Kitabı oku: «Manuel de la procédure d'asile et de renvoi», sayfa 12

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Si ces recherches n’aboutissent à aucun résultat, l’art. 8 par. 4 RD III attribue la compétence à l’Etat où la demande d’asile a été déposée, pour autant que cela soit conforme à l’intérêt supérieur de l’enfant. S’il y a plusieurs demandes d’asile, la jurisprudence de la CJUE relative à l’art. 8 par. 4 RD III, en dérogeant presque à l’art. 7 par. 2 RD III, retient la compétence de l’Etat où a été déposée la dernière [138]demande.51 Comme l’arrêt pertinent de la CJUE n’a été rendu qu’après le compromis sur la formulation, la Commission a été chargée de préparer une modification de l’art. 8 par. 4 RD III. Le projet correspondant est prêt et était en discussion au moment de la mise sous presse.52 Le débat porte avant tout sur le point de savoir si l’arrêt de la CJUE va empêcher tout transfert de mineurs non accompagnés et quelles situations de fait sont effectivement concernées. Les dispositions spéciales de procédure pour les requérants mineurs non accompagnés de l’art. 17 al. 2 LAsi s’appliquent aussi dans le cadre de la procédure Dublin.53

2.2.2.2 Membres de la famille

Lorsqu’un requérant d’asile a des membres de sa famille, au sens de l’art. 2 let. g RD III, dans un autre Etat Dublin et que ceux-ci y ont déjà obtenu une protection internationale (qualité de réfugié ou protection subsidiaire), l’Etat en question est compétent, selon l’art. 9 RD III, pour mener la procédure d’asile. Ce motif de compétence est indépendant de la préexistence des liens de famille dans l’Etat de provenance.54 La norme de compétence de l’art. 9 RD III est quelque peu problématique, car la protection subsidiaire au sens de la Directive qualification est inconnue comme telle en droit suisse. C’est pourquoi, il y a lieu soit de déterminer dans le cas d’espèce si l’admission provisoire correspond à la protection subsidiaire soit, pour certains types d’admissions provisoires, si l’on peut admettre qu’il s’agit de cas assimilables à une telle protection.55

Selon l’art. 10 RD III, l’Etat compétent pour mener la procédure d’asile est celui où séjournent des membres de la famille requérants d’asile lorsque leur procédure est pendante en première instance. La compétence prévue par les art. 9 et 10 RD III n’est applicable que si les intéressés en ont exprimé le souhait par écrit. Ceux-ci doivent être informés en conséquence (voir art. 4 RD III).

L’art. 11 RD III concerne la situation spéciale où plusieurs membres de la famille déposent une demande d’asile dans un délai suffisamment rapproché pour que les demandes puissent être examinées ensemble.56 Dans ce cas, l’Etat responsable est [139]celui qui est compétent pour le nombre le plus élevé de membres de la famille. En cas d’égalité, c’est celui où réside le membre de la famille le plus âgé.

2.2.2.3 Titre de séjour et visa

Selon l’art. 12 par. 1 RD III, l’Etat qui a délivré un titre de séjour au sens de l’art. 2 let. l RD III est responsable de l’examen de la demande d’asile pour autant que la personne n’ait pas quitté le territoire des Etats membres dans l’intervalle. Si les autorités suisses établissent un tel titre de séjour après le dépôt d’une demande d’asile, la Suisse devient l’Etat compétent selon l’art. 19 par. 1 RD III. Selon la volonté de l’auteur du Règlement,57 la notion de titre de séjour précitée doit être comprise dans un sens large. Elle s’étend, de par sa définition, à toute autorisation – même temporaire – qui permet la présence de l’intéressé sur le territoire national d’un Etat. Seules en sont exclues les autorisations provisoires (comme le livret N) qui sont délivrées pour la durée de la procédure d’asile ou d’une autre procédure d’autorisation relevant du droit de séjour. Ainsi, par exemple, l’octroi d’un délai de rétablissement et de réflexion aux victimes de la traite des êtres humains, prévu par le droit international public à l’art. 13 CLTEH et contraignant pour la Suisse en vertu de la ratification de la CLTEH,58 est aussi un titre de séjour au sens de l’art. 2 let. l RD III.59 Cela signifie que l’Etat de séjour qui procède à l’identification des victimes potentielles de la traite d’êtres humains, devient toujours également compétent pour examiner la demande d’asile déposée par celles-ci. La CJUE a tiré une même conclusion dans sa jurisprudence relative aux mineurs non accompagnés,60 même si l’examen de l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas expressément caractérisé comme fondant la compétence, mais comme élément plaidant en général contre un transfert du mineur concerné. A notre avis, les groupes de personnes particulièrement protégés par le droit international public devraient en règle générale échapper à la procédure Dublin pour que soit garanti d’emblée un traitement axé sur leur besoin de protection (et non pas seulement au moment de leur arrivée dans un autre Etat compétent).61

[140]L’art. 12 par. 2 RD III règle la compétence de l’Etat qui a délivré un visa – en l’absence de titre de séjour.

S’il existe plusieurs titres de séjour ou visas, celui qui compte est celui dont la durée de validité est la plus longue et, en cas de durée identique, celui dont l’échéance est la plus lointaine (art. 12 par. 3 RD III). L’art. 12 par. 4 RD III prévoit qu’il est possible de fonder la compétence d’un Etat même après l’expiration du titre de séjour (pendant deux ans) ou du visa (pendant six mois) à moins que le requérant d’asile ait quitté l’espace Dublin dans l’intervalle. Après l’écoulement de ces délais, l’Etat compétent est celui où est déposée la demande d’asile.

2.2.2.4 Entrée « irrégulière » et séjour illégal

Ce n’est que lorsqu’aucun des critères susmentionnés n’est réalisé que l’Etat responsable du traitement de la demande d’asile est celui dont la frontière extérieure62 a été traversée au moment de l’entrée « irrégulière »63 du requérant d’asile. En cas de poursuite du voyage et de multiples entrées et sorties du territoire Dublin dans un délai de trois mois64 se pose la question de savoir quel passage de la frontière a pour effet de fonder la compétence (en particulier lors de l’itinéraire traversant la Turquie, la Grèce, la Macédoine, la Serbie et la Hongrie avec une prolongation éventuelle dans un autre Etat). Cette question n’est pas tranchée à ce jour65 et dépend également des circonstances précises du cas particulier. Si, dans une telle situation, un Etat consent à prendre en charge la responsabilité de traiter la demande d’asile, [141]la compétence lui revient.66 La responsabilité d’un Etat en raison d’une entrée « irrégulière » par une frontière extérieure prend fin douze mois après l’entrée dans le pays. En pratique, le critère de compétence prévu à l’art. 13 par. 1 RD III est le plus souvent appliqué.

En vertu de l’art. 13 par. 2 RD III, la compétence incombe à l’Etat où le requérant d’asile a séjourné illégalement pendant plus de cinq mois. Si ces conditions sont réunies pour plus d’un Etat, c’est la dernière période de cinq mois au moins qui est déterminante.

2.2.2.5 Entrée sous exemption de visa et demande présentée dans la zone de transit international d’un aéroport

Le Règlement prévoit en outre l’entrée sous exemption de visa (art. 14 RD III) et la demande présentée dans la zone de transit international d’un aéroport (art. 15 RD III) comme critères fondant la compétence d’un Etat. Ces cas se rencontrent rarement en pratique, car un des autres critères (à examiner en priorité) est la plupart du temps déjà applicable.

2.2.2.6 Personnes dépendantes

L’art. 16 RD III contient une disposition difficile à interpréter dans le détail et selon laquelle, en règle générale, les parents, les enfants et les frères et sœurs dépendants les uns des autres ont un droit à ne pas être séparés ou à être regroupés. Selon la teneur de cette disposition, le requérant d’asile peut être soit la personne dépendante, soit la personne dont le soutien est nécessaire. Cette précision apportée à la réglementation antérieure fait suite à l’arrêt K de la CJUE dans lequel la personne apportant le soutien était la belle-mère du requérante d’asile.67 De par la limitation du cercle des personnes concernées, l’art. 16 RD III n’inclut plus une telle situation dans son champ d’application, ni du reste, de par sa teneur, une situation de dépendance entre conjoints. En considération du contexte général et de la volonté d’améliorer la situation des requérants plutôt que de la péjorer,68 il apparaît qu’un tel cas devrait désormais être réglé par l’usage de la clause de souveraineté. L’obligation de droit international public de protéger la vie privée et familiale dans une telle situation réduit par ailleurs considérablement la marge d’appréciation des autorités.

2.2.2.7 Clause de souveraineté et clause humanitaire

[142]La Suisse a toujours la possibilité d’examiner elle-même toute demande d’asile qui lui est présentée (clause de souveraineté – art. 17 par. 1 RD III). Il est en outre possible de demander à un autre Etat membre le transfert d’un requérant d’asile et de sa procédure pour des motifs humanitaires, ceci à tout moment précédant la première décision matérielle (clause humanitaire – art. 17 par. 2 RD III).69 Dans ces deux cas, il peut être dérogé aux critères de compétence pour des motifs familiaux, humanitaires ou culturels. L’art. 29a al. 3 OA 1 contient, en précision de la clause de souveraineté, une disposition qui permet au SEM de traiter la demande d’asile également lorsque l’examen des critères a abouti à la compétence d’un autre Etat. Cela est important dans la mesure où le TAF a jugé que la clause de souveraineté n’a pas un caractère obligatoire et qu’il ne peut résulter du RD III aucune obligation directe d’entrer en matière.70 Une telle obligation peut toutefois découler de l’art. 29a al. 3 OA 1.71 L’entrée en matière relève en très grande partie du pouvoir d’appréciation du SEM et un recours contre le non-usage de la clause de souveraineté doit se limiter à invoquer des vices juridiques dans l’exercice de ce pouvoir d’appréciation.72

Si aucun Etat n’invoque la clause de souverainté ou ne s’avère compétent en application des critères du Règlement, c’est le premier Etat dans lequel la demande d’asile a été déposée qui, selon l’art. 3 par. 2 al. 1 RD III est responsable de mener la procédure d’asile.73 La question se pose de savoir comment l’examen des critères doit se faire lorsque plusieurs demandes d’asile ont été déposées dans des Etats [143]différents.74 Lorsqu’un Etat a déjà examiné la demande d’asile et a rendu une décision négative, c’est cet Etat qui, selon l’art. 18 par. 1 let. d RD III, est compétent pour assurer le départ du requérant d’asile (et également pour l’examen d’éventuels moyens de droit extraordinaires).

2.2.3 Déroulement de la procédure Dublin et types de procédures

Si, au moment de l’examen de la compétence, le SEM retient qu’un autre Etat est responsable de la procédure d’asile et ne fait pas usage de la clause de souveraineté, la procédure prévue dans le Règlement pour la détermination de l’Etat responsable est engagée sous la forme soit d’une procédure de prise en charge soit d’une procédure de reprise en charge. Dans la procédure à l’aéroport, il faut, en plus de l’introduction de cette procédure, refuser l’entrée en Suisse car, selon l’art. 22 al. 1ter LAsi, la compétence de la Suisse pour examiner la demande d’asile est une condition de l’autorisation d’entrée en Suisse.

La procédure se divise en trois phases : demande, réponse et (en cas d’accord) transfert. Chaque phase est soumise à des délais dont l’inutilisation a des effets sur la compétence, indépendamment des critères.


[144]Illustration 2 : Déroulement et délais

2.2.3.1 Procédures de prise et de reprise en charge

La principale différence entre les procédures de prise et de reprise en charge relève de la situation de droit procédural du requérant d’asile. Il est question d’une procédure de prise en charge lorsque la demande d’asile déposée en Suisse est la première demande d’asile au sens de l’art. 3 par. 2 al. 1 RD III, c’est-à-dire qu’il n’existe aucune demande d’asile déterminante pour la compétence dans un autre Etat.75 Tel est en règle générale le cas lorsque la personne dépose une demande d’asile après son entrée en Suisse par une frontière extérieure (que ce soit en respectant ou en contournant les prescriptions sur l’entrée en Suisse).

Une procédure de reprise en charge est au contraire introduite lorsque la demande d’asile déposée en Suisse n’est pas la première demande d’asile présentée dans l’espace Dublin.

La procédure avec l’autre Etat Dublin doit être exécutée conformément à l’art. 26 al. 2bis LAsi en principe pendant la phase préparatoire.

[145]2.2.3.2 Délais pour l’envoi de la requête

Dans la procédure de prise en charge, le SEM doit soumettre sa demande de prise en charge à l’autre Etat dans les trois mois à compter du dépôt de la demande d’asile et, s’il existe des données venant du système Eurodac qui établissent une entrée illégale par la frontière extérieure, dans les deux mois suivant le résultat positif (art. 21 par. 1 al. 1 et 2 RD III). Si le SEM manque ce délai, la Suisse devient l’Etat responsable pour traiter la demande d’asile (voir art. 21 par. 1 al. 3 RD III).

Dans la procédure de reprise en charge qui suit le dépôt d’une demande d’asile en Suisse, le SEM doit formuler la requête aux fins de reprise en charge dans les deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac sur le dépôt d’une demande d’asile dans un autre Etat (art. 23 par. 2 RD III). En l’absence de telles données, la requête doit être formulée au plus tard dans les trois mois à compter du dépôt de la demande d’asile. Ici aussi, si le SEM manque le délai, la Suisse devient responsable du traitement de la demande d’asile (art. 23 par. 3 RD III).

Une procédure de reprise en charge peut aussi être engagée sans qu’une procédure d’asile n’ait été introduite en Suisse. Dans ces cas, le délai est une fois encore de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac si des données Eurodac existent et, sinon, de trois mois à compter de la date à laquelle la Suisse a constaté qu’un autre Etat pouvait être responsable (art. 24 par. 2 RD III). L’expiration du délai sans qu’il en soit fait usage oblige la Suisse à rendre possible le dépôt d’une demande d’asile, aucune demande n’ayant encore pu y être déposée (art. 24 par. 3 RD III).

2.2.3.3 Délais de réponse et conséquences possibles

Dans la procédure de prise en charge, le délai de réponse est en général de deux mois selon l’art. 22 par. 1 RD III, afin de donner à l’Etat membre requis la possibilité d’examiner la question de sa responsabilité. L’examen se fait sur la base des moyens de preuves et indices mentionnés à l’art. 22 par. 3 RD III. Dans les cas où la demande d’asile n’a été déposée en Suisse qu’à l’occasion d’une procédure de refus d’entrée ou d’une procédure de renvoi, il est possible de demander une réponse urgente avec fixation de délai (minimum une semaine). Dans ces cas, le délai de réponse est en principe le délai demandé par l’Etat requérant, mais, à titre exceptionnel, la réponse peut intervenir au plus tard dans le mois qui suit la requête urgente (art. 22 par. 6 RD III). Si l’Etat requis manque le délai de réponse, il doit prendre en charge la procédure d’asile. Dans les procédures urgentes, le transfert de responsabilité a donc lieu après un mois (art. 22 par. 7 RD III).

Dans la procédure de reprise en charge, le délai de réponse est d’un mois. Il se réduit à deux semaines lorsqu’il existe des données dans le système Eurodac. [146]L’absence de réponse dans ce délai entraîne aussi le transfert de la responsabilité du cas (art. 25 RD III). Il existe une fiction d’acceptation : selon les termes du Règlement « l’absence de réponse à l’expiration du délai […] équivaut à l’acceptation de la requête et entraîne l’obligation de reprendre en charge la personne concernée ».

En cas de consentement exprès avant l’expiration du délai, le transfert de responsabilité intervient à cette date.

En cas de refus, l’Etat requis ne devient pas non plus compétent même si cela ressort clairement des critères posés. Le système Dublin ne connaît pas de mécanisme permettant d’obliger un Etat à donner son consentement. Toutefois, selon l’art. 5 par. 1 du Règlement Dublin sur les modalités d’application, une réponse négative doit être pleinement motivée.76 Si l’Etat requérant est convaincu que le refus de l’Etat requis est dû à une erreur d’appréciation, il peut engager dans les trois semaines une procédure de réexamen de sa requête selon l’art. 5 par. 2 du Règlement Dublin sur les modalités d’application et solliciter ainsi un nouvel examen de la part de l’Etat requis. Ce dernier est tenu de répondre dans les deux semaines. Dans ce cas, un silence ne signifie pas un changement de compétence, car un tel changement nécessite un consentement exprès. La procédure de demande de réexamen n’a pas d’effet sur les délais de transfert : si l’Etat requis donne son consentement après coup, dans le cadre de cette procédure, le délai de transfert débute au moment de la première réponse (négative) et non de la seconde (voir la teneur de l’art. 5 par. 2 du Règlement Dublin sur les modalités d’application).

L’Etat dont la compétence est déterminée par cette procédure est responsable de conduire la procédure d’asile et d’accueillir le requérant d’asile sur son territoire. En cas d’octroi de la protection, un droit à la libre circulation au sein de l’Europe ne peut être acquis qu’après cinq ans au plus tôt.77 En cas de refus de la protection, l’Etat responsable n’est libéré de ses obligations que s’il provoque le départ ou si la personne a quitté le territoire des Etats membres pendant plus de trois mois (voir art. 19 par. 2 et 3 RD III).

2.2.3.4 Droits spécifiques des requérants d’asile dans la procédure Dublin

Le RD III a renforcé certains des droits de procédure des requérants d’asile et unifié les informations relatives au système Dublin qui doivent être transmises78 dans [147]le but de rendre le système plus transparent et accessible. Les art. 4 et 5 RD III posent des exigences élevées en matière d’informations et prévoient en règle générale un entretien personnel avec le requérant d’asile. Il est pour le moins incertain que l’entretien personnel généralement tenu en procédure suisse dans le cadre de l’audition sommaire réponde suffisamment aux exigences du Règlement Dublin en matière de droit d’être entendu (sur le droit d’être entendu, voir pt 4.2).

En pratique, bien des requérants d’asile sont dépassés par la complexité juridique et pratique du système Dublin. Il serait nécessaire de garantir un conseil effectif aux personnes concernées comme le prévoit l’art. 27par. 5 et 6 RD III.79 Pour les mineurs non accompagnés, il faut, selon la jurisprudence, qu’un représentant légal ou au moins une personne de confiance soit présente à l’audition sommaire de la procédure Dublin, car cette audition a une importance décisive pour la procédure. L’art. 7 al. 2bis OA 1 prévoit depuis le 1er juillet 2015 une réglementation allant dans ce sens pour tous les requérants d’asile mineurs non accompagnés (et pas seulement dans la procédure Dublin). Cette disposition précise en outre, pour les cas Dublin, que l’activité de la personne de confiance dure jusqu’au transfert du mineur vers l’Etat compétent et s’étend également en cas de prononcé ou de prolongation d’une détention administrative. Cette règle comporte l’obligation pour le SEM d’informer les autorités cantonales compétentes.80

2.2.4 Décision et délais de transfert

Si le SEM arrive à la conclusion, après avoir examiné la question de la compétence, qu’un autre Etat est compétent et si celui-ci a consenti à la prise ou reprise en charge du cas (implicitement en manquant le délai de réponse ou explicitement en répondant affirmativement) une décision de non-entrée en matière est rendue en application de l’art. 31a al. 1 let. b LAsi.

Toute décision Dublin est double : elle porte d’une part sur la compétence et d’autre part sur la légalité du transfert. Les deux éléments doivent être conformes au droit pour que la décision globale le soit. En tant qu’elle porte sur la compétence, il faut que la décision repose sur le consentement de l’Etat compétent selon les critères [148]donnés (voir art. 29a al. 2 OA 1).81 En ce qu’elle concerne le renvoi, il faut que les éventuelles interdictions du transfert aient été examinées. Le SEM doit aussi se demander s’il entend faire usage de la clause de souveraineté. S’il existe une obligation d’entrer en matière par usage de la clause de souveraineté, une décision Dublin ne peut pas être rendue (voir à ce sujet pt 2.2.6). La légalité du transfert doit exister au moment de la décision pour que le prononcé d’une décision de non-entrée en matière selon l’art. 31a al. 1 let. b LAsi soit conforme au droit. En tenant compte de l’arrêt Tarakhel de la Cedh, le TAF a retenu que les garanties individuelles nécessaires de la part de l’Italie concernant un hébergement approprié à l’enfant et le respect de l’unité de la famille constituaient « une condition d’admissibilité matérielle de droit international public du transfert » et devait dès lors exister au moment de la décision.82 Il faut distinguer les garanties individuelles des modalités d’exécution qui ne doivent être respectées par le SEM qu’au moment de l’exécution et qui ne justifient en général pas que la décision soit déclarée contraire au droit et annulée dans la procédure de recours.83 Selon la jurisprudence du TAF, les modalités d’exécution ne doivent pas pouvoir être contrôlables déjà au moment de la décision. La conformité légale des modalités d’exécution, généralement présumée par le TAF, n’en reste pas moins une condition que le SEM est tenu de respecter au moment de l’exécution du renvoi.84 Cela est étonnant dans la mesure où on ne sait pas bien comment il est possible de faire valoir une éventuelle violation du droit due au non-respect des modalités d’exécution.

Si les conditions susmentionnées sont réunies, une décision de non-entrée en matière est rendue. Selon l’art. 37 al. 1 LAsi, cette décision doit intervenir en règle générale dans les cinq jours après réception du consentement. La brièveté de ce délai s’explique notamment par le fait que le délai de transfert au sens de l’art. 29 par. 1 RD III commence à courir dès le consentement.

La notification de la décision doit respecter les conditions prévues à l’art. 26 RD III. La décision doit indiquer les voies de recours et, si la personne n’est pas représentée, [149] ses éléments essentiels doivent être traduits dans une langue que la personne comprend. En outre, c’est au plus tard au moment de la notification que doivent être données des indications sur les possibilités de bénéficier d’un conseil et d’une représentation juridiques.

Le transfert peut intervenir de trois manières différentes : spontanément, par un départ contrôlé ou accompagné (art. 7 par. 1 du Règlement Dublin sur les modalités d’application). Selon l’art. 26 par. 2 RD III, il faut indiquer à la personne où s’adresser si elle part de sa propre initiative. Cette disposition doit être interprétée comme priorisant le départ volontaire. Cette façon de procédé correspond du reste au principe général de droit administratif qui veut que l’on laisse la possibilité à une personne de donner suite volontairement à une injonction de l’autorité avant d’entamer des mesures de contrainte. Des exceptions peuvent être admises en cas de circonstances particulières justifiant une exécution immédiate. Une telle situation ne devrait cependant que rarement se rencontrer dans les cas Dublin. Si le transfert se fait par un départ contrôlé ou accompagné, il faut s’assurer, selon l’art. 29 par. 1 al. 2 RD III, qu’il ait lieu dans des conditions humaines et dans le plein respect des droits humains. En cas de nécessité, un laissez-passer doit être établi pour la sortie du pays.85

Le délai dans lequel le transfert doit avoir lieu est de six mois.86 Si le transfert n’intervient pas dans ce délai, l’Etat qui ne l’a pas exécuté devient responsable de mener la procédure d’asile (art. 29 par. 2 RD III). Si la personne concernée forme un recours assorti de l’effet suspensif au sens de l’art. 27 par. 3 RD III, le délai de transfert court à partir de la date où la décision sur recours devient exécutoire. En Suisse, le recours n’est pas systématiquement assorti de l’effet suspensif dans les cas Dublin, mais il faut le solliciter (voir art. 107a al. 1 LAsi). L’absence de caractère exécutoire durant le délai de recours et pendant le temps nécessaire à l’examen de l’octroi éventuel de l’effet suspensif n’a pas d’incidence sur le délai de transfert.87 Cela signifie que le délai du transfert court dès la réception du consentement de l’Etat requis lorsqu’aucun effet suspensif n’est finalement accordé.

Si l’effet suspensif est ordonné, la date du début du délai de transfert est différée jusqu’au lendemain du jour de la cessation de l’empêchement juridique au transfert. [150]88 En cas de décision judiciaire, le délai de transfert débute le jour où la décision est rendue et non pas celui de sa notification.89 Si la Cedh ordonne une mesure provisoire selon l’art. 39 du Règlement de la Cour, cela a aussi, en pratique, des effets sur le point de départ du délai de transfert.90 Selon la situation juridique en Suisse, il faut cependant que, dans de tels cas, le transfert soit aussi formellement suspendu par le TAF.91

Les délais sont en général contraignants, car ils sont censés garantir les droits du requérant d’asile et peuvent en conséquence être invoqués en justice (« self-executing »).92 Si le délai de transfert a expiré, la responsabilité de l’examen de la demande d’asile passe automatiquement à la Suisse. Dans ces cas, le SEM reprend l’affaire en main et revient sur sa décision de non-entrée en matière. S’il ne le fait pas ou refuse de le faire, il est possible d’agir en constatation de la compétence et en annulation de la décision auprès du SEM.93 En cas de rejet, un recours en constatation de la compétence de la Suisse peut être déposé.

Au cours de la procédure, il peut survenir – en plus de l’expiration du délai – des changements ou des motifs relevant de considérations humanitaires, qui justifient une modification de la décision. Le SEM peut sans autre régler ces cas en prenant en charge la responsabilité par l’usage des clauses discrétionnaires de l’art. 17 RD III qui ne sont soumises à aucun délai. Le requérant d’asile peut en tout temps présenter une demande de réexamen allant dans ce sens.

[151]2.2.5 Normes pour la protection juridique selon le RD III

La protection juridique contre une décision de non-entrée matière Dublin est réglée selon les normes de l’art. 27 RD III. Elle se base sur les conditions posées par la jurisprudence de la Cedh et de la CJUE sur le recours effectif en général et sur la procédure Dublin en particulier.94 L’art. 27 par. 3 RD III prévoit trois modèles possibles pour garantir l’effet suspensif automatique nécessaire.95 Lors de la modification de l’art. 107a LAsi intervenue dans le cadre de la mise en œuvre du RD III, la Suisse a opté pour la variante de la lettre c de l’art. 27 par. 3 RD III.96

Quelle que soit l’option, la jurisprudence exige que le modèle choisi et fixé à l’art. 107a LAsi réponde aux exigences de l’art. 27 par. 3 let. c RD III et qu’on puisse recourir directement à ces normes en cas de doute.97 Par exemple, ni l’art. 107a al. 1 LAsi ni son al. 2 ne prévoient expressément l’inexécutabilité de la décision de renvoi pendant le délai de recours ; au contraire, selon la teneur expresse de l’art. 45 al. 3 LAsi, les décisions de renvoi dans les cas Dublin peuvent être immédiatement exécutoires.98 Cependant, le TAF a retenu que, pendant la durée du délai de recours, le transfert ne saurait être exécuté.99 Or, sur le plan juridique, il semble extrêmement douteux que cela satisfasse aux normes du RD III. L’interdiction de l’exécution du renvoi pendant l’écoulement du délai de recours selon l’art. 27 par. 3 let. c RD III doit ainsi, à notre avis, être directement appliquée. Dès lors, il ne serait plus nécessaire que le TAF ordonne une mesure provisoire selon l’art. 56 PA – comme il le fait habituellement en pratique.100

Lorsqu’un recours est interjeté et qu’une suspension est demandée, l’art. 107a al. 3 2e phr. LAsi autorise l’exécution du renvoi si le Tribunal ne décide pas dans les cinq jours d’accorder l’effet suspensif. Cela n’est pas compatible avec les normes [152]de l’art. 27 par. 3 let. c RD III. Cet article prévoit certes aussi la possibilité d’un délai dans lequel la décision judiciaire doit être prise. Toutefois, selon la teneur de cette disposition, le transfert ne peut avoir lieu qu’après une « décision » judiciaire. Comme celle-ci doit être motivée en cas de rejet, une passivité du Tribunal (contrairement à ce qui est prévu à l’art. 107a al. 3 LAsi) ne peut pas déclencher le caractère exécutoire de la décision de transfert. Dès lors, il faut toujours attendre la décision judiciaire sur la demande de suspension avant de pouvoir exécuter la décision de transfert.101

2.2.6 Interdictions de transférer

Les interdictions de refoulement (voir chap. X, pt 2) doivent aussi être respectées dans la procédure Dublin. Un transfert ne doit pas avoir lieu lorsqu’existe une telle interdiction. Pour les interdictions de transfert qui se fondent sur des défaillances systémiques, l’art. 3 par. 2 RD III règle l’obligation de ne pas transférer le requérant d’asile.102 Dans le cas d’espèce, il est fait référence au seuil de la « prétention soutenable » (« arguable claim ») selon la jurisprudence de la Cedh.103 Dans ce contexte, il faut tenir compte du refoulement tant direct qu’indirect.104 Le critère est ici différent et plus étroit que celui appliqué dans le cadre de l’examen des obstacles à l’exécution du renvoi, car il s’agit de n’examiner qu’une interdiction de transfert dont les conditions sont déterminées à l’art. 29a al. 3 OA 1 (« motifs humanitaires ») et non pas selon la question de savoir si le transfert est raisonnablement exigible. Pour des raisons de systématique, il n’y a dès lors pas de place dans la procédure Dublin pour les normes et l’examen de l’art. 83 al. 4 LEtr en particulier ; les réflexions correspondantes sont déjà comprises dans la décision de non-entrée en matière.105 [153]S’il existe une interdiction de transfert, la personne concernée a un droit à ce que la Suisse fasse usage de la clause de souveraineté (art. 29a al. 3 OA 1 en relation avec l’art. 17 RD III).106

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