écrire, si nous partons…
Tu restes ici? Pourquoi? Pour qu’on me garde,
Va dire à l’oncle qu’on ferme tout à clef!
Je saute par la fenêtre…
(Elle ouvre la fenêtre toute grande.)
Quel silence! Regarde
Cette nuit!..
IVAN
Ma foi! Mais vous me pardonnez,
Si je suis assez bête pour refuser…
À votre service!..
(À part.)
Quelle fille! C’est bien trouvé!..
SACHA
Partons cette nuit, quand tous vont se coucher
Pour qu’on ne se mette pas à nous chercher…
Selle deux chevaux… Prends des fioles, des pistolets,
Tu le sais mieux… Éteins les feux, après,
Va aux étables… Je t’attendrai ici,
Ne lambine pas…
IVAN
Je fais tout sans tromperie.
(Il tourne pour s’en aller mais s’arrête brusquement.)
SACHA
Encore? Quoi?
IVAN
On ne part pas loin du tout
Sans argent, mais je n’ai que petites monnaies…
J’y sers sans vols…
SACHA
Et il en faut beaucoup?
IVAN
On le sait bien!
SACHA
Dommage!
(Elle fronce le sourcil, s’assied mais saute tout de suite.)
Je sais!
(Elle sort le collier de dessous son uniforme.)
Parfait!
Ce collier de la grand-mère servira
Bien – on va le vendre… N’aie pas la frousse! Va!..
IVAN
Votre oncle a un manteau dans sa chambre qui
Vous est utile… Et si vous le prenez…
SACHA
Il se réveille. Son sommeil est léger.
Il va parler, pleurer, persuader, puis!…
IVAN
Sans un manteau, c’est peu commode, pour vous…
SACHA
C’est mieux, si plus tard, on va acheter tout…
Je t’attendrai ici dans une heure! Va!
IVAN
De gråce! Sauve-nous, Saint Nicolas!
(Il part.)
Sacha, très émue, va et vient dans la salle. Elle s’arrête devant la fenêtre et regarde dans le jardin. Il n’y a pas de bruit. On entend de tout près l’antique sonnerie mélodique d’une
pendule.
SACHA
Adieu, ma vieille maison! Peut-être à tout jamais!..
Où, sans souci, mes jeunes années passaient…
Petite, j’y ai fait des gamineries
Et j’y ai joué… Soudain, j’y ai grandi…
Adieu, ma bonne maison, adieu, ma chère,
Où j’ai connu pour toute ma vie chaque pierre
Comme des pleurs et des passes-temps enfantins,
Comme un rêve vague d’une gloire qui n’arrive point…
Adieu, mes si chers coins de chez-moi merveilleux,
Mes murs, fenêtres et hauts plafonds, adieu,
Adieu, mes ais toujours grogneurs…
Je ne savais pas que le cœur
Pourrait si battre en vous quittant!.. Ma maison, dis,
Si je pourrai te revoir puis?
Mais il se peut que je ne te revoie jamais…
Suis-je låche?.. N’importe – je m’en vais!
Oui, mes chères portes, vous me chantiez
Le même chant…
(Une pause.)
Ah!.. C’est quoi? J’ai déliré…
Pas de bruit. On entend une souris grater. Sacha tape du pied pour lui faire peur et cette secousse fait tomber quelque chose de derrière l’armoire. Sacha se baisse et prend avec
précaution cet objet. C’est une grande poupée.
Adieu, mademoiselle décente! C’est toi
Qui vas t’ennuyer sage devant ma broderie
Dans une robe longue et une fanchon de soie…
Prends mes ennuis! Vis mon destin ici!
Tu fermes les yeux, tu dors, Claire, mon amour,
Tu as été trop matinale ce jour.
Dors, ma pauvrette! Et je vais te chanter
Très doucement ta berceuse préférée…
(Elle couche la poupée comme un bébé et chante très bas.)
La pleine lune éclaire
Les clairières. La nuit
Est claire. Dors, ma Claire,
Dors, comme j’ai dormi.
Dans l’oreiller, cache
Ton nez. Les étoiles
Luisent comme des taches
De rousseur, très pâles.
Le jardin murmure
Par des feuilles. Le jour
Naît. Je ne suis sûre
De rien pour mon tour.
Elle va s’éteindre
Enfin, la bougie.
Dors, Claire, rien à craindre,
Elle est claire, la nuit…
Dans la salle voisine, on entend des pas. Sacha prête l’oreille.
Des pas!.. De l’oncle, comme j’entends…
Azarov entre, en robe de chambre et bonnet de nuit, la bougie à la main.
AZAROV
Va te coucher, ma chère, n’attends
Pas de passer la nuit comme ça…
Tu es lasse…
SACHA
Je ne la suis pas.
AZAROV
Madame joue aux poupées, c’est bien,
Comme une fillette… Mais dans une heure,
Tu auras dix-sept ans!.. Tu pleures?
SACHA
J’ai quelque chose dans l’œil, c’est rien…
AZAROV
Que je suis las, moi, je vieillis…
Dieu va m’appeler… Et un mari
Te soutiendrait… Mais c’est la guerre
Qui est comme un nuage noir, pourtant,
J’espère qu’elle passe vite sans tonnerre…
Va te coucher,,, Dors sans tourments,
Sans graves pensées jusqu’au matin;
Nous parlerons de tout demain…
Tu vas dire si tes rêves sont beaux…
SACHA
Et vous, voulez-vous de nouveau
Vous battre à la guerre?
AZAROV
C’est fini
Pour moi! Et la nature nous dit
Que tout a sa fin… Tôt ou tard…
Dans cet habit tu es gaillard!
Embrasse-moi! Mais c’est quoi?.. Tu pleures?
SACHA
Ce n’est rien…
(Elle tourne vers la fenêtre.)
Quelle odeur des fleurs!
AZAROV
Viens, je vais te bénir… Je n’ai
Pas de fils, Dieu n’a pas donné –
C’est à cause de mes fautes, hélas!
Pourtant, je t’aime comme ma fille. Si
Tu te maries, ne me quitte pas…
Sacha, ferme la fenêtre!
SACHA
Quelle nuit!..
Non, je ne peux pas…
AZAROV
Qu’as-tu dit?
Je ne t’entends pas…
(Une pause.)
Des souris
Y sont… Amène le chat… Tu veux
Rêver près de la fenêtre, c’est mieux…
(Il bredouille en sortant.)
Je regrette le bal arrêté…
SACHA
Mon oncle!..
AZAROV
Quoi? Tu m’as effrayé!
SACHA, elle l’embrasse impétueusement.
Comme ça! Comme ça! Que je vous aime…
J’aime ces pattes d’oie, ces rides et même
Ces plis sur le front, ces fossettes!..
AZAROV
Grand bien te fasse!
(Il bénit Sacha par un signe de croix et sort.)
SACHA, en écoutant ses pas s’éloigner.
Que je suis bête
De le quitter, mais je veux bien
Le laisser seul… Je sais, vraiment,
Qu’il sera triste infiniment…
Je lui rendrai le grand chagrin
Pour mon caprice. Où puis-je aller?..
Je vais dire à Ivan que c’est
Un jeu! Qu’il est tard que je vais
Dormir!.. Que c’est pour rigoler!..
Il n’aura plus de tel souci.
Je m’occuperai de la broderie
Des coussinets pour l’oncle, c’est ça.
Aller à cheval, la nuit? Pourquoi?
J’irai dans ma chambre et là-haut,
J’oublierai tout et tous… En gros,
Comme toutes mes aïeules, je vivrai…
Ivan entre. Il n’est plus vêtu d’une livrée, mais d’un casaquin, son chapeau à la main.
IVAN
Dites-moi que vous vous êtes moquée
Du vieux…
Sacha garde le silence.
Vraiment? Mais je l’ai cru…
Les chevaux sont prêts… Un imbécile!..
En campagne! Vous et moi, sans plus!
J’ai pris des armes… C’est inutile…
Idiot!..
SACHA
Alors, les chevaux sont prêts?
IVAN
Oui, par bêtise…
SACHA
Donc…
IVAN
Je l’ai fait.
Je suis plus sot qu’une poule. Riez!
Si j’en parle, personne ne croira.
Le grand åge est un grave péché!..
Sacha garde le silence.
Bonne nuit! Je ferme tout, ça va…
La nuit est belle… Quel paradis!
Il fait calme. Il faut être au lit.
Allez… Votre oncle dort déjà…
(Il rit.)
Et moi, je rêve tout éveillé…
Sacha garde le silence.
Je desselle?
SACHA
Non!..
IVAN
On ne rit pas?
Alors…
SACHA
Oui… Va!.. Je te suivrai.
Ivan recule devant elle, puis il met son chapeau et sort vite. Sacha reste immobile. Pas de
bruit. La pendule sonne.
(Elle va vers la porte mais s’arrête de nouveau.)
Je laisse là mon enfance, derrière
Cette porte… Ma chérie, adieu!..
(Elle reste silencieuse encore un instant.)
Oh, la nuit! Cache-moi de ton bleu
Comme d’un manteau en route à faire!..
(Elle sort précipitamment.)
Le silence profond règne dans la maison, on entend une souris grater. Puis les sabots des
chevaux résonnent fréquemment. Le rideau tombe.
ACTE DEUXIÈME
C’est un bivouac des partisans dans une maison de propriété abandonnée: une grande salle à deux rangées de fenêtres, avec des plafonds en moulures, un immense lustre doré, des fenêtres à l’italienne, derrière lesquelles on voit l’obscurité du soir d'octobre. Il n’y a pas de meubles dans la salle, on les a remplacés par des paquets de paille, des sacs d’avoine, des caparaçons jetés en tas. Au milieu de la salle, il y a un foyer en briques improvisé avec du feu là-dedans. Sur le feu, il y a une gamelle avec de la bouillie. Les officiers du détachement de partisans de Davide Vassiliev passent leurs rares loisirs. Véliaminov, allongé sur les sacs d'avoine, se tourne et se retourne, essayant en vain de s'endormir. Stankévitch écrit quelque chose, ayant mis un cahier relié en cuir sur ses genoux. Rtichtchev nettoie le pistolet. Goritch accorde une guitare. Voronetz veille à la gamelle, remuant de temps en temps la bouillie. Pélymov, ayant étalé sur le sol, son nécessaire de voyage, nettoie les ongles. Sur les uniformes, certains officiers ont des touloupes14 et des douillettes. D'autres ont les uniformes froissés, déchirés dont le drap élégant est dans la paille et le foin. Rtichtchev a l'œil droit bandé. Stankévitch a la main gauche bandée. Seulement Pélymov se distingue parmi tous par un uniforme brillant, propre, flambant neuf. Quelqu'un d'autre, couvert de caparaçons, dort au premier plan. La porte s’ouvre, Khilkov entre. À ce moment, un ronflement puissant retentit
sous le caparaçon.
KHILKOV
Un orage? En octobre? Ou des canons?
STANKÉVITCH
Celui qui ronfle comme un escadron
Est Dimitri qui vient de se coucher…
RTICHTCHEV
Quel est le mois de la guerre à mener?
VORONETZ
C’est le cinquième…
RTICHTCHEV
Oh, si l’hiver venait
Plus vite, jusqu’au mars, on pourrait tout faire,
Le prendre de deux côtés…
KHILKOV
Il n’échapperait
Pas, ce Napoléon, de notre hiver
Si vite…
VORONETZ
Du moins, ses affaires ne sont pas
Trop bonnes, s’il a abandonné Moscou…
RTICHTCHEV
Au retour à Smolensk, il passe partout
Par des villages pillés… Il ne sait pas
Où prendre du fourrage…
VORONETZ
Davide nous dit
Que la Fortune lui a tourné le dos…
KHILKOV
Sa vue du derrière n’est pas très jolie!
VORONETZ
Il va sentir le sapin, à propos…
Ohé, Rtichtchev, tu as, certes, du tabac?
GORITCH
Le ciel est étoilé! Il fera froid…
RTICHTCHEV
Tiens!..
KHILKOV
Pélymov! Mais, qu’est-ce que tu fais là?
Il vernit ses ongles et il les nettoie!
RTICHTCHEV
C’est pas la peine!..
KHILKOV
Il est de Göttingen15,
Et sa tenue est tellement élégante!
PÉLYMOV
Quand je regarde vos figures malsaines,
Je peux comprendre que si le vieux Dante
Avait fait les modèles d’enfer de vous,
Dans son œuvre, le vrai aurait gagné tout!
KHILKOV
La propreté à la guerre? Quelle idée!
RTICHTCHEV
Depuis trente jours, je ne suis pas rasé
Et ça fera encore quarante, pourvu
Que la poudre soit sèche, que mon cheval n’ait plus
Faim. Dans l’armée, on l’apprend simplement…
VÉLIAMINOV
Je ne m’endors pas! Diable!
KHILKOV
Compte jusqu’à cent!
STANKÉVITCH, à Khilkov.
J’ai entendu que juste avant la guerre,
Pélymov avait eu l’amour tragique.
Mais sans doute, son sort a été sévère,
C’est pourquoi il est comme fou héroïque.
KHILKOV
Dans l’escarmouche, aux balles, il tend son front
Et il nettoie ses ongles une heure après.
“Pourquoi vivons-nous?” – lui ai-je demandé.
“Selon l’habitude…” C'est ce qu'il me répond.
RTICHTCHEV
Donc, la bouillie est prête?
VÉLIAMINOV
Paul, remue-la!
KHILKOV
Écoute, j’ai le cœur gros mais ce n’est pas
À cause de la bouillie… Mais si…
VÉLIAMINOV
Tais-toi!
L’accord? Tu l’oublies?..
RTICHTCHEV
On a lu, n’est-ce pas,
Ce livre de Genlis? Tout le monde? Messieurs,
Vous permettez que j’en arrache une feuille?
VORONETZ
Pourquoi?
RTICHTCHEV
Il est humide, donc, mon tabac.
Je le sécherai…
KHILKOV
Le livre, laisse-le là,
Arsène, prends les poèmes de Théodore.
On rit aux éclats.
STANKÉVITCH
Vous riez comme des ânes!
KHILKOV
Mais je les ai lus:
Amours, ruisseaux, bergers! Et lyres encore!…
On rit aux éclats.
STANKÉVITCH
Mon cher monsieur, n'avez-vous jamais su
Que lire sans permission les papiers d’autrui
Est une action qui sent de l’espionnage?
KHILKOV
Attends, Théo, ne te fâche pas! L’ennui
Me fait bâiller terriblement, mon ange.
Je ne comprends rien dans la poésie.
C’est ridicule: la guerre et les bergères…
On rit aux éclats.
STANKÉVITCH
Donc, des canons, dois-je composer des vers?
Ou des héros comme toi? Dis!
GORITCH
On en rit!
VÉLIAMINOV
Mes gars, laissez, donc, vos querelles enfin,
J’en ai assez!… Pourtant, ça serait bien,
Si tu chantes, Goritch!
GORITCH
Attends que j’accorde…
KHILKOV
J’aime Théodore, il est un brave garçon…
STANKÉVITCH
Laisse-moi! …
KHILKOV
Surtout quand il est en désordre,
Quand il se fâche…
GORITCH
Dites quelle est cette chanson
Que je vous chante?
VÉLIAMINOV
Celle que tu veux!
GORITCH
Vraiment,
Ça m’est égal.
VORONETZ
Chante, donc, “Il y a beau temps”.
Goritch fait son solo en l’accompagnant avec sa guitare. Les autres reprennent le refrain en
chœur.
GORITCH
Quand mes amis sont en tristesse
Et leurs åmes sont pleines d’ombre noire pour le moment,
Je chante une chanson sans paresse…
TOUS
Il y a beau temps,
Il y a beau temps,
Il y a beau temps!
GORITCH
Il y a très loin une maisonnette
Avec de petites fenêtres. Elle nous est chère… Pourtant,
Personne ne nous attend aux fêtes…
TOUS
Il y a beau temps,
Il y a beau temps,
Il y a beau temps!
GORITCH
Ne pense pas au bonheur qui passe!
On ne fait pas revenir le passé au présent,
Une autre passion nous le remplace…
TOUS
Il y a beau temps,
Il y a beau temps,
Il y a beau temps!
GORITCH
Par une longue route, la vie nous mène,
Rire ou pleurer – ça nous est égal maintenant,
Quand on chante une chanson ancienne…
TOUS
Il y a beau temps,
Il y a beau temps,
Il y a beau temps!
Un kosaque barbu et Sacha Azarov apparaissent sur le seuil. Elle est en uniforme de
cornette et en manteau.
KOSAQUE
Retenu près du bois…
SACHA
De l’état-major,
Avec une estafette…
VÉLIAMINOV
Ça va.
Le cosaque se retire.
C’est quoi?
SACHA
Comme je suis aide de camp…
VÉLIAMINOV
Oui, je le vois.
SACHA, elle sort une lettre cachetée.
À qui remettre cette lettre alors?
VÉLIAMINOV
Le chef est allé en reconnaissance…
SACHA
Son aide? Cet ordre, à qui puis-je le remettre?
KHILKOV, il montre du doigt celui qui dort.
À cette relique vivante qui dans l’absence
Du chef… Mon lieutenant, veux-tu te mettre
Debout devant l’officier?
On entend un ronflement fort en réponse.
SACHA
Réveillez!
VÉLIAMINOV
C’est fou!
STANKÉVITCH
Il est ours, si l’on le réveille!
VORONETZ
Tous sont enfants contre lui, s’il est fâché.
RTICHTCHEV
N’osez pas avoir de pensées pareilles…
VÉLIAMINOV
Ils craignent bien sa ferveur, nos ennemis…
KHILKOV
Hier il a dispersé un régiment
D’ennemis… Il a dit, en les attaquant,
De crier à tue-tête “Hourra!”… Ceux-ci
Sont tous tombés: les uns parce qu’ils craignaient,
Les autres – à jamais… Lui va se coucher.
Sacha hésite.
VÉLIAMINOV
Il est très jeune, pourtant!
RTICHTCHEV
Jeune mais roublard!
VORONETZ
Pélymov, comme dans la garde, est-ce un élégant?
STANKÉVITCH
Il est hussard.
VORONETZ
Dans l’état-major? C’est bizarre!
RTICHTCHEV
Juste du berceau et le voilà un aide de camp!
KHILKOV
Mon cher, comment y êtes-vous arrivé?
VORONETZ
Ne le harcèle pas… Ses larmes sont tout près.
Il est boudé…
RTICHTCHEV
Mais il a des manières
D’enfant gâté…
KHILKOV
Il veut faire la carrière!
GORITCH, il chante en regardant Sacha fixement.
Même si les pédants nous répètent,
Vivre pour la seule carrière n’est pas intelligent…
On se fiche de vos aiguillettes…
TOUS
Il y a beau temps,
Il y a beau temps,
Il y a beau temps!
SACHA
Si vous ne voulez pas le réveiller,
Je le ferai moi-même…
(Elle se dirige vers celui qui dort.)
VÉLIAMINOV
Non, non!
RTICHTCHEV
De grâce!
STANKÉVITCH
Demi réveillé, il vous tuera sur place…
VORONETZ
S’il veut dormir, toujours, il est fâché…
GORITCH
Il a passé sur la selle vingt-quatre heures…
VÉLIAMINOV
Il ronfle plus fort qu’un bœuf peut faire ça.
KHIKOV
Ces sons sont délicieux, vraiment, n’est-ce pas?
SACHA
Je tâcherai…
VÉLIAMINOV
Je m’en écarte de peur!
KHILKOV
Et moi, je vais décrire à votre mère
La mort que ce soir, vous allez avoir.
RTICHTCHEV
Cela mérite la scène! Il faut le voir!
Sacha hésite.
KHILKOV
Alors? Allez!
VORONETZ
Avez-vous peur, mon cher?
KHILKOV
On dit qu’on est lâche à l’état-major!
GORITCH
Plus de courage, mon officier! Encore!
SACHA, elle secoue par l’épaule celui qui dort.
Monsieur, réveillez-vous!.. Monsieur!
CELUI QUI DORT, il remue.
Parbleu!
(Il change de côté et ronfle toujours.)
On rit aux éclats.
VÉLIAMINOV
Il vaut mieux laisser ce sport dangereux…
SACHA, elle secoue toujours celui qui dort.
Réveillez-vous!
CELUI QUI DORT
Une diablerie? N’est-ce pas?
On entend un ronflement formidable et les rires de tous.
KHILKOV
Il faut vous promouvoir pour votre exploit.
SACHA, elle secoue avec acharnement celui qui dort.
Réveillez-vous!
Celui qui dort garde toujours le silence.
VÉLIAMINOV
Silence! La bouche cousue!
On rit aux éclats.
KHILKOV
C’est à mourir de rire, je ne peux plus,
Messieurs, comme c’est nuisible à ma santé.
GORITCH
On voit qu’il est en nage, notre officier.
Sacha prend une gamelle avec de l’eau et verse sur celui qui dort. Celui-ci saute tout de suite. Tout le monde recule de peur.
RTICHTCHEV
Quelle mort l’attend?
Celui qui s’est réveillé reste immobile, comme s’il est pris d’une grande colère.
STANKÉVITCH
Il a perdu le don
De la parole à cause d’un grand courroux.
VÉLIAMINOV
Je vous ai prévenu!
CELUI QUI S’EST RÉVEILLÉ
Malédiction!
On reconnaît Rjevski. Il regarde stupidement Sacha sans rien comprendre, en evidence, après le sommeil.
SACHA
Le lieutenant Rjevski?.. Surprise!.. C’est vous!..
Enfin, Rjevski reconnaît le cornette et embrasse Sacha. Tout le monde est étonné.
RJEVSKI
Quel bon vent t’a amené ici, mon cher?
Je ne pense pas te revoir à la guerre.
Je ne reconnais personne, quand je dors.
Tu es venu à la bonne heure ici…
KHILKOV
Ils se connaissent!
SACHA
Cet ordre, celui-ci,
Est de l’état-major…